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  • Les bibliothèques sur Internet : spécificités de la communication à destination des jeunes

    Les bibliothèques sur Internet : spécificités de la communication à destination des jeunes

    La culture enfantine se développe depuis de nombreuses années notamment à travers un ciblage de plus en plus précis de différents dispositifs médiatiques (télévision, presse, littérature, cinéma) et info-communicationnels (sites web). Bien souvent un tel ciblage s’inscrit dans une démarche marketing, de vente ou de recherche de rentabilité d’un produit culturel.

    Ces ciblages s’appuient sur des imaginaires collectifs (professionnels, associatifs, grand public, experts, adultes ou jeunes etc.), parfois des utopies et même des idéologies, quoiqu’il en soit des représentations.

    Et clairement les jeunes font l’objet de représentations, parfois encore héritières de pensées anciennes pour ne pas dire archaïques, quant à leurs capacités de compréhension, d’appropriation des contenus par exemple. Or, on sait aujourd’hui que les jeunes (6-18 ans) ont régulièrement recours aux technologies de l’information et de la communication, qu’ils utilisent internet et précisément pour des recherches d’informations pour leurs devoirs.

    Ceci n’est clairement pas sans poser des difficultés à certaines institutions publiques culturelles, pour lesquelles d’abord un tel ciblage ne repose pas (du moins ne semble a priori pas reposer) sur une problématique de rentabilité, mais sur celle d’une diffusion de la culture au plus grand nombre, dont les publics « empêchés » ou « difficiles ».

    En effet, les bibliothèques de lecture publique, malgré un fort développement de leur nombre et de leurs services en France depuis plus de 30 ans, peinent à fidéliser leurs jeunes lecteurs. A travers l’étude de leur communication en ligne, dont on sait que les jeunes (âgés de 6 à 18 ans) sont susceptibles d’être des récepteurs et des acteurs, nous montrons la diversité des catégories de discours leur étant adressés.

    L’analyse des discours et des images met en exergue les représentations de leurs auteurs et les représentations qu’ils se font de leurs récepteurs. Aussi en nous appuyant sur une approche sémio-pragmatique du méta-genre discursif, nous proposons ici une discussion sur la communication en ligne à destination des jeunes, à travers le cas de la communication en ligne des bibliothèques de lecture publique.

    Plusieurs invariants sont retenus pour identifier un méta-genre web « jeunes » : charte graphique, modalités d’échanges (avec l’institution et/ou entre pairs), personnalisation du discours de l’institution, niveau d’identification du jeune, mode discursif, fonctionnalités informationnelles etc.

    Proposer un méta-genre permet de montrer les différentes approches info-communicationnelles des jeunes publics par les bibliothèques de lecture publique. L’approche sémio-pragmatique tient non seulement compte du discours (écrit, images animées ou fixes etc.) mais aussi de la taille de la structure (et donc des moyens techniques et financiers disponibles), du rattachement du site web à un site institutionnel principal (communes, communautés de communes) et du contexte local (pays). En revanche, à ce stade de l’étude, nous n’intégrons pas la formation des bibliothécaires aux technologies numériques, ni la question de la gestion de la communication (à savoir, qui sont réellement les auteurs et gestionnaires des sites des bibliothèques ? Les bibliothécaires ? Les services de communication ? Les deux ?).

    Le corpus de sites est limité à des sites de bibliothèques situées en zone francophone : France, Canada, Belgique, Suisse. Outre la langue, ces pays ont en commun le développement important de l’édition jeunesse. Ce sont aussi des lieux où l’enfant est reconnu en tant qu’individu à part entière, où il fait l’objet d’une réelle « attention sociale » et où des initiatives de protection vis-à-vis des médias ont été mises en place.

    La question qui se pose ici est : quels sont les critères permettant aux jeunes d’identifier un discours leur étant destinés ?

    Nous proposons de développer notre propos en trois parties : d’abord nous reviendrons sur la question de genre, d’abord employé en littérature, cinéma et télévision, pour montrer comment nous l’appliquons à la communication web des bibliothèques de lecture publique. Ensuite, nous exposerons les principaux résultats de notre étude. Enfin nous présenterons notre taxinomie des sites étudiés et les invariants retenus pour qualifier le méta-genre web « jeunes ».

