Catégorie : POINT DE VUE

  • Bricolage et bricoleurs dans l’éducation : c’est du sérieux !

    Bricolage et bricoleurs dans l’éducation : c’est du sérieux !

    Moiraud_bricolage310314Si l’on a résolu cette question, sait-on s’il est issu du monde de l’industrie où l’on fabrique des objets tangibles, s’agit-il d’un enseignant qui cherche à construire les apprentissages de ses élèves ou bien encore un artiste-artisan?

    Cherche t-il à bricoler parce que la réussite de son entreprise est son objectif ou bien parce qu’il cherche de façon plus ou moins consciente à subvertir son milieu? La réponse pourrait être cartésienne, tranchée, nette …

    Malheureusement (heureusement ?) la réponse est complexe, il n’y a pas de bricolage, il y a des bricoleurs.

     

    Suis je un bricoleur ? C’est fort possible ! Cerner le métier d’enseignant c’est chercher à comprendre ce qu’est le bricolage, notion élaborée à la fois dans les forêts du Brésil et dans les usines industrielles de la révolution du même nom.

    « C’est quoi un prof qui bricole ? » dira le quidam, « C’est quoi ce prof qui bricole » dira le parent d’élève inquiet. Bricoler est un verbe obscur qui inquiète. Peut-on bricoler l’immatériel ?

    C’est inquiétant un prof qui revendique son attachement au  bricolage, il dit haut et fort qu’il tâtonne, qu’il cherche, quand la société donne de lui l’image de celui qui sait, qui organise, qui programme (d’ailleurs il doit respecter le programme !). Serait-il la machine à ne pas douter, l’instrument d’un système huilé ?

    J’ai donc essayé, au gré de mes recherches, de cerner cette nébuleuse. J’ai bricolé (je continue de bricoler) un article fait de bribes de références, une forme de collage à la Breton pour m’aider à comprendre ce que je fais (ou de m’y perdre définitivement), ce que je ne fais pas aussi. Un travail commencé sans le savoir en côtoyant mes premiers élèves, poursuivi en (re)découvrant (assez tardivement) Claude Levi Strauss, formalisé (paradoxe ?) en intégrant l’INRP et poursuivi depuis.

    Voici mes collages, ils ne respectent pas un véritable ordre, si ce n’est celui du hasard programmé de mes lectures.

    Pris entre la posture de l’ingénieur et celle du bricoleur, ou est la place de l’enseignant ?

    Le bricolage ou des bricoleurs ?

    L’in[génie1]osité littéraire au service du bricolage …

    La référence sur le concept de bricolage est bien évidemment Claude Levi Strauss et le passage fameux de la pensée sauvage :

    «Une forme d’activité subsiste parmi nous qui, sur le plan technique, permet assez bien de concevoir ce que, sur le plan de la spéculation, put être une science que nous préférons appeler première plutôt que primitive : c’est celle communément désignée par le terme de bricolage.

    Dans son sens ancien, le verbe « bricoler » s’applique au jeu de balle et de billard, à la chasse et à l’équitation, mais toujours pour évoquer un mouvement incident: celui de la balle qui rebondit, du chien qui divague, du cheval qui s’écarte de la ligne droite pour éviter un obstacle. Et, de nos jours, le bricoleur reste celui qui œuvre de ses mains, en utilisant des moyens détournés par comparaison avec ceux de l’homme de l’art ». /…/

    Le bricoleur est apte à exécuter un grand nombre de tâches diversifiées ; mais, à la différence de l’ingénieur, il ne subordonne pas chacune d’elles à l’obtention de matières premières et d’outils conçus et procurés à la mesure de son projet : son univers instrumental est clos, et la règle de son jeu est de toujours s’arranger avec les « moyens du bord », c’est-à-dire un ensemble à chaque instant fini d’outils et de matériaux, hétéroclites au surplus, parce que la composition de l’ensemble n’est pas en rapport avec le projet du moment, ni d’ailleurs avec aucun projet particulier, mais est le résultat contingent de toutes les occasions qui se sont présentées de renouveler ou d’enrichir le stock, ou de l’entretenir avec les résidus de constructions et de destructions antérieures.

    L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas définissable par un projet (ce qui supposerait d’ailleurs, comme chez l’ingénieur, l’existence d’autant d’ensembles instrumentaux que de genres de projets, au moins en théorie) ; il se définit seulement par son instrumentalité, autrement dit, et pour employer le langage même du bricoleur, parce que les éléments sont recueillis ou conservés en vertu du principe que « ça peut toujours servir ».

    De tels éléments sont donc à demi particularisés : suffisamment pour que le bricoleur n’ait pas besoin de l’équipement et du savoir de tous les corps d’état, mais pas assez pour que chaque élément soit astreint à un emploi précis et déterminé. Chaque élément représente un ensemble de relations, à la fois concrètes et virtuelles ; ce sont des opérateurs, mais utilisables en vue d’opérations quelconques au sein d’un type. /…/Claude Levi Strauss (1962) – La pensée sauvage – Agora

    La littérature regorge d’exemples qui peuvent servir d’appui pour illustrer les réflexions sur le bricolage en pédagogie. Ces passages ne sont pas forcément issus des réflexions de sciences de l’éducation mais elles aident à cadrer le concept :

    Le cas de l’ouvrier Demarty à l’usine Citroën

    Après les évènements de 68, Robert Lihnart intègre l’usine Citroën et les chaines de montage de 2 CV. Il y décrit un ouvrier, Demarty, chargé de «décabosser» les ailes. Pour accomplir sa tâche, il a, au fil du temps, construit un établi …

    «Le plus étonnant, c’est son établi. Un engin indéfinissable, fait de morceaux de ferraille et de tiges, de supports hétéroclites, d’étaux improvisés pour caler les pièces, avec des trous partout et une allure d’instabilité inquiétante. Ce n’est qu’une  apparence. Jamais l’établi ne l’a trahi ni ne s’est effondré. Et, quand on le regarde travailler pendant un temps assez long, on comprend que toutes les apparentes  imperfections de l’établi ont leur utilité : par cette fente, il peut glisser un instrument qui servira à caler une partie cachée ; par ce trou, il passera la tige d’une soudure difficile» – L’établi de Robert Lihnart (1978)

    Le cas de Monsieur Quignon à la poste

    Fabienne Hanique analyse les stratégies de modernisation au sein de  l’entreprise « La Poste » qui s’attache à conduire «la modernisation des agents», pour transformer les postiers en «acteurs associés au changement».

    Dans ses observations, elle évoque le cas de Monsieur Quignon, un vieil homme qui vient quotidiennement au bureau de poste pour vérifier l’état de son compte postal. Tous les agents savent qu’il ne perçoit que deux fois par mois sa maigre pension, le reste du temps le compte est vide. Les impératifs de rentabilité imposeraient de lui consacrer le minimum de temps.

