Catégorie : POINT DE VUE

  • 10 raisons d’utiliser les téléphones mobiles en classe

    10 raisons d’utiliser les téléphones mobiles en classe

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    Autoriser ou non l’utilisation du téléphone cellulaire en classe : voilà un sujet délicat ! Un rapide sondage dans tout établissement secondaire permet de constater qu’une bonne partie des jeunes possède un téléphone cellulaire, et qu’il est souvent sur eux. On peut, par ailleurs, s’attendre à ce que la baisse des prix et les forfaits familiaux poussent de plus en plus de parents à fournir un téléphone intelligent avec Internet à leurs enfants.

    Il y a peu de temps, à l’occasion d’une conférence, Martin Lessard, chroniqueur à l’émission La Sphère de Radio-Canada, expliquait que les cellulaires actuels sont aussi puissants que le module lunaire des missions Apollo, à la seule différence que cette puissance est maintenant dans nos poches.

    Cette puissance informatique augmente à un rythme extrêmement rapide : un potentiel énorme que l’on met de côté en empêchant son utilisation en classe.

    Le 27 janvier dernier, le site Teachthought publiait sur le sujet un article de Terry Heick intitulé 50 Reasons It’s Time For Smartphones In Every Classroom.
    Fait important, les propos de cet article ne sont pas ceux d’un adepte « aveuglé » par son désir de technologie en classe ! Ils soulèvent au contraire l’importance de tous les problèmes que cette intégration peut causer : gestion de classe, vie privée, vols, harcèlement, etc. Une intégration trop superficielle et sans éducation peut causer beaucoup de problèmes et de distractions chez les élèves.

    Même son de cloche du côté de Jennie Magiera, technopédagogue de Chicago que j’ai eu le privilège de rencontrer deux fois. Selon elle, bien que la technologie amplifie tout ce qui fonctionne dans une classe, elle fait de même avec ce qui ne fonctionne pas. Le positif comme le négatif !

    C’est pourquoi il est si important de bien réfléchir la stratégie d’intégration technologique en classe. Voici, pour cela, 10 raisons d’utiliser le téléphone cellulaire à l’école, parmi les 50 identifiées dans l’article cité plus haut.

    1) Donner aux élèves la possibilité de chercher sur Google si nécessaire, comme l’enseignant le fait lui-même ;

    2) permettre aux élèves d’être mobiles tout en utilisant la technologie ;

    3) utiliser des applications qui envoient des notifications directement aux élèves ;

    4) utiliser des codes QR en classe que les élèves peuvent lire ;

    5) faire de la vidéo en l’envoyer directement dans un compte YouTube de classe ;

    6) permettre aux élèves de construire un portfolio numérique en temps réel ;

    7) permettre aux élèves d’utiliser des applications de lecture comme iBook, Kindle, etc ;

    8) permettre aux élèves d’écouter de la musique en travaillant, comme le font plusieurs enseignants ;

    9) s’organiser grâce à un agenda numérique avec système de rappel ;

    10) tirer profit d’un appareil qui est, de toute façon, déjà dans la poche de plus en plus d’élèves.

    En conclusion, ces 10 raisons ne sont pas présentées comme étant des vérités ni des recettes miracles, mais tout simplement des constats que les avantages existent.

    Avez-vous tenté l’expérience ? Si oui, quels ont été vos succès, et vos points à améliorer ?

    Vous pouvez réagir en contactant notre rédaction (onglet « contacter la rédaction ») ou directement Sébastien Wart, @sebastienwart

    À propos de l’auteur Sébastien est conseiller pédagogique TIC au Collège de Montréal et ancien enseignant de sciences. Il livre de nombreuses autres idées sur son site www.Edulogia.com

    Article publié le 31 janvier 2014 sur Infobourg.com et rédigé par Sébastien Wart, auteur du site edulogia.com

  • Le numérique, une culture où l’Ecole ne peut être absente

    Le numérique, une culture où l’Ecole ne peut être absente

    Le numérique occupe t-il nos esprits ?

    Il occupe en tout cas notre quotidien, sans même que nous nous en rendions compte. Pierre Barrière nous donne l’exemple récent d’une panne électrique qui a touché le rectorat de Bordeaux courant janvier et qui a privé tout le monde de téléphone et de liaisons numériques, « ce qui a rendu les échanges compliqués, l’espace d’une journée ».

    Le numérique est-il aussi présent dans la tête des enseignants ? Pierre Barrière est unanime et sa réponse est « oui ».

    Il reconnaît que l’appropriation du numérique se fait de manière disparate et variée, « ce qui mérite sans doute une meilleure organisation » et il adhère au message du Ministre Vincent Peillon lorsqu’il déclare « qu’il faut faire entrer l’école dans l’ère du numérique ».

    « Le temps n’est plus celui des pionniers mais celui d’un usage général mieux maîtrisé qui descende dans la classe, ce qui ne signifie pas que tout doit passer par le numérique ».

    Il lui tient à cœur d’insister sur deux points :

    –  que le numérique peut apporter beaucoup à l’enseignement
    –  tout en invoquant la nécessité de se prémunir des dangers qu’il peut comporter, notamment par rapport à la vie personnelle.

    « Le numérique fait partie d’une culture dont l’école ne peut être absente », déclare Pierre Barrière.

    « Cela fait maintenant un certain temps que nous savons que le rôle de l’enseignant change, qu’il n’est plus l’unique dispensateur du savoir, mais qu’il est un médiateur ».

    L’outil numérique, d’après lui, est une aide pour « cette transmission nouvelle des savoirs », pour « cette acquisition nouvelle par les élèves d’un certain nombre de connaissances et de compétences ».

    Le refus du numérique, la « crainte », perceptible chez certains enseignants est-elle un mythe ?

    D’après le DASEN, la crainte qui peut être suscitée par le numérique touche surtout aux questions de sécurité : sécurité des systèmes d’information, sécurité de la vie privée, les « dérives » que le numérique peut occasionner.

    Ce sont des problèmes de citoyens et qui méritent d’être posés dans l’espace commun et pas seulement à l’école.

    Pour lui, l’existence d’usages fautifs ou problématiques ne doit pas constituer l’argument qui condamnerait tout un processus. Cela tiendrait à considérer qu’avant le numérique, la transmission était parfaite et que maintenant, il y a des dangers.

    Les individus qui se cloisonnent dans ce système de pensée représenteraient, selon lui, une minorité qui « s’attarde sur des problématiques désormais dépassées ».

    En guise de conclusion, Pierre Barrière insiste sur la « non-importance » des matériels. Il donne l’exemple de l’ENT qui structure aujourd’hui l’entrée dans l’établissement scolaire aux parents et aux élèves ; demain, « nous serons peut-être sur une informatique personnelle que nous devrons intégrer, en toute sécurité, au sein de ce même établissement scolaire ». Sur ce point, il n’est pas fataliste et invite à être réactif !

    Les technologies des matériels évoluant très rapidement, il se plaît à démontrer qu’il est aujourd’hui vital d’acquérir la culture numérique.

    La culture numérique n’est-elle finalement pas aussi vitale que l’air que nous respirons ?

    « Le résultat que nous devons chercher à obtenir est un citoyen bien construit autour du numérique, soucieux de ses libertés mais pas frileux, ne tremblant pas devant cette crainte irraisonnée du numérique ; celle-là même qui nous ferait sans doute manquer des rendez-vous importants de développement de la connaissance et d’accès démocratique à cette connaissance, qui reste la mission de l’Ecole ».

  • Le WIFI est-il sans risques pour notre santé ? Le Canada répond Oui

    Le WIFI est-il sans risques pour notre santé ? Le Canada répond Oui

    La vidéo ci-contre – en anglais, pardonnez-nous pour les lecteurs non anglicistes- datant de 2010, tient à démontrer que des recherches approfondies ont été menées et que le WIFI n’est pas dangereux :
    –  les ondes diffusées par le WIFI se situent sur une échelle inférieure à d’autres ondes qui sont présentes dans notre quotidien (ex le micro-onde) ;
    – leur niveau est d’ailleurs inférieur au seuil de tolérance établi au Canada, lui-même correspondant au seuil de tolérance de la majorité des pays du monde.