     

    Bibliographie indicative :

    Assadi Houssem, Beauvisage Thomas, De Charentenay France et alii, Usages des bibliothèques électroniques en ligne, projet BibUsages, rapport final, juillet 2003, URL : http://bibnum.bnf.fr/usages/bibusages_rapport.pdf [janvier-mars 2012].

    Bertrand Anne-Marie et alii, Les bibliothèques municipales et leurs publics : pratiques ordinaires de la culture, Paris : Bibliothèque publique d’information, Centre Georges Pompidou, 2011, 286 p.

    Charaudeau Patrick, Les conditions d’une typologie des genres télévisuels d’information, in « Réseaux », 81(15), 1997, pp. 79-101.

    Cofremca, Votre enfant deviendra-t-il lecteur ?, Paris : Savoir livre, 1992, 181 p.

    Combe Dominique, La stylistique des genres, in « Langue française », 135(135), 2002, pp. 33-49.

    De Singly François, Lire à 12 ans : une enquête sur les lectures des adolescents, Paris : Nathan, 1989, 223 p.

    Greene Ellin, Books, babies and libraries : serving infants, toddlers, their parents and caregivers, 1991, 186 p.

    Jost François, La promesse des genres, in « Réseaux », 81(15), 1997, pp. 11-31.

    Kerbrat-Orecchioni, Catherine, L’énonciation, De la subjectivité dans le langage, Paris: Armand Colin, 1980.

    La génération des 8-16 ans et la lecture, enquête réalisée par Médiamétrie pour le compte de Hachette Grande diffusion, 1993.

    Mondoloni Emilie, Les séries télévisées à destination des publics préscolaires : un méta-genre télévisuel spécifique, in « Recherches en communication », n°34, « Les compétences médiatiques des gens ordinaires (II) », 2012, pp.149-162.

    Pasquier Dominique, Cultures lycéennes : La tyrannie de la majorité, Paris : Editions Autrement, 2005, 180 p.

    Poissenot, Claude, Les adolescents et la bibliothèque, Paris : Bibliothèque publique d’information, Centre Georges Pompidou, 1997, 360 p.

    Poissenot, Claude, Usages des bibliothèques : approche sociologique et méthodologie d’enquête, Villeurbanne : Presses de l’ENSSIB, 2005, 350 p.

    Poissenot, Claude, La nouvelle bibliothèque : contribution pour la bibliothèque de demain, Voiron : Territorial, 2009, 86 p.

    Repaire Virginie, Touitou Cécile, Les 11-18 ans et les bibliothèques municipales, Paris : Bibliothèque publique d’information, Centre Georges Pompidou, 2009, 37 p.

    Sénat Marie-Ange, Animer une bibliothèque destinée à la jeunesse, in « Notre Librairie. Revue des littératures du Sud », n° hors-série. Guide pratique du bibliothécaire. avril – juin 2002.

    Soulages, Jean-Claude, Les rhétoriques télévisuelles : le formatage du regard, Bruxelles : De Boeck, Paris : INA, 2007.

    Weiss Hélène, Les bibliothèques pour enfants en quête d’un nouveau modèle, in « Bulletin des bibliothèques de France », 2006.

    Méthode appliquée et terrain d’étude :

    Le corpus de sites est limité à des sites de bibliothèques situées en zone francophone : France, Canada, Belgique, Suisse. Outre la langue, ces pays ont en commun le développement important de l’édition jeunesse. Ce sont aussi des lieux où l’enfant est reconnu en tant qu’individu à part entière, où il fait l’objet d’une réelle « attention sociale » et où des initiatives de protection vis-à-vis des médias ont été mises en place.

    Un corpus de 130 sites de bibliothèques de lecture publique a été analysé, soit 80 sites français[1], 26 sites québécois, 15 sites suisses francophones, 7 sites belges. Ce corpus correspond à un ensemble de bibliothèques disposant d’une section jeunesse, ou bien à des sites jeunesse destinés aux publics jeunes. Sont exclus les sites sur la littérature jeunesse destinés avant tout aux adultes, éducateurs ou professionnels (La Joie par le Livre par exemple).

