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  • Comment mettre en place un projet 1 élève/1 tablette dans son école en prenant en compte les avancées de la recherche?

    Comment mettre en place un projet 1 élève/1 tablette dans son école en prenant en compte les avancées de la recherche?

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    Nous accompagnons depuis une année une école primaire, institution bilingue et privée située aux abords du lac Léman, en veillant à mettre en œuvre les composantes d’un référentiel de réussite basé sur les recherches de Barrette (2004a, 2004b, 2009a, 2009b, 2011).

    Dans cet Explorcamp, nous nous réjouissons de vous présenter comment, concrètement, nous avons mis en œuvre ces « ingrédients de la réussite ».

    Nous aborderons, certes, les aspects techniques, mais mettrons l’accent sur l’importance d’un accompagnement holistique des acteurs. Notre présentation sera illustrée de quelques séquences vidéos capturées dans leurs classes.

     

    Barrette, C. (2004a). Vers une métasynthèse des impacts des TIC sur l’apprentissage et l’enseignement dans les établissements du réseau collégial québécois. De la recension des écrits à l’analyse conceptuelle. Clic, Bulletin colllégial des technologies de l’information et des communications, no 55. Consulté le 26 septembre 2012 sur http://clic.ntic.org/cgi-bin/aff.pl?page=article&id=1085

    Barrette, C. (2004b). Vers une métasynthèse des impacts des TIC sur l’apprentissage et l’enseignement dans les établissements du réseau collégial québécois. Parcours méthodologique. Clic, Bulletin colllégial des technologies de l’information et des communications, no 56. Consulté le 26 septembre 2012 sur http://clic.ntic.org/cgi-bin/aff.pl?page=article&id=1079

    Barrette, C. (2009a). Métarecherche sur les effets de l’intégration des TIC en pédagogie collégiale. Revue internationale des technologies en pédagogie universitaire, 6(2-3).

    Barrette, C. (2009b), Une grille d’analyse pour jeter un regard critique sur les activités TIC. Clic, Bulletin colllégial des technologies de l’information et des communications, no 71. Consulté le 26 septembre 2012 sur http://clic.ntic.org/cgi-bin/aff.pl?page=article&id=2146].

    Barrette, C. (2011). La grille d’analyse du scénario d’une activité pédagogique misant sur les TIC. Pédagogie collégiale, vol. 24, no 4, été 2011, pp. 20-25. Consulté le 26 septembre 2012 sur http://www.infiressources.ca/fer/depotdocuments/Grille_d_analyse_du_scenario_d_une_activite_pedagogique_misant_sur_les_TIC-BaretteCollectif-Vol_24-4.pdf

     

    A propos des auteurs :  Christian Fantoli et Gabriel Parriaux
    Découvrir le programme ExplorCamps Ludovia#12.

  • Partager le numérique et le détourner, cela va de soi #ludovia12

    Partager le numérique et le détourner, cela va de soi #ludovia12

    « Numérique et éducation, entre appropriations et détournements », tel est le thème de la 12e édition de Ludovia à Ax-les-Thermes, très bientôt.

    Franchement, si vous n’avez rien de mieux à faire en cette fin août, c’est là qu’il faut être, sans aucun doute. C’est magique, du matin au soir.

    Pour ma part, je vais cette année manquer le rendez-vous et j’en suis fort désappointé.

    Pour ma part, pour tout dire, j’éprouve quelques réticences pour accepter cette idée de s’approprier le numérique, en matière d’éducation comme dans d’autres domaines. S’approprier, c’est prendre pour soi, c’est devenir propriétaire, d’une certaine manière, et l’acception me paraît peu compatible avec ce que je sais du numérique et de ce qu’il induit de partage et d’horizontalité réticulaire — clin d’œil à mes complices de Nipédu.

    On peut aussi le comprendre comme une accommodation, une acculturation progressive, une manière d’avancer les bras pour mieux cerner, pour mieux comprendre — com-prendre ? —, pour mieux appréhender… S’il s’agit de cela, j’agrée bien volontiers cette démarche, à condition que les bras qu’on avance puissent rapidement s’ouvrir. Il ne s’agit pas de générosité, il s’agit juste d’enrichissement mutuel.

    Dans ce deuxième sens, oui, il faut s’approprier le numérique, d’accord. Sauf à s’assécher, quand on a soif, il faut boire.

    Le détournement est consubstantiel du numérique, lui aussi. Détourner le numérique est presque un pléonasme. Il en va d’ailleurs du numérique comme de l’innovation, c’est quand ils commencent à s’institutionnaliser — des colloques et salons pour le premier, une journée annuelle pour la deuxième, des services académiques pour tous les deux — qu’il convient d’être à leur sujet encore plus disruptif, comme on dit, voire subversif.