    D’un autre côté, des associations canadiennes dénoncent ces recherches qu’elles qualifient comme « une tromperie et une aberration« , pointant le fait que les industriels et les gouvernements se réfèrent à des normes jugées obsolètes. De plus, ils argumentent sur la durée d’exposition des enfants en classe et la vulnérabilité plus importante du jeune public par rapport à ce phénomène (plus d’infos ici).

    En France, Fleur Pellerin déclarait en mars 2013 ne pas s’alarmer sur le Wi-Fi mais sur les ondes émises par les téléphones mobiles. La ministre annonçait le lancement d’une grande campagne de prévention incitant les utilisateurs de portables à utiliser leur kit main libre ou oreillettes Bluetooth. L’organisation mondiale de la santé (OMS) considère les téléphones portables comme cancérogènes depuis mai 2011.

    Argument qui est largement controversé et à prendre avec modération puisque dans une enquête datant d’août 2012, une monographie (étude qui se veut exhaustive sur un sujet précis) de l’OMS classait les ondes des téléphones portables dans le groupe « 2B », interprété totalement différemment selon les commentateurs.

    En tout état de cause, le groupe 2 de la classification des champs électromagnétiques comprend les agents dont la cancérogénicité n’est pas parfaitement démontrée.

    ci-dessous une capture d’écran de l’article en question à lire aussi ici page 77 :

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    Nous sommes preneurs d’éléments de votre part, chers lecteurs, sans engager la polémique, mais pouvant nous permettre d’alimenter le débat et de nous éclairer sur la question. Vous pouvez déposer vos suggestions dans notre rubrique « contacter la rédaction« . Merci !

     

  • Les 5 étapes incontournables pour construire votre projet d’école numérique

    Les 5 étapes incontournables pour construire votre projet d’école numérique

    Ce sont trop souvent des investissements engagés par la collectivité, sans avoir consulté, ni impliqué les enseignants, et les services de l’éducation nationale, sans avoir étudié la configuration des établissements, ou encore sans avoir anticipé les problématiques de maintenance qui pourraient se présenter.

    Alors que faire ? Effectuer des appels à projets auprès des enseignants?

    Oui, mais d’expérience cette méthode reste très insuffisante car les enseignants ne sont qu’un maillon de la chaine et ne peuvent anticiper toutes les problématiques. Sans compter, qu’ils ne connaissent bien souvent que les équipements les plus notoires tels que les tableaux numériques interactifs ou les tablettes et ignorent les usages d’autres outils qui pourraient également soutenir leurs enseignements.

    Si vous souhaitez réellement, engager votre collectivité dans un investissement efficient, des usages pérennes et évolutifs, consacrez quelques semaines à une étude détaillée afin de comprendre les besoins et contraintes de chacun mais aussi d’impliquer chaque acteur dés le départ.

    Cela vous évitera, peut-être, des investissements qui n’auraient pas eu de raisons d’être et surtout vous permettra de définir en amont des critères de suivis pour une future généralisation, dans le cadre d’un plan pluri-annuel.

    Engager une étude certes, mais comment procéder ?

    Je vous livre ici les 5 étapes à respecter pour réussir votre étude préalable.

    Amotice_140114Créez votre Comité de Pilotage et organisez votre gouvernance en mode projet

    Un projet d’école numérique implique des compétences différentes, dispersées au sein de plusieurs délégations de la collectivité. Votre Comité de Pilotage réunira l’ensemble des acteurs impliqués, soit :

    1. Des responsables des services techniques et informatiques,
    2. Des responsables des services de l’Education et des Affaires scolaires,
    3. Des enseignants volontaires,
    4. Des représentants de parents d’élèves,
    5. Les élus éducation & jeunesse, TIC,
    6. Les représentants de l’Education Nationale (IEN et/ou animateur TICE)
    7. Les responsables du périscolaire.

    Organisez un audit des équipes pédagogiques, enseignants et animateurs périscolaires

    Amotice2_140114Evaluez et anticiper les besoins, les motivations, mais aussi les freins et les contraintes des élèves et des familles face aux usages numériques

    Rédigez et diffusez des questionnaires pour chacune de ces cibles et rencontrez-les, en particulier les enseignants volontaires de vos écoles en partenariat avec votre animateur TICE.

    A la suite de cela :

    – Analysez la fréquence et la nature de leurs usages informatiques et les raisons de leurs freins éventuels.
    – Anticipez leurs motivations effectives à s’approprier les outils, sont-ils prêts à consacrer le temps nécessaire pour se former et préparer leurs cours autrement ?
    – Appréhendez les problématiques pédagogiques rencontrées avec leurs élèves ? Vous pourrez ainsi par la suite définir les outils qui permettront de les soutenir dans leurs parcours pédagogiques et non le contraire !
    – Mesurez la motivation et les attentes des services périscolaires, en particulier leur implication à créer des contenus éducatif en continuité avec ceux du socle commun en vue d’une mutualisation des outils numérique. Ces actions faciliteront, entre autres, votre prochaine organisation dans le cadre de l’application de la réforme des rythmes scolaires.
    – Evaluez la motivation des parents vis-à-vis de vos projets.

    Diagnostiquez les configurations et les infrastructures de vos établissements scolaires Amotice3_140114

    – Prenez connaissance du plan de chaque établissement, puis visitez-les, pour observer leurs infrastructures architecturales, ou réseaux techniques ou informatiques
    – Evaluez vos marges d’évolutions selon les besoins d’équipements exprimés par les enseignants, anticipez la continuité de service pour éviter tout dysfonctionnement.

    Définissez les besoins de votre collectivité et arbitrez !

    Suite à votre audit, définissez vos scénarii d’Ecole Numérique :

    • Les hypothèses d’équipements et d’infrastructures, correspondant aux possibilités politiques, budgétaires, et organisationnelles de votre collectivité pour une efficience des usages.
      – Les besoins en formations fonctionnelles : la prise en main des matériels en amont des sessions de l’Education Nationale
      – Les modalités de maintenance : intervention à distance et/ou sur site
      – Anticipez la répartition des rôles entre la collectivité et les futurs prestataires pour préparer la mise en œuvre, et assurer la maintenance.
      – Arbitrez sur les choix d’utilisation du wifi dans les écoles, les différents lieux où seront sécurisés les matériels, etc.
      – Effectuez votre estimation budgétaire après avoir demandé des devis à vos revendeurs locaux. Parmi les postes de votre budget, figureront :
    • L’infrastructure : ralliement internet + câblage ou le CPL
    • Les équipements et outils numériques,
    • Les modules de formations fonctionnelles,
    • La garantie et la maintenance,

    Arbitrez, et lancez votre consultation !

    Amotice4_140114Soignez votre partenariat avec l’Education Nationale

    Les services déconcentrés de l’Education Nationale en charge du Numérique (Atice, DAN, IEN TICE) ont pour mission d’inciter les enseignants et les collectivités à développer les usages du numérique de façon transversale dans les établissements scolaires.

    C’est donc normalement un partenaire privilégié pour vous aider à “rentabiliser” vos investissements engagés et prévenir le gâchis d’argent public avec des usages efficients.

    Invitez donc votre animateur TICE et votre IEN à chacune de vos réunions de Comité de pilotage, relancez-les si besoin, pour qu’ils suivent votre projet, jusqu’à son terme.

    Dernier conseil surtout, rédigez vous-même une proposition de convention afin que soient intégrés les indicateurs de suivis qui vous permettront d’effectuer des bilans semestriels voir trimestriels de concert avec votre partenaire de l’Education Nationale.

    De nombreuses collectivités ont aujourd’hui construit l’architecture de leur école numérique ou certaines expérimentations grâce à ce schéma et en sont satisfaites.

