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  • Imaginaires pirates du Net art. Création numérique et médias tactiques

    Imaginaires pirates du Net art. Création numérique et médias tactiques

    imaginaire
    Le Net art s’est développé à l’écart du monde réel, parodiant les institutions médiatiques et les modes de diffusion et de réception de l’art contemporain. Ses manifestations et inscriptions sur Internet ont promu des modes inédits de monstration et de propagation des œuvres. Ma communication propose de décrire ces modes d’occupation du réseau, les stratégies médiatiques et les dispositifs de détournements artistiques qui contribuent à l’émergence d’un monde de l’art centré sur l’Internet.

    À l’instar de la photographie, du cinéma et de la télévision, l’innovation technique et le média que constitue l’Internet font, dès leur apparition publique autour de 1995, l’objet d’une longue série d’appropriations et de détournements artistiques. C’est alors la matérialité et les fonctionnalités de l’Internet qui forment le cœur des premières investigations du Net art : dans la lignée des œuvres de Nam June Paik ou de Wolf Vostell qui visaient à détruire physiquement la télévision (les sculptures vidéo) ou intervenaient plus symboliquement sur le médium par des altérations du signal vidéo. L’action créative vise ainsi à contaminer l’Internet par des virus artistiques.

    Cette implication parasitaire au sein du réseau emprunte ses formes et actions aux comportements déviants des pirates de l’informatique : les hackers. Les artistes y mettent en œuvre une efficace de l’infection et de la contamination : leur démarche a pour objet l’incident, le bug, l’inconfort technologique et la perte des repères.

    Au-delà de cette première visée « médiologique », le Net art interroge également les modes de communication et les formes relationnelles engendrées sur le réseau. Il participe de l’apparition d’une « démocratie technique » à l’articulation des problématiques du logiciel libre et des réseaux peer to peer relayés par des collectifs d’artistes et des réseaux de production indépendants. Ce n’est pas un hasard si le Net art s’est développé massivement très tôt en Russie et dans les pays de l’ex-Europe de l’Est où la critique des régimes non-démocratiques, l’activisme, le cyber-féminisme, la réflexion sur le concept même de Net art constituent des prémisses.

    Indissociable de la technologie et du contexte socio-politique des années 1990, Internet révèle les implications sociales du réseau, notamment des technologies de repérage et d’accès à l’information. Le Net art développe donc des dispositifs de distorsion des médias et de leurs contenus, et adopte ainsi une visée plus politique. L’œuvre collective Carnivore (www.rhizome.org/carnivore) propose par exemple une version détournée du logiciel DCS1000 employé par le FBI pour développer l’écoute électronique sur le réseau. Heath Bunting (www.irational.org) pervertit les communications médiatiques de grandes puissances financières. Les Yes Men et le collectif ®TMark (www.rtmark.com) détournent, dans un but politique, les stratégies de communication de grandes sociétés de courtage privées.

    À l’heure de l’Internet 2.0, l’artiste Christophe Bruno incarne le renouveau français de cet imaginaire de l’artiste critique en « s’attaquant » aux outils et rituels du web collaboratif. Il baptise une première série d’œuvre les « Google Hack » : des dispositifs artistiques et programmes informatiques qui détournent Google de ses fonctions utilitaires tout en en révélant les dimensions contraignantes et cachées. Selon l’artiste, Internet est devenu un outil de surveillance et de contrôle inégalé dont la dynamique économique repose sur l’analyse et la prédiction de tendances, à l’aide de logiciels de traçage de la vie privée des goûts et des identités sur la toile.

    Au croisement de l’anthropologie des techniques, de la sociologie de l’art et des sciences de la communication, ma conférence mettra au jour ces pratiques médiatiques et leurs incidences sur la désignation et circulation d’une œuvre d’art qui se développe en écho à l’imaginaire de la démocratie technique.


     

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  • Imaginaire du numérique : la machine-monde, faire disparaître l’interface…

    Imaginaire du numérique : la machine-monde, faire disparaître l’interface…

    imaginaire

    Les recherches dans le domaine des interfaces homme-machine, à la croisée des sciences cognitives et de l’ingénierie informatique, fournissent un lieu privilégié d’observation des imaginaires techniques. Comme le soulignait l’écrivain de science-fiction Alain Damasio : ce qui se joue dans l’interaction homme-machine « c’est la façon dont l’homme réinvente par la machine son triple rapport à l’autre, à lui-même et au monde ».

    C’est dire que, loin de rester circonscrite dans la sphère technologique, l’interaction homme-machine (IHM) ne peut faire l’économie d’une réflexion ontologique visant à qualifier la place et la situation de l’homme dans son rapport à un environnement matériel et cognitif, hypothétiquement envisagé comme « interfaçable ».

    Des premiers écrits sur la « symbiose homme-machine » (Licklider, 1960) aux technologies « calmes » proposées par le défunt directeur de recherche du Xerox PARC (Palo Alto Research Center), Mark Weiser (1991), en passant par les travaux pionniers du Standford Research Institute (SRI) sur les interfaces graphiques (Bardini, 2001) : toutes ces recherches à l’origine de nombreux dispositifs techniques d’interface couramment usités, sont également productrices de discours, de récits imaginaires qui nourrissent aussi bien la science-fiction (cyberpunk ou « post » cyberpunk) (Ferro, 2011) que les appétits idéologiques des industriels.

    C’est cette mise en récit de la technique que nous souhaiterions interroger dans le cadre de cette contribution en focalisant particulièrement notre attention sur les écrits produits au tournant des années 90 par les chercheurs du Xerox PARC.

    Ces derniers, en renouvelant les approches qui présidaient au développement des interfaces homme-machine, ont aussi initié une nouvelle façon d’envisager l’informatique désormais inscrite dans une véritable téléologie évolutionniste : ce que j’ai par ailleurs appelé le « projet ubiquitaire » (Pucheu, 2013). Un projet, une « programmatique » qui trouve aujourd’hui d’innombrables traductions (informatique invisible, ambiante, pervasive ; internet des objets ; ubimedia ; web squarred etc.) affichant un objectif commun : celui de faire « disparaître l’interface ».

    Une idée que résumait de façon radicale le directeur du consortium Things that thinks du MIT Neil Gershenfeld en affirmant que le succès de l’ingénierie informatique dépendra en dernier lieu de sa capacité à « faire du monde notre interface » (1999, p.4). Derrière cette volonté explicite de « naturaliser » la médiation instrumentale opérée par les interfaces digitales vouées à s’intégrer au plus près de nos corps et de nos consciences pour finalement « se dissoudre dans la trame de nos vies quotidiennes » (Weiser, 1991, p. 94), se dessine les contours d’une société de l’information en voie vers son ultime accomplissement.

    Un monde tout entier « médiaté » par des dispositifs numériques qui nourrit des visions contradictoires : celles d’un « Léviathan numérique » au commande de nos destinées éveillant autant l’extase (O’Reilly, 2009) que l’effroi (Araya, 1995).

    En mobilisant notamment les travaux de Paul Ricœur sur le récit et l’imaginaire (1985, 1997) ainsi que ceux de Gilbert Durand et Jean-Jacques Wunenburger (2002) sur ce que nous pourrions appeler l’imagination créatrice, nous voudrions montrer comment ces discours, oscillant entre utopie et idéologie, n’en restent pas moins décisifs pour comprendre la trajectoire empruntée ces dernières années par l’ingénierie informatique dans le développement des interfaces dites « naturelles », les technologies « perceptives » ou encore l’informatique contextuelle. A partir d’un vaste corpus de textes produits au sein du Xerox PARC, du SRI et du medialab du MIT (Massachussetts Institute of Technology), nous entreprendrons une analyse à mi-chemin entre la sociohistoire et la mythologie qui nous permettra d’esquisser les contours de cette mise en récit de la technique qui anime aujourd’hui largement le développement des interfaces homme-machine.

    Quels imaginaires de l’homme et de son rapport au monde, quels mythes se dissimulent derrière ces discours ? Que restera-t-il à l’usager des TIC dans un monde hypothétiquement peuplé d’interfaces devenues invisibles à sa conscience ?

    Autant de questions que nous voudrions ici interroger pour mettre en lumière des problématiques trop souvent opacifiées par l’enthousiasme naïf des thuriféraires de l’industrie informatique.

    Agre, P. E., (2001), « Changing places : contexts of Awareness in Computing » dans Human-Computer Interaction. 16 2. pp.177-192.

    Araya, A. (1995). « Questioning Ubiquitous computing »  dans CSC ’95 Proceedings of the 1995 ACM 23rd annual conference on Computer science, New York : ACM. pp. 230-237

    Bardini, T. (2001), Bootstrapping: Douglas Engelbart, Coevolution, and the Origins of Personal Computing, Standford : Standford University Press.