    L’analyse porte sur la structure des sites, la charte graphique et le discours à destination des jeunes. Aussi la méthode employée vise à dégager les thématiques récurrentes sur chaque site, les modes de traitement récurrent de l’information et les éléments (vocabulaire, couleurs, logos, symboles etc.) permettant aux jeunes de s’approprier (ou pas) le site et le discours de l’institution.

  • L’imaginaire du rapport à l’information dans un parcours numérique de ville

    L’offre de parcours urbain permettant de visiter une ville à partir de son intérêt patrimonial et culturel est affectée par l’introduction du numérique. Alors que l’on avait plutôt affaire à des parcours expographiques (tel un circuit jalonné d’outils d’interprétation du patrimoine articulé par une signalétique) ordonnancés et fixés par les concepteurs, apparaissent aujourd’hui des parcours faisant appel à des outils numériques qui laissent place à une programmation du parcours par l’usager. La mise en contexte de l’usager dans la ville était anticipée à la fois comme une fonction de guidage dans l’espace et comme un composant même de l’information. Les scénarisations actuelles laissent à penser que l’on pourrait ne pas traiter la relation du contexte à l’usager, c’est-à-dire la manière dont celui-ci va interagir avec le contexte de la documentation pour y accéder et en prendre connaissance.

    Dans le cas d’un milieu ouvert tel que la ville et de dispositifs dont l’enjeu (du point de vue de l’architecture urbaine) est de se fondre en toute discrétion dans le mobilier urbain, comment l’usager pourra produire du sens à partir de rien ? C’est-à-dire sans se reporter à une mise en contexte qui le mette au moins dans un état de vigilance par rapport à l’apparaître d’un dispositif d’information dans la ville. La question que nous posons est celle de la possibilité pour l’usager de produire du sens avec de l’aléatoire.

    L’analyse porte sur cet imaginaire d’un rapport aléatoire à l’information à partir de l’exemple des Sentiers Numériques de la ville d’Arles[1]. Nous proposons de montrer la façon dont cet imaginaire s’articule à une représentation de la ville comme un ensemble qui se définirait selon trois points de vue :

    – Un imaginaire de la ville comme espace documentaire. Ce mode d’orientation et d’information dans la ville remplace l’organisation expographique du circuit patrimonial par l’imaginaire d’une base de données distribuée spatialement au sein de la ville. La ville apparaît telle une unité close remplie de documents à consulter par une navigation aléatoire, celle de n’importe quel usager dans n’importe quelle situation de circulation.

    Un imaginaire de la ville vue d’en haut. Alors que l’expographie de la ville raisonne à partir de l’accompagnement du déplacement du corps humain en train de marcher selon une orientation donnée, cette scénographie documentaire renvoie à un imaginaire de la ville vue d’en haut. Car le point de vue panoramique apparaît comme le seul moyen de donner la logique d’organisation qui n’est pas donnée depuis le sol.

    Un imaginaire de la ville vue de nuit. La tombée du jour est le moment idéal pour faire les Sentiers numériques : leur luminosité les signale, attire l’usager vers une borne, puis vers l’autre. Dans cette mise en contexte créée par la tombée du jour, les bornes deviennent un dispositif signifiant à plusieurs titres, en tant qu’outils d’interprétation de la ville (le texte surgit du mur), de signalétique par la force de la luminosité, de scénographie de l’architecture et du mobilier urbain.

    La discussion porte sur les conditions dans lesquelles cet imaginaire d’une prise d’informations aléatoire en milieu urbain pourrait fonctionner. La concrétisation d’un contexte d’usage de jour et depuis le sol pour les Sentiers numériques nécessite que l’usager attribue un sens au balisage qui dépasse celui d’outils à faire fonctionner pour les vivre plus symboliquement comme des marqueurs de l’identité d’une ville et d’un quartier. Ce processus de requalification des outils en marques (Jeanneret, 2012) pourrait venir compenser par l’imaginaire une visibilité et une reconnaissance sociales déficientes.

     

    Note de positionnement scientifique

    – Section scientifique de rattachement des deux auteurs : 71ème section, sciences de l’information et de la communication.