    On voit bien comment cette institutionnalisation est facteur de sclérose quand le numérique consacre et sublime les usages au détriment des pratiques professionnelles et de l’engagement.

    Michel Serres, en réponse à L’Hebdo, dit privilégier les errances, zigzags et bifurcations pour pouvoir, de manière lucide, créer et inventer. L’école n’échappera pas non plus à cette obligation.

    Les tenants rabougris de la fermeture et du repli sur soi et sur des valeurs surannées ont perdu d’avance, soyons-en certains.

    Cette nouvelle édition de Ludovia sera disruptive, j’en fais le pari. Et les zigzags des participants seront plus à mettre au compte des doutes, des hésitations, des volontés de contourner ou de détourner, de « hacker » l’école, peut-être, que des quelques et légers excès de boisson vespéraux.

    À tous, à Aurélie, à Éric, à tous les amis, à tous les autres, je souhaite une superbe nouvelle édition. Je vous embrasse.

    Michel Guillou @michelguillou

    A lire sur http://www.culture-numerique.fr

  • Déjouer les dispositifs : l’art et le jeu comme modes d’appropriation

    Déjouer les dispositifs : l’art et le jeu comme modes d’appropriation

    La question du jeu dans les expositions d’art contemporain semble incontournable aujourd’hui si on fait le constat des nombreuses œuvres qui proposent une dimension interactive et ludique. Mais il est intéressant de constater aussi que des jeux-vidéos ont été conservés récemment au Musée d’Art Moderne de New York. Ainsi, nous évaluerons dans un premier temps des points de rencontre entre œuvres d’art et jeux-vidéos pour suggérer des hybridations entre conduites artistiques (Schaeffer) et attitudes ludiques (Henriot). Pour rendre compte de la nécessaire remise en question d’une catégorisation stricte de ces activités, le corpus proposé reposera principalement sur l’étude d’un jeu vidéo qui a été conservé au Musée d’Art Moderne, ainsi que d’une installation personnelle pouvant être qualifiée de jouable.

    Notre approche de ce corpus posera alors la question de l’appropriation et du détournement à travers une dialectique entre emprise et lâcher prise. Abordant des problématiques de société de contrôle et de surveillance à l’ère des nouvelles technologies, les créations présentées interrogent nos rapports aux dispositifs, mais aussi l’emprise que ces derniers exercent sur notre habitus ainsi que nos capacités (ou incapacités) à les détourner, les déjouer ou les profaner (Agamben) pour enfin se les approprier. Cette question semble incontournable alors même qu’une inquiétude se fait sentir face à des phénomènes d’esthétisation du monde (Lipovetsky, Serroy) ou de dissémination vidéoludiques dans nos sociétés (Lavigne). En s’appropriant des schèmes cognitifs qui sous-tendent les pratiques artistiques et ludiques, ces tendances semblent bien jouer sur nos désirs de lâcher prise, mais à des fins de productivité et de rentabilité économique. Nous opterons donc, à l’instar de Stiegler, pour une réhabilitation de la pratique au détriment de l’usage concernant les produits de notre société, que ces derniers soient catégorisés comme des objets techniques, des objets numériques, des œuvres d’art ou bien des jeux.

    Positionnement scientifique

    D’un point de vue méthodologique, je souhaite aborder ce sujet de manière dialectique à travers une démarche de création recherche, approche qui est chère aux chercheurs du LARA (Laboratoire de Recherche en Audiovisuel). Personnellement impliqué activement au sein d’une association d’artistes (Patch_work, arts émergents), j’effectue en relation avec ma pratique artistique des résidences d’artistes, des ateliers pédagogiques et participe notamment à l’organisation de manifestations culturelles. Mon propre travail de création vient donc enrichir mon travail de recherche dans un dialogue toujours fécond entre la pratique et la théorie.

    Cette approche relie donc une réflexion d’ordre individuelle tournée vers la compréhension subjective de l’art, avec une approche plus scientifique qui permet l’échange et le partage des connaissances. Elle s’inscrit plus généralement comme une démarche de théorie de l’art et par l’art.

    Plus d’infos sur la programme du colloque scientifique sur www.ludovia.org/2015/colloque-scientifique

    A propos de l’auteur Raphaël Bergère

  • Projet INCA, éditeur d’activités collaboratives en ligne

    Projet INCA, éditeur d’activités collaboratives en ligne

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    Différents travaux précisent la dimension sociale et collaborative des apprentissages (Gokhale, 1995 ; Nowak et al, 1996 ; Galagan, 2009) mais cette modalité des activités d’apprentissage reste pourtant difficile à mettre en œuvre au sein de dispositifs d’éducation formels.

    La forme scolaire classique est peu propice aux activités collectives et, malgré des avancées notables tant sur le plan didactique que pédagogique, l’enseignement scolaire peine à proposer des scénarios qui intègrent efficacement les processus de collaboration (Rollet, 2007).

