Catégorie : A LA UNE

  • Numérique : enseignement spécifique ou littératie transversale?

    Numérique : enseignement spécifique ou littératie transversale?

    [callout]Devons-nous faire du numérique une discipline dans l’enseignement ou doit-il être intégré comme un objet transversal d’apprentissage ? Comme le rappelle Michel Guillou, cette idée a longtemps fait l’objet de débats à propos de l’éducation aux médias et elle renaît aujourd’hui.[/callout]

    De son côté Martial pencherait plutôt sur la solution d’une littératie transversale expliquant que pour lui, le média étant un support mais aussi une évolution, il n’y a pas de raison pour qu’il fasse l’objet d’un enseignement spécifique. Il doit se fondre dans le paysage, s’y développer pour apporter un vrai complément et un moyen de partager.

    Pour Muriel, l’éducation aux médias devrait faire l’objet des savoirs de base du premier degré.

    « De la même manière que les élèves n’apprennent pas la caligraphie au collège ou au lycée, il apparaîtrait normal qu’ils arrivent dans le secondaire en sachant manipuler un ordinateur un minimum ».

    Muriel serait donc tenté de prôner pour une discipline « culture numérique » dans le premier degré mais pas dans le second degré.

    Le nouveau socle commun intègre le numérique de manière totalement transversale, indique Odile Chenevez. Elle trouverait même naturel de supprimer le mot « numérique » de notre langage.

    « On apprend, tout simplement, avec les outils de la société actuelle ».

    Le frein, Odile le voit plus dans la situation de l’Ecole et son positionnement par discipline qui fait que l’Ecole ne semble pas préparée à la société numérique.

    De ce fait, elle verrait de manière cohérente que pour un temps, on instaure une forme de « discipline » relative à l’éducation aux médias, au codage et toutes ces notions dont on parle actuellement afin de permettre à l’Ecole de « prendre le virage ».

    Voir la vidéo du « 7×7 » en totalité : https://www.youtube.com/watch?v=VXakcQX2az0
    Veuillez nous excuser pour les petits soucis techniques de son dans les premières minutes de la vidéo.

     

     

  • Canopé : le nouveau visage du réseau dans les pas de la Refondation

    Canopé : le nouveau visage du réseau dans les pas de la Refondation

    Le réseau Canopé vit, depuis quelques mois, une profonde mutation pour ne pas dire « une Refondation » et il est amené à se repenser ; repenser ses métiers d’origine comme la production de ressources et l’édition mais aussi identifier de nouveaux métiers comme par exemple le « designer d’expérience ».

    Dans le domaine pédagogique, un designer d’expérience est amené à accompagner la production de ressources afin que les usages soient intégrés dans le processus de production.

    La Refondation se base également sur de nouveaux concepts éditoriaux ; aujourd’hui, Canopé regroupe trois univers :

    « Eclairer, maîtriser, agir : simple, efficace, pragmatique ; ces trois univers doivent nous permettre une plus forte identification de notre réseau », déclare Jean-Marc Merriaux.

    La Refondation du réseau Canopé repose enfin sur des concepts d’innovation ouverte et donc un principe de proximité.

    « Comment renforcer la proximité pour un réseau qui compte pas moins de 120 lieux de proximité et favoriser l’innovation ouverte », souligne JM Merriaux.

    Les ateliers Canopé, comme celui présenté à Poitiers lors du Campus Européen d’été de l’Université de Poitiers, en sont un exemple, c’est « l’appartement témoin » ; ces espaces vont se multiplier dans tout l’hexagone et Outre-Mer, pour atteindre une centaine d’ici trois ans (un atelier par département). Aujourd’hui, une trentaine d’entre eux ont déjà été labellisés.

    L’enjeu de ces lieux sera ensuite l’ouverture à de nouveaux publics.

    « Même si le “cœur de cible“ reste l’enseignant, nous avons besoin de nous ouvrir, élargir à la communauté éducative dans son ensemble et aller au-delà », précise JM Merriaux.