    Baudrillard, J. (1968). Le système des objets. Paris : Gallimard.

    Crang, M., Graham, S. (2007) « Sentient cities. Ambient intelligence and the politics of urban space », Information, Communication & Society, 10:6, p. 789 – 817.

    Dertouzous M. (2001). The Unfinished Revolution: Human-Centered Computers and What They Can Do For Us. New York : Harperbusiness.

    Dourish, P., Bell, G. (2011). Divining a digital future, Mess and mythology in ubiquitous computing. Cambridge : MIT Press.

    Faucheux, M. (2005). « Technologiques. Technique et langage » dans Communication et langages. N°143. pp. 61-70.

    Ferro, D. Swedin, E. (2011). Science Fiction and Computing: Essays on Interlinked Domains. New-York: McFarland

    Gershenfeld, N. (1999). When things start to think. Londres : Hodder and Stoughton.

    Greenfield, A. (2007). Everyware, la révolution de l’ubimédia. Limoges : FYP éditions.

    Leroi Gourhan, A. (1964). Le geste et la parole 1 : technique et langage. Paris : Albin Michel.

    Licklider, J. C. R. (1960). « Man-computer Symbiosis » dans IRE Transactions on human factors in electronics, Volume HFE-1, p. 4-11

    Norman D. A. (1999). The invisible computer. Cambridge : The MIT Press.

    O’reilly, Tim., Battelle, J. (2009). Web Squared, Web 2.0 five years on. O’REILLY Media récupéré sur http://assets.en.oreilly.com/1/event/28/web2009_websquared-whitepaper.pdf

    Pucheu, D. (2013 à paraître). Aux origines du messianisme technologique américain. Apogée : Rennes.

    Pucheu, D. (2009). « Du travestissement du symbolisme religieux dans l’appréhension des imaginaires technologiques » dans Lakel, A., Massit-Follea F., Robert, P. (dir.). Imaginaire(s) des technologies d’information et de communication. Paris : Les éditions de la MSH.

    Pucheu, D. (2013). « Le projet ubiquitaire : une nouvelle eschatologie informationnelle ? » dans ESHAES, Journal of communication Studies.

    Ricœur, P. (1985). Temps et récit. Tome 3. Le temps raconté. Paris : Seuil.

    Ricœur, P. (1997). L’idéologie et l’utopie. Paris : Seuil.

    Sfez, L. (2002). Technique et idéologie. Un enjeu de Pouvoir. Paris : Le Seuil

    Thomas Joël et al. (1998). Introduction aux méthodologies de l’imaginaire, Paris : Ellipses.

    Weiser M. (1991). « The computer for the XXIe century », Scientific American. Vol. 265 3

    Weiser, M. (1996). «The world is not a desktop » dans Interactions, Vol. 1 1

    Weiser, M., BROWN J. S. (1996). « The coming age of calm technology » dans Powergrid Journal, Vol. 1.01

    Wunenburger, J. J. (2002). La vie des images. Grenoble : PUG

    Par David Pucheu : Actuellement Maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Poitiers, directeur des études de la spécialité Ingénierie des Médias pour l’Education du Master Information-Communication, membre de l’équipe d’accueil TECHNE.

    Mes recherches portent principalement sur 3 domaines :

    – les imaginaires des TIC et plus particulièrement ceux qui entourent le développement de l’informatique en réseau aux États-Unis (de la première cybernétique aux mouvements transhumanistes contemporains) ;

    – les imaginaires et les usages des TICE dans le milieu éducatif ;

    – les mutations des industries de la culture et de la communication à l’heure de la numérisation des biens culturels.

    Sélection de publications :

    Pucheu, D. (2013 à paraître). Aux origines du messianisme technologique américain. Apogée : Rennes.

    Pucheu, D. (2013). « Les nouveaux chemins de l’intermédiation » dans Matthews, J. Perticoz, L. L’industrie musicale à l’aube du XXIème siècle. Paris : L’Harmattan.

    Pucheu, D. (2013). « Le projet ubiquitaire : une nouvelle eschatologie informationnelle ? » dans ESSACHES, Journal of communication Studies.

    Pucheu, D. (2009). « Du travestissement du symbolisme religieux dans l’appréhension des imaginaires technologiques » dans Lakel, A., Massit-Follea F., Robert, P. (dir.). Imaginaire(s) des technologies d’information et de communication. Paris : Les éditions de la MSH.

    Pucheu, D. (2006). Techno-imaginaire de la communication et religiosités aux Etats-Unis. Réflexions sur le développement technologique de la communication instrumentale au XIXème siècle (Thèse de doctorat). Université du Québec à Montréal.

     

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  • Imagerie du texte numérique dans le discours visuel publicitaire (1980-2010)

    Imagerie du texte numérique dans le discours visuel publicitaire (1980-2010)

    imaginaire
    La communication proposée porte sur la culture de l’écran et du texte numérique à travers trente années de spots publicitaires, de 1980 à 2010. Nous faisons l’hypothèse que les dimensions culturelles et sensibles du texte numérique s’établissent et se reconduisent à travers ses images, notamment publicitaires, en une « imagerie de l’écran ».

    L’analyse sémiologique de spots publicitaires présente trois périodes au cours desquelles se transforment les relations entre texte et média : il s’agit ainsi de souligner les principales modalités des regards publicitaires sur les écrans.

    Cette proposition repose sur un postulat relié à une histoire longue de la communication écrite : avant d’être « lus », les écrans sont des objets « vus » qui désignent (en tant que cadres, organisant la vision et l’interprétation) un texte qu’ils affichent. Dans la publicité, l’écran – l’image du texte qu’il contient – est quasiment toujours « pratiqué ». Il est la face sociale de la machine, le lieu du connu/reconnu, du lisible, de l’émotion, de l’écriture et de la création, de l’appropriation.

    En trente ans, les transformations technologiques des supports de l’écrit sont multiples et se produisent de manière disséminée dans les secteurs de la technique et du contenu.

    L’analyse menée révèle une première période marquée par l’introduction démocratisée d’un outil de calcul et de gestion de l’information, l’écran étant le support permettant de programmer la machine (écrire un texte) et un espace d’affichage du texte produit par la machine (visualiser de manière graphique ou pré-éditée des données). L’ordinateur doit prendre place en société et l’esthétique de ces courts films publicitaires est particulièrement caractérisée par un régime d’explicitation du changement sociétal en train de s’accomplir.

    La période suivante est caractérisée par l’émergence du texte numérique comme figure. Le statut du texte numérique est totalement bouleversé, devenant peu à peu auto-énonciateur.

    Le discours publicitaire entre 1999 et 2009, revient sur l’écran et la machine en soulignant sa technicité, particulièrement réactivée par l’introduction de nouveaux appareils sur le marché. La spectacularisation de ces innovations est singulièrement centrée sur la manipulation du texte.  Le processus d’« affichage » du texte devient un motif énonciatif qui innerve aussi bien les films publicitaires pour les outils numériques que pour l’imprimé, principalement la presse. Il rend palpable la circulation et l’édition : cet affichage, parce qu’il est dynamique, renvoie directement à la lecture, orientée et située.

    Dans l’ensemble, la nécessité de recourir à des scénarios réalistes et à des mises en contextes concrètes s’amenuise en trente ans. Le corps du lecteur apparaît moins socialisé, et surtout de plus en plus partiel et segmenté. A l’inverse, la focalisation sur le texte est de plus en plus importante  (lisible, identifiable). Plus globalement, on observe la montée en puissance des industriels du contenu qui interpénètrent peu à peu les énoncés focalisés sur les technologies.

    Cette évolution conduit à la représentation de dissociations du texte de son support, signe d’une acculturation sociale aux écrits d’écrans. Des formes ou des gestes sont ainsi capables de signifier l’écran sans l’écran. La culture du texte numérique contemporaine semble ainsi s’élaborer au carrefour de trois énoncés portés par la publicité : le texte numérique constitue une rupture culturelle (bien qu’il ne puisse se penser sans référence à la culture imprimée) ; il peut être sans support ; il « redonne la main » à son lecteur en tant qu’il est toujours à manipuler pour être vu/lu.

    Note de positionnement scientifique

    71ème section, Sciences de l’information et de la communication

    La base documentaire « Pub» de l’INA a servi de point de départ pour la constitution d’un corpus de 280 spots publicitaires, ensuite divisé en trois sous-corpus nettoyés et réorganisés par nous avec l’appui d’une ingénieure de recherche[1].

    –       Le premier regroupe des publicités réalisées autour de l’imprimé : éditeurs et organismes de presse en sont les principaux annonceurs. Ce sous-corpus comprend 139 notices.