    Et vous, dans quel contexte envisagez vous de développer le numérique dans vos écoles ? Partagez votre expérience en contactant Marie-France Bodiguian sur son blog…Cabinet AMO-TICE

     

  • L’écriture avec des tablettes et des ordinateurs est nécessaire à l’école

    L’écriture avec des tablettes et des ordinateurs est nécessaire à l’école

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    Dans notre culture, l’écriture est une étape importante pour le développement neuro-psycho-affectif de l’enfant.

    En apprenant à écrire, l’enfant complète son développement neurologique. Il doit mettre en place des capacités de coordination visuo-motrice très fine puisque les lettres doivent avoir une forme précise, être tracée dans un ordre déterminé, et veiller à ce que les lettres respectent un stricte alignement horizontal.

    Sur le plan psychologique, l’écriture soutient l’abstraction, la généralisation, et la spatialisation. L’écriture rompt avec le monde de l’oralité et introduit l’enfant au monde de la « raison graphique » (J. Goody)

    Sur le plan affectif, l’apprentissage de l’écriture est une lente appropriation d’un élément fortement investi par les adultes. Pour l’enfant, l’écriture est donc associée à son désir d’identification aux grandes personnes, et à l’estime de soi.

    Jusqu’il y a peu de temps, l’écriture était associée au dispositif papier- crayon (ou ardoise-craie).  Les tablettes et les ordinateurs sont aujourd’hui utilisés banalement pour écrire, et la question de leur introduction à l’école se pose de plus en plus.

    Souvent, cette introduction est pensée en termes antagonistes : l’écriture numérique est opposée à l’écriture papier-crayon. Les discussions sont souvent nimbée d’un halo de nostalgie qui idéalise l’écriture sur le papier. On oublie alors que l’abandon de la plume sergent-major a été vécue comme un drame et présentée dans des termes qui sont ceux du débat actuel sur les dispositifs numériques.

    Les enseignants savent l’importance de l’écriture en termes d’intégration de l’image du corps. Les bonnes performances en copie sont associés aux compétences visuomotrices (Weil & Cunningham Amundson, 1994). Par ailleurs, l’écriture a des effets d’entrainement sur ces capacités. Il y aurait donc une sorte de cercle vertueux de l’écriture qui tirerait les enfants vers le haut.

    Mais l’écriture peut également être un cercle vicieux, entrainant l’enfant toujours plus bas dans la mésestime de soi.

    En effet, trop souvent l’école identifie l’écriture à l’élève. Un bon élève aura une bonne écriture, et une bonne écriture sera le fait d’un bon élève. Pour les élèves qui écrivent « mal » , ce rapport a des effets gravement inhibant. Puisque écrire bien est le signe d’une bonne pensée, cela signifie qu’ils pensent mal ou que leur pensées ne sont pas bonne a partager. La rature et la réécriture sont insuffisamment valorisées à l’école, et sont compris comme des échecs, alors que ce sont des traductions des aller-retour et des hésitations de notre pensée.

    Pour les élèves en mal d’écriture, l’encre numérique peut être salutaire.

    Les tablettes et les ordinateurs portables mettent enfin les plaisirs du travail de l’écriture à portée de main. Pour les forçats de l’écriture manuscrite, pour ceux qui doivent se concentrer sur la taille de la lettre, leur rattachement à la lettre suivante, l’espacement des mots, l’encre numérique est une bouée de sauvetage. Ils n’ont plus à se soucier de savoir si leur ligne d’écriture tombe mollement vers un coin de la feuille, ou si elle décolle irrépressiblement vers le haut. Il leur reste à gérer la seule question importante : les idées. Leurs idées.

    Pour les élèves qui ne sont pas en difficulté, le bénéfice est également important puisqu’ils bénéficient d’un support d’écriture supplémentaire. Il peuvent passer des plaisirs de la page blanche aux plaisirs de l’écran blanc.

    L’intérêt de l’écriture numérique est connu depuis Sketchpad. Les dispositifs numériques permettent d’écrire et de réécrire mille fois un texte. Elle libère de la culpabilité de la tâche et de la rature. Elle permet de se lancer dans les plaisirs de l’écriture. Sa fluidité la rend plus proche de la manière dont nous pensons. En ce sens, elle allège la pensée.

    Mais la capacité de sauvegarde rend également les choses moins futiles. Par sa fonction de mémoire, l’écriture numérique « aggrave » la pensée. En d’autres termes, l’écriture numérique est l’écriture tout court, et c’est pour cela qu’elle devrait être proposée à l’école.

    Que l’on s’entende bien. Les outils numériques ne sont pas une panacée. Ils posent des questions et des problèmes inédits. Par exemple, puisqu’il est facile d’écrire et d’effacer, il devient plus facile d’écrire n’importe quoi.

    En d’autres termes, si la culpabilité peut être stérilisante avec un papier et un crayon, son absence devient tout autant problématique avec un dispositif numérique puisque les pensées peuvent être insuffisamment filtrées.

    Le second problème correspond à ce que j’appelle la tyrannie de l’idéal. Les mondes numériques sont des mondes de la perfection. Les possibilités d’ajustement sont si nombreuses, si précises, que l’on peut perdre beaucoup de temps a tenter d’atteindre la perfection. Concrètement, cela signifie que l’élève procrastinera pour savoir s’il mettra Helevetica 12 bleu ou Georgia 11 noir. En d’autres termes, il perdra de vue le contenu en donnant trop d’importance au contenant.

    Un autre argument en faveur de l’écriture électronique à l’école est qu’elle est tout simplement inévitable.

    Les enfants qui arrivent à l’école ne sont pas vierge de toute écriture. Il existe une pratique enfantine de l’écriture qui ne dépend pas de l’école Les pédagogues apprennent cette écriture « inventé » ou « approchée » selon l’importance que l’on donne à l’écriture adulte comme modèle. Cette écriture s’appuie sur des désirs d’identification de l’enfant aux parents. Or, que voient les enfants aujourd’hui ? Sur quoi écrivent leurs parents ? Comment donnent-ils des nouvelles à leurs proches ? Ou écrivent-ils les listes des commissions ?

    Dans un monde où le mail a remplacé la carte postale et le smartphone le bout de papier, va-t-on demander encore longtemps aux enfants d’écrire à la main ? Va-t-on demander aux enfants d’être les conservateurs d’un musée que les adultes ont déserté ? Puisque la culture est devenu numérique, va-t-on encore longtemps éloigner les enfants du numérique ?

    N. B. Bien évidement, les tablettes et les ordinateurs coûtent cher. On peut donc penser que c’est une question d’équité que de ralentir leur introduction à l’école. J’aurais plutôt tendance à penser que c’est le meilleur moyen de maintenir d’inégalité.
    Les enfants de milieu favorisé auront de toute façon chez eux des ordinateurs et des tablettes. Les autres n’auront pas ce que l’école aurait pu leur apporter : une occasion de pallier un mauvais jet de dés de la société.

    Par ailleurs, la question de l’inéquité n’est qu’une question de temps. Il ne fait pas de doute que des tablettes et des ordinateurs a 100 euros seront bientôt courants. Que cherchera-t-on alors comme excuse ?

    Article de Yann Leroux à lire ici : psychologik.blogspot.fr

  • « Il devient à la fois possible et nécessaire, grâce au numérique, d’enseigner autrement »

    « Il devient à la fois possible et nécessaire, grâce au numérique, d’enseigner autrement »


    Vous trouverez sur le site du ministère le compte rendu de l’installation du Conseil, la liste de ses membres, la lettre de mission, les premières commandes passées par le ministre et des schémas explicatifs de son fonctionnement et notamment le calendrier de ses travaux, ci-dessous.

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    On le voit, les travaux du CSP sont progressifs, très progressifs, même s’il travaille d’emblée sur l’intégralité de l’école du socle, de la maternelle au collège. Les éditeurs sont-ils la cause de l’application lente, année après année, des nouveaux programmes — voir en marge, à droite ? On attend bien sûr d’eux les merveilleux manuels innovants qui ne seront, cela va de soi, que numériques.