    L’essor des technologies numériques a conduit à réfléchir à de nouveaux artefacts qui suscitent et organisent l’activité collective. Les surfaces tactiles (TNI, tablettes, smartphones, tables tactiles, sol interactif… ), surtout lorsqu’elles possèdent des interfaces multiutilisateurs et qu’elles sont communicantes, sont manifestement très sous-exploitées en la matière comme en témoignent plusieurs rapports d’évaluation ou de recherche rédigés à l’occasion des différents plans d’équipement d’établissements scolaires en tableaux numériques interactifs en France et au-delà.

    Le choix des technologies a été basé sur deux dispositifs différents pour la réalisation d’une activité de collaboration : un dispositif qui intègre à la fois des technologies de type individuel (ordinateur, papier brouillon) et des technologies de type collaboratif (TBI, écran/table tactile, tableau blanc) ; et un dispositif qui intègre seulement des technologies de type collaboratif.

    Pour la mise en oeuvre des deux dispositifs, 24 élèves d’une classe de seconde en histoire ont été divisés en 6 groupes de 4 élèves chacun. Trois groupes ont été attribués des technologies collaboratives et individuelles et trois groupes ont été attribués des technologies seulement collaboratives.

    Groupes Technologie collaborative Technologie individuelle
    1 TBI Ordinateur
    2 Projecteur + table blanche
    3 Ecran tactile Sans technologie individuelle
    4 Table tactile
    5 Tableau blanc + post-it Sans technologie individuelle
    6 Papier brouillon + crayon

    
Relation avec le thème de l’édition Ludovia#12

    Le projet INCA vise à mettre à disposition des élèves et des enseignants un éditeur ou plateforme d’activités collaboratives qui soit capable de transmettre ou de recevoir des informations numériques d’un support individuel (tablette tactile, ordinateur, smartphone) vers un environnement numérique collaboratif (table, écran interactif) de visualisation collective.

    Cette plateforme sera adaptée à tout type de support de système d’exploitation qu’utilisent aujourd’hui les adolescents et les établissements scolaires.

    D’un point de vue pédagogique, la plateforme collaborative du projet INCA permet à l’enseignant d’accéder à un catalogue de séquences pédagogiques prédéfinies par matière, niveau, thématique et tâches, de manière à faciliter les possibles adaptations si besoin.

    L’ensemble de la plateforme peut être comparé à un ENT dans la mesure où il y a un espace enseignant et un espace élève, en même temps que chacun a à leur disposition des espaces individuels ou collaboratifs.

    Dans cette dernière dimension, la plateforme collaborative INCA peut être considérée comme un ENC (Environnement Numérique de Collaboration).

    Le projet INCA a comme but d’explorer les possibilités des dispositifs numériques de collaboration à partir de la conception, le développement et l’implémentation de prototypes fonctionnels. L’ensemble du projet est destiné tant aux enseignants –mise en place des séquences pédagogiques collaboratives- comme aux élèves –mise en place des activités collaboratives. L’expérience qui se présente ci-dessus relève uniquement de la partie du projet destiné aux élèves –mise en place d’une activité de collaboration type carte mentale.

    Les premières observations de cette activité révèlent que :

    • les élèves qui n’avaient pas d’espace individuel devaient atteindre que le camarade qui avait le clavier finisse d’écrire pour prendre la main de l’outil ; en revanche, les élèves avec un espace privatif étaient plus productifs car ils écrivaient en même temps dans leur espace privatif et dans l’espace collaboratif.
    • Les élèves qui n’avaient pas d’espace individuel mettaient en commun leurs idées à l’orale avant que quelqu’un écrive les nœuds de la carte mentale sur l’écran collaborative ; en revanche, les élèves avec un espace individuel mettaient en commun leurs idées à l’orale après avoir partagé avec leurs camarades leurs nœuds individuels. Cette dernière option donnait lieu à des débats plus complexes car les élèves s’étaient appropriés des nœuds auxquels ils avaient déjà réfléchi dans leur espace individuel avant du partage.
    • Les élèves qui n’ont pas utilisé de technologie numérique ont arrivé à des productions similaires aux élèves qui ont utilisé les technologies numériques. En revanche, les élèves qui ont utilisé les outils numériques remarquent la facilité de lecture, d’organisation et la rapidité pour effacer ou ajouter des nœuds, ce qui est plus confus pour certains quand ils écrivent à la main.
  • Les figures de l’usager des Technologies de l’Information et de la Communication à l’interdiscipline des sciences de gestion, du droit et des sciences de l’information et de la communication

    Les figures de l’usager des Technologies de l’Information et de la Communication à l’interdiscipline des sciences de gestion, du droit et des sciences de l’information et de la communication

    [callout]L’objectif de cette communication est de faire une revue de différentes littératures des sciences humaines et sociales – plus précisément les sciences de l’information et de la communication, le droit et les sciences de gestion – qui ont abordé l’usager des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) sous différentes perspectives pour en offrir une vision étendue et apprécier son évolution au fil du temps, des évolutions technologiques et de la numérisation de l’économie et de la société de l’information.[/callout]

    Cette approche pluridisciplinaire permet d’articuler des cadres théoriques complémentaires pour se saisir de la figure de l’usager qui traverse les SHS depuis une trentaine d’années.

