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Musée et numérique. Quelles visions du participatif ?

Le numérique porte avec lui une promesse, celle d’une vision du numérique comme un moyen capable de créer, d’entretenir et/ou d’être le support de participations. Dans le domaine des musées, cette notion est depuis Georges Henri Rivière, fondateur de la nouvelle muséologie, un élément fondamental[1]. Pierre Camusat a décrit l’expérience de participation à travers 5 façons : participation aux décisions, aux restitutions (de savoirs, d’usages), à l’accueil et aux informations, à l’échange de témoignages et enfin par la participation à la constitution des collections par le don ou les prêts[2]. Aujourd’hui, cette notion de participation peut désigner une diversité de pratiques au sein du musée : consultation de comités de visiteurs pour la préparation d’une exposition, ateliers de médiation interactifs, dispositifs d’exposition nécessitant des actions de la part des visiteurs pour s’approprier un message ou co-construire un contenu[3]… Cette diversité se déploie d’autant plus depuis que l’accès à Internet et aux technologies numériques embarquées[4] touche chaque jour un public plus nombreux.

Il s’agit ici d’étudier la notion de participation dans le champ du numérique au prisme de ses représentations au sein du monde muséal. Pour tenter d’y parvenir, nous nous baserons sur l’hypothèse qu’Internet et les réseaux sociaux, qui reposent notamment sur l’usage des technologies numériques embarquées, sont vus, par certains, comme intrinsèquement participatifs. Nous chercherons à déterminer si cet énoncé se vérifie et comment ? À quelles représentations cette notion est-elle liée et quelle forme prend-elle au sein du musée ? Enfin, nous poserons la question de comment les valeurs et les attentes associées au participatif en ligne rencontrent celles attribuées aux actions muséales qualifiées de participatives.

À partir d’une approche ancrée en muséologie et par la mise au point d’outils méthodologiques issus des sciences humaines et des sciences de l’informatique, nous avons développés plusieurs axes méthodologiques. Tout d’abord, nous dresserons un état des lieux des démarches participatives que peuvent proposer les professionnels au sein d’une institution muséale aujourd’hui. Ensuite, nous tenterons de dessiner un panorama de l’offre en ligne qualifiée de participative par les musées et produites par eux. Ces deux états des lieux, non exhaustifs, permettront de cerner des tendances. Par ailleurs et afin d’enrichir ces premiers éléments, nous les confronterons à une étude de cas. Il s’agit d’une exposition du Musée dauphinois à Grenoble intitulée «Un air d’Italie» consacrée aux apports des migrants transalpins, ouverte en novembre 2011 pour une durée de 13 mois à Grenoble en Isère. Ce musée, connu et reconnu pour sa pratique d’une muséographie dite participative, est un terrain adéquat pour mener des observations sur cette notion.

À l’occasion de cette exposition, l’équipe a mis en place plusieurs dispositifs qualifiés de participatifs avant et pendant son ouverture au public ainsi que des dispositifs participatifs en ligne. Grâce à une observation participante menée pendant la conception de l’exposition et pendant son ouverture au public, nous avons pu rassembler un matériel riche concernant les discours, les représentations et les pratiques du participatif pour ce musée au sein de l’institution et de son territoire ainsi qu’en ligne. Enfin, nous mettrons en perspective l’analyse des discours, des représentations et des pratiques du Musée dauphinois autour du participatifs avec l’analyse des discours associés aux offres dites participatives en ligne relevées en amont et délivrées par les musées. Cette dernière étape aura pour objectif de mieux percevoir l’image qui se construit au sujet de la dimension participative du numérique et de tenter d’en vérifier les apports dans le domaine de la culture et en particulier, celui des musées.

 

Note de positionnement scientifique

Cette recherche s’inscrit dans le cadre d’un projet de thèse qui vise à étudier l’impact du web et des technologies numériques embarquées sur la participation et l’interaction des visiteurs au sein du musée et avec le musée. Il s’agit d’explorer les comportements potentiels de participation et d’interaction que déploient les visiteurs lorsqu’ils sont au contact du média exposition et de mesurer les mutations éventuelles entrainées par l’usage du web et des technologies numériques embarquées sur les modalités d’appropriation des savoirs. Cette recherche est transdisciplinaire et s’appuie sur les sciences de l’informatique et les sciences de l’information et de la communication. Elle est portée par la SFR Agorantic qui réunit le Laboratoire d’Informatique d’Avignon et le Laboratoire Culture et Communication de l’Université d’Avignon.

Les outils méthodologiques utilisés et développés sont dans la lignée de cette approche à la croisée des sciences informatiques et des sciences de l’information et de la communication.

Le terrain au coeur du projet de recherche. Un partenariat est établi avec le Musée dauphinois à Grenoble, premier terrain en cours d’exploration, un autre se construit avec le Mucem, à Marseille.



[1] Georges Henri Rivière développera le concept d’écomusée à travers une définition évolutive (197-1980) comme l’explique François Mairesse dans son ouvrage intitulé La belle histoire, aux origines de la nouvelle muséologie dans Publics et Musées, n° 17-18, vol. 17, 2000, p. 44-45.

[2] La description de Pierre Camusat est recontée par Georges Henri Rivière dans le receuil de textes et notes de cours intitulé La muséologie selon Georges Henri Rivière, Paris, 1989, p. 320-322, cité dans André Gob, Noémie Drouguet, La muséologie. Histoire, enjeux, développements actuels, Paris, 2006, p. 101.

[3] Dans son ouvrage, Nina Simon présente et analyse quelques-uns de ces dispositifs participatifs répondant au principe de l’efficacité et destinés aux expositions où aux espaces du musée en général.  Nina Simon, The participatory Museum, 2010.

[4] Les technologies numériques embarquées sont, dans le cadre de cette recherche, les téléphones mobiles (toutes générations confondues), les tablettes, les appareils photos numériques, les consoles portables, soit tout objet pouvant être relié à Internet à un moment donné et dont la caractéristique principale est d’être un objet facilement transportable.

Plus d’infos sur le programme du colloque scientifique LUDOVIA 2013 ici

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