    Est-ce-ce pourtant bien utile d’attendre leurs productions quand on observe que nombreux sont, dans toutes les disciplines, les professeurs qui élaborent, à partir de ressources diverses, gratuites, libres, payantes… les manuels dont ils ont besoin et qu’ils utilisent ? Et que penser de l’absence de toute réflexion encore sur les programmes du lycée dont les mises à jour sont remises aux calendes grecques ? Faudra-t-il encore longtemps subir ce baccalauréat inadapté ? Faudra-t-il continuer longtemps encore à installer dans les salles d’examen des détecteurs de smartphones ?

    Invité à évoquer la stratégie du CSP à Bordeaux à l’occasion des « Boussoles du numérique », Alain Boissinot, trop occupé par le lancement des travaux, a dû renoncer. Il a pourtant bien voulu m’accorder une interview, le 27 novembre dernier, dans les locaux du CSP à Vanves.

    Vous en trouverez ci-dessous la captation vidéo (les moyens techniques sont ceux de la Maison départementale de l’éducation du Val-d’Oise, merci à eux) et la transcription intégrale.

    M. G. : M. le président, le ministre Vincent Peillon vous a confié la mission de présider ce Conseil supérieur des programmes avec une lettre de mission lourde et importante et vous a passé commande d’un certain nombre de chantiers. Si j’ai bien compris, en 2014, vous allez travailler sur les programmes de maternelle…

    Alain Boissinot : Entre autres choses, oui, tout à fait… Les commandes que le Conseil supérieur des programmes a déjà reçues du ministre portent essentiellement sur la maternelle et sur la scolarité obligatoire, l’élémentaire et le collège.

    Donc ça implique de redéfinir les missions de l’école maternelle — il y a une grande attente à l’égard d’un nouveau texte —

    ensuite l’école primaire, le collège avec une organisation d’ensemble en trois nouveaux cycles, et puis la redéfinition du socle commun également qui pose un certain nombre de problèmes, l’évaluation notamment. Donc ça fait un vaste chantier…

    M. G. : Donc, parallèlement, si j’ai bien compris, seront menées des investigations sur les programmes des collèges…

    Alain Boissinot : Tout à fait. Le socle commun couvre l’ensemble de la scolarité obligatoire et, en parallèle et en même temps, parce que l’objectif c’est justement d’articuler la définition du socle commun et les programmes d’enseignement, on va travailler dans les semaines qui viennent sur les programmes de l’école primaire et les programmes du collège.

    M. G. : Et plus tard viendra le lycée ?

    Alain Boissinot : Et dans un deuxième temps, viendra le lycée mais, pour le moment, on a déjà fort à faire…

    M. G. : Notre propos aujourd’hui est centré sur le numérique et la place importante qu’il prend maintenant dans la société et les pratiques des jeunes en particulier. L’école ne peut pas y échapper. Puisque la question d’enseigner avec le numérique ne semble plus se poser, comment pensez-vous que les programmes puissent prendre en compte l’enseignement du numérique ? Certains pensent à une nouvelle discipline…

    Alain Boissinot : Alors la question est vaste et il y a plusieurs facettes.

    Première remarque : moi, j’ai une conviction, c’est qu’on arrive à un moment où, en effet, les pratiques du numérique se développent dans les classes et où on est en mesure de franchir un seuil, à condition d’en tirer toutes les conséquences. Et là, c’est la responsabilité de l’institution, c’est-à-dire qu’on ne peut plus laisser simplement les choses se faire empiriquement sur le terrain mais il faut qu’on voie comment on accompagne ce développement. Alors ça pose un certain nombre de questions auxquelles la dernière loi de refondation de l’école tente d’apporter des éléments de réponses.

    Premièrement, il faut coordonner ce développement du numérique, l’organiser, fournir des outils ou aider à ce que les outils se développent, c’est le rôle du service public du numérique éducatif

    qui est un enjeu, je crois, important sur lequel travaille mon amie et collègue Catherine Bizot et je crois que ça permettra de mettre en synergie beaucoup de choses qui, de fait, sont en train de se développer sur le terrain. Mais on franchira un cran de plus et surtout l’institution pourra aider à ce développement.

    Et puis, la deuxième condition essentielle, c’est qu’effectivement il faut qu’on tire toutes les conséquences dans la définition des programmes et là on en vient aux missions du Conseil, des différents outils, des différentes pratiques que permet le numérique. Et je crois qu’il faut insister sur le fait que le nouveau Conseil supérieur des programmes qui débute donc ses travaux a un champ d’activités que le ministre a souhaité large, de ce point de vue, puisque contrairement aux Conseils qui avaient existé dans le passé, son décret de création comme la loi d’ailleurs elle-même de refondation de l’école, prévoient explicitement que le Conseil est légitime pour s’intéresser non seulement aux programmes, au sens le plus traditionnel du terme, c’est-à-dire les contenus d’enseignement, disons, mais aussi aux pratiques pédagogiques mises en œuvre et notamment à tout ce que permettent les nouveaux outils comme le numérique, et de la même façon, le Conseil est invité à s’intéresser à l’évaluation, ce qui est point tout à fait essentiel, et à la formation des maîtres.

    Donc il s’agit de tenter de couvrir toute la chaîne, les contenus d’enseignement, certes, mais aussi la formation des enseignants qui est au moins aussi importante que la définition des programmes et puis les outils qu’ils mettent en œuvre.

    Donc on va effectivement se poser le problème du numérique. De ce point de vue et par rapport à votre question, et en essayant d’aller à l’essentiel, il me semble que le sujet n’est pas d’enseigner le numérique en tant que tel ou de créer une nouvelle discipline — bon, on peut en débattre — mais ça n’est pas cela l’essentiel du problème.

    Le problème, il est sur deux points. Il est comment revivifier l’ensemble des enseignements actuels dans les différents domaines disciplinaires par le numérique, puisque le numérique n’est pas simplement un outil et il ne s’agit pas simplement de passer du tableau noir au tableau interactif, ça n’est pas uniquement une modification au niveau de l’instrumentation de l’enseignement, ça met en cause les pratiques, les contenus d’enseignement mêmes, et ça, il faut qu’on s’interroge là-dessus. Qu’est-ce que le développement du numérique fait bouger en français, en éducation morale et civique, en économie pour permettre d’une part de mieux enseigner ces différentes disciplines, et d’autre part pour faire en sorte que ces disciplines contribuent à rendre les élèves plus experts, à la fois en réception de tout ce qui relève de la communication par le numérique, mais aussi en matière de création ?

    Ma collègue Catherine Bizot y insiste beaucoup et à juste titre : il faut que les apprentissages des élèves aillent dans les deux sens, non seulement des consommateurs de numérique mais aussi, dans un certain nombre de domaines, des créateurs d’informations, des diffuseurs d’informations. Donc il faut que tous les programmes de toutes les disciplines témoignent de cette réflexion-là et la prennent en compte.

    Et puis il y a un deuxième axe : c’est que nous devons nous interroger sur tous les déplacements pédagogiques qu’induit le numérique c’est-à-dire sur le fait qu’il devient à la fois possible et nécessaire, grâce au numérique, d’enseigner autrement.

    Le numérique, ça modifie les conditions d’accès à l’information. Certains poussent alors assez loin le trait mais peut-être ont-ils raison d’ailleurs, en parlant de pédagogie inversée — je pense aux travaux de Michel Serres, je pense à beaucoup d’autres témoignages en ce sens — qui disent, par exemple, au fond, à l’origine le rôle du maître c’était d’apporter des informations, et puis ensuite les élèves se débrouillaient à partir de ce qu’on appelait le fameux travail personnel de l’élève, à l’école ou à la maison. Eh bien au fond, est-ce qu’on n’est pas en train de vivre par rapport à ça une révolution copernicienne ?