    – Méthode d’analyse :

    L’analyse de l’émergence de l’imaginaire d’un rapport aléatoire à l’information touristique en ville avec l’introduction du numérique s’inscrit dans la continuité de recherches effectuées antérieurement sur le fonctionnement de sites web dans le domaine du tourisme. L’analyse montrait le processus de représentation par les dispositifs de communautés sociales imaginaires et son pouvoir d’enrôlement des internautes dans la production de l’information sur les sites (Tardy, Davallon, 2012). On constate qu’en passant de sites web dans le tourisme qui reporte la production de l’information vers les usagers à un type de parcours urbain faisant appel au numérique, la logique de l’aléatoire dans la prise d’informations est un processus qui se développe. Cependant, les formes de dispositifs permettant ce fonctionnement aléatoire restent à trouver. En s’éloignant d’une structuration des composants documentaires figée par le concepteur, il reste à savoir comment concevoir des structures de surface programmable par l’usager (Leleu-Merviel, 2005), dès lors que les objets culturels ne sont pas articulés à la réalité contextuelle de l’usager, à sa manière d’accéder puis d’interagir avec les composants informationnels. Par rapport aux recherches antérieures, nous proposons d’explorer la dimension aléatoire de la prise d’informations dès lors que l’on n’a plus affaire à une unité fonctionnelle délimitée matériellement telle que l’ordinateur mais à une situation urbaine piétonne pour laquelle la « navigation » aléatoire pose des problèmes d’une autre ampleur.

    Le cas des Sentiers Numériques d’Arles a été abordé dans le cadre d’une étude d’usages insérée dans le processus de la conception du dispositif, financée par le Programme PACALabs (soutenir l’innovation numérique en Provence-Alpes-Côte d’Azur). Même si cette étude nourrie notre réflexion, la communication proposée ne porte pas sur celle-ci. D’une part, elle prend le cas du premier Sentier Numérique entièrement réalisé – et non son expérimentation partielle –, d’autre part, elle s’engage dans une analyse plus large de ce qui fonde l’imaginaire de la conception de tels objets culturels.

    La communication proposée s’appuie sur l’analyse socio-sémiotique de ce dispositif de parcours urbain afin de comprendre précisément les modalités de prises d’information pensées pour l’usager, les impasses qu’elles semblent contenir par rapport aux parcours traditionnels, et du coup l’imaginaire du rapport à l’information et de la ville « numérique » qui les supportent. Nous intégrons également  l’analyse du discours d’accompagnement par les concepteurs (discours écrit des concepteurs eux-mêmes et discours des concepteurs médiatisés par la presse) pour discuter de l’imposition d’une logique de marque et non d’outils, dans la revendication, pour ce dispositif, de l’incarnation d’une ville plutôt qu’une découverte opérationnelle.

    Terrain d’étude :

    Le projet des Sentiers Numériques est lancé en février 2013 dans la ville d’Arles après une phase d’expérimentation. Pour les concepteurs, il s’agit d’un parcours « Patrimoines & Culture », qui se veut être en relation avec un traitement innovant de la thématique patrimoniale, en faisant référence à la fois à l’histoire plus intime du quartier, à l’actualité culturelle, au jeu, à la tribune libre, au sens pratique. Ce dispositif se caractérise par l’implantation de bornes lumineuses totalement intégrées dans les murs de la ville (usage des boîtiers électriques) sur lesquelles s’affichent un texte accompagné d’une image et une invitation à télécharger avec son Iphone une information plus approfondie. Les concepteurs revendiquent un positionnement des Sentiers Numériques auprès des touristes comme des habitants.

    – Références bibliographiques :

    Davallon, J. 2012. « Du numérique pour la culture à la culture numérique ? », Actes de la 2ème Journée scientifique internationale du Réseau MUSSI, Rio de Janeiro, 24, 25 et 26 octobre 2012, p. 21-36.

    Davallon, J. (dir.). 2012. L’économie des écritures sur le web. Vol. 1 Traces d’usage dans un corpus de sites de tourisme. Paris : Hermès Sciences-Lavoisier. (Coll. « Ingénierie représentationnelle et construction de sens ».)

    Gentès, A., Jutant, C. 2011. « Expérimentation technique et création : l’implication des utilisateurs dans l’invention des médias », Communication et langages, 168, p. 97-111.

    Harris, R. 1994. Sémiologie de l’écriture. Paris : CNRS Éditions.