    Pourtant… à l’encontre des règles managériales qui recommandent une distance avec le client, une rentabilité et une rapidité de l’opération, les guichetiers s’occupent de Monsieur Quignon, lui consacrent du temps. Ils prennent le temps de vérifier chaque jour son compte postal, ils lui adressent un mot gentil même si le résultat est connu d’avance. Les guichetiers ont bricolé la règle, ils l’ont adapté en fonction des besoins locaux.

    «La conduite qu’avait initialement adopté Annie n’était en rien critiquable au regard des procédures et des règles de l’efficacité managériale qui commandent notamment de diminuer le temps d’attente des clients et d’améliorer le temps de traitement et d’améliorer le temps de traitement des opérations. L’échange de regards avec les deux «anciens» l’a pourtant amenée à renoncer à cette posture pour se ranger aux «règles» locales de cette micro-société.

    Les enjeux sous-jacents sont importants pour l’ensemble des protagonistes / Pour Micheline et Jackie, il convient de vérifier qu’en la présence d’Annie, on peut travailler, c’est-à-dire non seulement mobiliser la réglementation et les procédures, mais aussi cette jurisprudence spécifique, véritables présupposés sociaux de l’activité personnelle, qui constitue le «genre de la maison». Libre à Annie de s’y plier ou pas … mais ne pas s’y résoudre peut être coûteux. Cela reviendrait à l’isoler et, du même coup, à la priver de la possibilité de mobiliser le collectif pour faire face à des situations que la réglementation prescrite seule ne peut plus suffire à affronter. Elle serait alors conduite, pour faire face à des situations codifiées, à produire des «inventions» ou des «bricolages» que l’absence de validation du collectif renverrait au rang de transgressions.» – Le sens du travail – Fabienne Hanique (2002) – éres

    Michel De Certeau et la perruque

    Dans son ouvrage l’invention du quotidien M. De Certeau évoque la notion de perruque dans le monde ouvrier. C’est le temps qui est détourné par les ouvriers pour fabriquer des objets personnels. Subversion du temps normé à des fins personnelles.

    « C’est la cas de la perruque. Ce phénomène se généralise partout, même si les cadres le pénalisent ou « ferment les yeux » pour n’en rien savoir. Accusé de voler, de récupérer du matériel à son profit et d’utiliser les machines pour son compte, le travailleur qui « fait la perruque » soustrait à l’usine du temps (plutôt que des biens, car il n’utilise que des restes) en vue d’un travail libre, créatif et précisément sans profit. Sur les lieux mêmes où règne la machine qu’il dit servir, il ruse pour le plaisir d’inventer des produits gratuits destinés seulement à signifier par son oeuvre un savoir faire propre et à répondre par une dépense à des solidarités ouvrières ou familiales » Michel de Certeau – L’invention du quotidien &. arts de faire – Folio essais page 45.

    Philippe Perrenoud

    Il évoque le bricolage chez les enseignants :

    « Les enseignants bricolent, ce qui ne signifie pas qu’ils font n’importe quoi et qu’ils ne font que cela. Le bricolage n’est pas antinomique avec la planification, la préparation, la référence à des théories éducatives. C’est ce que rappelle Philippe Perrenoud dans son article intitulé « La pratique pédagogique entre l’improvisation réglée et le bricolage » (4).

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    Génie au sens de la science des ingénieurs

    (4) « La pratique pédagogique entre l’improvisation réglée et le bricolage », Philippe Perrenoud, 1983 http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1983/1983_01.html

     

     Plus d’infos : retrouvez tous les billets de JP Moiraud dans notre rubrique « Entre ingénieur et bricoleur, un espace à investir chez les enseignants » et sur son blog

  • 7  règles à respecter pour construire votre Ecole Numérique avec l’Education Nationale

    7 règles à respecter pour construire votre Ecole Numérique avec l’Education Nationale

    Par Marie-France Bodiguian Cabinet AMO-TICE

    Amotice_240314Collectivités vous le savez, aux côtés des problématiques techniques, la formation pédagogique initiale et continue des enseignants est l’une des pierres angulaires de la réussite de votre projet d’Ecole Numérique.

    Selon le schéma habituel, la formation des enseignants reste le domaine de compétence de l’Education Nationale tandis que votre responsabilité est engagée dès lors qu’il s’agit de maintenance et de continuité de service. Jusque-là rien de nouveau.

    Mais votre rôle s’arrête-t-il vraiment là ?

    Au-delà d’être le « financeur » des équipements et infrastructures, d’être le garant de la continuité de service, vous êtes bien sûr le maître d’œuvre, en charge de la gouvernance. C’est donc à vous de motiver les acteurs impliqués, de mener et gérer les compétences de chacun, d’initier et d’encadrer les partenariats, dont celui, incontournable, avec l’Education Nationale.

    Délicat d’analyser l’autopsie de projets enterrés, malheureusement trop nombreux, d’usages initiés avec enthousiasme puis abandonnés faute de suivi. En revanche, l’analyse des succès et l’expérience de nos missions, réussies, nous fournissent des enseignements pertinents.

    Je vous livre donc ici les 7 règles à respecter pour bâtir les fondements d’un partenariat privilégié et pérenne avec L’Education Nationale,

    1/ Impliquez dès que possible dans votre projet l’Inspecteur d’Education Nationale, l’animateur TICE, le conseiller pédagogique de votre circonscription ainsi que les directeurs et enseignants de vos écoles. Pour cela :

    • Invitez-les à chacun de vos comités de pilotage, car le succès d’un tel projet, on ne le dira jamais assez, repose sur la conjugaison des compétences de chacun, orchestré par un chef de projet.
    • Consultez les enseignants, avec l’accord de votre IEN,  afin de comprendre leurs attentes et leur freins face au numérique, puis dans un second temps, de leur présenter les différents scénarii d’équipements et infrastructures que vous envisagez. Leur avis pourra vous permettre de finaliser ensuite votre projet.

    2/ Consultez les enseignants : Tout en respectant leur expertise pédagogique, cherchez à comprendre :

    – leurs motivations, au départ de votre projet,  car il est bien normal que, même si le numérique est inscrit dans la loi sur la refondation de l’école, leur degré d’implication ne sera pas simultanément le même pour tous. Connaître ainsi l’approche des enseignants dans votre commune vous permettra de mesurer et d’orienter vos investissements dans le cadre d’un plan pluriannuel, que vous ferez évoluer au fil du temps selon des critères de suivi à définir.

    – leurs problèmes organisationnels au sein de l’école et de leur classe afin de leur proposer des solutions, auxquelles les usages du numériques peuvent répondre. Attention, partez bien des problèmes et des besoins d’usages pour trouver les solutions d’équipements et d’infrastructures et non le contraire, qui s’est souvent avéré contre-productif.