    L’apport d’information se fait maintenant autrement que par le maître, très largement, et donc le rôle du maître doit se repositionner, aux côtés de l’élève pour l’aider à maîtriser cette masse d’informations, pour l’aider à construire à partir de là des compétences et des connaissances. Et ça, ça déplace aussi évidemment les programmes, puisque les programmes traditionnels définissaient d’abord historiquement une somme de compétences qu’on était supposé décerner aux élèves, eh bien là il faut aussi que les programmes tirent aussi les conséquences de cette évolution rendue possible par le numérique et définissent sans doute davantage des progressions permettant aux élèves de construire progressivement leurs connaissances et leurs compétences. C’est tout ce champ qui est devant nous, il faut qu’on essaie de tenir à la fois toutes les pièces du puzzle pour, comme je le disais tout à l’heure, au fond, franchir ce point critique auquel nous arrivons actuellement.

    M. G. : Deux autres points, si vous le voulez bien. Vous avez peut-être entendu parler de François Taddéi, qui est enseignant-chercheur en biologie à Paris-Descartes, qui a créé et dirige depuis 2005 un Centre de recherches interdisciplinaires qui fait se croiser, se rencontrer les disciplines. Ce à quoi il croît, c’est que le numérique, justement, permet des échanges, des passerelles nombreuses entre ces dernières. Comment les programmes, qui seront peut-être définis discipline par discipline, peuvent-ils permettre ces passerelles ? Les champs disciplinaires sont-ils définitivement cloisonnés ou pourra-t-on ouvrir des espaces communs ou de la transversalité ?

    Alain Boissinot : Cette question du cloisonnement, des champs disciplinaires est une question qui, au demeurant, se posait avant le numérique. Il y a longtemps que de bons esprits s’interrogent sur les limites du cloisonnement excessif des disciplines et sur le risque de segmentation et de saupoudrage des savoirs. Il y a des expériences, je pense à l’enseignement intégré des sciences et de la technologie au collège, qui cherchent déjà à remédier à ça.

    Bien évidemment, c’est une des questions qui est devant nous et qui a déjà été rencontrée aussi à propos de la définition du socle commun. Lorsqu’on s’interroge sur les compétences que les élèves doivent acquérir pendant la scolarité obligatoire, on rencontre un certain nombre de compétences transversales, comme on dit, qui relèvent de différents champs disciplinaires et pas simplement d’une matière parmi d’autres. Donc on est amené à se reposer la question de ces acquisitions transversales, de ces relations interdisciplinaires et, sans doute — alors, au niveau de l’école primaire, c’est une idée qui est en général bien acceptée puisqu’elle relève de la polyvalence du maître, au niveau du collège, c’est plus difficile —

    il faudra sans doute essayer de travailler sur cette notion de transversalité plus grande des apprentissages. Et c’est vrai que là, le numérique devrait être un facilitateur dans cette approche,

    parce que, en mettant à disposition des élèves, d’une part des connaissances très nombreuses et très diverses et, d’autre part, des outils et des pratiques qui, par définition, sont transversales, qui ne sont pas propres à telle ou telle discipline, le numérique aide à construire des démarches complexes, à mettre l’élève face à un projet global, face à une problématique globale, et à aller chercher des ressources dans tel ou tel domaine disciplinaire.

    Donc, là encore, le travail, de mon point de vue, c’est de tenter de mettre en synergie les perspectives qu’on se donne en matière d’acquisition de connaissances, une démarche […] des savoirs et la mise en œuvre d’outils qui, effectivement, permettent de développer des pratiques nouvelles et, elles-mêmes, moins cloisonnées que les pratiques antérieures.

    Au fond, tout ça doit relever d’évolutions non pas en parallèle, mais d’une même évolution globale et qui, à certains égards, est un peu un changement de paradigme au sein du système éducatif. C’est une nouvelle logique qui est en train de se développer qui devrait d’ailleurs aussi permettre d’aborder différemment la question du temps scolaire, la différence entre le travail que l’élève fait pendant la classe, le travail qu’il fait dans ce qu’on appelait les CDI et le travail qu’il fait à la maison, cette différence, elle s’estompe par rapport au cadre traditionnel.

    De même, le temps de la classe et le temps que l’élève va passer devant son ordinateur et on sait qu’il devient de plus en plus important, ces temps-là, ils vont se rencontrer, ils vont se croiser au moins partiellement. Donc les cadres traditionnels de l’enseignement, le temps, l’espace, le cadre de la classe, tout ça est remis en cause à travers ces évolutions et le problème, c’est de tenter de faire en sorte que ça ne donne pas le sentiment d’une crise des apprentissages traditionnels ou d’une dispersion des élèves mais que ça débouche sur de nouvelles démarches cohérentes. Et les nouveaux programmes, tels que nous avons, me semble-t-il, à les penser, doivent intégrer toutes ces dimensions-là. C’est vraiment cela l’enjeu qui est devant nous.

    M. G. : Si vous me permettez un prolongement, M. le président, est-ce que la formation des maîtres n’est pas là un enjeu très important de ce décloisonnement, de cette ouverture-là ? Il y a quand même un certain nombre de barrières historiques, dans ces instituts de formation des maîtres, appelées aujourd’hui ESPE…

    Alain Boissinot : Oui, tous les rapports montrent, et d’une certaine manière, c’est évident, que la formation des maîtres est au moins aussi importante que l’élaboration des programmes à proprement parler. On peut faire les meilleurs programmes que l’on veut, que l’on souhaite, si ils ne sont pas acceptés par des maîtres qu’on a aidés à les mettre en œuvre, ils ne serviront pas à grand-chose. La formation des maîtres est un enjeu essentiel, le Conseil supérieur des programmes, de par son décret de création, est d’ailleurs invité à faire des suggestions en ce sens, et je crois que c’est en effet très important que la réflexion sur les programmes et la réflexion sur la formation des maîtres se rebouclent et ne soient pas menées en parallèle.

    Donc bien évidemment, il faudra que ces questions-là soient traitées dès la formation des maîtres.

    Je suis peut-être trop optimiste mais, malgré tout, ceux qui sont actuellement recrutés, les jeunes qui sont recrutés actuellement, pour devenir enseignants sont tous des jeunes de la génération du numérique et ils ont, de ce point de vue-là une culture qui est probablement plus proche de celle des élèves que de la culture de leurs aînés donc on peut penser qu’ils entreront assez volontiers dans ces logiques-là et il faut qu’on se donne les moyens de les aider en termes de production d’outils et aussi en termes de perspectives pédagogiques, de définition des épreuves d’examens.

    Par exemple, à l’heure du numérique, les procédures d’évaluation que l’institution prévoit dans les différents examens doivent, me semble-t-il, évoluer. On n’évalue pas l’orthographe de la même manière à l’époque du correcteur d’orthographe, on n’évalue pas la géographie de la même manière quand Google permet de repérer tous les sites du monde et de les regarder en relief sur l’écran de l’ordinateur. Donc il faut intégrer dans les contenus d’enseignement, dans les pratiques d’enseignement, dans les méthodes d’évaluation… Là encore, ce sont des déplacements professionnels.

    On a déjà connu ça, d’une certaine manière, quand les mathématiciens ont dû prendre en compte les effets de la présence des calculatrices entre les mains des élèves et dans les salles de classe, ça les a amenés à redéfinir ce qu’était, par exemple, l’évaluation en mathématiques et, évidemment, les épreuves de mathématiques maintenant ne sont plus de même nature que ce qu’elles étaient autrefois. Je crois que, toutes choses égales d’ailleurs, il faudra aider les enseignants à imaginer des pratiques professionnelles, des pratiques d’évaluation qui tiennent compte des nouveaux outils.

    M. G. : Ma dernière question porte, de manière plus pratique, sur les conseils que vous pourriez donner aux enseignants qui sont confrontés aujourd’hui à des difficultés. Les corrections des devoirs sont maintenant disponibles en ligne, sur des sites où l’élève paie un ou deux euros pour y avoir accès, sans d’ailleurs que le maître le sache et sans qu’il puisse vérifier les sources des travaux personnels faits à la maison. Comment faire ?