    –       Le deuxième sous-corpus comporte un ensemble élargi  de films présentant des écrans et des outils technologiques (électroniques) de l’écriture et de la lecture : les annonceurs sont aussi bien des industriels de l’informatique, que des éditeurs numériques (82 documents). A des fins de comparaison, nous avons également distingué dans un sous-corpus bis ce qui relevait exclusivement des appareils technologiques.

    –       Troisièmement, nous avons réuni des spots mobilisant la lecture comme scène pour la réclame d’autres produits, comme l’alimentation ou les cosmétiques. Ce sont les principales thématiques associées : plus restreint, cet ensemble comprend une trentaine de films.

    La méthodologie d’analyse repose sur une approche sémiologique effectuée sur la base d’un codage quantitatif en fonction de trois ensembles de descripteurs (saynète du spot publicitaire ; modalités énonciatives ; lien du texte et du média).

    Références

    Colombo Fausto (dir.), (2010), Tracce : atlante warburghiano della televisione, con fotografie di Jacopo Benassi, Milano, Cologno Monzese, Link.

    Doueihi Milad (2009), « Le livre à l’heure du numérique : objet fétiche, objet de résistance », in Dacos Marin (dir.), Read/write Book, Marseille, Cléo, p. 109-120.

    Dula Daiana (2012), « Mimésis de l’écran. Quand le contenu devient sa propre représentation. », MEI, n°34.

    Frau-Meigs Divina (2011), Penser la société de l’écran, Paris, Presses de la Sorbonne.

    Fresnault-Deruelle Pierre (2007), « Le tout premier cinéma à l’affiche, ou comment parler des images mobiles (et parfois sonorisées) avec des images fixes (et aphones) », Visible, n°3, p. 57-69.

    Garret Stewart (2006),  The Look of Reading, Chicago, University Of Chicago Press.

    Jeanneret Yves (2004), « Economies de l’écran : discours, pratiques et imaginaires entre visible et invisible », in Roelens Nathalie, Jeanneret Yves (dir.), L’imaginaire de l’écran / Screen Imagery, Amsterdam et New-York, Rodopi, p. 141-162.

    Lambert Frédéric (1999),  « L’entreprise du cadre : support-export », Champs-visuels, n°12-13, p. 64-65.

    Manovich Lev (2010), Le langage des nouveaux médias, Paris, Les Presses du réel.

    Peninou Georges (1972), Intelligence de la publicité, Paris, Robert Laffont.

    Quinton Philippe (2002), « Le corps du design : mutations de la médiation du corps dans le procès de l’image », in Caune Jean, Dufrêne Bernadette (dir.), Médiations du corps, Grenoble, Université Grenoble 3, p 125-146.

    Renaud Lise (2007), « Les représentations du téléphone mobile : des imaginaires aux pratiques », Les Enjeux, http://w3.u-grenoble3.fr/les_enjeux/2007-meotic/Renaud/index.html, consulté le 31 août 2012.



    [1]
                « Les notices proviennent de la collecte au titre du dépôt légal depuis le 1er janvier 1995 auprès de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), ex Bureau de Vérification de la Publicité (BVP) et de fonds historiques complémentaires provenant de la Régie Française de Publicité (RFP) et de TNS Media Intelligence. » (Extrait de la présentation de l’Ina sur son site web). Dans la base « Pub » de l’Ina, les spots ne sont pas indexés thématiquement : la recherche a donc consisté à utiliser des termes clés (livre, ordinateur, papier, bibliothèque, lecture, tablette, liseuse, téléphone, Smartphone, écran, internet) et des noms de marque et d’éditeurs (par exemple, Hachette, Gallimard, Microsoft, Aple, etc.), ce qui revient à interroger le champ « titre » principalement et à procéder par déduction et recoupements. De fait, la réalisation du corpus relève d’un certain artisanat.
     

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  • Fragments d’utopie et enseignement musical à distance : le cas des masterclasses en ligne

    Fragments d’utopie et enseignement musical à distance : le cas des masterclasses en ligne

    imaginaire
    Cette communication s’intéressera à la façon dont des fragments de discours utopiques peuvent contribuer à remettre en cause les normes d’un monde éducatif relativement autonome, celui de l’enseignement spécialisé de la musique.

    Des acteurs aussi divers que l’Unesco, l’Union européenne, des éditeurs de logiciels et de cours en ligne partagent en effet des arguments qui militent en faveur d’une utilisation croissante des ressources qu’offrent la numérisation des contenus et l’utilisation d’outils informatiques dans ce milieu.

    Quelle cohérence peut-on trouver dans cet ensemble hétérogène de propos qui vantent les mérites de l’accessibilité des enregistrements sonores et audiovisuels en ligne, de la liberté de se former par soi-même au moyen de didacticiels ou de ressources encyclopédiques, ou encore, des échanges qui peuvent se nouer entre des musiciens, enseignants comme apprenants, qui ne pourraient se rencontrer physiquement ?

    In fine, quel pouvoir attribuer à ces productions discursives ? Le sens commun a souvent tendance à considérer les discours incitatifs, au mieux, comme des énoncés sans lien avec les conditions de l’action concrète, au pire, comme des propositions dénuées de sens. À l’inverse, en accord avec le cadre théorique de l’analyse de discours telle qu’elle a pu être pratiquée en France depuis les années 1970 (par exemple dans les travaux de Dominique Maingueneau), nous montrerons qu’en se nourrissant – mais aussi en alimentant – des imaginaires utopistes, ils constituent des modalités de l’action, à plusieurs titres.

    Premièrement, en considérant les locuteurs qui les portent comme des acteurs inscrits dans un champ de forces, nous faisons l’hypothèse que leurs productions discursives ont une valeur instituante, parce ce qu’ils constituent une manière d’agir pour des organisations et des institutions qui, normalement, ne relèvent pas de ce champ. En appeler à des arguments largement partagés peut ainsi faire paraître tout à fait légitime le fait qu’un acteur industriel émette des préconisations sur l’enseignement musical, ou que l’Union européenne intervienne dans un domaine qui ne relève pas de ses compétences.

    Deuxièmement, considérer ces discours comme des actes de langage conduit à s’interroger sur leur dimension perlocutoire, c’est-à-dire sur leur potentiel de modification du réel. Elle réside, nous semble-t-il, dans leur capacité à alimenter ce que l’on pourrait appeler un imaginaire, ou, pour reprendre l’expression de Pierre Musso (2002), un ensemble de « grappes techno-imaginaires », au service d’un projet de société : celui de la « société de la connaissance », ou de l’un de ses avatars actuels, de l’ « économie créative ».

    Sur notre terrain d’enquête, ces discours connaissent des formes d’« inscription » (Maingueneau, 1991) très variables. Notre analyse portera sur un cas concret : celui des dispositifs de cours en ligne dispensés par des grands maîtres, fondés sur le modèle des masterclasses, c’est-à-dire d’un enseignement en présentiel dont l’objectif premier est de transmettre à la fois une lecture personnelle d’une œuvre musicale et les techniques qui permettent de l’interpréter.

    Ces plateformes de captations audiovisuelles sont en effet accompagnées de discours qui mettent en avant la possibilité, par le numérique, de sortir de la relation exclusive entre le maître et son disciple, qui a longtemps constitué une norme dans le monde de l’enseignement musical. En d’autres termes, ce genre de dispositif s’appuie sur l’utopie de l’effacement des frontières liées à la distance, mais aussi sur celui de la démocratisation culturelle, l’accès aux grands maîtres n’étant plus soumis à tout le processus de sélection (par concours) et de recommandation (par un réseau d’anciens élèves) qui le conditionnait (Wagner, 2004).

    L’analyse que nous proposerons s’efforcera donc d’articuler l’analyse des discours qui accompagnent ces dispositifs, en s’intéressant aux reformulations de lieux communs utopiques, avec ceux qui encouragent plus généralement l’utilisation d’outils et de médias, ainsi qu’à la parole d’acteurs d’enseignants et de directeurs de conservatoires, que nous avons recueillie en entretien.

    Références bibliographiques :

    Flichy Patrice, L’ imaginaire d’Internet, Paris, La Découverte, coll. « Sciences et société », 2001.
    Lakel Amar, Massit-Folléa Françoise et Robert Pascal (dirs.), Imaginaire(s) des technologies d’information et de communication, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, coll. « praTICs », 2009.
    Maingueneau Dominique, L’analyse de discours : introduction aux lectures de l’archive, Paris, Hachette, coll. « Supérieur », 1991.
    Musso Pierre, « L’économie symbolique de la société d’information », Revue européenne des sciences sociales, 2002, XL-123, « La société de l’information. État des lieux », pp. 91‑113.
    Wagner Izabela, « La formation des violonistes virtuoses : les réseaux de soutien », Sociétés contemporaines, 2004, vol. 56, nᵒ 4, pp. 133‑163.

