Les MiniFlip.net : des profs de 10 ans
L’université d’été Ludovia aura lieu du 23 au 26 août 2016 dans l’Ariège. Lors de cet événement des ateliers Explorcamps et Fabcamps seront proposés. Soledad Garnier présente « les MiniFlip.net : des profs de 10 ans ».
Problématique pédagogique
Mes élèves apprennent depuis trois ans grâce aux pédagogies actives et à la classe inversée. Cette approche m’a permis de rendre les élèves plus actifs, plus impliqués et responsables; bref, selon l’expression consacrée, acteurs de leurs apprentissages. J’ai souhaité les emmener plus loin et leur permettre un retour sur leurs pratiques, dans le but de leur faire construire des apprentissages solides et surtout pérennes. Des compétences acquises dans le temps, et pas seulement le jour de l’évaluation. La solution que j’ai envisagée et que j’expérimente cette année est de leur faire produire du contenu numérique : une tâche complexe pour réussir ses apprentissages, ou comment des élèves deviennent à leur tour des enseignants.
Apport du numérique ou présentation de la technologie utilisée
Le fait de placer les élèves en posture d’enseignants les amène à structurer leur pensée de façon cohérente et compréhensible pour les autres : « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément ». Nicolas Boileau
Puisqu’on n’a vraiment compris que ce que l’on est capable d’expliquer, je demande à mes élèves, en fin de séquence, de produire du contenu numérique à destination d’autres classes (mais plus particulièrement d’élèves hospitalisés ou descolarisés), via une chaîne youtube créée à cet effet. Un blog entièrement dédié à ce travail est actuellement en construction avec les élèves : MiniFlip.net
Ma classe inversée (décrite ici https://www.youtube.com/watch?v=ygA1HbUaMjQ) fonctionne en ateliers, sur une semaine. A la fin de cette étape d’apprentissage, les élèves font le point sur ce qu’ils ont appris et se sentent capables d’expliquer à leur tour.
Le vendredi, les compétences traitées lors des ateliers de la semaine sont listées au tableau et les élèves s’inscrivent en-dessous de celles qu’ils pensent maîtriser suffisamment.
Ils ont le choix du support : tutoriel, carte mentale interactive ou enrichie, exercices en ligne destinés à d’autres élèves (dont ils doivent maîtriser la correction) etc…
– Dans le cas du tutoriel (l’un des support que je souhaite privilégier cette année) lorsqu’ils ont choisi la compétence et le support, ils doivent en écrire le scénario. Sur une feuille A4 partagée en deux colonnes, ils écrivent à gauche le texte qui sera lu et à droite ils dessinent grossièrement ce qui apparaîtra à l’écran.
– Ils travaillent ensuite par groupes (généralement, d’eux-mêmes, ils se regroupent par trois : un qui tracera les figures, écrira les phrases ou placera les flèches, un qui lira les explications et le troisième qui filmera). Le storyboard, cependant, s’écrit à plusieurs mains et ne peut m’être proposé à la validation que si tous les membres du groupe y ont participé et ont écrit à tour de rôle.
– Une fois le synopsis écrit et validé, les élèves utilisent les tablettes de la classe (iPads) pour réaliser leur production avec AdobeVoice, iMovie ou encore photospeack.
– Leur production est présentée à la classe pour être validée ou améliorée en fonction des remarques des autres élèves.
– La production validée par la classe est mise en ligne sur la chaîne youtube de la classe (cm BURIE) en attendant que le site dédié soit fonctionnel.
Les élèves créent également des exercices en ligne de type QCM avec learning apps. Pour proposer une réponse juste et des réponses erronées, ils doivent réfléchir aux types d’erreurs qui pourraient être commises (en se basant notamment sur leur propre expérience) et proposer pour chacune de ces erreurs une phrase d’explication pour guider l’élève qui se tromperait.
Ainsi, grâce au numérique, les élèves créent eux-mêmes des parcours d’apprentissage complets, à destination d’autres élèves. Mais ce sont eux, finalement, qui en sont les premiers bénéficiaires, puisque l’élaboration de ces parcours leur permet d’acquérir des compétences en termes de savoirs, de savoir-faire, de savoir-être et développent leur estime de soi.
Relation avec le thème de l’édition
« Présence, attention et engagement en classe avec le numérique ».
Bien que les sollicitations numériques se multiplient dans l’environnement des élèves et entraîne (quoi que ce soit discutable) et mettent à mal l’attention des élèves, le fait d’utiliser le numérique en classe à des fins pédagogiques permet de recentrer cette attention. Les sollicitations sont différentes. L’action est privilégiée par rapport à la passivité. L’élève ne répond pas à une sollicitation, il en crée. Le projet MiniFlip est un projet dans lequel les élèves doivent s’engager. Le fait de publier leurs productions sur le net exige de leur part une plus grande rigueur (et attention)…) car ils ne peuvent publier n’importe quoi et leurs travaux seront soumis aux critiques d’inconnus. Il ne s’agit pas d’utiliser du contenu mais d’en proposer. Ils créent eux-mêmes et partagent en coopérant, collaborant entre eux. Ils sont donc présents les uns pour les autres, car les groupes de travail sont composés d’élèves experts et d’élèves en cours d’apprentissage. Les uns apportent aux autres leur expertise, leurs stratégies; les autres apportent leurs erreurs et leurs raisonnements incorrects pour permettre d’élaborer des QCM efficaces. Ils s’engagent spontanément dans ce projet qui leur permet de valoriser leurs compétences, ne serait-ce qu’à leurs propres yeux.
Synthèse et retour d’usage en classe
Au-delà du plaisir que les élèves prennent à produire ce type de contenu, les apports pédagogiques sont indéniables. Cette activité leur permet de prendre du temps pour penser. Pour réfléchir aux stratégies qu’ils mettent en œuvre pour réaliser une tâche, et dans quel ordre. Le type de tâches choisies fait lui-même appel à différentes stratégies.
Les élèves les plus fragiles prennent confiance en eux car ils ont davantage conscience de ce qu’ils savent ou ne savent pas. Cette création leur permet de prendre conscience des critères de réalisation d’une tâche. En travaillant avec les autres, ils comprennent que ceux qui réussissent ne sont pas plus intelligents mais mettent en place un enchaînement de stratégies efficaces qu’il peuvent eux-mêmes apprendre à mettre en œuvre.
Les élèves les plus performants progressent également car ils sont obligés de verbaliser leurs procédures. En les partageant, ils en saisissent parfois les limites et découvrent les stratégies d’autres élèves, parfois plus simples ou plus efficaces. Cette explicitation des procédures leur permet de réfléchir sur leurs compétences. Ils peuvent alors mieux comprendre les raisonnements qu’ils engagent, et sont ainsi amenés à construire de nouvelles compétences.
Les parents sont également ravis de constater ce que leurs enfants sont capables de faire.
Plus d’infos sur les ateliers EXPLORCAMPs Ludovia#13
http://ludovia.org/2016/ateliers-sur-explorcamps-ludovia13/