    3/ Effectuez une veille régulière sur les différentes actions menées par le ministère de l’Education Nationale  en matière de numérique afin de comprendre les problématiques et contraintes des services déconcentrés (IEN, animateurs tice, conseillers pédagogiques) et des enseignants de vos écoles. Cela permettra d’instaurer rapidement un climat de confiance et un dialogue transparent.

    Des pistes parmi d’autres : le nouveau réseau CANOPE,  la prise en main par les enseignants de la plateforme de formation à distance M@gistère, qui intégrera dans les mois à venir des parcours sur les usages du numérique, etc.

    4/ Valorisez auprès des enseignants  les moins intéressés, les bénéfices du numérique en matière de conditions de travail. Car les outils numériques peuvent considérablement faciliter leur vie quotidienne grâce par exemple au stockage centralisé des contenus pédagogiques et à leur mutualisation au sein de l’école. Ils  facilitent également la gestion de la classe, en captivant l’attention et améliorant la concentration des élèves, etc.  Les récents succès des expériences de pédagogie inversée grâce aux usages du numérique en sont des exemples les plus probants.

    5/ Etudiez avec votre IEN de circonscription, de quelle manière, comme l’avait annoncé M. Peillon, en juin 2013 lors de sa conférence « pour faire rentrer l’école dans l’ère du numérique », le ou les conseillers pédagogiques en charge de vos écoles, pourront intervenir comme relais de l’animateur TICE, aux côtés des enseignants et de la ville. Car comme vous le savez certainement, et comme l’avait alors confirmé le ministre, les animateurs Tice sont responsables de grandes ou très denses circonscriptions.

    De ce fait le nombre considérable d’écoles, dont ils ont la charge leur rend difficile un suivi fréquent et rapproché des enseignants en matière d’usage numérique.

    Pour cela, le conseiller pédagogique devra alors bien sûr être formé. Ce dont vous devrez tenir compte dans votre calendrier de mise en œuvre.

    6/ Signez une convention avec l’Education Nationale où les rôles de chacun, services de la ville et Education Nationale, ainsi que les directeurs des écoles seront clairement exprimés. Convenez ensemble de suivre les usages chaque trimestre ou chaque semestre, selon des critères de suivi préalablement définis.

    7/ Accompagnez le changement en valorisant dans votre commune, les enseignants dès les premiers usages du numérique dans les classes, afin de motiver leur implication sur le long terme. Une stratégie de communication bien menée à cet effet permettra également  d’encourager le développement des usages sur l’ensemble des écoles, en particulier auprès des autres enseignants, qui ne se seraient pas encore lancés dans l’aventure.

    Voilà à vous de jouer, vous avez à présent toutes les cartes en main pour bâtir les fondements de votre partenariat avec l’Education Nationale.

    Et vous, comment avez-vous construit votre partenariat avec l’Education Nationale ?

     

  • Les supports pédagogiques, des créations pleines de ressources

    Les supports pédagogiques, des créations pleines de ressources

    Quelle différence y a t-il entre une ressource et un support ?

    « Une ressource, cela se matérialise de différentes manières : par des documents, des personnes, … tandis qu’un support, c’est ce que va vraiment utiliser l’enseignant dans son enseignement », définit Bruno Devauchelle.

    Il utilise les supports pour illustrer ses cours, aider les élèves à apprendre ou laisser une trace aux élèves.

    Les enseignants utilisent de plus en plus de supports (documents) pour enrichir leurs cours. Les traditionnelles cartes murales chères à notre imaginaire scolaire collectif sont désormais davantage des objets de collection (cf le livre de Michel Picouly) que des outils de travail.

    L’enseignant peut trouver des supports tout faits, par exemple auprès des éditeurs ou auprès de Canopé, « mais en réalité, quand on regarde les enseignants travailler, on se rend compte qu’ils détournent une partie de ces supports et ils en fabriquent une partie », souligne Bruno Devauchelle.

    Ce que regarde en premier un enseignant est comment il va pouvoir adapter le support à ses besoins pédagogiques.

    « En fait, peu d’enseignants utilisent des supports tout faits ; le manuel scolaire est d’ailleurs un très bon exemple et il a beaucoup évolué passant d’une forme linéaire à une forme kaléidoscopique ».

    Le tableau noir a été remplacé par le tableau blanc et désormais, le tableau se numérise. L’évolution des vecteurs de diffusion a permis une variété importante de pratiques et donc de supports.

    Les acétates (rétroprojection) introduites dans les années 60, la télévision petit à petit arrivée dans les salles de classe et désormais internet via les ordinateurs et autres appareils mobiles, enrichissent, voire remplace les supports plus anciens.

    Au delà de cette évolution et cette variété, est apparue, ou plutôt s’est développée, la possibilité pour chacun de concevoir et construire ses propres supports.

    Certes, il y a bien longtemps que les enseignants construisent et « bricolent » des supports. Outre les petits « bricolages », l’arrivée du photocopieur, par exemple, a fortement marqué le travail enseignant ainsi que celui des élèves. La photocopie est devenue très rapidement le prolongement efficient de cette manière de personnaliser les supports destinés aux élèves.

    Les éditeurs ont toujours lutté contre le « photocopiage », en particulier ceux spécialisés en éducation, qui ont obtenu le maintien de l’interdiction dans la loi sur l’exception pédagogique. La mise sur le marché de supports avec droits de reproduction n’a pas connu de franc succès, laissant le champ à un contournement toujours d’actualité.

    Utiliser légalement ou pas, un supports de cours reste un élément de base de la profession enseignante. Une pratique complémentaire existe et demande aussi à être analysée : l’enrichissement des supports existants.

    « Les enseignants ont une tradition d’enrichissement de supports ; avec le numérique, cela devient plus compliqué ».

    Bruno Devauchelle parle alors de « clans » qui se créent.

    En première typologie de support, « on a tout simplement la sélection d’un support : parmi un ensemble de documents, j’en sélectionne un que je vais fournir à mes élèves, soit sous forme vidéo-projetée, soit sur l’ENT, soit sous forme papier ».

    La deuxième typologie est l’assemblage qui consiste à rapprocher plusieurs objets qui ne sont pas ensemble à l’origine. Le troisième niveau est celui où l’enseignant met sa touche personnelle ; « plus que du bricolage,  il s’agit, selon la loi, d’oeuvre de création par assemblage ».

    Reste une question essentielle qui soutient les pratiques : quelles sont les compétences nécessaires pour parvenir à enrichir des supports existants ?

    Selon l’objectif visé et les objets techniques sollicités, elles sont très diverses et pas forcément toutes faciles à maîtriser. Il semble bien que ce soit l’un des freins, au moins partiel.