    Positionnement méthodologique et présentation de la thèse

    Outils et médias éducatifs et enseignement spécialisé de la musique :
    une approche communicationnelle

    Cette thèse s’intéresse aux dispositifs numériques utilisés dans l’enseignement spécialisé de la musique en conservatoire : didacticiels, plateformes de cours en ligne, logiciels de création et de production exploités dans l’enseignement, matériels informatiques et électroniques constituent les déclinaisons les plus courantes d’un objet souvent désigné par l’acronyme « TICE ». Afin de comprendre comment ces « outils et médias » (Mœglin, 2005) entrent dans le jeu des établissements d’enseignement musical, la première zone d’ombre à éclaircir consiste à savoir ce que désignent les « technologies numériques » ou les « TICE ».

    En dépit de la diversité de ses acceptions, la notion de dispositif nous semble pouvoir rendre compte du caractère composite des assemblages d’appareils électroniques et de logiciels qui sont utilisés dans ce milieu. La plupart d’entre eux font en effet l’objet de transferts depuis le monde de la production musicale vers celui de l’enseignement, et ne relèvent pas à proprement parler des « technologies éducatives ».

    Sur son versant amont, le marché des fabricants et des éditeurs d’outils et de médias n’est pas moins hétérogène : y figurent des acteurs historiques du secteur de l’édition musicale ou de la production musicale, mais aussi des opérateurs publics, ou encore des développeurs de logiciels libres. Quelles stratégies ces différents acteurs mettent-ils en œuvre afin de prendre position dans ce secteur, et quelles formes de mise en marché adoptent-ils ? Nos observations montrent que ce secteur peu stabilisé procède essentiellement par essais et par tâtonnements, sans qu’un modèle socio-économique unique puisse se dégager clairement.

    Dans la perspective communicationnelle développée ici, la circulation des discours enthousiastes quant à l’apport des dispositifs numériques à l’enseignement, et la façon dont ils s’articulent avec les enjeux propres aux enseignements artistiques constitue également un domaine de recherche privilégié. Comment comprendre en effet les formes de convergence observables entre des discours programmatiques produits par des acteurs institutionnels et des discours accompagnant la distribution (marchande ou non) d’outils et de médias ?

    À ce stade de l’analyse, il nous semble qu’ils s’inscrivent dans une logique de promotion d’un « grand projet » (Lacroix, Miège et Tremblay, 1994) qui s’apparente à bien des égards à celui qui prend pour emblème le développement d’une « économie créative ». Afin de saisir les caractéristiques de ce programme dans toute son étendue, nous nous attachons à mettre en relation les analyse de corpus avec la parole des acteurs directement impliqués dans l’enseignement musical : enseignants, directeurs d’établissements, responsables territoriaux, en nous intéressant particulièrement aux arguments qu’ils formulent en faveur d’une généralisation des outils et médias dans les établissements comme dans les pratiques pédagogiques ordinaires. L’analyse de ces entretiens permet d’ores-et-déjà de montrer que ces dispositifs révèlent une mutation des conceptions de la professionnalisation du musicien : l’usage des technologies numériques se justifie, pour beaucoup, par la nécessité d’adopter une approche pédagogique orientée vers l’acquisition de compétences transférables, plutôt que par la révélation progressive d’une vocation artistique.

    La méthodologie adoptée dans cette thèse articule ainsi trois angles d’approche. Premièrement, afin d’appréhender la façon dont des acteurs qui n’ont pas vocation à prescrire des manières d’enseigner et d’apprendre prennent pourtant position dans ce domaine, nous analysons notre corpus de textes prescriptifs en mobilisant les outils de l’analyse de discours. Notre démarche s’appuie sur les travaux de Maingueneau (1991) et Oger (2008), ainsi que sur des publications qui s’intéressent à la dimension argumentative des discours politiques (Angenot, 1993 ; Amossy, 2000). Deuxièmement, nous nous appuyons sur une série d’entretiens semi-directifs auprès des acteurs impliqués tant dans la production d’outils et de médias que dans leur utilisation dans le monde de l’enseignement. Dans la mesure où nos observations nous conduisent à mettre en évidence des conflits entre des valeurs divergentes, les recherches menées dans le cadre de la théorie des conventions (Boltanski et Thévenot, 2001), et notamment celles de Jean-Louis Derouet (1992) nous fournissent un cadre théorique pertinent pour rendre compte d’une situation où l’existence de compromis semble fortement remise en cause. Enfin, nos investigations s’inscrivent dans la continuité des travaux menés dans en socio-économie des industries culturelles, depuis l’ouvrage fondateur de Huet, Ion, Lefebvre et Miège (1984), jusqu’aux recherches sur les industries éducatives (Mœglin, 1998 et 2010).

    Références bibliographiques :
    Amossy Ruth, L’argumentation dans le discours  : discours politique, littérature d’idées, fiction, Nathan, 2000.
    Angenot Marc, L’utopie collectiviste : le grand récit socialiste sous la Deuxième Internationale, Presses universitaires de France, 1993.
    Derouet Jean-Louis, École et justice  : de l’égalité des chances aux compromis locaux  ?, Métailié, 1992.
    Huet Armel, Ion Jacques, Lefebvre Alain et Miège Bernard, Capitalisme et industries culturelles, deuxième édition, Presses universitaires de Grenoble, 1984.
    Lacroix Jean-Guy, Miège Bernard et Tremblay Gaëtan (dirs.), De la télématique aux autoroutes électroniques : le grand projet reconduit, Presses de l’Université du Québec et Presses universitaires de Grenoble, 1994.
    Mœglin Pierre, Les Industries éducatives, PUF, 2010.
    Mœglin Pierre, Outils et médias éducatifs  : une approche communicationnelle, Presses universitaires de Grenoble, 2005.
    Oger Claire, Le façonnage des élites de la République  : culture générale et haute fonction publique, Paris, Presses de Sciences Po, 2008.

    Publications récentes :
    Levoin X. et Oger C. (2012), « Des industries créatives aux politiques éducatives : la “créativité” en contexte » in Bouquillion Ph. (dir.), Creative Economy, Creative Industries : des notions à traduire, Presses universitaires de Vincennes, pp. 171-190.
    Levoin X. et Oger C. (2012), « Concours de créativité dans l’enseignement : approche critique des politiques publiques d’innovation », Communication et Langages, 173, pp. 113-128.

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  • Hybridations filmiques, imaginaires et sens

    Hybridations filmiques, imaginaires et sens

    imaginaire
    Nous proposons d’appréhender ici les incidences de la forme numérique sur la production d’objets filmiques et sur le sens qui en émane, dans leurs relations avec les imaginaires des auteurs et des spectateurs.

    Afin de mener cette investigation, nous avons sélectionné deux documents. Le premier, « Je vous ai compris » conçu et réalisé par Frank Chiche, est un téléfilm graphique de 85 minutes [France, 2012]. Alors que le second, « Le livre des morts », réalisé par Alain Escalle, est un moyen métrage d’animation de 32 minutes [France, 2012].

    Le visionnement de ces films nous amène à nous poser la question suivante :

    comment les écritures filmiques intègrent-elles les ressources du numérique et permettent-elles de produire de nouveaux vecteurs visuels qui élargissent les possibilités d’expression des auteurs? Plus précisément, dans les situations historiques traitées par ces films, comment énoncer l’inacceptable en pensant de nouvelles combinaisons d’écriture ?

    Les deux documents présentent des points communs. D’une part, ils sont conçus et réalisés sur le fondement de l’application du principe d’hybridation d’éléments visuels photoniques et algorithmiques. D’autre part, les thèmes respectifs de la guerre d’Algérie et de la déportation sont caractérisés par la violence et la production d’imaginaires où il est parfois complexe de trouver les voies d’une expression qui repousse la haine et favorise le respect de l’Humain.

    Dans les deux cas, les constructions filmiques retenues sont basées sur la production d’un discours qui tente de renouveler les représentations et de se placer sur des plans revisités, où la mémoire et l’imaginaire sont actifs. Les choix techniques et esthétiques participent aussi à l’obtention de résultats qui ne laissent pas insensible, qui tentent de compléter les représentations jusqu’alors proposées. Les deux auteurs profitent des potentialités des ressources numériques pour développer des écritures à l’intérieur desquelles les spectateurs s’introduiront, sans que cela implique pour autant une identification.

    Le premier film, « Je vous ai compris », nous rappelle que malgré l’hybridation, l’analogique peut encore réserver des surprises dans le domaine de la pensée visuelle. L’emploi du rotoscoping et les « multi » numériques mettent ainsi en évidence des effets de complémentarité, mais aussi la présence d’interstices où des fragments induiront des vibrations liés à l’imaginaire.

