Perspectives 2013, paroles d’industriels entame cette chronique de plusieurs épisodes avec Guillaume Chatagnon, Directeur général de Motiv’solutions, technologies interactives pour l’éducation et l’entreprise.
Ludovia Magazine : Dans le contexte de crise économique que nous connaissons, est-ce que vous notez une perte de vitesse sur le marché e-éducatif ? Quels sont les changements et les adaptations auxquels vous êtes confronté ?
Guillaume Chatagnon : Le numérique à l’école est en pleine mutation, c’est un fait. Ceci étant, nous notons qu’à cause des budgets réduits, les établissements sont contraints de définir plus précisément leurs besoins afin d’investir au plus proche de leurs problématiques.
En tant qu’industriel, nous devons nous adapter à cette contrainte et offrir une offre globale, intégrant ces nouvelles contraintes budgétaires.
Nous notons un dynamisme et une croissance sur tous les sujets qui touchent au numérique ; cependant, ne perdons pas de vue que le plus important n’est pas de vendre de la technologie mais de s’assurer que les enseignants puissent l’utiliser. Cela doit passer par un accompagnement adapté, sur mesure et sur la durée.
En tant que professionnel, il est de notre devoir d’accompagner les enseignants dans une conduite au changement inévitable.
LM : Les annonces (recrutement d’enseignants) et le rapport sur la refondation de l’Ecole (inclus la concertation Etat-collectivités locales) vont-ils avoir des répercussions sur votre secteur d’activité en 2013 ? Comment l’appréhendez-vous ?
GC : Je pense que cela aura, inévitablement, des répercussions sur notre activité et il faudra le prendre en considération dans notre approche en 2013. Les collectivités locales vont devoir faire des choix d’investissements et c’est à nous, professionnels du secteur, de leur démontrer qu’il est fondamental en 2013, d’investir dans le numérique à l’école.
LM: Au delà des annonces, pour l’instant théoriques, quelles mesures pensez-vous qu’il faudrait privilégier pour l’avenir du numérique en éducation ?
GC : Il faut impérativement réduire le « fossé » qui existe entre ce que nos enfants utilisent quotidiennement à la maison en terme de technologies et ce qui est encore utilisé à l’école.
Pour cela, je le répète, la mesure qui nous semble être primordiale est celle de l’accompagnement des enseignants par des formations sur mesure, adaptées, et sur la durée. Sans une volonté forte des différents acteurs (ministères, collectivités, enseignants, industriels) sur le point de la formation, l’avenir du numérique semble, sans aucun doute, compromis.
L’autre mesure qu’il serait bon d’entreprendre serait la concertation des différents acteurs engagés dans le numérique, un « think-tank » sur ces sujets.
LM : Au regard de ce qui se passe sur les marchés internationaux, européens et autres, quelles préconisations pourriez-vous soumettre au Ministère de l’éducation nationale français ?
GC : Je préconise plus de concertation au niveau national pour qu’une politique globale sur le numérique puisse voir le jour. Les collectivités engagent individuellement des travaux importants sur le numérique sans pour autant qu’une volonté commune existe.
Je pense qu’il faut « réinventer » l’enseignement :
– Passer les nombreuses expérimentations en cours à une approche intégrée c’est à dire capitaliser sur les expériences, avec 2 grands axes prioritaires :
1) Proposer des modèles de scénarisation pédagogique adaptée à chaque type d’enseignements (sports, arts, culture, sciences et techniques,) qui utilisent toutes les potentialités de ces nouveaux médias.
2) Aller vers une intégration globale : manuels scolaires numériques , enseignement interactif via les TNI (scénarisation adaptée), ENT, etc
Certains pays voisins comme l’Angleterre sont en avance dans ce domaine ; d’une part, au delà d’une différence culturel, le système de financement est bien plus souple que chez nous (les établissements décident eux-mêmes des investissements). D’autre part, il existe une orientation nationale qui simplifie grandement les investissements.
La France ne peut plus enregistrer ce retard par rapport aux autres pays européens. C’est de l’avenir de nos enfants dont il est question.