    Avec l’arrivée des moyens numériques, les niveaux techniques ont fortement augmenté. D’ailleurs, l’utilisation des photocopies n’a encore que peu diminué, contrairement à ce que l’on pouvait croire. D’un autre coté, les manuels scolaires numériques et les éditeurs éponymes n’ont pas encore apporté suffisamment d’accessibilité et d’utilisabilité pour encourager le développement de telles pratiques.

    Enrichir des supports reste une pratique artisanale et relativement modeste, bien que largement répandue en quantité.

     

  • Comment gagner du temps en enseignant avec la technologie *

    Comment gagner du temps en enseignant avec la technologie *

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    Larry Ellison, fondateur de la compagnie Oracle, estime que la technologie sera vraiment fonctionnelle quand elle deviendra invisible dans nos vies. Pour l’instant, cette réalité est une fiction, que l’on peut voir dans d’étonnantes vidéos comme A Day Made of Glass de la compagnie Corning.

    Actuellement, nous sommes plutôt dans une réalité où, quelques fois, le réseau nous laisse tomber, les élèves oublient leurs mots de passe et les ordinateurs tombent en morceaux.

    D’un autre côté, la technologie permet aussi de sauver beaucoup de temps en classe. Terry Heick, directeur du site TeachThought et ancien enseignant d’anglais aux États-Unis, a publié le 20 février dernier un bon article sur le sujet.

    Son texte How to save time teaching with technology regroupe 13 problèmes courants vécus à l’école en lien avec la technologie, et 46 solutions possibles.

    Voici l’un des problèmes qu’il identifie et différentes solutions qu’il propose. Poursuivez ensuite la lecture de son article pour en savoir plus!

    Problème : des ordinateurs trop lents

    (On est d’accord, il faut mettre la pédago avant la techno; mais quand la techno ne suit pas, difficile de s’en sortir!)

    Solutions possibles :

    1) Autoriser (et favoriser!) l’utilisation des appareils personnels
    Ceci demande un investissement de temps et un lâcher prise de la part de l’enseignant, mais ceux qui le font en retirent des avantages. Le phénomène Bring Your Own Device (BYOD) est là pour rester et prend de plus en plus d’ampleur.

    Rares sont les écoles qui ont les reins (financiers!) assez solides pour prêter un portable et/ou une tablette à tous leurs enseignants, encore moins à leurs élèves. Pourtant, nombreux sont ces derniers qui ont déjà des appareils portables intelligents qu’ils pourraient amener en classe…

    2) Utiliser une tablette
    Les tablettes mobiles sont construites avec un système d’exploitation différent par rapport aux ordinateurs traditionnels. Ce système semble moins demandant et, de ce fait, les tablettes semblent garder un bon niveau de performance plus longtemps que les appareils fixes.

    3) Ajouter de la mémoire
    Souvent, un ordinateur fixe au labo devient lent car il manque de mémoire vive. La mémoire vive est à l’image de votre surface de travail tandis que le disque dur pourrait être associé à votre classeur de documents.

    Pour travailler efficacement sur plusieurs dossiers en même temps, il faut de l’espace ! Si tout ce que vous avez est une petite table à café, le tout sera ardu. En travaillant sur une grande table (ou en ajoutant de la mémoire vive à un vieil ordinateur), on augmente son efficacité. En plus, ajouter de la mémoire vive est relativement peu coûteux.

    4) Utiliser un Chromebook
    La compagnie Google a mis de l’avant la création d’un appareil du nom de Chromebook. Cet appareil fonctionne sous Chrome OS, qui est le système d’exploitation de Google. L’avantage de ce système est qu’il fonctionne avec des applications Web et qu’il se limite au navigateur Chrome. En gros, c’est une machine simple et très rapide.

     

    Vous avez d’autres solutions qui fonctionnent à partager? N’hésitez surtout pas à le faire à l’aide du formulaire »contactez la rédaction » ou directement Sébastien Wart, @sebastienwart sur twitter.

    À propos de l’auteur Sébastien est conseiller pédagogique TIC au Collège de Montréal et ancien enseignant de sciences. Il livre de nombreuses autres idées sur son site www.Edulogia.com

    Article publié le 28 février 2014 sur Infobourg.com et rédigé par Sébastien Wart, auteur du site edulogia.com

    * tout en résolvant les problèmes courants !

  • Les ressources pour apprendre, de l’enseignant à l’élève

    Les ressources pour apprendre, de l’enseignant à l’élève

    Une ressource, c’est quoi ?

    C’est la première question qui se pose lorsqu’on utilise le mot « ressource ». Bruno Devauchelle définirait, de manière général, « tout ce qu’on a besoin, que ce soit le papier, le numérique et beaucoup d’autres choses, pour enseigner et apprendre ».

    Quelles ressources choisir ?

    Dans l’enseignement traditionnel, l’enseignant arrive en classe avec des ressources. Comment fait-il ses choix et pourquoi n’utiliserait-on que les ressources de l’enseignant et pas celles que les élèves pourraient apporter en classe ?

    Le manuel scolaire est le symbole le plus reconnu parmi les ressources, mais l’observateur de la classe au quotidien sait bien que les enseignants, comme les élèves, font appel à des ressources de toutes natures, humaines, matérielles, visuelles, auditives, etc. Or, le choix de ces ressources et un des éléments clés de la réussite dans l’apprentissage.

    Si avec l’Ecole, le XIXème siècle a consacré le manuel scolaire et le Maître, le XXIème siècle risque de consacrer d’autres ressources car « avec l’arrivée du numérique, les ressources ont explosé ».

    « En réalité, les enseignants n’ont pas une ressource mais une multiplicité de ressources qu’ils vont chercher ; l’enseignant est un assembleur de ressources ».

    Il peut faire appel aussi bien aux collègues qu’aux manuels scolaires, à Internet ou encore à sa propre bibliothèque, désormais de plus en plus numérisée elle aussi.

    Apprendre suppose que l’on accède à des ressources qui vont aider au passage à la connaissance.

    L’élève qui utilise l’ordinateur et internet fait de même ; il prolonge son travail en allant à la recherche de ressources variées pour répondre aux demandes des enseignants : amis, livres, sites web, forums, réseaux sociaux, etc…

    La mutation des ressources utilisées dans l’enseignement est le premier signe d’une évolution importante du système scolaire. L’apparition de classes inversées ou de cours en ligne gratuits et massifs (CLOM ou MOOC) viennent s’ajouter à ce phénomène.

    Ainsi, lorsque l’on recherche dans une discipline les ressources numériques accessibles, on est étonné d’en voir la variété mais surtout le nombre ; à tel point qu’il est très difficile de se tenir à jour et surtout de distinguer, dans ces sources, ce qui est vraiment pertinent.