    Alain Boissinot : Je ne sais pas si j’ai des conseils à donner mais je peux comme tous les enseignants réfléchir sur les évolutions qui vont se mettre en place. Je crois qu’il y a des facettes traditionnelles du métier qui vont, effectivement, perdre de leur importance. Il est clair que la notion de contrôle de connaissances n’a plus la même signification lorsque les connaissances sont, à condition de savoir un tout petit peu s’y prendre, aisément disponibles en ligne. C’est ce que raconte quelqu’un comme Michel Serres qui dit

    « Autrefois, quand je commençais un cours devant mes étudiants, je me demandais : “qu’est-ce qu’ils ne savent pas et que je dois leur apprendre ?” et maintenant je me demande : “mais qu’est-ce qu’ils savent déjà et que je ne dois surtout pas répéter parce que je vais les ennuyer ?” ».

    Alors ça, c’est vrai pour tout le monde, c’est-à-dire un enseignement conçu d’abord comme transmission de connaissances puis ensuite comme contrôle de l’acquisition de ces connaissances, il est effectivement remis en cause par les nouveaux outils. Mais je ne crois pas qu’il faille le regretter, je crois que ça déblaie le terrain précisément pour des activités professionnelles qui seront d’autant plus intéressantes. L’exemple de l’enseignement du français : on prendra peut-être moins de temps pour vérifier la notice biographique de tel ou tel écrivain, et je ne suis pas sûr qu’il faille le regretter, en revanche on aura davantage de temps, par exemple, pour accompagner les élèves dans des travaux de production de textes, des travaux d’écriture.

    On peut, grâce au traitement de texte, grâce au numérique, faire des choses extrêmement intéressantes en matière de suivi des corrections d’un texte, d’élaboration progressive d’un texte plus achevé, voilà, de nouvelles pratiques deviennent possibles qui, effectivement, vont occuper un espace, un temps qui sont libérés par rapport aux pratiques anciennes.

    Alors tout cela modifiera sans doute les facettes de nos disciplines, je ne crois pas que ça soit du tout un déclin, je crois qu’au contraire, ça leur permet d’aller au cœur de pratiques plus intéressantes et plus riches que les pratiques traditionnelles. En tout cas, c’est notre responsabilité que d’essayer d’imaginer ces nouvelles pratiques d’enseignement.

    M. G. : Je termine, M. le président. Il y a pourtant, me semble-t-il, une sorte de collision entre les programmes, tels qu’ils sont, et ces nouvelles pratiques qui commencent à se développer. Il y a un vrai hiatus, de vraies difficultés que vivent au jour le jour les professeurs… 

    Alain Boissinot Alors il y a sans doute en effet un hiatus entre la logique ancienne qui continue à fonctionner y compris, c’est vrai, dans la lettre des programmes, même si ils ont cherché à évoluer, et puis les pratiques qui se développent quotidiennement dans les classes.

    Alors je crois qu’à ça il faut répondre de deux manières : d’abord il faut en effet que nous ayons une réflexion pour faire évoluer les programmes et nous allons le faire et c’est bien le sens des missions qui ont été confiées au Conseil supérieur des programmes. Mais il y a un autre niveau de réponse. Je crois que, de même que nous sommes sortis d’un certain nombre de pratiques traditionnelles, nous sommes aussi sortis d’une logique où l’institution pouvait prétendre fixer depuis la rue de Grenelle, en ayant consulté quelques experts, si compétents soient-ils, l’ensemble des pratiques pédagogiques que devaient mettre en œuvre tous les enseignants de France. Je crois qu’il faut apprendre à être, certes clairs sur les grands objectifs parce que tout le monde en a besoin, mais en même temps un peu plus modestes sur le détail de leur mise en œuvre, et il faut apprendre, et ça aussi les nouveaux outils y insistent, à faire confiance à un travail plus horizontal comme on dit quelquefois, plus en réseau, à laisser un espace de créativité aux enseignants, un espace d’adaptation par rapport aux objectifs qu’on leur propose et, au fond, permettre au système de s’adapter, de se réguler lui-même davantage au niveau des pratiques professionnelles des équipes pédagogiques.

    Je crois que c’est aussi un enjeu qui est devant nous. L’époque où le ministre pouvait décider du jour et de l’heure à laquelle tous les élèves de France feraient leur dictée, elle est décidément bien terminée et c’est là aussi une nouvelle logique sur laquelle nous réfléchissons beaucoup au début de nos travaux, au Conseil supérieur des programmes : comment trouver le bon équilibre entre ce qui doit être défini au niveau national parce que c’est l’expression d’une volonté collective, parce que c’est un facteur d’unité auquel tout le monde est attaché, et ce qui doit être laissé à l’initiative des équipes pour permettre une adaptation suffisamment fluide, suffisamment rapide aux évolutions des mœurs, des idées et des techniques.

    M. G. : Je vous remercie, M. le président.

     

    Source : Michel Guillou @michelguillou, blog http://gingko.neottia.net

  • Le Numérique, porte de sortie au débat sur la réforme des rythmes scolaires ?

    Le Numérique, porte de sortie au débat sur la réforme des rythmes scolaires ?

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    Par le manque de visibilité sur les coûts qu’entraîne cette réforme, ainsi que par l’absence d’évaluation de son efficacité dans la lutte contre l’échec scolaire, les maires et l’ensemble des services des villes ne savent plus où donner de la tête sur ces fameuses activités périscolaires, supposées créer de la continuité éducative entre le scolaire et le périscolaire.

    Pourquoi ne pas généraliser ce qui fonctionnait déjà ?

    Qui dit continuité éducative entre scolaire et périscolaire tel que loi sur la refondation de l’école le suggère, dit inévitablement approfondissement des apprentissages du socle commun des connaissances au-delà des murs de la classe.

    Ce qui suppose bien sûr, un véritable partenariat entre l’Education Nationale et la ville afin de synchroniser les actions ludo-éducatives des services périscolaires avec les contenus pédagogiques des enseignants, seuls à décider du tempo et à donner le « la ».

    Or c’est justement ce partenariat qui a fait défaut dans une grande majorité des villes où ont été mis en place les nouveaux rythmes scolaires, qui ne bénéficiaient pas initialement d’une politique de continuité éducative entre le scolaire et le périscolaire.

    D’expérience le numérique constitue justement un formidable levier de continuité éducative entre le scolaire et le périscolaire, en favorisant le flux des contenus et le dialogue entre les services et  l’Education Nationale et la ville.

    C’est ce que l’on observe en particulier dans les villes, qui dans le cadre d’une mutualisation des outils, ont choisi de privilégier la formation des animateurs et la mise en œuvre d’un partenariat suivi entre l’Education Nationale et la ville.

    A Issy les Moulineaux par exemple, l’usage d’un espace numérique collaboratif partagé entre l’équipe enseignante et le périscolaire a été expérimenté dans une école entre février et juin 2012, pour être étendu à plusieurs écoles depuis septembre 2012. Cet espace numérique d’échanges intègre les partenaires associatifs naturels de la ville, qui œuvrent dans le cadre des animations périscolaires : développement d’un serious game, atelier d’écriture, animation numérique suite à la visite d’un musée avec la classe grâce à l’usage d’une mallette de balado-diffusion, etc.

    A Angers, on mutualisait déjà les équipements numériques entre le scolaire et le périscolaire avant la réforme. A l’école élémentaire Isoret, en particulier où avait été maintenu le rythme des 4 jours ½, l’un des projets d’école était de suivre un coureur du Vendée Globe.
    Ce projet permettait, entre autres, dans le cadre des objectifs pédagogiques, de faire travailler en groupe les enfants sur l’expression écrite et parlé : concevoir en équipe un message et savoir l’exprimer. En parallèle, afin d’animer ce projet, les enfants ont participé sur le temps périscolaire à la fabrication d’un bateau, conçu au départ avec les outils numériques de l’école.

    Dans une autre école de la ville, certaines applications sur tablettes vont permettre, pendant les activités périscolaires, la création d’une pièce de théâtre.

    Ce ne sont malgré tout que des aménagements autour de l’organisation scolaire et périscolaire. Mais est-ce suffisant pour lutter contre l’échec scolaire ? En effet, l’urgence est bien là et nos résultats à l’étude PISA 2012 nous l’ont encore tristement démontré cette semaine.

    Réussite scolaire : adieu la réforme, vive le soutien pédagogique par le numérique !