    Les sciences de l’information ont produit plusieurs de ces cadres théoriques, notamment en réaction aux approches techno-déterministes. La dernière livraison de la Revue Française des Sciences de l’Information et de la Communication consacre un intéressant dossier aux « Usages et usagers de l’information à l’ère numérique » qui dresse un bilan de trente années d’études d’usages et dessine les grandes orientations passées et à venir de la sociologie des usages (avec les changements paradigmatiques liés à l’essor du big data). Des contributeurs très engagés dans cette branche y ont pris part, en particulier Serge Proulx (2015).

    Les sciences de gestion se sont, elles, surtout intéressées à la place de l’usager dans le contexte organisationnel et aux différentes modalités de son engagement dans les projets de changement du système d’information de l’entreprise pour obtenir son acceptation et éviter les phénomènes de résistance au changement et d’inertie organisationnelle. Ces travaux ont beaucoup apporté à la compréhension des phénomènes d’appropriation des TIC dans les organisations (de Vaujany, 2003).

    Enfin, le droit apporte également un éclairage important sur la nature changeante de l’usager des TIC à travers les époques. Ce dernier s’est peu à peu transformé en passant du statut de simple consommateur – recevant passivement les technologies (principalement des artefacts matériels) sans questionner leur design et leurs capacités ou en les détournant avec plus ou moins d’ingéniosité – au statut de co-créateur participant à certaines évolutions technologiques (principalement les interfaces de services en ligne en version « bêta » perpétuelle).

    Ce consommateur s’est aussi fréquemment mué en producteur du contenu de ces mêmes services (d’où l’expression « contenus générés par les utilisateurs » ou UGC, qui sont caractéristiques des services du web 2.0 tels que Facebook ou YouTube). Ces mutations ont nécessairement impacté le statut juridique du consommateur-producteur impliqué dans ces nouvelles manières de consommer en fournissant une force de travail dans les nouveaux régimes concurrentiels nés de ces nouveaux écosystèmes (Pénard, 2006), au premier rang desquels Facebook.

    L’usager doit donc être repensé dans son ensemble en lien avec le changement de nature des TIC et en mettant en lumière, de manière historique, la propre évolution qui le caractérise, spécialement les transformations de son rôle. Il est passé d’un statut de simple utilisateur recevant les TIC de manière plus ou moins passive ou créative, à un statut d’usager dont l’avis est pris en compte en amont lors des phases de conception des TIC, pour en arriver à son plus récent statut de co-créateur et co-producteur des services. Il est donc légitime de questionner cette évolution à travers les éclairages du droit mais également des SIC et de la gestion.

    Cette évolution ayant déjà été abordée par des auteurs issus de différentes traditions de recherche, il nous paraît pertinent de tenter un rapprochement de leurs apports respectifs pour offrir des grilles de lecture compréhensives de l’usager des TIC sous ses multiples facettes (utilisateur, inventeur, consommateur, salarié, citoyen…).

    Dans ce travail, nous nous proposons d’articuler des approches généralement séparées pour caractériser l’évolution du statut de l’usager dans le temps et en suivant les évolutions technologiques qui se sont succédées.

    Transformation que l’on peut illustrer avec l’exemple du passage des études d’usages menées dans le cadre d’enquêtes sociologiques portant sur la réception du magnétoscope, de la téléphonie mobile, des baladeurs… à des études d’usages de services en ligne (Facebook, FlickR, YouTube…) conduites à partir des données de trafic dans le cadre des nouvelles méthodologies issues du big data (Denouel et Granjon, 2011 ; boyd et Crawford, 2012).

    La transformation des TIC objets (matérialité des artefacts) à des TIC de plus en plus virtuels (interfaces web, sites, applications mobiles…) brouille d’autant plus les cartes que les usagers se saisissent des outils, les peuplent et les alimentent en produisant du contenu mais vont aussi permettre de les façonner en fonction des usages qu’ils vont enacter (amélioration permanente des services web, ajouts de fonctionnalités manquantes…).