    Ce qui guette les enseignants c’est la surdose de ressources.

    D’ailleurs le maintien du recours au manuel scolaire peut être lu comme le signe du besoin de ressources limitées et cohérentes, tout comme l’attente des enseignants vis à vis des inspections dont ils demandent un cadrage plus important et surtout un guidage ; ce à quoi certains répondent par des sites disciplinaires académiques très riches et variés.

    En conclusion, Bruno Devauchelle attire notre attention sur le fait que l’enseignement va être totalement dépendant  de « la façon dont l’enseignant utilise les ressources, la façon dont il les amène et la façon dont il les fait chercher par les élèves ou pas » et qui constituent ses choix pédagogiques.

     

  • Quelle école pour demain ?

    Quelle école pour demain ?

    Philippe_chavernac_070314« Réformer le mammouth ! » disait un ancien ministre de l’Education nationale pour souligner d’une part la nécessité d’engager des réformes, d’autre part pour stigmatiser la taille importante du ministère dont il avait la charge.

     

    Un rapport de la Cour des comptes (« Gérer les enseignants autrement », mai 2013) rappelle la prééminence de l’Education nationale dans le budget de la nation :

    « En raison de leur nombre (837 000 en 2012, soit 44% des agents publics employés par l’Etat et du poids de leurs rémunérations (49,9 Md€ en 2011, soit 17% du budget général de l’Etat), leur gestion est déterminante ».

    Comment le simple citoyen, au delà de toute appartenance politique ou idéologique, peut-il contribuer à réfléchir à la place de l’école dans notre société ? Les professeurs ont-ils trop de vacances ? Les rythmes scolaires sont-ils bénéfiques aux apprentissages ? Comment adapter la pédagogie des nos jours quand les élèves utilisent et s’approprient les résultats donnés par les moteurs de recherche ?

    De nombreuses questions récurrentes, d’éternelles critiques souvent sans fondement, qui sont peut-être exprimées pour se défausser de son rôle de parent… Et si la solution passait par une réflexion basée sur le bon sens ? Quelques idées simples, de la bonne volonté et surtout une prise de conscience du vivre ensemble pourraient changer le cours des choses. Passons de la communauté scolaire à la communauté nationale pour appréhender le devenir de l’école. Regardons autour de nous, et surtout au niveau européen, pour prendre le « meilleur » des systèmes étrangers.

    Améliorons le système de « gestion des enseignants pour redresser les résultats des élèves ». Demandons aux « politiques » d’avoir le courage nécessaire pour faire évoluer le système éducatif français et ainsi le réformer.

    Il est toujours utile de se référer au passé et de nombreux ouvrages ne manquent pas de nous le rappeler. A quoi ressemblait la classe de nos grands parents ? Le fameux tableau noir qui reste dans notre imaginaire collectif, le pupitre de l’écolier immortalisé par les photographies de Doisneau, la craie, la tablette de l’élève sont des images toujours présentes dans nos esprits.

    Mais encore faut-il replacer l’école d’autrefois dans son contexte où il y avait peu de bacheliers et où deux systèmes étaient juxtaposés (l’enseignement primaire supérieur dans les écoles primaires supérieures et le lycée qui couvrait l’enseignement de la sixième à la terminale pour une catégorie sociale plus aisée). De plus, les comparaisons internationales étaient inexistantes, ce qui n’est pas le cas de nos jours. En effet, comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes, la France « se situe au 18ième rang de l’OCDE pour la performance des élèves […] et connaît une inquiétante crise d’attractivité du métier ».

    Pour cette institution, ces résultats « passables » (un professeur pourrait porter l’appréciation suivante : « peut mieux faire »…) proviennent en partie d’une « utilisation défaillante des moyens existants ». Le rapport souligne l’inadéquate utilisation des moyens humains :

    « les heures de cours entrent dans le cadre hebdomadaire fixe sans que cela corresponde nécessairement aux besoins des élèves ».

    Au niveau national, les auteurs du rapport mentionnent le difficile travail pour répartir sur tout le territoire les enseignants, entre la volonté du professeur de retourner dans son académie d’origine et les besoins de certaines régions qui sont déficitaires en personnels qualifiés. Et de souligner en gras la phrase suivante : « les postes d’enseignants sont répartis sur le territoire selon des critères qui ne caractérisent que partiellement et indirectement les difficultés des élèves ».

    Cela entraîne de nombreux effets pervers :

    « Dans le second degré, 45% des jeunes enseignants affectés sur leur premier poste le sont dans les deux académies les moins attractives, provoquant par la suite des départs massifs ».

    Parallèlement, nous pouvons aussi nous interroger sur la sous-utilisation des locaux ? On peut se référer aux expériences, baptisées « école ouverte », qui pendant les vacances, montrent qu’un public est près à venir dans l’établissement en dehors des horaires « normaux ».

    En effet, les élèves qui sont souvent issus de milieux moins favorisés n’ont pas les moyens d’aller à l’étranger pour suivre des cours de langues ou d’avoir des stages de pratique sportive. Pouvoir les accueillir, leur proposer des activités ludo-éducatives permet d’entretenir un lien social fort avec ces populations. On peut en profiter pour avoir une relation plus individuelle, les « voir » autrement, « casser » un peu cette relation frontale maître-élèves.

    De la maison à l’école, l’élève, à part peut-être à la bibliothèque ou au centre sportif, ne fréquente pas régulièrement d’autres lieux. A l’inverse, on constate que les espaces virtuels sont surencombrés. L’établissement scolaire reste un repère essentiel dans le processus de socialisation de l’élève et participe à la construction de son identité. Ce lien permet aussi de se retrouver entre pairs, de se rencontrer, et d’échanger.

    D’ailleurs, l’école n’est-elle pas un bien public financée par l’impôt ? Comment accepter qu’elle soit fermée après 18 heures, souvent les samedis et pendant toutes les vacances ? Comment vaincre cette bureaucratie qui empêche d’ouvrir les espaces où les « jeunes » pourraient trouver un sens nouveau à leurs actions, encadrés bien sûr par un personnel compétent et rémunéré.

    S’appuyant sur les recommandations du rapport de la Cour des comptes, on peut espérer quelques changements et en particulier une affectation des professeurs « en fonction de la réalité des postes et des projets d’établissement ». On peut aussi envisager de « mieux valoriser les ressources humaines, au niveau individuel et des équipes ».

     

    Ce constat étant posé, on en revient toujours au même. Quand on annonce aux élèves l’absence de leur professeur cela provoque chez eux des cris de joie. Notre système est fortement basé sur un lieu, la salle de classe, un face à face, professeur élèves et des programmes nationaux. Quelques expérimentations peuvent faire la une de la presse locale mais cela reste limité à peu d’établissements.

