Le programme de recherche Imagitour analyse les circulations et les imaginaires des touristes en région Centre en partant des données accompagnant les photographies postées sur des sites de partage comme Panoramio, Flickr ou Instagram. Celles contiennent notamment des informations sur les dates et les lieux des prises de vues, permettant de générer des cartographies des fréquentations et des circulations. Elles peuvent également contenir des informations sur l’âge ou la nationalité des photographes, ce qui permet d’analyser des variations selon certains critères. L’originalité de ce programme de recherche est d’avoir associé à une équipe spécialisée en informatique à une équipe de chercheurs en sciences sociales, qui est allée sur le terrain à la rencontre des touristes pour étudier le rapport à l’image et aux circulations.
Une des missions du programme est de créer un prototype d’application de type smartphone qui utiliserait ces données associées aux photographies postées sur les plates-formes de partage pour proposer aux touristes des circuits personnalisés. On voit immédiatement, à travers cette application, comment les objets numériques permettent de court-circuiter les modes classiques de consommation : chaque touriste qui poste des photos sur internet devient de fait un conseiller, sans même en avoir conscience, pour les autres. On est ici face à une conception inductive et empirique : la circulation ne dépend plus d’un choix soumis de l’extérieur aux touristes par les entreprises ou institutions concernées, mais elle se calque sur les circuits que les autres touristes ont eux-mêmes générés, selon leurs critères personnels. Ainsi le touriste n’a plus à rentrer dans des catégories préconstruites pour se voir proposer un produit personnalisé, ces catégories ressortant directement des pratiques.
On voit donc qu’un tel usage des nouvelles technologies implique plusieurs questionnements :
– Quel rapport à l’image et à son partage entretiennent les touristes ?
– Quelle place est laissée aux technologies mobiles dans un contexte de loisirs ?
– Comment la disponibilité de grands volumes de données volontairement partagées par les internautes (big data) change la connaissance des pratiques et son exploitation ?
Au-delà de l’expérience de création du prototype, des enquêtes de terrain ont été menées pendant l’été 2013. Celles-ci ont permis d’étudier au plus près des touristes leur circulation et leurs usages de la photographie, en utilisant notamment des dispositifs d’enquête novateurs. Ces enquêtes ont notamment montré la complexité d’établir des catégories et la diversité des facteurs influant les choix des touristes.
L’objet de cette présentation est de présenter un usage particulier des données et outils numériques, tout en soulignant l’importance des recherches classiques pour étudier les comportements et permettre une juste exploitation des informations.
Note de positionnement
[callout]Le travail a été réalisé dans le cadre d’Imagitour, programme de recherche financé par la Région Centre.
Le programme est porté par le Laboratoire Citères de l’Université de Tours, et compte également parmi ses partenaires :
– L’EIREST (Équipe interdisciplinaire de recherche sur le tourisme) de l’Université Paris I
– L’École Supérieur d’Ingénieur Léonard de Vinci
Les recherches s’appuient sur l’exploitation des données associées aux photographies postées sur les plates formes de partage Panoramio, Flickr et Instagramm, ainsi qu’aux informations disponibles sur les sites Hotel.com et TripAdvisor. Elles s’appuient également sur des enquêtes ethnographies menées pendant l’été 2013 dans le Val de Loire et le sud de la Touraine.
Pour plus d’information sur le programme, il est possible de consulter : Chareyron, G., Da Rugna, J., Cousin, S., Piñeros, S., Branchet, B., & Michaud, M. (2014). Observer les pratiques touristiques en croisant traces numériques et observation ethnographique. Le projet de recherche Imagitour. Espaces, 316(janvier-février), 99-107.[/callout]
Voir le programme complet du colloque scientifique Ludovia#11
Voir la bio de Gaël Chareyron, Jérôme Da Rugna, Saskia Cousin et Maxime Michaud sur Ludovia 2014