    Jacobi, D. 2006. « La signalétique conceptuelle entre topologie et schématisation : le cas des parcours d’interprétation du patrimoine », p. 37.48, in Indice, index, indexation, sous la direction de Kovacs & Timini. ADBS.

    Jeanneret, Y. 2012. « Analyser les réseaux sociaux en tant que dispositifs info-communicationnels : une problématique », Actes de la 2ème Journée scientifique internationale du Réseau MUSSI, Rio de Janeiro, 24, 25 et 26 octobre 2012, p. 39-61.

    Lakel, A., Massit-Folléa, F., Robert, P. (dir.). 2009. Imaginaire(s) des technologies d’information et de communication. Nouvelle édition [en ligne]. Paris : Éditions de la maison des sciences de l’homme. Disponible sur internet : http://books.openedition.org/editionsmsh/72

    Leleu-Merviel, S. 2005. « Structurer la conception des documents numériques grâce à la scénistique », p. 151-181, in Création numérique : écritures-expériences interactives, sous la direction de Leleu-Merviel, S. Paris : Éditions Hermès, Lavoisier.

    Marin, L. 1994. « La ville dans sa carte et son portrait », p. 204-218, in De la représentation. Paris : Gallimard / Le Seuil.

    Tardy, C., Davallon, J. 2012. « La constitution de corpus d’identités entre calcul et témoignage », p. 153-188, in L’économie des écritures sur le web. Vol. 1 Traces d’usage dans un corpus de sites de tourisme, sous la direction de Davallon, J. Paris : Hermès Sciences-Lavoisier. (Coll. « Ingénierie représentationnelle et construction de sens ».)

    Topalian, R., Le Marec, J. 2008. «Visite + : innover dans l’interactivité », La Lettre de l’OCIM, n°118, juillet-août, p. 22-31.



    [1] Voir la présentation du terrain d’étude dans la note de positionnement scientifique.

    Plus d’infos sur le programme du colloque scientifique LUDOVIA 2013 ici

  • Musée et numérique. Quelles visions du participatif ?

    Musée et numérique. Quelles visions du participatif ?

    Le numérique porte avec lui une promesse, celle d’une vision du numérique comme un moyen capable de créer, d’entretenir et/ou d’être le support de participations. Dans le domaine des musées, cette notion est depuis Georges Henri Rivière, fondateur de la nouvelle muséologie, un élément fondamental[1]. Pierre Camusat a décrit l’expérience de participation à travers 5 façons : participation aux décisions, aux restitutions (de savoirs, d’usages), à l’accueil et aux informations, à l’échange de témoignages et enfin par la participation à la constitution des collections par le don ou les prêts[2]. Aujourd’hui, cette notion de participation peut désigner une diversité de pratiques au sein du musée : consultation de comités de visiteurs pour la préparation d’une exposition, ateliers de médiation interactifs, dispositifs d’exposition nécessitant des actions de la part des visiteurs pour s’approprier un message ou co-construire un contenu[3]… Cette diversité se déploie d’autant plus depuis que l’accès à Internet et aux technologies numériques embarquées[4] touche chaque jour un public plus nombreux.

    Il s’agit ici d’étudier la notion de participation dans le champ du numérique au prisme de ses représentations au sein du monde muséal. Pour tenter d’y parvenir, nous nous baserons sur l’hypothèse qu’Internet et les réseaux sociaux, qui reposent notamment sur l’usage des technologies numériques embarquées, sont vus, par certains, comme intrinsèquement participatifs. Nous chercherons à déterminer si cet énoncé se vérifie et comment ? À quelles représentations cette notion est-elle liée et quelle forme prend-elle au sein du musée ? Enfin, nous poserons la question de comment les valeurs et les attentes associées au participatif en ligne rencontrent celles attribuées aux actions muséales qualifiées de participatives.