    L’école Steiner, au Royaume Uni, révolutionne le cadre scolaire par la volonté de travailler autrement à des rythmes différents et en choisissant ses matières. Sans adopter cet extrême, ne pourrions-nous pas faire évoluer cette relation frontale entre professeur et élèves ? Si le TNI (Tableau Numérique Interactif) a remplacé l’historique tableau « noir », il n’en reste pas moins des dispositifs qui ne bougent pas.

    Ne peut-on, à l’instar du système universitaire américain, travailler sur des thématiques et des problématiques que les élèves résoudraient progressivement en utilisant un centre de ressources ? L’apprentissage individuel de la pédagogie par projet pourrait être plus largement mise en œuvre. En effet, comme l’écrit Catherine Reverdy dans un intéressant dossier d’actualité (« Des projets pour mieux apprendre ? », Dossier d’actualité Veille et analyses, n°82, février 2013) de l’Institut français de l’éducation (Ife) :

    « L’apprenant possède des connaissances et des compétences sur lesquelles il va s’appuyer pour construire son projet […] il construit son savoir au fur et à mesure, en faisant et réparant ses erreurs ». Cette pédagogie pourrait se mettre en place dans le CDI (Centre de Documentation et d’Information).

    De plus, nous constatons dans nos pratiques quotidiennes de nouveaux supports pour la lecture et l’écriture. La quête de l’information pour construire un exposé passe par l’utilisation des moteurs de recherche via l’emploi de mots-clés. L’intégration du numérique dans les programmes des disciplines scolaires a été un des thèmes d’une passionnante conférence nationale organisée à Lyon les 21 et 22 mai 2013 et intitulée : « Cultures numériques, éducation aux médias et à l’information ».

    Eric Sanchez (maître de conférences, École normale supérieure de Lyon – Institut français de l’éducation) et Paul Mathias (inspecteur général de l’Éducation nationale) rappellent dans la présentation de leur table ronde (« Cultures numériques : quelles responsabilités de l’école ? ») qu’il « est devenu capital de penser une refondation numérique de l’Ecole et de comprendre comment elle peut se confronter aux évolutions de notre société en s’y adaptant mais aussi en les accompagnant ».

    De nombreuses expérimentations dans l’utilisation de nouveaux supports ont, d’une part, témoigné d’un réel engouement des élèves et d’autre part de la mise en place d’une pédagogie vraiment différenciée. On constate, peut-être avec raison, une grande prudence des collectivités territoriales pour investir dans ces matériels. Comme le souligne Michel Perez (inspecteur général de l’Éducation nationale) : « la responsabilité de l’école sans laquelle celle-ci n’a aucune chance d’entrer dans le numérique, sera de donner aux enseignants les moyens d’être capables de médiatiser l’accès à la connaissance dans ses nouvelles modalités issues du monde numérique ».

     

    De même, il serait temps de favoriser les échanges au niveau européen et de simplifier les procédures d’inscription (voir le programme Comenius).

    Pourquoi ne pas permettre à un professeur de passer trois mois ou plus dans un autre pays de la Communauté européenne. Comment vraiment apprendre une langue sans séjourner dans un pays étranger ?

    L’Europe se fera sur cette prise de conscience que nous appartenons à la même communauté et la barrière de la langue ne sera franchie que par l’immersion complète dans un pays étranger. Et pour finir, comment accepter qu’un jeune professeur lauréat fasse toute sa carrière devant les élèves ?
    Pourquoi les ressources humaines au sein de l’Education nationale en particulier et de l’administration en général sont elles si peu ouvertes aux évolutions de carrière ? N’y a-t-il pas chez certains une lassitude qui s’instaure ? Et comment leur permettre d’évoluer avant une retraite qui s’annonce de plus en plus lointaine…

    Beaucoup de questions sont posées dans cet article qui demanderaient des réponses de bon sens… Mais comme l’écrivait Michel Crozier, dans son livre d’il y a déjà quarante ans (La société bloquée, Le Seuil, 1970), sans une révolution la France est-elle capable de changer ? Puissent ces quelques remarques susciter la réaction ainsi que le débat et l’entreprise ne sera pas totalement vaine…

    Auteur : Philippe CHAVERNAC, professeur documentaliste, LP Gustave Ferrié Paris
    Retrouvez le sur son blog : supercdi.free.fr

  • Et si l’enseignant innovant était un concept utile pour … ne pas innover ?

    Et si l’enseignant innovant était un concept utile pour … ne pas innover ?

    JPMoiraud_Art1_260214

    N’est-il pas désormais un concept dépassé ? Il a été utile, nécessaire et indispensable pour passer du 1.0 au 2.0, le pionnier a eu une fonction sociale mais la modernité s’est installée, instillée, développée.

    L’innovant s’est épuisé, il lui arrive même de se démobiliser, de douter.

    Peut-on aujourd’hui se contenter de  n’avoir que des enseignants innovants, isolés, atomisés, sympathiques curiosités du monde enseignant ? Ce serait vrai si le système éducatif se réduisait au seul monde enseignant ; or nous savons tous que le système est complexe. Il est difficile de parler d’éducation, d’enseignement et d’apprentissage sans évoquer les apprenants, les chefs d’établissement, les corps d’inspections, les administrations, la recherche, les syndicats, les parents d’élèves,  j’en oublie certainement.

    L’enseignant innovant est un concept dépassé. Il nous faut maintenant penser l’innovation comme un instrument global. C’est ici que se justifie mon titre car mettre la focale sur l’enseignement innovant permet, à bien des égards de conserver le système en l’état. En détournant le regard sur un « objet » que j’ose qualifier d’anecdotique (que mes collègues innovants m’excusent par avance de la violence voulue du terme anecdotique). Seul, l’enseignant innovant s’épuise, il se coupe petit à petit de son milieu, se marginalise car il avance au sein d’un système qui stagne.

    Comme dans toute greffe il faut que le corps accepte la greffon faute de quoi c’est le rejet qui s’impose.

    En glorifiant l’enseignant innovant on lui rend un mauvais service et on rend un mauvais service à l’institution. Nous nous trompons depuis des années, nous focalisons notre attention sur quelques individus quand c’est le système qu’il faut analyser. L’enseignant innovant est mort, que vive la structure innovante.

    Si l’on veut innover, alors regardons où sont les équipes innovantes, celles qui savent collaborer, travailler de concert, savent intégrer l’interdisciplinarité comme vecteur de la réussite. Ne plus regarder son voisin de classe, son pair d’amphithéâtre comme un étrange étranger mais comme un allié précieux.

    Si  l’on veut innover, alors regardons où sont les chefs d’établissements  innovants, ceux qui acceptent de prendre le risque de modifier les habitudes, les usages confortablement acceptés pour être tranquilles ; le chef d’établissement global, expérimentateur qui ose le dialogue horizontal en complément du nécessaire hiérarchique.

