Dans l’antiquité, les orateurs avaient coutume de mémoriser les différentes parties de leur discours en faisant appel à la « méthode des lieux ». Répétant leur discours, ils visitaient et revisitaient des édifices dont ils se souvenaient, en ayant associé une partie à chaque pièce. Ainsi, l’espace et la mémoire entretiennent des relations étroites dans le traitement de l’information, relations observables dans les parcours scénarisés ludiques et pédagogiques.
Le monde numérique nous confronte à de nouvelles représentations de l’espace (modélisations 3D, simulation, virtualité…) qui dématérialisent le monde physique, le ré-agencent et conduisent à établir de nouvelles relations au réel et à l’imaginaire. La modélisation 3D des monuments historiques, des villes, des musées, invitent à de nouveaux usages, donnant à voir ce qui était jusqu’alors inaccessible au regard pour des raisons d’échelles, d’éloignement ou de mode de représentation.
De l’espace réel numérisé aux mondes imaginés, le numérique donne forme à des projets et des phénomènes qui ne sont plus soumis aux lois de la physique. En mettant à disposition des lieux inaccessibles, passés ou imaginaires, en construisant des espaces de savoir, de dialogue, de travail à distance, en permettant de concrétiser des expériences de pensée, les dispositifs interactifs ourlent le réel d’une mémoire numérique.
Dans le même temps, alors que les espaces traditionnels de représentation tentaient d’inscrire leurs productions dans une quête d’éternité, les nouveaux espaces valorisent l’éphémère avec l’obsolescence des technologies, l’instabilité de l’image écranique, le déclin des supports physiques, les logiques de flux, le « temps réel », la surabondance informationnelle, les problèmes d’archivage… Peut-on redouter de nouveaux risques d’amnésie ?
Pourtant les espaces numériques semblent receler des capacités mémorielles incommensurables. Les systèmes informatisés autorisent une traçabilité inédite avec ses risques (avènement d’une « société du contrôle » ?) et ses opportunités (adaptation des systèmes aux stratégies des utilisateurs, mise en commun des expériences).
La confrontation espace(s) / mémoire(s) soulève donc des enjeux multiples et nouveaux que notre colloque souhaite éclairer. A titre indicatif on pourra notamment aborder les questions suivantes :
– Comment vivre et s’orienter dans ces nouveaux espaces ?
– En quoi le rapport au réel s’en trouve-t-il changé ?
– Assiste t-on à un déplacement des frontières virtuel/réel ?
– Sur quels modèles de connaissance (métaphores) se construisent les espaces numériques ?
– Quelle est la part de l’individuel et du collectif ?
– Quels usages engendrent les traces laissées par les utilisateurs ?
– Les rapports au temps et à l’histoire sont-ils modifiés ?
– Quelle est la relation entre la mise en espace et sa perception par l’utilisateur ? En quoi cette
spatialisation joue-t-elle un rôle dans le processus de mémorisation ?
– La mémorisation s’en trouve-t-elle renforcée ou affaiblie ? Est-ce une aide, un support, une délégation ?
– Qu’en ressort-il concernant les oppositions fondatrices communautés/société, homme/individu, mémoire orale/écrite, etc. ?
Ces problématiques pourront être déclinées utilement dans divers domaines et appliquées à différents types de logiciels, notamment dans ceux :
– de la mobilité (géolocalisation, tracking GPS, modélisation topologique 3D) : Ces dispositifs aident-t- ls les sujets à trouver leur chemin ? Améliorent-ils la mémorisation des trajectoires ? Génèrent-ils de nouvelles perceptions de l’espace ?
– de la communication (visioconférence, chat, networking) : Comment l’espace numérique permet-t-il de franchir la distance ? Comment les relations intersubjectives, collectives, l’identité, sont-elles spatialisées ? Quelles conséquences sur la communication ? Comment les modalités de communication, à la fois interpersonnelles et médiatiques évoluent-elles dans ces nouveaux espaces, dont la mémoire en apparence éphémère est finalement tenace ?
– du jeu vidéo (univers tridimensionnels, spatialisation des fonctionnalités, dimension exploratoire) : quels percepts la pratique vidéoludique stimule-t-elle ? Quelles représentations de l’espace et des fonctionnalités dans le jeu vidéo ?