    La question du continuum pédagogique entre temps scolaire et temps périscolaire a été également réfléchie et amène à penser que ces espaces pourraient devenir ces lieux de rencontre à destination des collectivités, des universités, de l’éducation prioritaire sans oublier les parents d’élèves.

    Enfin, ces ateliers auront aussi une vocation « endogène ».

    Ils ont pour but d’accueillir les personnels internes à Canopé pour devenir leurs espaces de formation et de discussion. Pour le Directeur Général, il est important que les 1800 personnes du réseau s’approprient ces lieux pour en comprendre tous les enjeux.

    Les industriels ne sont pas oubliés dans la boucle ; en tant qu’acteur public, Jean-Marc Merriaux a conscience du rôle que doit jouer le réseau Canopé dans la structuration de la filière du numérique éducatif.

    « Nous devons être le plus exhaustif possible, afin d’offrir nos services et notre savoir-faire pédagogique dans la structuration de cette nouvelle filière ».

    Pour conclure en quelques mots, Jean-Marc Merriaux définirait ainsi « l’atelier Canopé », « comme un espace où se fera de la formation et de l’accompagnement, du co-design et de la scénarisation, de l’événement pédagogique et enfin de la médiation de ressources ».

    Pour préciser ce qu’il entend par co-design et scénarisation, il s’agit clairement de s’étendre sur la notion de création, afin que ces espaces deviennent aussi les « FabLabs » du réseau Canopé.

     

    Et vous, où sera votre atelier Canopé le plus proche ?

  • Numérique et connaissances : et si on arrivait au «finage numérique» ?

    Numérique et connaissances : et si on arrivait au «finage numérique» ?

    Pour lui, l’idée de l’égalité avec le numérique n’est pas au rendez-vous. Il dresse le constat que les différences d’accès, comme celles d’accès aux soins ou à la culture par exemple, sont les mêmes avec le numérique ; selon un gradient de revenu économique, de formation initiale des individus…

    « La transformation d’un système éducatif est quelque chose de vraiment difficile à analyser », notamment parce que ce système est porteur de valeurs qui sont inscrites dans le pays.

    D’autre part, il soulève un autre point, celui du renouvellement d’un enseignant, en ces termes :

    « Le renouvellement de la technologie, c’est 18 mois. Le renouvellement d’un enseignant, c’est 30 ans ».

    Pour Didier Paquelin, l’enseignant doit s’affranchir de ce qui l’a formé pour devenir à son tour créateur. Certaines études montreraient que ce temps serait de sept à huit années d’exercice professionnel.

    Il aborde ensuite les notions de spatialité et de temps d’apprentissage. Comment le système éducatif peut-il s’adapter à ces changements ?

    Enfin, il introduit la notion de « finage numérique« .

    C2E_Paquelin1_150914Au moyen-âge, le finage est une communauté villageoise pour produire individuellement mais aussi collectivement… par analogie, le finage numérique est à la fois cette notion de communauté, qui permet à des individus de s’exprimer, mais aussi à des collectifs de se constituer et d’aller emprunter des composantes aux différents mondes, formels, informels … et de se constituer son territoire pour son apprentissage.

     Voir la présentation en PDF de Didier Paquelin

     

     

    Plus d’infos : le site du Campus européen de l’Univerisité de Poitiers ici

    crédit photo : Manolo Guizar

  • L’externalisation numérique des connaissances rend-elle nos sociétés plus intelligentes ?

    L’externalisation numérique des connaissances rend-elle nos sociétés plus intelligentes ?

    Externalisation numériques des connaissances

    « Le constat, issu d’une dynamique historique, est que la fabrication de l’humanité, montre que nous avons constamment développé nos capacités cognitives en déportant nos savoirs vers l’environnement ».