    Dans un premier temps, ce document s’appuie sur une intervention soutenue du réel dans la création de fragments visuels. Mais dans un second temps, il exploite les spécificités du numérique pour renforcer la production d’un objet filmique singulier.

    Par l’usage de l’hybridation, l’auteur joue avec les écarts, la lumière et le mouvement pour construire du sens et pour effleurer différemment des niveaux demeurés cachés dans l’ombre des discours antérieurs.

    Les choix du réalisateur participent aussi au renouvellement des écritures, à la création d’une forme graphique construite pour surprendre, pour emmener ailleurs les spectateurs, dans une marge où les idées reçues sont moins dominantes, où l’espoir d’un nouveau regard devient possible. Les formes créées favorisent l’adoption d’un autre point de vue sur les thèmes abordés, ainsi que de nouveaux ancrages pour les imaginaires des tendances idéologiques en prise dans les conflits.

    Le second document, quant à lui, « Le livre des morts », s’inscrit précisément dans le cadre d’un projet de représentation visuelle d’un thème où les imaginaires s’entrecroisent. Quels signes visuels retenir pour évoquer une mémoire douloureuse? Pourquoi utiliser des images photoniques renvoyant à un référent réel ou des images algorithmiques non dépendantes de la lumière? Quelles solutions privilégier pour appliquer le processus de transformation qui conduit de la pensée à la forme visuelle des images filmiques? Pour appréhender l’innommable, Alain Escalle opte pour une construction allégorique et symbolique convoquant des acteurs maquillés, qui partageront l’espace-temps de l’image avec des fragments calculés. L’hybridation imbriquera alors représentation et simulation. Au-delà de la chorégraphie des corps, un ballet et une explosion de fragments visuels produiront des images résultantes comme autant de points d’accroche de l’imaginaire.

    Dans les deux cas, les discours énoncés sont supportés par des écritures filmiques qui requièrent des ressources sélectionnées non pas pour imiter la forme analogique, le réel, mais pour créer des espaces-temps s’appuyant pleinement sur les spécificités du moyen d’expression. Les auteurs contrôlent les fragments et les écarts présents comme autant de vecteurs de sens que le spectateur verra et interprétera.

    Nous désirons montrer que les spécificités des écritures hybrides, par leurs innovations, participent à la production d’un discours renouvelé. Cette investigation d’un thème propose des voies d’accès conduisant les spectateurs à la découverte d’une parcelle d’un nouveau territoire où l’imaginaire s’active.

    Positionnement scientifique

    –       71e section – Sciences de l’Information et de la communication – Laboratoire ELICO (Lyon)

    Je m’intéresse particulièrement à l’incidence des technologies sur la production de signes visuels, d’images et de documents filmiques.

    Je recherche ainsi actuellement des éléments de réponse à la question suivante : Comment un thème et les spécificités d’un espace-temps réel influencent-ils les choix effectués par un réalisateur pour en opérer une représentation filmique? Afin de nourrir ce questionnement, je visionne principalement des documentaires, des reportages, des clips musicaux et des documents proposés en streaming par des plateformes de diffusion (Youtube, Dailymotion, etc.). J’envisage en outre de m’orienter vers l’anthropologie visuelle pour appréhender de nouvelles approches abordant les relations  réel – représentation.

    J’accorde aujourd’hui un intérêt spécifique aux processus d’hybridation dans la mesure où ils permettent une démultiplication des possibilités d’écriture. L’appel à communications LUDOVIA 2013 « Imaginaire du numérique » m’a conduit à sélectionner deux films caractérisés par leur intégration de l’hybridation visuelle et des imaginaires qu’ils convoquent. A cet égard, les thèmes abordés par ces documents, la guerre d’Algérie et la déportation perpétrée au cours de la seconde guerre mondiale, conduisent les auteurs à privilégier des solutions visuelles et des écritures qui ouvrent de nouvelles perspectives à la production d’un discours offrant lui-même de nouvelles possibilités aux spectateurs : cela leur permet de poser ainsi leur imaginaire, tout en élargissant le champ du sens véhiculé.

    Je m’oriente donc vers une analyse filmique intégrant la prise en compte de la mise en scène développée lors du tournage, mais aussi pendant la phase de postproduction.

    La technique et la technologie proposent un ensemble de ressources et de possibilités, mais elles sont au service de l’application de processus de représentation et de simulation visuelles. Il n’est donc pas envisageable d’en assurer l’apologie, de la même manière que les dénigrer correspondrait au développement d’une approche réductrice.

    L’imaginaire est central dans l’approche de la représentation. Il participe pleinement à l’investissement de l’auteur comme du spectateur, lors de la création et de la réception des images et des documents filmiques.

    En 1990, Alain Renaud avait créé une revue intitulée « Imaginaire numérique ».  La question du couple imaginaire-numérique demeure aujourd’hui plus que jamais actuelle, car la puissance des dispositifs décuple et nous devons en conséquence nous demander comment l’imaginaire progresse et de quelle manière il investit ses nouveaux domaines.

     

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  • Les récits numériques : de nouvelles formes narratives ?

    Les récits numériques : de nouvelles formes narratives ?

    imaginaire
    Depuis une trentaine d’années est apparue toute une série d’objets numériques qui mêlent récit (quelque soit le degré de narrativité (Revaz 2009)) et interactivité : jeux vidéo, récits interactifs, films interactifs, narrations émergentes, webdocumentaires, hypertextes, … Ces derniers sont accompagnés de discours et il est devenu relativement fréquent d’en parler comme de nouvelles formes de narration (Di Crosta 2006) ou de récit (Campion 2009)1.

    Nous proposons de mener une réflexion sur ce sujet afin de déterminer ce qu’il en est vraiment : ces « récits interactifs » (au sens large) reposent-ils sur de nouvelles façons de raconter des histoires ou s’agit-il d’un mythe des discours du numérique ?

    Nous voulons porter un regard critique sur la prégnance de cet imaginaire de la nouveauté prêtée aux objets narratifs numériques.

    Notre hypothèse de travail est que ces récits numériques déclinent en réalité des formes de narration préexistantes mais mal connues, qui trouvent de nombreuses mises en pratique dans des objets restés marginaux au sein de la production culturelle de masse : les jeux de rôle sur table ou « grandeur nature », les murder parties, les livres dont vous êtes le héros ou encore diverses formes expérimentales de théâtre (Boal 1971).

    Nous souhaitons effectuer une analyse d’inspiration structuraliste (Greimas 1966, Brémond 1979), de différents concepts issus des études du récit numérique, tel que l’avatar (Amato 2008), l’arborescence ou l’émergence (Aylett & al 2011); afin de montrer en quoi ceux-ci peuvent tout aussi bien s’appliquer à des narrations non numériques.
    La nouveauté de ces récits numériques ne se situerait donc pas au niveau de la structure narrative ni dans leur système d’interaction. Nous en tirerons une première conséquence directe : la technologie numérique ne serait pas déterminante au niveau structurel et narratif.
    Pour confirmer ce propos, nous proposons de définir deux groupes d’objet, indépendamment de leur recours à la technologie du numérique, afin d’établir deux types de filiations. Le critère essentiel nous semble être la participation que la structure narrative interactionnelle sous-tend, en lien avec une technique d’écriture (plutôt qu’une technologie).

    Nous pensons pouvoir dégager, d’un côté, un pôle dit « oral », caractérisé par la nécessité de la production d’un imaginaire par les usagers, qui inclurait les jeux de rôle (ludiques ou théâtraux), ainsi que les narrations émergentes, et certains hypertextes. De l’autre côté, un pôle dit « écrit », basé sur le besoin d’immersion et d’interprétation (Hurel 2013), reprendrait les webdocumentaires, les récits à arborescence (dont les livres dont vous êtes le héros), ou encore les jeux vidéo. Deux techniques d’écriture distinctes seraient donc mises en évidence : d’une part l’écriture d’un socle de base, dont la mise en récit dépendrait grandement de l’usager; de l’autre une écriture plus conventionnelle d’un récit, prédéterminé dans les grandes lignes, auquel l’usager prendrait part. Nous aboutirions ainsi à deux types d’oeuvres, relevant de deux logiques différentes de participation et d’écriture, s’affranchissant de la barrière illusoire du numérique.

    Une fois ces différentes questions considérées, que reste-t-il de neuf dans le récit numérique ? Nous terminerons notre communication par l’examen des éléments qui peuvent finalement être
    1 Ce sont ici des exemples universitaires mais ce discours est également fréquemment relayé dans les médias, spécialisés ou généralistes, notamment quand il s’agit du jeu vidéo ou du webdocumentaire.
    accordés à ce domaine, telle que la coopération à distance, l’image de synthèse, ou encore l’intelligence artificielle. Il conviendra alors de déterminer en quoi cela constitue ou non un facteur d’innovation au niveau du système narratif.