    L’objet TIC (ou le TIC-objet) évoluant, la figure de l’usager le suit et les cadres théoriques pour les aborder se doivent d’évoluer pour réussir à continuer à comprendre la place de l’usage dans les phénomènes d’appropriation, de détournement et, plus encore, de création et de développement. La place grandissante des usagers et le poids de leur prise en compte dans la conception, le développement et maintenant l’évolution des technologies se détecte dans l’étude des travaux historiques (Akrich, Callon et Latour, 2006) mais se constate surtout dans les travaux les plus récents (Denouel et Granjon, 2011 ; Vidal, 2012).

    L’usager des TIC a mille visages. Il peut être entre aperçu chez le simple utilisateur mais passionne d’autant plus qu’il est à la source d’innovations avec des figures telles que le lead user (von Hippel, 2005), l’early adopter (Rogers, 1983), l’amateur à la pratique quasi professionnelle (Miller et Leadbetter, 2004 ; Flichy, 2010), le porte parole (Akrich, Callon et Latour, 2006), l’utilisateur pilote ou le leader d’opinion (super utilisateur dans les projet SI), le client mis au travail (Dujarier, 2008) avec les problématiques du digital labour (Fuchs et Sevignani, 2013) et du crowdsourcing (Bahbam, 2014), le consommateur évaluateur (Pasquier, 2014), le salarié bricoleur du SI (Ciborra, 1999)…

    Sur la base de notre revue des différents apports théoriques pluridisciplinaires en sciences humaines et sociales, qui ont interrogé l’évolution des usages des TIC, recentrant de manière récurrente mais encore dispersée leurs questionnements sur les usagers, nous proposons une construction interdisciplinaire, qui s’attachera à typologiser les multiples figures de l’usager. Nous analyserons les différents champs de compétences (techniques, économiques, juridiques, culturelles, sociales, etc.) que les usagers mobilisent, afin d’appréhender des dispositifs numériques en évolution constante, la place qui leur est allouée au sein de ces dispositifs et celle dont ils se saisissent concrètement.

    Cette analyse interdisciplinaire prendra pour terrain d’étude le site web communautaire Reddit, qui nous apparaît concentrer les usages « mainstream » de partage de liens et de textes, voire offrir une vue d’ensemble de ce qui se lit et s’écrit sur Internet (« The front page of the Internet », « Have you already read it », votes, karma, etc.). Nous envisageons une analyse croisée de l’organisation du site (cadrage éditorial, injonctions à l’interactivité, subreddit, etc.) et des réponses actives des contributeurs (détournements des injonctions, production de contenus, usages en lecture-écriture, compétences mobilisées, etc.) afin d’isoler différents types d’usagers, dont la typologie générale saura rendre compte des principales figures.

    Note de positionnement scientifique

    Amelle Guesmi est Maître de conférences en Droit privé.

    Samy Guesmi est enseignant chercheur qualifié aux fonctions de Maître de conférence par la section 06 du CNU (Sciences de Gestion).

    Céline Lacroix Masoni est Maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication.

    Le travail proposé est résolument pluridisciplinaire et même interdisciplinaire.

    Références bibliographiques

    • Akrich M., Callon M., Latour B. (2006) Sociologie de la traduction. Textes fondateurs. Paris, Presses de l’Ecole des Mines, 2006.
    • boyd d. et Crawford K. (2012) « Critical questions for Big Data. Provocations for a cultural, technological and scholarly phenomenon » Information, Communication & Society, Vol. 15, n°5, p. 662-679.
    • Brabham D. (2013) Crowdsourcing. MIT Press, Boston, Massachusetts, 2014.
    • Ciborra C. (1999) A Theory of Information Systems Based on Improvisation. p. 136–155 In: Currie, W., Galliers B. (eds.) Rethinking Management Information Systems. Oxford University Press, Oxford, 1999.
    • Dujarier M.-A. (2008) Le travail du consommateur. De McDo à E-Bay: comment nous coproduisons ce que nous achetons. Edition La Découverte, 2008.
    • Denouël J. et Granjon F. (2011) dir., Communiquer à l’ère numérique. Regards croisés sur la sociologie des usages. Paris. Presses des Mines, 2011.
    • Flichy P. (2010) Le sacre de l’amateur. Sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique, Seuil, Coll. La République des Idées, Paris, 2010.
    • Fuchs C. et Sevignani S. (2013) « What is Digital Labour? What is Digital Work? What’s their Difference? And why do these Questions Matter for Understanding Social Media? », Triple C, Vol. 11, n°2, p. 237-293.
    • Hippel (von) E. (2005) Democrazing Innovation. MIT Press, Boston, Massachusetts, 2005.
    • Lévy P. (1994) L’intelligence collective, pour une anthropologie du cyberspace, Paris, La Découverte.
    • Miller P. et Leadbetter C. (2004) The Pro-Am Revolution : How Enthusiasts Are Changing Our Society and Economy. Demos Publications, New-York, 2004.
    • Pasquier D. (2014) « Les jugements profanes en ligne sous le regard des sciences sociales » Réseaux, Vol. 33, n°183, p. 9-25.
    • Pénard T. (2006) « Faut-il repenser la politique de la concurrence sur les marchés internet? » Revue Internationale de Droit Economique, tome XX, n°1, p. 57-88.
    • Proulx S., Garcia J.-L ?, Heaton L. et al. (2014) La contribution en ligne, Pratiques participatives à l’ère du capitalisme informationnel, Presse de l’Université de Québec.
    • Proulx S. (2015) « La sociologie des usages, et après ? », Revue Française des Sciences de l’Information et de la Communication, en ligne 6/2015, mis en ligne le 1er janvier 2015, consulté le 3 février 2015. URL : http://rfsic.revues.org/1230.
    • Rogers E. (1983) Diffusion of innovation. New York. The Free Press, 3ème édition, 1983.
    • Vaujany (de) F.-X. (2003) « Les figures de la gestion du changement sociotechnique », , Sociologie du travail, Vol. 45, n°4, p. 515-536.
    • Vidal G. (2012) dir., La sociologie des usages. Continuités et transformations. Paris. Hermès Lavoisier, 2012.
    • Wittorski R. (1997) Analyse du travail et production de compétences collectives, Paris, L’Harmattan.