    Dominique Cardon donne l’exemple de l’outil, du livre et aujourd’hui du numérique.
    « On allège notre mémoire interne au profit d’une mémoire externe ».
    ET donc, la question se pose : si l’on déporte ces informations vers l’environnement, à quoi consacrons-nous la formation de notre propre anamnèse, de notre mémoire ?
    L’argument optimiste, d’après Dominique Cardon et que nous confions à notre activité cérébrale des fonctions cognitives de plus en plus avancées.

    La société devient-elle donc plus intelligente ?

    Elle devient plus compliquée parce qu’on a multiplié, interfacé différentes couches, répond Dominique Cardon.
    La connaissance ne se limite pas à du « presse-bouton ». Elle demande aussi des procédures, des règles d’acquisition du savoir (voir article et vidéo du premier épisode sur l’exemple de Wikipédia).

    Ramenée à l’échelle de la classe, comment puis-je rendre mes élèves plus intelligents avec le numérique ?

    Dominique Cardon, qui se dit non-spécialiste des questions d’éducation, tente de répondre à cette dernière question. « On fait reposer sur l’enseignant des activités pédagogiques qui lui donnent de plus en plus d’autonomie pédagogique pour que les outils numériques, qui en eux-mêmes ne servent à rien dans la classe, soient utilisés pour des exercices, des activités collaboratives etc. »
    « Bref, cela renvoie un peu la responsabilité vers ce que nous en faisons ».

    L’externalisation numérique nous permet donc de rendre nos sociétés plus intelligentes mais cela dépend de comment nous utilisons ces potentialités. Ne sommes-nous pas en deçà de ce qu’elles nous offrent ?

    « N’oubliez pas de regarder en périphérie », voici le conseil que nous pourrions retenir de cette interview.

  • Le numérique éducatif : fabrique d’experts ou fabrique d’incultes ?

    Le numérique éducatif : fabrique d’experts ou fabrique d’incultes ?

    [callout] Les intervenants passés au crible sur cette onzième édition étaient Martial Pinkowski, Muriel Epstein et Odile Chenevez (CLEMI Aix-Marseille). LudoMag a retenu 3 sujets et vous propose de les découvrir en 3 épisodes successifs.[/callout].

    Les jeunes, les élèves, les étudiants, devant le foisonnement d’informations qui s’offrent à eux et qu’ils découvrent via les outils numériques, vont petit à petit, aidés par les enseignants qui sont là pour les aiguiller, acquérir une certaine expertise de l’information.

    D’un autre côté, l’infobésité de l’information peut aussi créer l’effet inverse : une perte de repères qui pourrait conduire à fabriquer des « incultes » plutôt que des « experts ».

    C’est ainsi que le débat est posé par Michel Guillou.

    D’après Muriel Epstein, le jeune peut tout à fait devenir expert sur les sujets qui le passionnent et très inculte sur ceux qui ne l’intéressent pas du tout.
    Cela sous-entendrait, si on considère ces propos, que le jeune ne serait donc pas « noyé » dans l’info mais parviendrait déjà à en faire une sélection.

    Muriel croit que les nouvelles générations auront dans un futur proche une forme d’expertise dans la mesure où elles seront capables de faire des recherches sur un sujet donné puis de rebondir sur un autre, tout en conservant un fil cohérent.

    Pour elle, c’est en cela que le numérique peut en faire des « experts ».

    Odile Chenevez rebondit justement sur ce que vient de dire Muriel sur la notion d’expert qui est, pour elle, entrain d’évoluer.

    « Un expert n’est pas quelqu’un qui a tout de prêt dans sa tête, un certain nombre de savoirs et de connaissances ; l’expert est celui qui va savoir rassembler l’information qu’il a besoin au moment où il en a besoin ».

    Martial est très frileux sur la notion d’expert, dans le sens qu’on entend parfois à savoir : le numérique peut améliorer les résultats des élèves. Par contre, il croit beaucoup, comme ses deux voisines d’interview, à une notion d’expertise dans le sens de « tri intelligent » de l’information.

    « Nous devons travailler sur l’esprit critique des élèves ».

