[callout]Nous nous intéressons à la place et aux effets du photomontage numérique via les réseaux socio-numériques dans l’espace public.[/callout]
Lorsque l’image numérique fait son apparition dans les années 2000, il s’agit d’un basculement majeur dans l’histoire des images : c’est une véritable révolution culturelle.
L’image numérique, sujette à toutes manipulations, est souvent accusée de fragiliser le lien entre le réel et sa représentation. L’histoire montre que cette question n’est pas tant liée à un problème technique qu’au contexte d’usage des images numériques ou non. Ainsi, nous entrons dans une nouvelle phase, celle de la dématérialisation, du détournement et de la connexion (partage sur les réseaux sociaux en ligne et le web) de l’image.
L’image devient le support principal d’une nouvelle culture où la valeur des biens symboliques dépend de leur capacité à être partagés, repris, truqués, détournés, à susciter des échanges et des conversations.
Nous assistons à un changement en profondeur du paradigme photographique, particulièrement visible à travers les usages communicants de l’image.
La photographie en tant qu’objet numérique interactionnel joue un rôle décisif en matière de conversation numérique.
À la manière du dessin de presse, la réappropriation et le détournement ludique de formes visuelles officielles permet notamment la manifestation d’une satire ou d’une critique des hommes politiques. Ce faisant, ces usagers réactualisent des pratiques d’emplois détournés et inattendus des technologies dans l’espace public.
À partir de ce constat rapide, plusieurs questions nous interpellent. Nous souhaitons interroger les liens entre innovations et usages, et plus précisément entre le mode de production numérique des photographies, les possibilités de diffusion et d’échange de celles-ci par l’intermédiaire des applications du web 2.0, et les usages ludiques de rediffusion, d’appropriation, de détournement ou de re-création que les internautes en font.
Ces appropriations et détournements sont-ils des phénomènes qui déterminent la valeur sociale d’un produit ? Participent-elles à des modifications sensibles, à des modes d’exister ou/et de paraître des usagers ? Assistons-nous à une forme de revendication démocratique et sociale passant par des pratiques et des demandes de déritualisation, de trivialisation du politique et des personnalités politiques ?
En quoi et comment la viralité de ces photographies modifie-t-elle l’espace public ? Les usages de désignation et de re-désignation dont elles font l’objet (titres, légendes, hashtags…) modifient-ils les processus de mise en publicité et en visibilité de celles-ci au sein de l’espace public ?
Nous tentons de cerner ces mutations à travers l’observation et l’analyse des phénomènes de diffusion et de circulation de photomontages d’hommes politiques français via les réseaux sociaux numériques.
Nous découpons ce travail en trois parties :
- Le photomontage politique, outil de communication politique et de propagande : rappels historiques et panorama actuel ;
- Analyse d’un corpus de photomontages politiques marquants dans l’espace public français au temps du numérique.
Fonctions politiques et sociales du photomontage interactionnel au temps du numérique et impacts sur l’espace public : re-politisation / dé-politisation, trivialisation, rapprochement des usages, familiarité et déritualisation des échanges
Positionnement scientifique
Sections scientifiques de rattachement :
- Sciences de l’Information-Communication, Histoire et Science politique
Méthode :
- Analyse des usages, analyse sémiotique, analyse des désignations
- Approche interactionnelle
- Focus groupe en réception
Terrain d’expérimentation :
- Les réseaux sociaux numériques (Facebook, Twitter, Flickr, Instagram) en tant que lieux et outils de mise en circulation, de diffusion, de réception, et de rediffusion des photomontages aux différentes étapes de leur mise en vie numérique : création, appropriation, détournement et re-création.
Bibliographie
- BÉGUIN-VERBRUGG Jeannette, « Peut-on entrer dans l’image ? » in Sciences-Humaines, Grands Dossiers n° 11 – juin-juillet-août 2008
- BERTHO LAVENIR Catherine, « Les plaisirs pervers de l’image numérique », in Le monde de l’image – Hors-série n° 43 – Décembre 2003/Janvier-Février 2004
- DELAGE Christian et GUIGUENO Vincent, La Fabrique des images contemporaines. Paris, Éditions du Cercle d’art, 2007.
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- GUNTHERT André, « L’image partagée », in Études photographiques, 24 | novembre 2009, [En ligne], mis en ligne le 09 novembre 2009. URL : http://etudesphotographiques.revues.org/2832. [consulté le 12 janvier 2015].
- GUNTHERT André, « L’image conversationnelle. Les nouveaux usages de la photographie numérique ». – 8 avril 2014 – 09:29 [English][Twitter] [FB], http://culturevisuelle.org/icones/2966
- GUNTHERT André, « L’image conversationnelle », Études photographiques, 31 | Printemps 2014, [En ligne], mis en ligne le 11 mars 2014. URL : http://etudesphotographiques.revues.org/3387. consulté le 12 janvier 2015.
- JOLY Martine, « Les trois dimensions de l’image », in Le monde de l’image – Hors-série n° 43 – Décembre 2003/Janvier-Février 2004.
- JOURNET Nicolas, « Quand l’image parle » in Sciences-Humaines, Grands Dossiers, n° 11 juin-juillet-août 2008.
- MOLENAT Xavier, « Vers une « ère post-photographique » ? in Le monde de l’image – Hors-série n° 43 – Décembre 2003/Janvier-Février 2004.
- TISSERON Serge, « Virtuel psychique et virtuel numérique. Psychanalyse de l´image », in Générations numériques : des enfants mutants ? – Mensuel n° 252 – octobre 2013.
Plus d’infos sur la programme du colloque scientifique sur www.ludovia.org/2015/colloque-scientifique
A propos des auteurs : Cécile Dolbeau-Bandin et Béatrice Donzelle