    Ainsi, mettre en place une réforme des rythmes scolaires, entre scolaire et périscolaire, et ainsi miser essentiellement sur une optimisation de la concentration des élèves le matin quand les heures de cours et les temps d’apprentissages ont été raccourcis depuis des années,  les vacances rallongées,  est-ce là la véritable solution pour lutter contre l’échec scolaire ?

    Alors que faire ?

    Que faire face à des pays où les enfants réussissent non pas grâce à des rythmes mais à des temps d’apprentissages, qui ne sont pas réduits au temps passé entre les murs de l’école ?

    Pourquoi inciter à ce point les communes à investir dans des activités périscolaires qui ne permettront pas à nos enfants de devenir meilleurs, quand les besoins en outils et en formation à la pédagogie numérique pour les enseignants permettraient justement de donner à nos enfants la chance d’apprendre mieux en cours grâce à la pédagogie différenciée et au-delà des murs de l’école ?

    Quand les chronobiologistes parlent d’organiser non pas les rythmes mais les temps de l’enfant, les outils numériques, s’ils sont bien encadrés par les enseignants, l’accompagne partout où il se trouve avec des apprentissages potentiellement ludiques et efficaces tout au long de ses temps de vie.

    Avec les outils et ressources numériques, l’enfant n’est pas mis en situation d’échec et de censure, comme il peut l’être en cours : une évaluation formative et des pratiques complémentaires, qui, pour reprendre les mots de Claire Leconte, chronobiologiste, « permettent de minimiser les fluctuations de l’attention ainsi que la fatigue inhérente à l’ennui ou l’angoisse de ne pas savoir faire ».

    Une récente évaluation établie par le collectif des maires contre la réforme des rythmes scolaires a estimé à près d’un milliard et demi d’euros le coût de cette réforme. Comme le souligne Jean-Michel Fourgous maire d’Elancourt et coordinateur du collectif : «A choisir, il aurait mieux fallu affecter ce budget à un grand plan de formation des enseignants pour améliorer et moderniser la pédagogie, avec des outils numériques, et surtout changer l’organisation pédagogique des enseignants, à l’image de ce que pratique des pays scandinaves, dont le niveau des élèves est aujourd’hui incontesté (étude Pisa) »

    Et vous, qu’en pensez-vous ? Réagissez en laissant votre commentaire en bas de page.

    Article rédigé par Marie-France Bodiguian, Cabinet AMO-TICE

  • 25 recommandations pour aider les parents à « faire apprendre » les technologies aux enfants

    25 recommandations pour aider les parents à « faire apprendre » les technologies aux enfants

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    « Comment protéger son enfant », « comment interdire l’accès à son enfant », etc.

    « Aujourd’hui on parle trop de sécurité et pas assez d’autres éléments qui me semblent importants », déclare Thierry Karsenti.

    « Je pense fortement qu’il y a une fracture numérique qui se dessine chez nos jeunes et ce, quelque soit le niveau de vie économique ».

    Il parle de fracture numérique de « 2ème » niveau, c’est à dire que tous les jeunes d’aujourd’hui savent se servir du numérique, mais, alors que certains utilisent les technologies pour apprendre, d’autres, s’en servent uniquement pour socialiser ou pour jouer.

    C’est de ce constat que lui est venu l’idée de « faire des recommandations » pour les parents ; et le premier lot issu de sa réflexion est « comment puis-je aider mon enfant à apprendre avec les technologies ? » de l’éducation aux médias en quelque sorte.

    Un extrait de ce premier lot est :

    « Il faut s’informer des technologies présentes dans notre société, tout particulièrement celles populaires auprès des jeunes ».

    « Il faut amener son enfant à développer un esprit critique et constructif face aux technologies et à Internet ».

    La deuxième partie de la liste de recommandations est liée à l’importance d’ouvrir un dialogue avec son enfant vis à vis de ces technologies « afin de trouver un juste équilibre entre technologies ou pas de technologies du tout, quand les utiliser, les moments avec ou sans technologies » :

    « Il faut planifier, de façon collaborative avec son enfant, des règles précises d’usages ».

    « Il faut parler de technologies à d’autres parents ou amis qui ont un enfant du même âge ».

    Et enfin, le troisième lot parle de sécurité, de prévention, de cyber-intimidation.

    « Il faut parler à son enfant de cybe-rintimidation à la fois pour prévenir mais aussi pour agir ».

    « Il faut amener son enfant à être responsable de ce qu’il fait ou ne fait pas avec les technologies ».
    Plus d’infos :

    Retrouvez toutes les recommandations de Thierry Karsenti sur http://karsenti.ca/25/

     

  • Les tablettes hybrides, la solution pour l’Ecole ?

    Les tablettes hybrides, la solution pour l’Ecole ?

    La tablette fait la « une » et occupe toutes les conversations. Michèle Monteil, qui fut en charge du suivi des expérimentations tablettes à la DGESCO, argumente sur la question « la tablette peut-elle vraiment détrôner l’ordinateur en classe ? » et nous apporte quelques pistes de réflexion.

     

    Faciliter l’appropriation de l’outil par l’enseignant

    « Donner un outil comme celui-ci à un enseignant impacte sa vie professionnelle; cela va modifier sa manière d’enseigner. Il est donc absolument nécessaire qu’il se sente à l’aise avec l’outil qu’on lui propose ».

    « Se sentir à l’aise » avec l’outil : c’est la clé de la réussite de l’intégration du numérique en classe, d’après Michèle Monteil. En effet, un outil accepté par l’enseignant, va lui permettre d’être rapidement opérationnel, d’être efficace, créatif et donc de motiver aussi ses élèves.

    Ce qui est récurrent, c’est d’entendre des enseignants qui font le constat de la motivation des élèves au contact d’un nouvel outil numérique en classe.

    Pour Michèle Monteil c’est un « non-argument ».

    « C’est vrai que la motivation peut durer plusieurs mois parfois même 1 an mais on s’aperçoit à chaque fois qu’il y a une habitude et que la motivation n’est pas ce qui va vraiment changer les choses dans la classe. Ce qui va changer les choses, c’est la façon dont l’enseignant va susciter l’intérêt de ses élèves ».

    Après avoir visité beaucoup de classes dans lesquelles il y avait un usage pertinent de tablettes, elle constate que ce n’était pas la tablette qui était extraordinaire mais que c’était l’enseignant.

    On comprend dans la remarque de Michèle Monteil que l’outil n’est « pas pour grand chose » dans la réussite de l’introduction du numérique en classe ; tous les outils que l’on dit aujourd’hui dépassés ont été vecteurs de séquences parfois très innovantes et même modélisantes ; par contre, si la prise en main est plus ou moins facilitée, le contenu et la conception de cet outil peuvent conditionner son appropriation par l’ensemble des enseignants. Ce n’est pas l’objet technologique mais l’enseignant qui va vraiment faire la différence.

    On peut juger de l’adaptation de l’outil à sa transparence c’est-à-dire quand l’enseignant enseigne sa discipline plutôt qu’il ne « fait de l’ordinateur ou du TNI ou de la tablette ».

    Aujourd’hui, y a t-il sur le marché des produits qui répondent à ces exigences ?

    Les tablettes qui s’installent peu à peu dans le paysage des classes doivent être prises en main par les enseignants mais pas seulement : il faut aussi qu’elles favorisent les apprentissages dans leur discipline respective, pour que leur présence suscite un intérêt.

    En quoi la tablette favorise les apprentissages dans une discipline ?

    Tout au long de sa carrière, Michèle Monteil a tenté de convaincre les enseignants d’utiliser le numérique dans leur classe et son argument a toujours été :  « vous allez trouver un avantage considérable dans les apprentissages de votre discipline ».

    Elle donne l’exemple de sa propre expérience en tant que professeur de mathématiques où, quand elle a vu arriver les imagiciels et les logiciels de géométrie dynamique: « j’ai pu montrer à des élèves des choses qu’ils ne voyaient pas au tableau ; j’ai pu faire de la géométrie dans l’espace et accrocher toute une catégorie d’élèves pour qui il était vraiment difficile de se faire une représentation mentale de cette partie du programme ».