    Plus d’infos sur la programme du colloque scientifique sur www.ludovia.org/2015/colloque-scientifique

    A propos des auteurs Amelle Guesmi, Samy Guesmi et Céline Lacroix Masoni

  • Classes en acte : Correspondance scolaire et projets à distance à l’ère du numérique

    Classes en acte : Correspondance scolaire et projets à distance à l’ère du numérique

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    En septembre 2013, nous avons mis en place un réseau de classes de différents pays (Suisse, Belgique, France, Canada, Népal) désirant construire et développer des projets communs à distance : Classes en acte.
    Cette expérience pédagogique a fait partie d’un évènement plus large, Freinet 2014, qui a eu lieu sur le site de la HEP Vaud en février 2014 comprenant également un colloque scientifique international et une exposition. Elle s’inspire largement de la pédagogie Freinet et de la pédagogie de projet.

    En effet, elle cherche à conjuguer des réalités scolaires différentes pour permettre l’ouverture de l’école sur la société et donner du sens aux apprentissages.

    Apports du numérique

    Ce projet vise à détourner des outils numériques en vue d’une nouvelle appropriation pédagogique. Classes en acte est l’occasion d’explorer et d’actualiser la correspondance scolaire proposée par Freinet en usant d’outils émergents de quête, de création et de partage de connaissances (visioconférence, documents collaboratifs, partage de fichiers).

    Les enseignants et leurs classes pratiquent la visio-correspondance pour construire des projets communs favorables au « faire ensemble » dans une dynamique de construction coopérative et d’échanges de savoirs.

    Rapport avec le thème de Ludovia#12

    Les logiciels courants de gestion professionnelle tels la visioconférence, de collaboration et de partage ne sont pas a priori prévu pour l’enseignement. Ce sont des logiciels micro-mondes qui proposent un environnement outillé mais non déterminé.

    L’appropriation de ces outils dans un cadre scolaire implique de détourner l’usage prévu par les développeurs et d’imaginer des pratiques pédagogiques à l’interface entre le monde numérique et les nécessités de la classe.

    A l’intersection de la pédagogie de projet, des technologies de la communication et de la correspondance scolaire, Classes en acte propose de « faire et d’apprendre ensemble » : les classes constituées en duos développent des projets partagés via la visiocorrespondance et les autres moyens de communication disponibles.

    Cette exploration pédagogique a permis de favoriser le développement de projets coopératifs, d’explorer l’usage pédagogique de la visiocorrespondance, des outils de communication et d’actions communes à distance.

    Les classes ayant participé à ce projet ont dû élaborer des activités  qui n’ont pas été  sans incidences sur leur fonctionnement habituel, ni sur celui des enseignants. La classe a parfois été perturbée par l’investissement d’une activité nouvelle faisant appel à des outils techniques.

    Les premiers bilans de Classes en acte, projet récent, font état d’une grande diversité des activités pédagogiques et d’un vécu riche d’apprentissages avec parfois une difficulté d’adaptation de l’enseignant à la posture nouvelle générée par cette dynamique.

  • Le BYOD au lycée, un nouveau cadre pour l’appropriation des technologies numériques par les élèves et les enseignants

    Le BYOD au lycée, un nouveau cadre pour l’appropriation des technologies numériques par les élèves et les enseignants

    L’équipement des élèves de l’enseignement scolaire amorce un tournant susceptible de modifier en profondeur les usages que ceux-ci font des technologies numériques. L’ampleur du mouvement d’équipement personnel des élèves s’accroît au point d’interroger, voire de condamner, la logique des plans d’équipement à l’œuvre depuis plusieurs décennies.

