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Du plaisir de se perdre dans des lieux (re)connus : flâneries et quêtes vidéoludiques

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Basés sur des scenarii fictifs favorisant la découverte des patrimoines, de lieux, d’époques et de mondes révolus, des jeux tels que Tomb Raider, Assassin’s creed ou même Call of duty laissent apparaître des formes singulières de médiatisation des patrimoines. Tirant pleinement profit des spécificités narratives du jeu vidéo et de l’importance accordée, dans ce mode de symbolisation, à la dimension spatiale du récit, ces productions cherchent à conjuguer plaisir ludique et tourisme numérique, jeu et émotion patrimoniale .

De fait, si Jean-Michel Schaeffer  considère qu’ «une représentation vécue en état d’immersion fictionnelle est l’objet d’investissements affectifs», il faut convenir que ces jeux fondés sur une proposition d’immersion fictionnelle autorisent, du côté des joueurs, l’appropriation ludique d’un cadre patrimonial simulé. Un rapport singulier à l’espace et au temps en est inévitablement induit que nous nous proposons d’interroger dans cette étude. Les joueurs voyagent dans le temps, acteurs de l’histoire et ici de l’Histoire. Il n’y a rien de nouveau, pour les historiens, dans le fait de représenter l’Histoire sous la forme narrative, qu’elle cela soit sous la forme d’un film historique, d’un roman ou d’un jeu vidéo – au reste Jean-Pierre Esquenazi  le rappelle très bien -, le récit constitue un moyen privilégié pour communiquer sur l’Histoire.

Ainsi, au-delà de leurs particularités diégétiques inscrivant la narration en termes spatiaux, ces changements de rythmes, cette recherche de plaisirs inscrits dans des temporalités distinctes pourrait fort bien incarner une forme de modernité décrite par des sociologues tels que Simmel  ou, plus récemment, Rosa  relevant la croissante complexification des tempos sociaux.

Le récent jeu d’action-aventure Assassin’s creed en est un exemple significatif. En effet, l’intrigue principale met en scène la quête d’un héros basée sur des événements historiques et des lieux patrimoniaux, plus ou moins fictifs. Ici, les éléments d’un monde réel serviront de base à l’univers diégétique et fictionnel du jeu. Pour mener à bien sa mission, le joueur effectue une suite d’actions prévues par le script narratif des concepteurs, mais, au-delà, est amené à visiter une époque historique, rencontrer des personnages, ou bien encore à participer à des conversations historico-fictionnelles. Or, le partage de la vie quotidienne constitue actuellement un élément central des médiations autour des patrimoines, telles que les organisent les institutions culturelles ou même les organisateurs de voyages. En asservissant les possibilités qui lui sont offertes par le gameplay de s’extraire un instant de la trame narrative du jeu, le joueur peut s’offrir d’autres plaisirs ludiques que ceux directement liés aux actions de jeu.

Dans une approche communicationnelle, nous nous proposons ainsi de montrer, à partir de l’étude sémiotique du cas du jeu Assasins’creed, comment les spécificités de la médiation vidéoludique permettent de faire rimer, entre libertés et contraintes, des plaisirs a priori antagonistes : flânerie et action, vagabondage et quête. Nous mettrons en lumière les systèmes signifiants qui composent ce type de jeux et, par conséquent, conditionnent cette recherche du plaisir.

Source : Julie PASQUER-JEANNE, Olivier ZERBIB

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