Le département des Landes a investi 52 millions d’euros dans l’opération. Depuis septembre, 51 000 collégiens landais ont pu bénéficier d’un ordinateur portable en prêt pendant une ou deux années de leur scolarité. Cela représente par an, l’équipement d’environ 9 500 portables remis aux collégiens de classe de 4ème et de 3ème et leurs enseignants. Mais aussi 3000 équipements fixes qui ne sont pas à négliger.
Pour plus détails, accédez ici à l’interview d’Henri Emmanuelli réalisée en décembre 2012 par Ludovia Magazine.
Constats et réflexions
Le but de notre réflexion n’est pas de reprendre chaque détail du rapport mais de pointer quelques aspects, positifs ou négatifs, sur lesquels nous jugeons opportun de retenir l’attention du lecteur.
Des contraintes d’ordre pratique en salle de classe
D’un point de vue esthétique et pratique, les installations filaires nécessitant des bornes sont vues comme une réelle contrainte dans l’espace. Alors que nous entrons dans un environnement très numérique qui devrait permettre une liberté d’enseignement de chaque discipline, la présence de ces éléments mobiliers empêchent toute latitude sur la configuration de la salle de classe.
Nous avions eu l’occasion de visiter le Collège Principal de Biscarosse en décembre 2012 (article ici) et c’est en effet ce que nous avait soufflé Françoise Laurençon, la chef d’établissement, notamment au sujet du cours de musique :
l’enseignante, nouvellement arrivée, ne pouvait, du fait de la présence des bornes au milieu de la salle, placer ses élèves comme elle le voulait, ce qui était fort handicapant pour réaliser ses cours à sa manière.
Un accompagnement, hors champ pédagogique, quasi inexistant
L’éducation aux médias, qui devait accompagner le projet, n’a pas encore été suffisamment mise en oeuvre et s’est souvent limitée à une information sur les méfaits d’internet.
Aux dires des élèves, il y a plus d’interdits que de conseils ; ils dénoncent également le peu de confiance qui leur est attribuée sur les usages qu’ils font en autonomie de ce nouvel outil.
Du côté des parents, « ils se plaignent d’avoir reçu cet outil sans aucune préparation en amont ». D’après eux, l’ordinateur à la maison se transforme plus en outil de loisir dont ils perdent facilement le contrôle (leurs enfants passeraient beaucoup de temps sur les jeux vidéos, musiques ou réseaux sociaux).
Adhésion progressive de la majorité des enseignants
Du côté des enseignants, alors qu’ils s’avouent avoir été peu concertés au démarrage de l’opération, ils ont peu à peu pris le virage qui s’imposait à eux.
Les « pionniers » ont entraîné les plus frileux et le rapport affirme que beaucoup d’enseignants ont même été jusqu’à demander leur mutation pour venir dans les Landes et pouvoir bénéficier de ces services et que certains ne souhaitaient pas non plus changer d’établissement une fois qu’ils avaient adopté cet environnement numérique.
Le numérique serait-il un moyen de « sédentariser » et fidéliser de jeunes profs sur un territoire ?
Cela pourrait être utilisé comme argument pour de nombreuses zones rurales victimes de la désertification … (un sujet d’actualité très réaliste, qui sera abordé lors de la 10ème édition de l’Université d’été de Ludovia à Ax-les-thermes dans l’Ariège, du 26 au 19 août, www.ludovia.org/2013).
L’ordinateur du collègien landais, c’est quoi ?
Enfin, une réflexion sur ce nouvel outil et ses vraies fonctions n’a pas été menée ni transmise aux élèves et aux parents. Une fois l’ordinateur dans les mains, qu’est censé en faire l’élève ? Est-ce un cahier, un livre ?
Une réflexion pour améliorer la communication entre tous les acteurs concernés par l’opération semble judicieuse à instaurer…
Pilotage partagé Etat-collectivité : mission réussie ?
Parmi les points positifs, le rapport relève qu’un pilotage partagé entre les deux acteurs principaux que sont la collectivité et l’éducation national est indispensable ; et justement, la récente convention signée entre le Conseil général des Landes et le Rectorat de Bordeaux en est la confirmation, reprise d’ailleurs dans la lettre académique de janvier 2012 qui souligne : « la nécessaire mise en place d’une gouvernance académique et de comités de pilotage régionaux et départementaux qui se réunissent plusieurs fois par an pour organiser, promouvoir, réguler et évaluer la mise en œuvre du dispositif ».
Cette entente partenariale a eu comme conséquence directe un regain de confiance des chefs d’établissement envers l’opération ; loin d’être anodine, cette remarque pèse tout son poids dans un contexte où les chefs d’établissements se sentaient peu écoutés, d’autant plus que nous savons bien que la dynamique TICE d’un collège ou d’un lycée est souvent impulsée par son principal ou son proviseur.
Plus d’infos :
L’opération landaise en « real life » sur ludovia.com.
Le rapport ici