    Il ne croit pas que le numérique puisse conduire à fabriquer des générations d’incultes. En synthèse, on pourrait dire que les experts seraient ceux « qui ont une compétence d’apprendre à apprendre, non pas dans le contenu ni dans la culture mais dans la capacité d’adaptabilité à un nouvel environnement ».

    Voir la vidéo du « 7×7 » en totalité : https://www.youtube.com/watch?v=VXakcQX2az0- Veuillez nous excuser pour les petits soucis techniques de son dans les premières minutes de la vidéo.

  • Comment Wikipédia peut-il être un modèle éducatif ?

    Comment Wikipédia peut-il être un modèle éducatif ?

    « Ce qui me fascine dans Wikipédia, c’est l’idée de séparer le contenu du savoir, de la procédure par laquelle on va chercher, maîtriser, publier, partager et synthétiser le savoir ».

    Cette séparation entre la « substance » et la « procédure » est absolument centrale dans la communauté Wikipédia.
    Il développe l’idée que n’importe qui peut être contributeur dans Wikipédia, sans affichage de diplôme ou de statut mais sans pour autant faire n’importe quoi ; la communauté doit suivre un certain nombre de règles et un « Wikipédiste » sera rappelé à l’ordre s’il ne le fait pas.
    Au travers de cette collaboration, « chacun va révéler son intelligence, ses capacités à mettre en œuvre quelque chose ».

    En cela, l’exemple de Wikipédia est un modèle qui s’apparente très bien à l’orientation actuelle du monde éducatif.

    « Désormais, ce qui devient central, c’est de mettre en forme les savoirs ».

    Il cite Jacques Rancières et son ouvrage de 1987, « le Maître ignorant », une biographie philosophique dans laquelle il pose le postulat de l’égalité des intelligences (source Wikipédia).

    L’enseignant n’est plus le détenteur du savoir qui déverse un ensemble de connaissances à ces élèves mais sa mission, et elle est de taille, est bien aujourd’hui, « de vérifier que chacun des apprenants, des élèves fasse sur lui-même l’effort nécessaire pour mettre en œuvre les qualités et les compétences dont tout le monde dispose dans une égalité des intelligences ».

    La suite en vidéo…

     

     

     

     

     

     

     

  • La Direction du Numérique pour l’Education partenaire de Ludovia#11

    La Direction du Numérique pour l’Education partenaire de Ludovia#11

    [callout]Blandine Raoul-Réa accompagnée d’Anne Delannoy (enseignante au lycée de Foix dans l’Ariège et interlocutrice académique pour le groupe documentation), Marie Deroide et Alain Thillay se sont prêtés à l’exercice du plateau TV pour évoquer différentes thématiques : ressources numériques, culture numérique et enfin mobilité dans l’ENT.[/callout]

    Quelques questions soulevées lors de ces interviews

    sur les ressources…

    De plus en plus de ressources accessibles avec différents types de droits d’utilisation. Quel serait le point d’entrée pour les ressources numériques spécialement conçues pour l’éducation ?
    Possibilité de nourrir ce « service » en faisant remonter les remarques du terrain ?
    Pourrait-on aller jusqu’à une proposition de parcours pédagogiques à partir des ressources ?

    sur la culture numérique…

    Comment faire pour que les enseignants non « geeks » s’approprient les techniques numériques ? L’objectif est-il de développer la culture numérique des enseignants ou des élèves ?
    Comment fait la DNE pour parvenir à maîtriser cet environnement numérique en perpétuel mouvement ?

    sur la mobilité dans l’ENT

    Les collectivités semblent se lancer dans l’équipement en matériel mobiles type tablettes…Pourtant, les tablettes ne vont pas transformer les usages ! « C’est l’ensemble de l’écosystème qui va être impacté par cette individualisation des équipements » explique Marie Deroide.



     

    Chers lecteurs, merci de votre indulgence quant aux micros coupures sur les vidéos, réalisées en quasi « direct ». Veuillez nous en excuser.