    Si l’on veut innover alors regardons où sont les IEN / IPR innovants, ceux qui osent valoriser le savoir académique comme la compétence acquise et développée ; savoir encourager l’innovation sans qu’elle se fasse au prix d’un renoncement salarial.

    Si l’on veut innover, regardons quelles sont les positions syndicales qui permettraient d’avancer dans le sens de l’innovation sociale.

    Si l’on veut être innovant regardons du côté des collectivités locales qui engagent des politiques innovantes en osant imaginer des établissements adaptés aux modes collaboratifs et coopératifs.

    Savoir intégrer la technologie pédagogique au-delà de l’acte d’investissement simple dans le registre du dialogue ordonnateur / comptable.

    Si l’on veut être innovant regardons du côté des modifications structurelles qui pourraient être envisagées.

    L’innovation pourrait tangenter vers la reconnaissance d’un temps numérique effectif dans les services, vers la reconnaissance d’un espace recomposé qui reconnaîtrait, à côté des espaces réels, les espaces numériques ; vers la reconnaissance des efforts engagés et des compétences acquises par les acteurs éducatifs.

    Si l’on veut innover faisons en sorte que le continuum lycée université soit aussi une réalité pour les enseignants.

    Osons donc penser l’innovation comme la préoccupation de chacun, à tout instant ; l’innovation oui mais pas seulement pour les enseignants.

    Et si on en discutait plus avant ?

    Plus d’infos : retrouvez tous les billets de JP Moiraud dans notre rubrique « Entre ingénieur et bricoleur, un espace à investir chez les enseignants » et sur son blog

  • Le WIFI est-il sans risques pour notre santé ? Point de vue sur les précautions à prendre

    Le WIFI est-il sans risques pour notre santé ? Point de vue sur les précautions à prendre

    WIFI_pointdevueDominiqueLebourseLe Canada répond Oui.

    Au préalable, j’attire votre attention sur le fait que la vidéo associée à l’article « Le-wifi-est-il-sans-risque-pour-notre-sante-le-canada-repond-oui« , date de 2010.

    Or, si l’on fait un parallèle avec les téléphones portables, on peut considérer que le point de vue des scientifiques et des constructeurs a sensiblement évolué depuis 2010.

    Pourquoi pas concernant le Wifi ? Par ailleurs, il est dit que les fréquences mises en œuvre se situent : « sur une échelle inférieure à d’autres ondes qui sont présentes dans notre quotidien (ex le micro-onde) ».
    Je me permets de préciser que les ondes du wifi sont pulsées à 2,4 GHz et qu’il s’agit bien de micro-ondes ou d’hyperfréquences. Je ne rentrerai pas plus dans les détails techniques en concluant que – tout comme avec les micro-ondes, il faut prendre des précautions.
    Par exemple, on ne reste pas à proximité du micro-onde avec son bébé dans les bras pendant que l’on réchauffe son biberon.

    Qu’en est-il du Wifi dans les écoles ?

    Mon point de vue est technique et non pas scientifique, sachant que je travaille dans une entreprise qui équipe des écoles avec des infrastructures réseau. Nous installons notamment des points d’accès Wifi qui sont effectivement indispensables à l’utilisation des tablettes et autres équipements sans fils.

    Nous avons aussi un rôle de conseil auprès des municipalités qui sollicitent nos services : nous leur confirmons qu’il ne faut pas proscrire le Wifi mais effectivement prendre des précautions.

    Quelles précautions prendre avec le Wifi et que préconisons-nous ?

    . Il faut éviter de déployer des infrastructures 100% Wifi dont on ne maîtriserait pas le niveau d’émission. Là aussi, je ne rentre pas dans la technique, mais il faut comprendre que – soit automatiquement, soit lors de l’installation -, le niveau d’émission des points d’accès Wifi peut être augmenté pour éviter les zones d’ombres et bénéficier d’une bonne couverture de l’ensemble des salles de classe.

    En outre, une entreprise peut être tentée de limiter le nombre de bornes wifi pour augmenter ses chances d’être retenue dans le cadre d’un appel d’offre avec une solution moins-disante financièrement.

    . Il faut limiter l’utilisation d’un point d’accès wifi dans la durée et dans l’espace ; pour ce faire :
    – la borne Wifi doit être installée à l’intérieur de la classe mobile ou de la valise qui embarque les PC portables où les tablettes ;
    – il faut utiliser un modèle de point d’accès sans fil professionnel dont on diminuera au maximum le niveau d’émission ;
    – il faut éteindre le Wifi dès que l’on a terminé la séquence pédagogique collaborative. Petite parenthèse : la majorité des constructeurs propose un bouton pour couper le wifi au même titre que l’on éteint la lumière quand on sort de la salle de classe. Pédagogiquement, il est bon de sensibiliser les élèves au fait que le wifi, tout comme le téléphone portable doivent être utilisés avec précaution.
    – la Classe Mobile – qui contient la (ou les bornes wifi) doit être placée dans la classe à plus d’un mètre des élèves ou de l’enseignant. Un point d’accès au réseau dans chaque salle de classe : un préalable essentiel à l’école numérique.

    Pour bénéficier pleinement d’une Classe Mobile, elle doit être raccordée au réseau informatique de l’école et à Internet. Cela suppose qu’un accès au réseau soit disponible dans la salle de classe et non pas via une infrastructure Wifi globale (cf le point 1).

    Comment faire quand l’établissement n’est pas câblé ?

    Si l’on dispose du budget et que l’on peut supporter ou attendre les travaux nécessaires, il faut câbler le bâtiment et faire l’acquisition des matériels réseaux actifs. Pour limiter le coût du câblage, on pourra profiter d’une éventuelle réhabilitation électrique où la main d’œuvre sera mutualisée sur la pose consécutive de tous les câbles courants fort et faible.

    Si l’on préfère consacrer une part plus importante du budget pour les équipements informatiques et interactifs, des solutions alternatives – performantes et sécurisées – existent qui mettent en œuvre une technologie Courant Porteur professionnelle qui s’adapte aux installations électriques triphasées les plus vétustes.

    A noter que des mesures réalisées par un centre de recherche indépendant ont montrées que le CPL utilise de fréquences comprises entre 1 et 68 MHz (Mega et non Giga Hertz) qui ne sont plus mesurables au-delà de quelques centimètres. En conclusion En termes de risques sanitaires, il y a sans doute plus de risques de jambes cassées à multiplier les câbles RJ45 dans les salles de classe que de risques avérés à utiliser une technologie sans fil comme le Wifi, à condition néanmoins d’observer des précautions nécessaires et suffisantes.