    A la croisée des chemins, l’Etat et les collectivités s’interrogent sur la nécessité d’équiper des élèves déjà très bien outillés.

    C’est le thème du BYOD (Bring Your Own Device) dont l’actualité se révèle jour après jour.

    On observe là un renversement de situation qui renouvelle la question de l’appropriation des technologies numériques dans le champ institutionnel de l’éducation selon deux dimensions.

    La première concerne les élèves. A l’organisation très contrainte de l’usage de matériels et ressources numériques scolaires fournis aux élèves par l’institution succède un contexte de plus grande latitude où, d’une certaine manière, les élèves importent non seulement à l’Ecole leurs matériels et ressources numériques, mais aussi des comportements et postures construits à l’extérieur de l’Ecole.

    Jusqu’à aujourd’hui, on observe deux catégories principales d’usages du numérique à l’Ecole à des fins personnelles : les détournements d’usage des matériels scolaires (quand l’enseignant « ne regarde pas ») et les usages cachés des équipements personnels (essentiellement des smartphones).

    L’intégration du BYOD à la politique numérique des établissements scolaires légitime l’usage des équipements personnels et facilite la réalisation d’activités non scolaires au cœur même des cours.

    Cette situation, courante à l’université, gagne peu à peu les lycées et les collèges.

    La deuxième dimension nouvelle relative à l’appropriation du numérique concerne les enseignants qui ont à faire face à une situation inédite où ils doivent concevoir et conduire des activités d’apprentissage qui mobilisent un équipement qui n’est pas celui de l’établissement scolaire, qui peut être hétérogène et dont la mise en œuvre emprunte aux habitus d’un public qu’ils doivent envisager comme des individus avant de les considérer comme des élèves.

    Cette transformation du contexte pédagogique fournit un nouveau cadre, au sens d’Erving Goffman, des usages scolaires prescrits et effectivement réalisés des technologies numériques. Elle interroge plus généralement la pertinence de la forme scolaire actuelle dont une part importante des déterminants et en particulier le contrat didactique sont mis en tension par les transformations qu’induit pour les élèves comme pour leurs enseignants, la disponibilité permanente de services et ressources numériques.

    Si le BYOD est une réalité qui s’installe, parfois malgré l’institution et en marge de véritables projets pédagogiques, il est déjà une réalité dans certains établissements scolaires. Parmi ceux-ci, le Lycée Pilote Innovant International du Futuroscope, vient de décider l’abandon de l’équipement systématique des élèves grâce au projet Living Cloud financé par la Région Poitou-Charentes (équipement systématique des élèves et des enseignants avec des tablettes tactiles), pour s’engager dans une politique assumée de BYOD.

    La communication proposée analysera la situation de ce lycée, à partir de données empiriques collectées dans le cadre de l’accompagnement scientifique que laboratoire TECHNE assure depuis janvier 2015.

    Note de positionnement

    Les travaux présentés relèvent des concepts, modèles et méthodes des sciences de l’information et de la communication. Ils mobilisent en particulier les travaux sur l’instrumentation (Rabardel), la médiation instrumentale (Peraya) et les interactions culturelles (cerisier). Ils portent (essentiellement) sur la situation des élèves et des enseignants du Lycées Pilote Innovant International (LPII) qui sera analysée à partir d’un ensemble de données et cours de collecte et de traitement (collecte de logs, questionnaires et entretiens).

    Plus d’infos sur la programme du colloque scientifique sur www.ludovia.org/2015/colloque-scientifique

    A propos des auteurs Melina Solari et Jean-François Cerisier

  • Pratiques créatives des jeunes sur les blogs

    Pratiques créatives des jeunes sur les blogs

    Notre société contemporaine, depuis la deuxième moitié du XXème siècle, a connu de nombreuses évolutions techniques et la multiplication des technologies de communication ainsi que des sources d’information n’avait pas connu une telle ampleur.

    Du fait de ce changement radical des flux informationnels et de leurs modalités de création et de diffusion, nous avons choisi de nous intéresser à ces discours multiples en nous centrant sur les blogs, afin d’observer les modalités communicationnelles adoptées. La jeunesse est particulièrement représentative de ces nouveaux usages, dans la mesure où cette dernière est souvent considérée comme pionnière et plus particulièrement dans le cas de l’usage des technologies numériques.

    Ce travail de thèse, inspiré par une volonté de s’intéresser aux écrits des adolescents et à leurs pratiques discursives, porte sur les pratiques communicationnelles des jeunes sur les blogs. Nous nous sommes particulièrement intéressés aux genres de discours émergents sur ces dispositifs en fonction des thématiques abordées par les adolescents et aux stratégies discursives mises en œuvre pour atteindre leur finalité discursive.

