Pourquoi tant de précautions à présent ? Une récente discussion, au sein d’un organe institutionnel voué à la promotion des usages, mais apparemment très en difficulté dans l’accomplissement de sa mission, m’a permis de constater avec une certaine déprime, qu’à nouveau le débat s’oriente sur ce qu’il ne sera pas possible de faire, et toute l’énergie dépensée à s’y atteler, sans proposer, en échange, des solutions qui devront fonctionner.
Je suis très inquiet. Persuadé du peu de cohérence derrière tout cela et du climat de psychose qui s’entretient, dans le but unique de promouvoir un marché numérique désorienté avant d’en valoriser les effets positifs pour les élèves.
Car comment expliquer que l’on ne cesse de nous dire que cela fonctionne bien, et de plus en plus, tout en ne constatant que des difficultés doublées de contradictions ? Une réalité qui se développe à année plus quelle chose, alors que c’est à l’instant que se cherchent des solutions.
Préambule
Pour remettre un peu d’enthousiasme là dedans, je me permets de vous faire part d’une nouvelle expérience, pas forcément récente (deux mois déjà !) qui relance débat et motivation sur les usages numériques.
Cela se passe dans un lycée de banlieue parisienne, à Evry, avec une classe de première littéraire ayant eu la chance de pouvoir se rendre dans un des hauts lieux de notre histoire humaine : Auschwitz.
Genèse d’un projet
Les choses ont été très vite. Elles s’articulent autour de la motivation forte de faire de cet évènement un prétexte à dépasser le cadre des exigences traditionnelles de retours et productions. Un cadre très simple à envisager : comment les utiliser, les exploiter ?
L’équipe d’enseignants concernés, avec Christine Fiasson (@ChrisFiasson), une collègue particulièrement investie dans la e-formation et proche des actions et innovations de terrain, voyagera au-delà du moment pour proposer un travail de réflexion et de présentation, allant sur le terrain avec les plus simples outils numériques du moment.
L’idée est d’investir le champ du numérique multimédia de la mission de marquer les esprits en associant le vécu aux émotions, tout en les partageant. Une mission de « médiation » qui verra le jour au sein d’une collaboration forte avec l’Atelier CANOPÉ local et les partenariats d’entreprises.
« Auschwitz16 » sera le projet, incluant la collaboration des élèves, des enseignants et des acteurs du numérique locaux.
Les journées « portes ouvertes » du Lycée du Parc des Loges à Evry, vont offrir le support idéal pour permettre aux élèves d’évaluer la valeur de leur travail. Car sous la pression de Christine, et avec mes exigences permanentes, ce sont eux qui vont apporter le contenu de l’application qui va servir de support à cette médiation, par le biais de QRCodes qui vont être associés à des photographies sur format A4.
Le tout, dans un environnement totalement déconnecté.
Un travail collaboratif
Le contenu est initialement très varié. C’est du son, de la photographie, de la vidéo. Ce sont des textes écrits sous des formes différentes (poèmes, proses, résumés), très souvent avec une mise en forme en relation avec toute l’émotion portée.
Pour les élèves, c’est à leur savoir que nous nous adressons. C’est à leurs compétences, et à leur investissement. De fait, tous les supports n’ont pas été uniformes.
Les quelques jours que nous avons pu y consacrer ont été intenses. Et c’est au résultat que nous nous sommes attachés.
J’ai pu assister à la présentation du compte-rendu du voyage aux parents et à l’ensemble des personnes qui ont franchi les portes de cette petite salle dédiée à l’exposition des photographies du voyage.
Une médiation de terrain
Un vidéo-projecteur au fond de la salle accueillait les badauds, présentant fièrement une des vidéos, entièrement réalisée par une élève, et contenue dans l’application. A l’entrée, des élèves à qui nous avions offert une formation expresse sur le fonctionnement de l’application juste cinq minutes avant l’ouverture des portes, accueillaient le public en leur proposant de faire le tour de la pièce, une tablette (prêtée par l’Atelier Canopé) … à la main.
Aucune magie, aucun artifice.
La transformation s’est opérée d’elle-même, dépassant même la simple satisfaction d’avoir fait quelque chose. Tout d’abord timides, et concentrés sur l’explication du fonctionnement de l’objet, les élèves présents se sont très vite vus accompagner les visiteurs sur le fond de cette présentation.
L’objet, devenu média et médiateur, au départ objet de l’attention, se présente comme un support venant renforcer l’expression orale des élèves, leurs explications, leur spontanéité.
Des textes non appris mais tirés de la mise en relation, à cet instant de ce qu’ils ont créé, vécu et ressenti avec l’impérative nécessité de le transmettre.
Pour le public, c’est autant de surprise et de satisfaction. Tout d’abord, nous avons constaté que cette salle aurait pu être traversée en quelques minutes avec peu de mots échangés. Dans la réalité, le simple passage par le média tablette aurait suffit à « garder » les personnes captivées quelques minutes de plus.
Et cette réalité s’est trouvée démultipliée par le dialogue entre adultes et élèves, pour des échanges allant au-delà des photographies, de leurs QRCodes et des contenus auxquels ils donnaient accès. Et également des échanges en marge de l’exposition initiale, se laissant aller même à des détails sur les techniques utilisées pour prendre les images, élaborer les contenus, et restituer l’ensemble.
Une expérience de plus
Nous avons tiré de cette journée une somme conséquente d’informations. Quand un tel évènement s’avèrera reconduit, nous pourrons bénéficier de ce premier jet, et nous pourrons y ajouter tous ces petits détails qui nous ont manqué.
La production de contenus est apparue plus concrète dans son utilisation, aux élèves.
Voir son travail utilisé et exploité, restitué au-delà d’une copie rendue ou d’une note obtenue a eu comme impact un fort sentiment de valorisation.
C’est une chose que nous devons intégrer, car ma réflexion immédiate a été qu’il fallait pousser, de fait, cette création et production avec, par exemple, l’élaboration de capsules vidéos plus conséquentes. Un autre point non négligeable dans l’utilisation des QRCodes est l’intensité lumineuse à prendre en considération afin de faciliter la lecture.
Un point très positif sur la qualité de l’application qui nous a permis de développer des techniques interactives, comme la navigation sur l’écran, à travers le plan du camp. Une qualité doublée de fiabilité car aucun problème technique n’est survenu pendant cet évènement. Ceci est d’autant plus nécessaire à préciser que, comme pour « 1871 » la contrainte technique principale à la réussite de cette journée était l’absence impérative de réseau permettant d’avoir accès à internet !
Si votre projet comporte des éléments similaires, ou si vous souhaitez pouvoir en développer d’autres, que vous soyez enseignant ou autre, je vous invite à contacter : contact@pdagogie.com ou à entrer en contact avec le Réseau Canopé à ce sujet.
Martial, @MarsPinko
Les articles « officiels » associés à cette action seront publiées sous peu sur les espaces de Canope et du réseau des interlocuteurs académiques. Ils seront accessibles en lien via les commentaires.