Comment se concrétise votre usage au quotidien de l’ENT PLACE ?
Bruno utilise l’ENT pour la saisie des absences en ligne au début de son cours, puis pour le cahier de textes ; « je le remplis soit à la fin de l’heure soit dans la journée ». Sandrine ajoute à ce sujet, « c’est quelque chose que je n’ai pas le temps de faire à la fin de la séance car j’enchaîne sur un cours suivant ; il est vrai que je remplis souvent le cahier de textes de retour à la maison ».
Tous deux utilisent l’ENT de manière pédagogique pour organiser des groupes de travail entre élèves, des discussions via des forums, déposer des documents pour préparer un cours ou encore récupérer des devoirs écrits de leurs élèves. La messagerie est également un atout indéniable de l’ENT ; certes, elle fait un peu « doublon » avec la messagerie académique pour les enseignants, mais celle de l’ENT est plus « universelle » puisqu’elle est ouverte surtout aux élèves, et également aux parents.
L’ENT exige t-il un temps de préparation au préalable pour l’enseignant ?
Il est certain que l’ENT demande un travail en amont, notamment pour la mise en place de groupes de travail, comme le décrit Sandrine. « Dans un groupe de travail, je vais mettre à disposition des documents pour les élèves et ce n’est pas quelque chose que je vais faire en classe ». Cette organisation avant le cours est nécessaire pour que Sandrine se sente opérationnelle devant les élèves et lance immédiatement l’activité, mais même sans numérique, un cours demande à être préparé !
Usages en classe ou usages à la maison ?
Bruno utilise beaucoup l’ENT chez lui pour la préparation de ses cours, déposer des documents ou encore répondre à des messages.
Du côté de ses élèves, l’usage se fait principalement à la maison ; en effet, il précise que sa salle de classe n’est pas équipée en ordinateurs. Par contre, les élèves peuvent tout à fait se connecter dans l’établissement, au CDI ou dans des cours où ils ont l’ordinateur à disposition, si ils ont besoin d’envoyer des messages ou de récupérer des documents pour travailler, par exemple.
Quel est le plus gros avantage pour l’enseignant à utiliser l’ENT ?
Sandrine voit dans le carnet de bord de l’enseignant quelque chose de très pratique qui lui permet de garder une trace de son cours sur toute l’année, même si elle précise qu’il y a toujours des modifications à apporter, «l’enseignant peut enregistrer sa progression et la réutiliser d’une année à l’autre ».
Pour Bruno, le fait de pouvoir consulter l’ENT n’importe où dès qu’il y a une connexion internet, est vraiment un « plus ». Il argumente en expliquant qu’avant l’ENT, il travaillait déjà sur un réseau pédagogique sur lequel il pouvait déposer des documents, consultables seulement à l’intérieur de l’établissement.
« Maintenant, je peux faire ce dépôt de documents sur l’ENT et les élèves peuvent y avoir accès partout, donc c’est quand même beaucoup plus souple. Avant, c’était très restrictif et peu d’élèves utilisaient les services du réseau ».
Et pour l’élève ?
Cette utilisation de l’ENT est bien une des clés de la réussite ; d’après nos deux enseignants, cela encourage les élèves à davantage communiquer.
Ils envoient plus facilement un mail à leurs professeurs pour avouer qu’ils n’ont pas compris une notion ou pour demander un délai supplémentaire pour rendre leurs devoirs !
Une communication est établie aussi par l’usage de l’ENT au travers des forums ; en éducation civique, Bruno met en place ce type d’outils : « les élèves ont 15 jours pour discuter d’un sujet en vue de préparer un débat (…). Cela marche très bien, les élèves discutent entre eux et je n’interviens quasiment pas ».
Sandrine ajoute que les élèves en oublient même qu’ils sont entrain de travailler lorsqu’ils conversent ensemble sur un forum. L’aspect ludique prend le dessus sur le pédagogique « mais finalement, ils préparent le cours sans s’en rendre compte ».
Les parents se sentent-ils concernés par l’ENT ?
D’après Sandrine et Bruno, les retours des parents qui utilisent l’ENT sont positifs ; ils sont rassurés, par exemple, de savoir qu’ils pourront récupérer les cours de leur enfant absent ou de pouvoir connaître précisément les devoirs à faire.
Par contre, l’ENT ne remplace pas encore la traditionnelle réunion parents-professeurs ou le cahier de liaison. Il est clair que des échanges peuvent s’établir plus facilement entre un parent et un enseignant via l’ENT, « mais je ne peux pas communiquer une information importante à tous les parents d’une classe via l’ENT, car je sais très bien qu’il y en aura certains qui ne vont pas se connecter », ajoute Bruno.
De ce côté-là, un pas reste donc à franchir.
Vous considérez-vous comme des enseignants « à la pointe » du numérique ?
Dans les collèges respectifs de Bruno et Sandrine, il existe un passage obligé par l’ENT pour les fonctions de gestion des notes et des absences, et pour les cahiers de textes des classes.
« Certains professeurs vont donc utiliser l’ENT à minima ; d’autres, comme moi, allons l’utiliser de manière plus pédagogique avec la mise en place de forums, les échanges via messagerie etc », confie Bruno.
Pour Sandrine, il est clair que sa fonction de professeure de technologie déjà « branchée » informatique a beaucoup facilité l’intégration de l’ENT dans sa pédagogie.
« Geek » ou pas « geek » pour adhérer à l’ENT ?
Comme l’a si bien résumé Pascal Faure dans une intervention qu’il a faite lors de la soirée rétrospective de l’Université d’été de Ludovia 2012 en novembre dernier, l’ENT est un parcours, mais pas du combattant. « Il y a l’ENT « imposé », avec l’enseignant qui dit « j’y vais pas » ; puis, il est obligé d’y aller ; on arrive à l’ENT « découvert ». Notre enseignant commence à voir que dans l’ENT il y a des fonctionnalités intéressantes ; il parvient à l’ENT « utilisé », où l’enseignant non seulement utilise mais en veut plus ! Enfin, il adopte totalement l’ENT dans ses pratiques ; l’ENT devient même transparent, c’est l’ENT « intégré » ».
Pour Pascal Faure, ce schéma n’est pas une utopie et même les enseignants les plus réticents au numérique franchiront toutes les étapes avec plus ou moins de facilité et de temps pour découvrir que l’ENT n’est qu’un outil qui va faciliter leur quotidien et leur donner du « plaisir » dans leur enseignement.
Si vous étiez mutés pour atterrir dans un établissement où il n’y a pas l’ENT, quelle serait votre réaction ?
Première réaction : « on pleure » !
« Si je n’avais plus d’ENT, j’aurais vraiment l’impression de régresser dans mon enseignement, je ne pourrais pas le concevoir », déclare Sandrine.
Quant à Bruno, il affirme qu’il aurait vraiment l’impression d’avoir perdu quelque chose.
Interview réalisée par Ludovia Magazine sur le stand d’ITOP éducation lors du salon professionnel Educatice fin novembre à Paris.