  • Ludovia#11 : retour sur la Khan Academy

    Ludovia#11 : retour sur la Khan Academy

    Par Jean-François Cerisier, intervenant sur la conférence inaugurale sur le thème de l’année « Numérique & éducation, entre consommation et création », à lire aussi sur son blog.

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    [callout]Du côté scène, sous la houlette de Bruno, les échanges sont nourris. Les questions et remarques de la salle aussi avec un public nombreux (salle comble) et persistant (clôture de la table-ronde à 23 heures). Et les discussions se poursuivent bien plus tard dans la nuit, autour d’un verre, dans la douceur de l’air exceptionnellement estival d’Ax-Les-Thermes. Sans compter les tweets, les commentaires postés sur les murs Facebook et les conversations au petit déjeuner du lendemain. Bref, la Khan Academy soulève des questions. Et c’est bien intéressant.[/callout]

    Comme l’espace de discussion d’une table-ronde ne laisse pas toujours le temps de développer son argumentation et que le train retour vers Poitiers ménage un temps propice à l’écriture, je propose de revenir ici sur quelques points.

    Entrée en matière

    L’enthousiasme de Jérémy Lachal pour présenter la version française de la Khan Academy (KA) fait réellement plaisir à entendre. En revanche, le fond du discours à consonance quasi-évangélique dérange. Il en ressort l’image d’un dispositif « miracle » adaptable à tous les contextes éducatifs et à tous les élèves, susceptible de résoudre tous les problème d’apprentissage, restaurant l’appétence éducative des élèves qui en manquent, développant la créativité, rassurant les parents, produisant une transformation des pratiques pédagogiques …

    Quelques témoignages dithyrambiques d’enseignants et de parents et quelques chiffres chocs (déjà plus de 10 millions d’utilisateurs dans le monde) accréditent un discours sans nuances. L’évocation des résultats préliminaires particulièrement positifs d’une recherche dont on ne connaît pas les conditions de réalisation parachève l’édifice.

    J’avais déjà été frappé de la tonalité des présentations de Salman Khan qui me rappelait celle de Nicolas Negroponte présentant le programme One Laptop Per Child il y a quelques années. Je la retrouve ici. J’imagine que l’on peut l’imputer, au moins partiellement, à des déterminants culturels et à des formats de présentation (TED notamment pour l’une des interventions de Salman Khan). Comme je ne doute ni de la sincérité de Jérémy ni de celle du projet de Bibliothèques sans frontières, j’admets volontiers que l’on ne doit pas s’arrêter à ce discours et qu’il convient de procéder à une véritable analyse du projet. Toutefois, je suggère qu’une présentation plus nuancée, moins « lisse » et intégrant les éléments d’une dimension critique serait bienvenue.

    Au fond, mes interrogations sont ailleurs.

    Tout d’abord, il faut bien convenir que la genèse du projet de Salman Khan s’inscrit dans une vision de l’éducation en marge de l’institution éducative. Les modules de cours adressés à sa cousine cherchaient (avec succès manifestement) à remédier aux échecs qu’elle rencontrait dans ses apprentissages scolaires. Une partie notable des témoignages qui circulent aujourd’hui sur les usages des ressources de la Khan Academy sont du même ordre ou d’un ordre voisin : usages pour des révisions scolaires, absence d’Ecole, problème d’accès à l’Ecole pour des apprenants ayant des besoins spécifiques …

    D’autres usages, parfois très différents en sont faits mais le modèle des ressources et de l’ensemble du dispositif a initialement été pensé dans et pour un contexte non scolaire (et culturellement situé). Il est de ce fait porteur d’un modèle de l’apprentissage qui, encore une fois, n’interdit pas d’en faire autre chose mais qui suggère des usages par ses caractéristiques propres. Si l’on se réfère à la théorie de l’activité instrumentée (Rabardel) et au modèle de médiation instrumentale de Peraya qui montrent notamment comment la nature des artefacts constitue un cadre d’usage, on peut affirmer que la modèle de la KA se retrouve nécessairement dans les usages qui en sont faits. Il est bien sûr possible d’utiliser un tournevis pour enfoncer une pointe mais il est probable qu’il sera plus souvent utilisé pour une vis.