    Les discours sur le numérique passent parfois trop rapidement sur leurs objets narratifs et les auréolent d’un caractère novateur. Pourtant, nous pensons pouvoir montrer que la réalité est plus nuancée et que différents champs d’étude (sur le jeu de rôle, le récit interactif, les jeux vidéo) gagneraient à reconnaître les filiations et similitudes entre objets numériques et non numériques.

    Une fois libérés de certaines idées reçues, différents champs d’études pourraient ainsi s’enrichir mutuellement, et distinguer en fin de compte les réelles spécificités du numérique.

    Bibliographie
    AYLETT R., LOUCHART S. et WEALLANS A., 2011, « Research in Interactive Drama Environments, Role-Play and Story-Telling », ICIDS, n°4, pp.1-12.
    BOAL A., 2006, Théâtre de l’opprimé, Paris, La Découverte.
    BORGSTROM R., 2007, « Structure and Meaning in Role-Playing Game Design » in Harrigan P. et Wardrip-Fruin N. (dir.), Second person : role-playing and story in games and playable media, Cambridge, MIT Press, pp.57-66.
    BOUCHARDON S., DESEILLIGNY O., 2010, « SIC et littérature », XVIIe congrès de la Société française des sciences de l’information et de la communication (SFSIC).
    BOUCHARDON S., 2012, « Du récit hypertextuel au récit interactif », Revue de la BNF, n° 42. BREMOND C., 1973, Logique du récit, Paris, Seuil.
    BROUDOUX E., 2011, « Le documentaire élargi au web », Les Enjeux de l’information et de la communication, Dossier 2011.
    CAMPION B., « Vers l’actualisation d’un « récit fantôme » ? Réflexions sur les nouvelles formes de récit et leur réception », Communication [En ligne], Vol. 26/2 | 2008, mis en ligne le 01 octobre 2009. URL : http://communication.revues.org/index824.html
    DI COSTA M., 2006, « Nouvelles formes de récit cinématographique. Vers une écriture des interactions film / spectateur », Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines, http://www.omnsh.org/spip.php?page=imprimer&id_article=72
    GENVO S., 2009. Le jeu à son ère numérique : comprendre et analyser les jeux vidéo, Paris, L’Harmattan.
    GREIMAS A.J., 1966, Sémantique structurale : recherche et méthode, Paris, Larousse. HUREL P.-Y., 2013 (à paraître), « Récit et interaction : la piste structuraliste », Actes des
    journées doctorales de l’EDSIC 2012 (belgique), Namur, PUN.
    REVAZ F., 2009, Introduction à la narratologie: Action et narration, Bruxelles, De Boeck.
    AMATO E.A., 2008, Le jeu vidéo comme dispositif d’instanciation. Du phénomène ludique aux avatars en réseau. Thèse en Sciences de l’Information et de la Communication, Université Paris 8.
    VACHEY F., 2011, « Narration interactive ludique : les jeunes lecteurs se réapproprient la culture populaire sous forme de persona-fictions », Strenæ, n°2.

    Positionnement scientifique
    Notre travail de recherche s’inscrit tout d’abord dans l’héritage des thèses structurales, avec Brémond, Eco et Greimas comme principales références. Il s’agit pour nous d’aborder en premier lieu les récits interactifs sous l’angle de leur structure narrative et d’interaction. Nous souhaitons à terme compléter cette approche « du dessus » par une étude plus « à niveau », plus proche de l’expérience des usagers, en cherchant à étudier la forme matérielle que prennent les structures ainsi définies. De la même manière, nous projetons de réaliser une analyse de corpus, mais aussi de réaliser un terrain ethnographique, dans lequel sera demandé à un panel d’usagers de nous raconter le récit qu’ils ont expérimenté à travers des objets définis. Épistologiquement, nous nous positionnons à la jonction entre la tradition de la théorie des effets médiatiques (nous étudions comment l’objet fabrique ses participants) et celle de l’appropriation des objets par les personnes (comment l’interaction dépend du participant). Sur ce dernier point, nous nous inscrivons dans une filiation avec les travaux de notre promotrice Christine Servais. Nous sommes rattachés au Département des Arts et Sciences de la Communication de l’Université de Liège.

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  • Discours et pratiques autour des Ressources Educatives Libre. Etat des lieux de l’utilisation des REL en Europe

    Discours et pratiques autour des Ressources Educatives Libre. Etat des lieux de l’utilisation des REL en Europe

    imaginaire
    Cet article fait partie de la section scientifique « monde éducatif ». La méthode qui a été appliquée pour l’analyse des besoins est un questionnaire pour lequel nous avons obtenu 1176 réponses de  professeurs venant de 19 pays européens.

    Discours et pratiques autour des Ressources Educatives Libre. Etat des lieux de l’utilisation des REL en Europe : stimuler la création par l’utilisation et le partage des ressources numériques en Europe dans le cadre du projet Open Discovery Space.

    Le développement des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) a engendré un bouleversement sociétal. Cette mutation systémique de notre quotidien a impacté de nombreux domaines, l’enseignement et l’apprentissage n’y ont pas échappés, que ce soit au niveau des technologies disponibles, ou au niveau des innovations pédagogiques.

    Les écoles françaises sont équipées en PC, Tableau Blanc Interactif (TBI), tablettes, dotation pour l’achat de ressources (53 % des écoliers français ont accès facilement un ordinateur ou matériel similaire) [1].

    Seulement leur utilisation n’est pas toujours effective, 36% des professeurs utilisent les ressources pédagogiques numériques pour préparer leurs cours et 27 % pour monter des séquences d’activités en classe.

    Il ne suffit donc pas de doter un établissement scolaire d’un TBI pour que les professeurs l’utilisent quotidiennement, et il ne suffit pas de promouvoir l’utilisation des Ressources Educatives Libre (REL)[1] [2] pour qu’elles soient utilisées. L’utilisation des TIC dans les salles de classes a besoin d’être pensé de façon systémique, de tenir compte des variables externes et internes, globales et spécifiques.

    Au regard des diverses révolutions technologiques que le monde contemporain a connu et des recherches sur l’innovation, nous retiendrons que l’accompagnement a une grande part de responsabilité dans l’acceptation ou non de l’innovation. David Autissier et Jean-Michel Moutot [3] énoncent trois catégories de leviers de la conduite du changement : la communication, la formation et l’accompagnement.

    Afin de conduire au mieux le changement dans le développement et l’utilisation des technologies numériques, les acteurs mondiaux, européens et nationaux ont démontré leur volonté d’agir en ce sens. La « Déclaration de Paris sur les REL 2012 » [2] issue du  congrès mondial tenu à l’UNESCO en juin 2012 sur les REL, définit 10 objectifs, parmi lesquels  favoriser une meilleure connaissance des REL et leur utilisation, créer des environnements propices à l’utilisation des technologies pour l’information et la communication, faciliter la recherche, la récupération et le partage des REL, etc.

    La Commission européenne (2012) fait valoir que les TIC « changent radicalement la façon dont les gens apprennent et enseignent » et que ces ressources ouvertes « offrent une opportunité sans précédent d’améliorer à la fois l’excellence et l’équité en éducation » [4].

    En France, Vincent Peillon, Ministre de l’éducation, présente une « stratégie numérique globale » pour «  faire entrer l’école dans XXIème siècle » [5], il a déclaré que c’était une transformation « aussi importante que le fut, au XVème siècle, l’invention de l’imprimerie ».

    Aborder une telle transformation du système éducatif, nécessite de connaître les préoccupations des acteurs du changement de paradigme. C’est dans ce sens, que le projet Open Discovery Space (ODS) [6] a été crée. ODS est un projet européen qui regroupe 23 états et 51 partenaires, pour lequel l’Institut Mines Télécom, Ecole de Management, est coordonnateur national pour la France.

    Les objectifs de ce projet sont de promouvoir les REL, de former et d’accompagner les écoles européennes du 1er et du 2eme degré dans l’utilisation des REL. L’enquête que nous présentons est issue de la première phase du projet dont, l’objectif principal était d’étudier les besoins des enseignants en se concentrant sur : la formation, la politique et la stratégie, les problématiques culturelles et linguistiques, et la qualité des REL.

    Plus de 2000 professeurs européens ont participé aux sessions de formation du projet ODS, et nous avons obtenu 1176 réponses de  professeurs issus de 19 pays européens.