    Le dispositif sociotechnique du blog nécessite de trouver une méthodologie d’analyse adaptée car « certaines questions méthodologiques sont spécifiquement liées à cette mouvance de l’objet : la question du corpus semble ici prendre toute son importance dans ce qu’il a d’interactif et de non permanent »[1].

    C’est l’analyse discursive qui a été retenue comme la méthode la plus rigoureuse et adaptée à l’analyse d’un corpus aussi hétérogène que le nôtre. Cette méthode, essentiellement issue des travaux en science du langage, est récemment utilisée en Sciences de l’information et de la communication pour aborder des corpus d’énoncés médiatiques ou médiatisés.

    Notre recherche a permis de mettre en évidence différents genres énonciatifs susceptibles d’être regroupés en grands ensembles que sont les énoncés à visée informative, ceux à visée factitive et les énoncés « auto-centrés ». Ces différents genres traduisent la volonté des jeunes de s’exprimer, mais également de se positionner en tant que « rédacteurs », voire d’auteur.

    Le dernier ensemble de genres énonciatifs est celui des énoncés à visée expressive, c’est-à-dire tous les posts dans lesquels les jeunes mettent en avant leurs capacités créatives. Les genres les plus représentés sur les blogs sont incontestablement les poèmes et les fanfictions. C’est sur ces deux grands genres que porte notre proposition de communication. L’observation systématique de ces énoncés met en avant des capacités créatives, ainsi que des stratégies de positionnement auctoriales.

    Il y apparait également que les jeunes adoptent les dispositifs médiatiques émergents pour narrer leurs propres aventures, vécues ou fictives et ce tant dans les poèmes que dans les fictions. La recherche met en lumière la grande présence de l’autorité des genres médiatiques, et plus spécifiquement ceux qui se rattachent à la matrice populaire. La question devient alors de savoir si les modèles médiatiques expressifs et symboliques laissent encore la place à une expression personnelle de la singularité ? Notre recherche prouve qu’il y a de la part des jeunes, une indéniable construction de compétences narratives plus ou moins élaborées.

    Si le blog se présente comme un dispositif d’écriture collaborative et in-progress, il convient de s’interroger sur les productions des jeunes pour voir si cette pratique est effective[2].

    C’est pourquoi il paraît également intéressant d’effectuer une observation des commentaires, suscités par ces formes créatives, pour voir dans quelle mesure ces derniers ont un impact sur les pratiques d’écriture des bloggeurs.

    [1] KLEIN, A., Objectif blogs !Exploration dynamique de la blogosphère, Paris, l’Harmattan, 2008, p. 26.

    [2] MARTIN, M., « Les “fanfictions” sur Internet », Médiamorphoses, n° HS, 2007, p. 186, URL : http://hdl.handle.net/2042/23603, [septembre, 2014]

    Positionnement scientifique

    Institut de la communication et des médias, laboratoire du CIM, ED 267.

    Méthode et terrain : Cette recherche porte sur les dispositifs sociotechniques et les stratégies de communications s’y rattachant par un travail d’analyse discursive comparative sur un corpus de blogs et de journaux collégiens et lycéens.

    Plus d’infos sur la programme du colloque scientifique sur www.ludovia.org/2015/colloque-scientifique

    A propos de l’auteur Olivia Bernard

  • Créons notre sMOOC, accompagnés par le projet européen ECO

    Créons notre sMOOC, accompagnés par le projet européen ECO

    Le projet Européen ECO a pour objectif d’accompagner les enseignants, pédagogues, formateurs à utiliser et créer leurs propres Ressources Educatives Libres et particulièrement un sMOOC. Un sMOOC est un MOOC basé sur les échanges des participants et la création des connaissances à partir de ces interactions.

    Les partenaires (provenant de 6 pays) proposent leurs sMOOCs, mais aussi un sMOOC d’accompagnement à la création d’un sMOOC. De plus le projet Européen met à disposition une plateforme orientée sMOOC et un hébergement, aux personnes intéressées par ce projet.

    Le projet européen a aussi mis l’accessibilité « pour tous » au cœur de ses préoccupations dans les ressources et animations utilisées.

    Le projet européen ECO travaille avec des plateformes qui permettent une construction des connaissances par interactions.

    OpenMOOC propose ainsi des fonctionnalités telles que : le micro-blogging, l’évaluation par les pairs, les groupes de travail, des liens vers les réseaux sociaux, la géolocalisation, l’intégration de badges, la gestion de sa progression, l’intégration de différents format de support… . L’accessibilité est aussi un point essentiel que prend en charge la plateforme OpenMOOC.

    A propos des auteurs : Adeline Bossu
    Découvrir le programme ExplorCamps Ludovia#12.