    Ainsi, les ressources de la KA peuvent sans aucun doute être également utilisées intelligemment et efficacement à l’Ecole mais elles y importeront son modèle sous-jacent et c’est la raison pour laquelle il faut pouvoir le caractériser. Ce qui est vrai pour la KA est vrai pour toutes les ressources, toutes les méthodes et tous les dispositifs, bien sûr. C’est pourquoi il est si important que la nation décide de l’Ecole dont elle veut se doter et charge son institution scolaire de réaliser son projet politique.

    S’agissant de la KA, je relève 4 caractéristiques qui me semblent constitutives de son modèle en ce qu’elles sont susceptibles de subsister quelle que soit l’ampleur de l’appropriation qui en sera faite :
    – la nature magistrale des cours qui constituent les ressources de base du dispositif ;
    – la logique d’une scénarisation traditionnelle qui enchaîne la consultation d’un cours magistral suivie d’une activité d’application ;
    – le découpage des contenus présentés qui s’inscrit dans une pédagogie de la maîtrise (du simple au complexe, du facile au difficile, une progression progressive subordonnée à la maîtrise des étapes à franchir) ;
    – l’attribution de « badges » qui attestent des connaissances/compétences acquises.

    Ces choix sont respectables, discutables, présentent des intérêts et des limites, ne conviennent probablement ni à tous les publics ni à tous les contextes et/mais sont très prégnants surtout si l’on réifie et idéalise la KA comme LE modèle salvateur. De fait, ce modèle interroge l’Ecole, du moins en France, car il s’éloigne notablement des approches que l’on y trouve le plus souvent. On peut y voir le ferment de très souhaitables innovations. On peut aussi y voir une proposition et des promesses par rapport auxquelles l’institution scolaire gagnerait à se positionner clairement.

    La question du financement de la KA a également été posée lors du débat de Ludovia. 

    La gratuité, avancée à juste titre par les promoteurs du projet comme un facteur favorable aux usages des ressources témoigne en fait d’un modèle économique où le financement n’est pas assuré directement par les clients finaux. C’est évidement un modèle particulièrement intéressant en ce qu’il facilite les usages de tous. Sauf erreur de ma part (les données sont difficiles à trouver et à vérifier), dans le cas de la KA, la localisation du dispositif au contexte français a été financée dans le cadre d’un mécénat de la fondation Orange d’un montant de 320 000 euros, c’est-à-dire 128 000 euros de fonds privés mais aussi 192000 euros de fonds publics sous forme de défiscalisation.

    L’engagement des mécènes est une excellente chose comme l’accompagnement de l’Etat. Même si l’on sait que les caisses de l’Etat sont vides, des financements publics restent indispensables pour permettre la conception et le développement de ressources de qualité qui exigent des investissements importants. Bien des projets restent dans les cartons faute de ces budgets d’amorçage …

    Le succès de la KA place dans l’ombre de nombreuses réalisations du même ordre. Certaines ont été réalisées par des enseignants, pour leurs élèves, dans des conditions relativement similaires à celles de Salman khan. Le site Maths-Vidéos réalisé par Philippe Mercier, par exemple offre plus de 900 vidéos pour 5000 utilisateurs. D’autres sont commerciales, comme l’offre de Paraschool notamment. De façon beaucoup plus générale, l’abondance de l’offre de ressources, extrêmement hétérogène en nature, formats, qualité … complique considérablement la tâche de l’enseignant.

    Dominique Cardon nous invite à faire confiance à l’évaluation par les utilisateurs que traduisent les algorithmes de PageRank avec des classements relatifs à la popularité des ressources. Pour autant, il est important que ces ressources soient sérieusement documentées (ce qu’elles sont, ce qu’elles font, ce que l’on peut en faire … ) et il me semble que cette tâche d’importance incombe à la puissance publique (Canopé ?).