    Les résultats démontrent que l’un des défis crucial pour les professeurs (avec une moyenne de 3,23) est lié à l’évaluation de la qualité des ressources. Plus de 40% des répondants considèrent que la difficulté à identifier des ressources qui correspondent à leur programme d’étude est un obstacle important ou très important à l’utilisation des REL. Le manque de temps, le manque de soutien de l’organisation, et le fait de ne pas avoir l’habitude d’utiliser les REL sont des barrières qui paraissent plus ou moins infranchissables en fonction des pays interrogés. Il convient donc d’analyser ces différences, et d’adapter les actions en fonction des besoins des parties prenantes du milieu éducatif.

    Les résultats de cette enquête nous permettent d’appréhender les freins et contraintes liés à l’utilisation des TIC et des REL dans les salles de classe européenne et les exigences des professeurs, afin de pouvoir répondre à leurs besoins spécifiques en formation et en accompagnement. ODS plaide pour le développement des compétences ; former au choix  des ressources, accompagner les professeurs dans la création et le partage de ressources de qualité, et diffuser les bonnes pratiques. Nous présenterons le portail qu’ODS propose pour les professeurs, les élèves et les parents ainsi que les possibilités de formation et d’accompagnement aux méthodes d’enseignement et d’apprentissage basées sur les ressources numériques.

    La diffusion des TIC à l’intérieur et en dehors des salles de classe passe par une communication pour faire connaître au plus grand nombre les possibilités offertes par ces innovations techno-pédagogiques. Mais pas seulement, car face aux réactions que suscite le changement, il est indispensable de connaître les besoins, afin d’offrir les services numériques permettant de compléter les enseignements existants. Former et accompagner les professeurs dans le processus de changement est une ambition qui ne peut être mise en place sans l’aval et l’utilisation des intéressés.

    Bibliographie

    [1]  PROFETIC. Enquête sur les pratiques numériques des enseignants en France auprès de 6 000 enseignants du second degré. [En ligne]. Ministère de l’éducation nationale, Rapport du 14 juin 2012. Disponible sur http://eduscol.education.fr/numerique/actualites/veille-education-numerique/novembre-2012/pratiques-du-numerique-des-enseignants-enquete   (consulté le 25/02/2013).

    [2] Congrès mondial sur les ressources éducatives libres (REL). Paris, 2012. Déclaration de Paris sur les REL 2012. [En ligne]. Disponible sur : http://www.unesco.org/new/fileadmin/MULTIMEDIA/HQ/CI/CI/pdf/Events/French_Paris_OER_Declaration.pdf. (Page consultée le 25/02/2013).

    [3]  AUTISSIER David, MOUTOT Jean-Michel. Pratiques de la conduite du changement : Comment passer du discours à l’action. Paris : Dunod, 2003, 248p.

    [4] Ministère de l’Education Nationale. Ressources éducatives ouvertes : consultation en ligne de la Commission européenne. [En ligne]. Eduscol. In : Commission Européenne. Disponible sur : http://eduscol.education.fr/depeches-de-laef/170801. (Page consultée le 25/02/2013).

    [5] PEILLON Vincent. Faire entrer l’École dans l’ère du numérique, une ambition pour la refondation de l’Ecole. Discours, 2012 [En ligne]. Disponible sur : http://www.education.gouv.fr/cid66604/faire-entrer-l-ecole-dans-l-ere-du-numerique-discours-de-vincent-peillon.html. (Page consultée le 25/02/2013).

    [6]  Projet européen OPEN DISCOVERY SPACE (ODS). « A socially-powered and multilingual open learning infrastructure to boost the adoption of eLearning resources » . Disponible sur : http://www.opendiscoveryspace.eu/. (Page consultée le 07/03/2013).

    Autres références :

    – Chen, Q., 2010. Use of Open Educational Resources: Challenges and Strategies. Hybrid Learning, pp.339–351. Disponible sur : http://www.springerlink.com/index/L75U014G07014762.pdf  [Page consultée le 18 janvier2011].

    – Clements, K.I. and Pawlowski, J.M. (2011), « User oriented quality for OER: Understanding teachers, views on OER and quality » , Journal of Computer Assisted Learning, vol. 28, no 1, pp. 4-14.

    – Condon JC & Yousef F (1975) An Introduction to Intercultural Communication. Maximilian Publishing Company, New York.

    – Hylén, J. (2006) . Open educational resources: Opportunities and challenges. Proceedings of Open Education, pp.49–63. Disponible sur : http://www.knowledgeall.net/files/Additional_Readings-Consolidated.pdf  [Page consultée le 20 juillet 2011].

    – Pawlowski, J.-M. & Richter, T. (2010). A Methodology to Compare and Adapt E-Learning in the Global Context. In: Breitner, M.H. (Ed.), E-Learning 2010 – Aspekte der Betriebswirtschaftslehre und Informatik. Physica-Verlag HD, Berlin, pp.3-14

    – Richter, T. & Ulf-Daniel, E., 2011. Barriers and Motivators for Using OER in Schools. eLearning Papers, 23(Mars), pp.1–7.



    [1] L’expression REL a été créée lors du Forum UNESCO de 2002, et désigne « des matériels d’enseignement, d’apprentissage et de recherche sur tout support, numérique ou autre, existant dans le domaine public ou publiés sous une licence ouverte permettant l’accès, l’utilisation, l’adaptation et la redistribution gratuits par d’autres, sans restrictions ou avec des restrictions limitées…» [2]

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  • Les interfaces numériques dans l’imaginaire de science-fiction : demain, quelle connexion homme-machine ?

    Les interfaces numériques dans l’imaginaire de science-fiction : demain, quelle connexion homme-machine ?

    imaginaireLa science-fiction, qu’il s’agisse de la littérature ou du cinéma, est une bonne façon d’entrer dans les imaginaires numériques contemporains. Il est intéressant de se demander comment la science-fiction se saisit d’une problématique majeure des technologies numériques, celle des interfaces. Comment imagine-t-on demain notre connexion avec les machines, et plus largement avec  l’infosphère, à laquelle ces machines nous donnent accès ?

    La question des interfaces numériques mobilise aujourd’hui les ingénieurs, qui tentent d’aller vers des solutions toujours plus « conviviales » (efficaces, simples, intuitives) pour faire communiquer l’homme la machine ; mais depuis longtemps les auteurs de SF se sont également saisis de cet enjeu de l’interface, qui apparaît en effet comme un nœud essentiel de la relation homme-machine. De la nature de ces interfaces dépendra pour une large part la nature de cette interaction.

    Cette communication se propose d’explorer les imaginaires de science-fiction autour des possibles évolutions de ces interfaces, dont découlent des configurations de rapports homme-machines bien différentes. A travers divers exemples d’oeuvres de SF, nous souhaitons développer deux idées-forces :

    • L’intégration biologique croissante des interfaces. Sans aller jusqu’au cyborg, mi-homme mi-machine (bien incarné au cinéma par le Robocop de Paul Verhoeven), la SF a un faible pour l’interpénétration de l’organique et de l’électronique : il peut s’agir d’implants électroniques permettant à l’homme de communiquer plus vite et mieux avec les machines, mais parfois aussi d’interfaces quasiment organiques comme les biopod d’Existenz, de David Cronenberg. Cette « convergence Nanosciences Biologie Informatique Cognition » est appelée de leurs vœux par les tenants de la post-humanité, qui rêvent de cette fusion de l’homme et de la machine.
    • Les interfaces numériques imaginées par la science-fiction sont très marquées par le paradigme de la réalité virtuelle. Il s’agit souvent de technologies lourdes, reprenant parfois les casques et gants des premiers prototypes de réalité virtuelle, mais plus souvent encore imaginant des techniques encore plus immersives, comme des caissons de réalité virtuelle donnant accès à une réalité virtuelle très réaliste. Ce type d’interface engendre une relation avec l’infosphère assez particulière : très immersive (via des univers virtuels), exclusive et excluante (induisant une coupure avec le monde réel). L’interface hard (le caisson ou le casque de réalité virtuelle), se double d’une interface soft, sous la forme d’un avatar que l’on pilote dans la réalité virtuelle.En ce domaine, la science-fiction a indubitablement ouvert la voie, puisque c’est à  écrivain de SF, William Gibson, que l’on doit la notion de cyberspace (dans son roman Neuromancien, de 1984), conçu comme une « hallucination consensuelle » qui permet aux humains de naviguer dans une sorte de réalité virtuelle abstraite représentant les paquets d’informations stockés dans le réseau informatique mondial.