    On ne proscrit donc pas le WiFi mais on prend des précautions et on consulte des entreprises spécialisées qui proposent une infrastructure réseau filaire ou des technologies alternatives plus économiques qui mixent une infrastructure réseau CPL et des points d’accès Wifi.

    Auteur : Dominique LE BOURSE, société Handi-Informatique

  • Les enseignants : une force de proposition pour avancer dans l’ère du numérique ?

    Les enseignants : une force de proposition pour avancer dans l’ère du numérique ?

    MartialP_110214L’orientation prise autour de la confiance sans faille aux éditeurs classiques, transformant à grand peine le marché classique du papier, en le justifiant par un cartable numérique tout en un, ne délivrait au final, qu’une vision simpliste au regard d’un potentiel accru.

    J’en tiens pour preuves toutes les expérimentations pluridisciplinaires que nous trouvons autour de l’utilisation de l’image que permettent les tablettes.

    A ce titre, voulant répondre à un projet d’équipement, j’ai trouvé chez mes collègues 2 types de réponse:
    « on pourra y mettre nos cours, documents, et autres supports » ou « c’est intéressant pour pouvoir prendre des images et des vidéos »

    Oui ! mais pas seulement…

    Tout d’abord, ne pas négliger le fort potentiel et la maîtrise technique de certains enseignants/développeurs, ayant intégré les usages innovants et en particulier le numérique, depuis de nombreuses années dans leur pédagogie. Ils possèdent en eux, l’ensemble des qualités que ne peuvent offrir, ou alors de manière incomplète, les ténors de l’industrie.

    La différence tient en l’observation quotidienne de l’évolution de leur métier : un moyen de réagir en temps réel et une adaptabilité toute particulière. Mais surtout en une capacité à identifier les besoins, à les interroger et y répondre avec une infinie précision, même si parfois la tâche s’avère juste ponctuelle, locale et surtout difficile.

    Cet aspect très professionnel, s’appelle les “règles métiers”. Un ensemble de détails qui sont un atout pour le professeur, un écueil[1] pour les développeurs.

    C’est pourquoi j’insiste sur ce potentiel conséquent que possède l’éducation nationale en son sein et que le projet “faire entrer l’école dans l’ère du numérique” semble oublier alors même que je l’aurais renommé “faire avancer l’école dans l’ère du numérique” !

    Je pense qu’il est important de prendre les devants et que, même avec des moyens qui peuvent sembler dérisoires, il est possible d’être force de proposition dans un domaine où il devient urgent d’être efficace.

    Je pose la question à partir d’un concept simple : cessons de nous poser le problème comme étant celui de la ressource, mais plutôt celui du besoin !

    La ressource est omniprésente, partout. A un point tel qu’aujourd’hui, on ne la diffuse que très difficilement, car elle se livre une concurrence impitoyable en fonction des supports (papier, CD-ROM, tablette, internet). Et il apparaît évident qu’on y ajoute chaque instant des contraintes d’utilisation supplémentaires. A sujet similaire, éditeur différent.

    Mes vielles éditions de Molière ne sont plus adaptées à celles d’aujourd’hui, et pourtant cela reste du Molière !

    Je me permettrai une réflexion plus longue sur cet aspect qui inquiète, alors que Google devient le précepteur incontournable de nos élèves et que nous luttons contre…

    Et de revenir sur mon sujet principal : l’énergie des enseignants, et le potentiel des enseignants/développeurs !

    En Essonne, une initiative d’abord locale, s’étend à l’ensemble du territoire, sur la base d’une idée simple. Une idée qui dénonce l’accès aux ressources sur un aspect fondamental qu’est la “facilité”.

    Un collège[2] impulse un moyen différent d’accéder aux contenus : partir de la liste de ce qui est essentiel à retenir d’un cycle de 4 ans au collège. Idée simple, mais qui comporte quelques restrictions que les professionnels doivent intégrer, professeurs ou éditeurs. L’application, « MonCollege« [3],a pour ambition d’intégrer l’ensemble de ces contenus de base dans toutes les disciplines[4], de manière progressive et collaborative, et de les rendre accessibles gratuitement, hors-ligne (et c’est important, car la connexion a un coût pour les élèves).

    Le coeur de cette construction tient à une présentation épurée où l’information est essentielle, facilement assimilable et correspondrait à la connaissance de l’approche des contenus, non pas par le professeur, mais par l’élève, premier concerné.

    Après plusieurs semaines, il semble bien que l’aspect technique du développement ne soit pas l’obstacle le plus conséquent, mais bien cette réflexion nécessaire de l’adulte pour offrir des formations intégrant la notion de BYOD[5] que nous détournons en UYOD (use your own device) pour donner à l’objet technique une fonction éducative de chaque instant.

    Le pari est de présenter le contenu pédagogique comme étant un contenu ludique. De proposer une consultation en amont des éléments ou évènements importants et de rejoindre le concept de “classe inversée” cher à Marcel Lebrun[6]. De montrer que le numérique tient une place dans le quotidien, tant au niveau du multimédia commercial que dans l’utile éducatif.

    « MonCollege » redonne aux enseignants la place importante qu’ils occupent dans les transformations actuelles, là où beaucoup d’entre eux ne se sentent pas concernés ou dépassés par ce qui est en train de changer. Il n’est pas rare de voir s’opposer des arguments comme “de toutes façons, ils [les élèves] sont meilleurs que moi, je n’y connais rien”, alors que le débat d’aujourd’hui n’est plus sur la forme, mais sur le fond, et qu’il apparait comme évident que ces mêmes enseignants n’ont rien à craindre du numérique pédagogique, car c’est par eux que passera la validité des savoirs retenus.

    La question est posée. Ne serait-il pas nécessaire d’utiliser enfin les compétences de nos enseignants, à commencer par ceux qui sont en capacité de développer ce genre d’idées, et bien d’autres, pour donner corps à “des apprentissages par et au numérique” ? Question de fond il me semble !

    Notes :


    [1] doit-on répondre à toutes les attentes, sachant que si ce n’est pas fait, le support risque d’être abandonné ?

    [2] Collège Les Pyramides à Evry

    [3] disponible aujourd’hui sur Google PLAYSTORE uniquement, mais prochainement sur APPSTORE

    [4] aujourd’hui: mathématiques, sciences physiques, histoire, anglais de manière incomplète

    [5] de l’anglais “Bring your own device”, où l’élève utilise en classe son propre périphérique (smartphone, tablette,…)

    [6] Marcel Lebrun, docteur en Sciences, est  actuellement  professeur en technologies de l’éducation et conseiller pédagogique à l’Institut de Pédagogie universitaire et des Multimédias (IPM) de l’UCL (Université catholique de Louvain à  Louvain-la-Neuve, Belgique)