    Pour conclure sur une note qui incite à l’optimisme, poussons le paradigme de la pédagogie inversée un peu plus avant et remplaçons les professeurs de la KA par des élèves. C’est ce que fait Muriel Epstein avec des élèves qui réalisent les ressources d’un MOOC intitulé TRANSIMOOC et dont les ressources ressemblent furieusement à celles de la KA. Ironie, la ressemblance va jusqu’au financement du projet par la fondation Orange. Si les ressources produites par les élèves autorisent des usages du même ordre que celles le la KA, leur réalisation exige des efforts d’élaboration et de structuration du discours particulièrement efficace pour conforter leurs apprentissages. Et que dire de la confiance qu’ils construisent …

    Ça, c’est de l’inversion ! Et Muriel Epstein n’est pas la seule à la pratiquer …

    Lire la synthèse de la soirée, rédigée par François Jourde et Caroline Jouneau-Sion sur le site de Ludovia#11

  • « De Clou à Clou » : L’ENT au service de l’art et de la culture

    « De Clou à Clou » : L’ENT au service de l’art et de la culture

    LudoviaCG81
    L’usage des ENT mérite d’être élargi aux pratiques culturelles des élèves, pour une plus grande autonomie des jeunes, pour un accès plus large à la culture, pour une représentation de celle-ci dans le champ des préoccupations scolaires.

    Avec le projet « De Clou à Clou » mené par le Centre d’art le LAIT en partenariat avec le Département du Tarn, nous avions besoin d’un espace de travail collaboratif pour partager et enrichir les ressources culturelles et construire une base de données numérique autour d’œuvres de l’Artothèque. L’idée est de conserver, valoriser et partager les travaux réalisés à partir des œuvres dans le but d’enrichir les ressources relatives à l’artothèque départementale, en un projet interdisciplinaire et inter-établissement.

    Apport du numérique ou présentation de la technologie utilisée

    L’utilisation des ENT a permis à la fois la récupération et la conservation (numérisation et archivage) des travaux d’élèves, ainsi que le partage inter-établissement et interdisciplinaire de points de vue, d’expériences, et même de commentaires qui seront possible l’an prochain via un blog et la mise en ligne d’un forum.
    Les travaux des élèves sont mis en ligne au fur et à mesure afin que tout le monde en profite sur l’ENT du collège puis de la collectivité, en une partie privée, où les élèves peuvent consulter tous les travaux de leurs pairs, même à l’état de brouillon, et une partie publique, vitrine du projet en accès grand public sur l’ENT du Département. Nous avons utilisé l’ENT dans ses fonctionnalités les plus courantes (dépôt de textes, photos, vidéos, son) et activerons pour l’année à venir Blog et Forum.

    Relation avec le thème de l’édition

    Avec ce projet, nous avons utilisé l’ENT tel qu’il existait déjà, et nous avons créé des ressources innovantes, non directement liées au programme scolaire, vouées à être enrichies tout au long de l’année, chaque année, en permanence, pour le bonheur des élèves, des professionnels de l’art et de l’enseignement !

    Synthèse et apport du retour d’usage en classe

    Pour cette année de travail autour de l ‘Artothèque, nous avons récupéré de quoi faire une exposition concrète, présentée dans le Hall de l’hôtel du Département, et une trentaine de contributions. Nous avons pu communiquer autour de cet usage des ENT, et espérons une meilleure efficacité du dispositif à l’avenir: l’ossature est prête, les habitudes et compétences en matière d’usage des ENT, en cours d’acquisition, et nous encourageons la formation de tandems pédagogiques pour gagner du temps de travail et d’accès aux ordinateurs.

    Des liens CM2/6ème se font aussi par le biais de l’usage de l’ordinateur dans le cadre du B2I. Lycées et Lycées agricoles ont aussi testé le dispositif, validant l’intérêt de cette interface dans un projet inter-établissements et accessible au grand public.

    Voir les bios de Hélène Lapeyrère et Arnaud Cano

    Voir le programme des ateliers Ludovia#11