    Mais la science-fiction trouve aussi ses limites avec sa fascination pour le paradigme de la réalité virtuelle, qui lui fait peut-être négliger d’autres évolutions actuelles des interfaces. Internet n’est toujours pas une « réalité virtuelle » remplaçant notre monde ; on s’y connecte toujours au moyen d’interfaces désormais classiques : clavier-écran-souris. La véritable révolution tient plutôt dans la miniaturisation et la portabilité de ces interfaces : avec les notebooks, les tablettes et les smartphones, on a désormais la possibilité d’une connexion permanente et ubiquiste avec l’infosphère.

    Cette connexion ne se substitue pas à la réalité, ne l’abolit nullement, mais au contraire vient l’enrichir : le paradigme de la réalité augmentée, qui vient ajouter une couche d’information au réel, semble encore assez peu développé dans l’imaginaire de SF, à quelques exceptions près.

     

    Note de positionnement scientifique

    Section de rattachement CNU : 23 (Géographie)

    Cette communication se rattache à la géographie des représentations, appliquée au  domaine du numérique.

    La géographie s’intéresse au numérique parce que les TIC lui offrent un nouveau monde à explorer :

    • D’abord, les TIC modifient notre rapport à l’espace géographique, en modifiant les notions de temps, de distance, et de situation dans l’espace (avec la géolocalisation)
    • Ensuite, les TIC révolutionnent la représentation cartographique de l’espace, à travers les SIG, l’imagerie satellitaire, etc.
    • Enfin, les TIC créent de nouveaux espaces virtuels, qui ont leur propre géographie. Il peut s’agir d’une géographie matérielle (des câbles, serveurs et terminaux Internet, par exemple), mais aussi d’une géographie virtuelle (les espaces virtuels des jeux vidéos, par exemple, ont aussi une géographie propre…)

    Le numérique est donc bien un objet géographique, qui bouleverse la géographie réelle, et constitue même un monde géographique virtuel. Cet univers numérique est également l’objet de représentations, qui peuvent être étudiées en tant que telles, comme pour tous les autres objets géographiques.

    La méthode d’analyse de ces représentations est ici l’analyse et la comparaison de discours : en l’occurrence, le discours, les représentations, et  l’imaginaire véhiculés par les œuvres de science-fiction, autour de la question des interfaces numériques.


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  • La fiction imaginale

    La fiction imaginale

    imaginaireTandis que s’imposent de multiples innovations techniques et la possibilité d’agir sur le vivant, les artistes de la première génération du numérique interrogent, dès 1990, les effets culturels et psychiques de ces bouleversements. Ces « fictions prométhéennes » sont marquées par le retour de figures mythologiques, chimériques ou androgynes qui, de Prométhée à Protée, semblent inscrire l’imaginaire post-humain sous l’égide d’un archaïque en devenir.

    Ces artistes, pionniers du numérique, expérimentent alors des potentiels d’identités fictives et favorisent le glissement d’une problématique du corps – devenu obsolète et nomade – vers celle du visage, afin d’insister sur une époque marquée par des interfaces communicationnelles, par le règne des surfaces et travaillée par de nouvelles modalités de pouvoir.

    Or, si l’apparition d’une nouvelle technique résonne sur la société sous le prisme séducteur d’une fiction, le numérique agence, lui, à l’image d’un mythe des origines, la narration d’un « imaginal[1] », autrement plus subtil. Il remémore en effet un intermonde mi-réel, mi-virtuel qui brouille toutes les frontières et donne consistance à des formes hybrides et « entre-deux ». Sans doute, ces récits ont-ils favorisé l’accueil et la critique du numérique en préparant les esprits, mais aussi les aspects culturels, éthiques et politiques de nos sociétés. Sans doute, ont-ils débridé l’imaginaire et renouvelé les expériences perceptives et cognitives des individus selon des logiques transversales, complexes ou topologiques.

    Cependant la postérité ne semble retenir de cette épopée, ni l’image de l’homme d’après ni les enjeux politiques et épistémologiques de ces expérimentations, mais la fascination quelque peu fétichisée des spécificités numériques. Le désir de perturber le réel par le « jeu des possibles » institue une grammaire visuelle à part entière qui s’épuise peu à peu dans une codification normalisée par le marché des images.

    Cette imagerie façonne dès lors un nouvel ordre visuel, mais également un nouveau marché cognitif où se définissent les croyances et les idées d’une époque. L’étau du réel se relâchant, le capital imaginaire est devenu une force sociale généralisée, dont le capitalisme culturel ou cognitif a fait sa matière première. Cette nouvelle économie semble alors commander et réguler, par l’appropriation des pouvoirs imaginaux, l’énergie psychique, créatrice et symbolique des individus. L’exploitation sociale de cet imaginal, parce qu’il dialogue avec l’inconscient collectif, devient donc l’enjeu d’une appropriation et d’une modélisation. Car qui dit contrôle de l’image et de la production symboliques dit aussi gestion et administration des visibilités et des subjectivités.

    Aujourd’hui, le passage d’une problématique de l’ontologie vers une médiologie, préférant aux notions de « virtuel », de « déréalisation » ou de « simulacre », celles de « 2.0 », de « traçabilité » ou de « données sémantiques » inscrit les discours dans une optique performative. Ainsi la question n’est-elle pas de savoir si c’est mondes intermédiaires existent ou pas, s’ils font revivre le fantasme d’un arrière-monde platonicien, ce qui compte c’est comment cet imaginal pénètre les consciences et participe à modéliser une mémoire commune tissée de virtualités et de mondes possibles.

    De telle sorte que le retour aux origines signe plus profondément la crise du réel lui-même. Il n’y a plus de réalité que construite, si bien qu’il s’agit désormais de découvrir la vérité derrière les apparences, de penser l’origine non plus en arrière de nous, mais en avant. En un mot, plutôt que de faire retour, il faut prédire, modéliser, anticiper.

    C’est pourquoi, au cœur de l’imaginal numérique se produit l’articulation entre arkhaios et arkhein. L’arkhè désigne en effet, à la fois le « commencement » et le « commandement » : arkhaios signifie « qui remonte aux commencements » et arkhein « commander »[2]. Ainsi tekhnè et arkhè se confondent-ils à travers la nécessité d’articuler l’origine et le commandement. La fiction imaginale devient le liant entre mythes et mythologisation des innovations, modèle et matrice d’un univers construit techniquement.

    La compréhension des imaginaires du numérique est donc une opération complexe, puisque d’une part, se cristallise un imaginal archaïque, et d’autre part, s’esquissent les bases d’une confrontation entre fantasmes technophiles et crispations technophobes liées au contrôle, non plus des corps, mais des imaginaires (de la psychè et du cognitif). Afin d’éviter tout glissement conduisant fatalement à un double écueil : celui naïf d’un archaïsme fictionnel et celui stérile d’une lutte entre deux visions de la technique, nous examinerons comment l’art d’aujourd’hui devient l’instrument d’un jeu du possible mimant les dispositifs d’une « mythologisation » propre au discours technique.

    Méthodologie :

    Ma communication s’appuie sur un corpus d’œuvres contemporaines exploitant le medium numérique. Si mon domaine de prédilection est l’esthétique, ma méthode est avant tout transdisciplinaire et se prolonge volontiers dans les Cultural Studies.

    Références bibliographiques :

    Balandier G. (1985), « L’imaginaire désorienté » in Le détour. Pouvoir et modernité, Paris, Fayard.

    Barthes R. (1957), Mythologies, Paris, Seuil.

    Couchot E. et Hilaire N. (2003), L’art numérique. Comment la technologie vient au monde de l’art, Paris, Flammarion.

    Janicaud D. (1985), La puissance du rationnel, Paris, Gallimard.

    Mons A. (2006), Paysage d’images. Essai sur les formes diffuses du contemporain, Paris, L’Harmattan.

    Scardigli V. (1989), « Nouvelles technologies : l’imaginaire du progrès », in L’imaginaire des techniques de pointe. Au doigt et à l’œil, sous la direction d’Alain Gras et Sophie Poirot-Delpech, Paris, L’Harmattan

    Semprini A. (2003), La société de flux. Formes du sens et identité dans les sociétés contemporaines, Paris, L’Harmattan.

    Sfez L. (2002), Technique et Idéologie. Un enjeu de pouvoir, Paris, Seuil.

    Musso P., Ponthou L., Seulliet É. (2005 et 2007), Fabriquer le futur 1 & 2. L’imaginaire au service de l’innovation, Pearson Education France, Paris.



    [1] Entendons par imaginal, un ensemble de représentations primordiales, de prototypes symboliques n’ayant pas d’équivalent dans le réel, mais qui pourtant participe au rayonnement psychique en proposant un « univers partagé de symboles ». C. Fleury (dir.) Imagination, Imaginaire, Imaginal, PUF, Paris, 2006, p.15.

    [2] J. Picoche, Dictionnaire étymologique du Français, Paris, Le Robert, 1992.

     

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