– de l’éducatif et du management (cartes cognitives, outils de gestion des tâches, espace de jeu et espace d’apprentissage, espaces numériques de travail, apprentissage de l’espace…)
– du patrimoine : numérisation 3D de sites archéologiques, de musées, de monuments historiques, patrimonialisation du numérique (notamment du jeu vidéo)
– de l’histoire : Comment se construit la « mémoire collective » à l’ère Internet, quel est l’impact des évolutions rapides et incessantes de la technologie sur la « culture numérique » ?
– du web design : Comment concrètement se manifestent les métaphores spatiales sur le web ?
Comment la mémoire est-elle sollicitée par l’organisation des pages et pour quelle expérience ?
– de la création : Quel est l’espace de l’œuvre, quelle est sa temporalité ? Quelle mobilisation en font les artistes pour faire sens ?
– …et dans tous les usages susceptibles d’éclairer la thématique.
Conformément à la logique du dialogue interdisciplinaire qui prévaut dans les colloques Ludovia, nous invitons les chercheurs en Sciences Humaines et Sociales de toutes disciplines ainsi que les chercheurs en Sciences de l’Ingénieur, à soumettre leurs propositions de communications.
LUDOVIA 2009 – ORGANISATION SCIENTIFIQUE
Modalités de soumission
Les propositions doivent être transmises par courrier électronique avant le lundi 16 mars 2009 à : michel_lavigne50@hotmail.com
La réception de chaque proposition donnera lieu à un accusé de réception par mail
La proposition se présentera sous forme d’un résumé de 4000 signes maximum, espaces non compris, en fichier attaché (titré proposition_ludovia_2009) au format rtf, doc ou odt, et ne contiendra que le titre de la communication, sans mention de son ou ses auteur(s).
Dans le corps du mail figureront le nom de l’auteur, ses coordonnées, ses titres scientifiques, sa section scientifique (section CNU), son organisme de rattachement et le titre de l’article.
Organisation de la sélection
La lecture des propositions et des articles complets se fera en double aveugle (deux lecteurs, ne disposant que du texte de la communication, sans les mentions liées à son auteur), l’un des lecteurs étant issu du champ de recherche correspondant à l’article, l’autre extérieur.
Chaque auteur recevra un avis circonstancié qui indiquera l’acceptation (conditionnée ou non), ou le refus de l’article et en donnera les critères. Les articles acceptés sous condition devront être modifiés en fonction des remarques des lecteurs.
Modalités techniques
Les articles définitifs devront respecter les conventions typographiques et de mise en page qui seront envoyées dans une feuille de style type.
Leur taille sera comprise entre 25000 et 30000 signes espaces compris.
Ils seront envoyés par voie électronique sous la forme d’un fichier au format .doc, .rtf ou .odt, contenant le titre, le résumé, le texte et, le cas échéant, ses illustrations, numérotées de façon incrémentielle (figure 1, figure 2, etc.).
Ces dernières seront reproduites sous la forme de fichiers jpeg ou png (un fichier par illustration, reprenant le nom et l’incrément de l’illustration) et accompagneront le texte sous la forme d’un dossier compacté au format .zip, du même nom que le fichier de l’article.
L’envoi consistera donc en deux fichiers, par exemple : montexte.rtf (ou .doc, .odt) et montexte.zip (dossier contenant les illustrations figure1.jpg, figure2.jpg, figuren.jpg).
Publication
• Les articles acceptés seront édités avant le colloque dans des actes en version papier, qui seront distribués aux auteurs lors du Colloque durant lequel ils seront conviés à venir les présenter dans le cadre d’une communication orale.
• Après le Colloque les actes seront mis en ligne sur le site de l’Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines (OMNSH), partenaire de Culture numérique.
• Une publication scientifique ultérieure est envisagée, composée des meilleures contributions du colloque, revues et augmentées, dans le cadre d’un ouvrage scientifique.
Calendrier (dates importantes) :
• Date limite de soumission : lundi 16 mars
• Notification d’acceptation des propositions : mardi 31 mars
• Remise des textes complets (30 000 signes maximum, espaces compris) : lundi 11 mai
• Évaluation des articles et retour aux auteurs : jusqu’au 15 juin
• Envoi des textes définitifs : lundi 29 juin
• Colloque : du mardi 25 au jeudi 27 août 2009.
En savoir plus :
Pour de plus amples renseignements sur l’appel à communications, vous pouvez passer par l’adresse de réception des communications : colloque.ludovia09@pigpix.org
Les informations ultérieures concernant le colloque, tant matérielles que scientifiques, seront régulièrement mises en ligne sur le site : www.ludovia.org/colloque/
Coordinateur de l’organisation scientifique : Michel Lavigne (Université Toulouse III / LARA).