    Par contre, elle remarque qu’en ce qui concerne les tablettes, cet argument n’est pas aussi « vendeur » et elle avoue :

    « je n’arrive pas à dire à un collègue d’utiliser la tablette en expliquant que ça va être un plus dans les apprentissages disciplinaires ».

    Son constat est que toute activité qui est possible sur tablette peut être réalisée avec un ordinateur, du moins au collège et au lycée avec parfois beaucoup plus d’efficacité.

    Mais Il faut reconnaître qu’il y a des disciplines où les apprentissages se voient facilités par l’usage de la tablette comme par exemple en langues, la tablette pouvant s’assimiler à un système de baladodiffusion. En EPS, le fait de pouvoir déplacer la tablette du gymnase sur le terrain ; ou encore pour une sortie scolaire, la tablette s’avère beaucoup plus appropriée que l’ordinateur. Il est donc judicieux de l’utiliser quand elle est plus performante que les autres outils.

    Par contre, lorsqu’on regarde les retours d’expérimentation, on constate que ces exemples sont très limités.

    De plus,  la tablette n’est souvent pas très mobile et reste dans la classe ; peu de déplacement à l’intérieur même de l’établissement et encore moins à l’extérieur car comme le souligne Michèle Monteil, « c’est un objet qui reste coûteux et fragile et les chefs d’établissement sont prudents ».

    Alors pourquoi l’argument du « plus » qui va améliorer les apprentissages n’est-il pas utilisé par Michèle Monteil pour valoriser la tablette tactile ?

    Dans les explications qu’elle va nous apporter, c’est en partie parce que la fonctionnalité tactile d’une tablette grand public limite les usages possibles en classe et dans plusieurs disciplines.

    Limites de la tablette tactile : l’hybride, la solution mixte « multifonctions » ?

    A titre personnel et professionnel, Michèle Monteil utilise quotidiennement la tablette ; mais jusqu’à présent, elle sentait encore le besoin d’utiliser aussi son ordinateur pour « travailler », réservant sa tablette aux usages de consultation, de lecture et de visionnage vidéo.

    Elle avoue qu’avec l’arrivée de la tablette hybride sous Windows 8, elle a pu récupérer, sur celle-ci, son environnement professionnel et délaisse plus facilement son ordinateur.  Et elle peut désormais, avec ce nouvel outil, démontrer à ses collègues enseignants, que l’hybride peut être une solution pour qu’ils ne se sentent pas « perdus » ; Tous les logiciels spécialisés utilisés par les enseignants de toutes disciplines sont compatibles et peuvent être exécuter en mode tactile ou clavier selon le besoin.

    Rien qu’en prenant comme exemple l’écran d’accueil de sa tablette sous Windows 8, Michèle nous montre qu’on peut retrouver facilement le panneau de configuration comme sur un ordinateur : « ils vont s’apercevoir qu’ils ont accès à toutes les informations et à tous les menus auxquels ils accédaient avant ».

    A utiliser cet outil on se surprend à utiliser le tactile et le clavier simultanément en choisissant l’un ou l’autre en fonction de l’efficacité et de la rapidité, d’une façon assez naturelle.

    Côté élèves, elle constate que l’engouement pour la tablette est vraiment notable chez les petits ; celui-ci peut persister éventuellement jusqu’au collège mais à partir de la 5ème, les élèves sont plus adeptes du Smartphone dans leur poche que d’une tablette dans leur cartable.

    Elle donne l’exemple d’un retour d’expérimentation à Grenoble pour des élèves de Terminale. Le travail consistait à faire des interviews dans des entreprises, prendre des photos, enregistrer et faire un compte-rendu de leur expérience. En ce qui concerne les photos et les enregistrements, Michèle Monteil rapporte que les étudiants ont avoué qu’ils auraient tout aussi bien pu le faire (et peut-être même mieux !) avec un Smartphone ; quant au compte-rendu, ils ont préféré le faire sur leur ordinateur.

    Pour notre experte, la tablette classique tactile permet une fonction de recherche et de consultation mais si le travail doit donner lieu à une production, le clavier virtuel  qui prend les trois quarts de l’écran, comme c’est le cas pour la plupart des tablettes, n’est pas plébiscité.

    « Les élèves prétendent, d’après les retours d’expérimentations, qu’ils préfèrent écrire avec un clavier ». Comme elle le souligne, la frappe sur une tablette tactile n’est pas du tout la même que sur un Smartphone, à laquelle ces mêmes jeunes sont habitués.

    Les tablettes hybrides sont des solutions nouvelles qui intègrent le meilleur de la tablette et du PC, pour ne pas avoir à choisir entre les deux, car les usages de l’un ou de l’autre sont très complémentaires. Les nouvelles tablettes hybrides apportent le meilleur de la tablette : le tactile, elle démarrent instantanément, ont une batterie longue durée et tous les bénéfices de travail sur l’ordinateur pour produire du contenu, faire tourner des applications gourmandes etc.

    « Avec l’hybride, on a toutes les fonctionnalités d’une tablette classique mais aussi la possibilité de “travailler“ comme sur un ordinateur, produire du texte ou utiliser le tableur par exemple, au moyen du clavier », conclut Michèle Monteil.

    Et « c’est encore mieux quand le clavier se détache », ajoute t-elle.

     

    Une tablette hybride sous Windows 8 sur laquelle d’une part, l’enseignant pourrait facilement retrouver son environnement d’ordinateur, les logiciels spécialisés qu’il à l’habitude d’utiliser  pour qu’il ne perde pas de temps à s’approprier l’outil ou à rechercher des applis soit disant éducatives et d’autre part, l’élève pourrait à la fois utiliser le tactile mais aussi produire : la solution pour les classes ?

    D’après notre experte, c’est en tous cas une voie très intéressante à explorer.

    Et pour parfaire l’usage de l’outil en classe, elle ajouterait un élément complémentaire, qui lui semble indispensable pour faciliter le travail des enseignants  et qui leur permettraient de gérer au même instant tout le parc tablettes de la classe – car, on le sait, gérer 30 élèves avec 30 tablettes en même temps, c’est encore une nouveauté pour notre enseignant et ce n’est pas facile ! – C’est l’outil de gestion de classe.

    L’outil de gestion de classe : indispensable pour l’enseignant qui utilise des tablettes

    « On entend souvent dire : les enfants se débrouillent mieux que les adultes lorsqu’ils utilisent une tablette ». Pour Michèle Monteil, cet argument utilisé à tout-va est complétement faux.

    Oui, l’enfant va être attiré par le tactile et cliquer facilement partout mais il peut se perdre rapidement aussi si il n’est pas « coaché ».

    « Quand j’assiste à des démonstrations dans les classes, je vois des enfants qui cliquent et qui se demandent ce qui se passe parce qu’ils n’ont pas cliqué au bon endroit, ils ne savent pas revenir en arrière. Cela pose un vrai problème de l’utilisation de la tablette grand public en classe ».

    Pour les plus grands qui maîtrisent très bien l’outil il est particulièrement difficile d’empêcher ceux qui le souhaitent de s’évader sur internet.

    D’ailleurs, elle dresse le constat que, dans une classe, on voit souvent 6, 12 tablettes et rarement autant de tablettes que d’élèves. Parce qu’une classe avec 30 tablettes ce n’est pas facile d’en garder la maîtrise. Que se passera-t-il quand tous les élèves auront une tablette ?

    « C’est plus facile de contrôler sa séance quand on a un outil qui le permet »

    Pour Michèle Monteil, cet outil de gestion de classe est indispensable pour la réussite d’une intégration de tablettes dans une classe ; encore une fois, c’est un moyen pour l’enseignant de se sentir à l’aise et de maîtriser la présence de ces nouveaux objets « numériques ».

    Et comme nous l’avons vu en tout début d’argumentaire, c’est bien l’enseignant qui va, sur le long terme, instaurer la dynamique et développer une motivation dans sa classe, avec ou sans le numérique.

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