    À partir d’une approche ancrée en muséologie et par la mise au point d’outils méthodologiques issus des sciences humaines et des sciences de l’informatique, nous avons développés plusieurs axes méthodologiques. Tout d’abord, nous dresserons un état des lieux des démarches participatives que peuvent proposer les professionnels au sein d’une institution muséale aujourd’hui. Ensuite, nous tenterons de dessiner un panorama de l’offre en ligne qualifiée de participative par les musées et produites par eux. Ces deux états des lieux, non exhaustifs, permettront de cerner des tendances. Par ailleurs et afin d’enrichir ces premiers éléments, nous les confronterons à une étude de cas. Il s’agit d’une exposition du Musée dauphinois à Grenoble intitulée «Un air d’Italie» consacrée aux apports des migrants transalpins, ouverte en novembre 2011 pour une durée de 13 mois à Grenoble en Isère. Ce musée, connu et reconnu pour sa pratique d’une muséographie dite participative, est un terrain adéquat pour mener des observations sur cette notion.

    À l’occasion de cette exposition, l’équipe a mis en place plusieurs dispositifs qualifiés de participatifs avant et pendant son ouverture au public ainsi que des dispositifs participatifs en ligne. Grâce à une observation participante menée pendant la conception de l’exposition et pendant son ouverture au public, nous avons pu rassembler un matériel riche concernant les discours, les représentations et les pratiques du participatif pour ce musée au sein de l’institution et de son territoire ainsi qu’en ligne. Enfin, nous mettrons en perspective l’analyse des discours, des représentations et des pratiques du Musée dauphinois autour du participatifs avec l’analyse des discours associés aux offres dites participatives en ligne relevées en amont et délivrées par les musées. Cette dernière étape aura pour objectif de mieux percevoir l’image qui se construit au sujet de la dimension participative du numérique et de tenter d’en vérifier les apports dans le domaine de la culture et en particulier, celui des musées.

     

    Note de positionnement scientifique

    Cette recherche s’inscrit dans le cadre d’un projet de thèse qui vise à étudier l’impact du web et des technologies numériques embarquées sur la participation et l’interaction des visiteurs au sein du musée et avec le musée. Il s’agit d’explorer les comportements potentiels de participation et d’interaction que déploient les visiteurs lorsqu’ils sont au contact du média exposition et de mesurer les mutations éventuelles entrainées par l’usage du web et des technologies numériques embarquées sur les modalités d’appropriation des savoirs. Cette recherche est transdisciplinaire et s’appuie sur les sciences de l’informatique et les sciences de l’information et de la communication. Elle est portée par la SFR Agorantic qui réunit le Laboratoire d’Informatique d’Avignon et le Laboratoire Culture et Communication de l’Université d’Avignon.

    Les outils méthodologiques utilisés et développés sont dans la lignée de cette approche à la croisée des sciences informatiques et des sciences de l’information et de la communication.

    Le terrain au coeur du projet de recherche. Un partenariat est établi avec le Musée dauphinois à Grenoble, premier terrain en cours d’exploration, un autre se construit avec le Mucem, à Marseille.



    [1] Georges Henri Rivière développera le concept d’écomusée à travers une définition évolutive (197-1980) comme l’explique François Mairesse dans son ouvrage intitulé La belle histoire, aux origines de la nouvelle muséologie dans Publics et Musées, n° 17-18, vol. 17, 2000, p. 44-45.

    [2] La description de Pierre Camusat est recontée par Georges Henri Rivière dans le receuil de textes et notes de cours intitulé La muséologie selon Georges Henri Rivière, Paris, 1989, p. 320-322, cité dans André Gob, Noémie Drouguet, La muséologie. Histoire, enjeux, développements actuels, Paris, 2006, p. 101.

    [3] Dans son ouvrage, Nina Simon présente et analyse quelques-uns de ces dispositifs participatifs répondant au principe de l’efficacité et destinés aux expositions où aux espaces du musée en général.  Nina Simon, The participatory Museum, 2010.

    [4] Les technologies numériques embarquées sont, dans le cadre de cette recherche, les téléphones mobiles (toutes générations confondues), les tablettes, les appareils photos numériques, les consoles portables, soit tout objet pouvant être relié à Internet à un moment donné et dont la caractéristique principale est d’être un objet facilement transportable.

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  • Mythes et images du « complot judéo-maçonnique » sur les vidéos Internet des traditionalistes catholiques

    Mythes et images du « complot judéo-maçonnique » sur les vidéos Internet des traditionalistes catholiques

    Les traditionalistes catholiques sont présents sur Internet, se représentent sur le Web social et forment des collectifs, groupes et communautés virtuelles (Rheingold). Les groupes de traditionalistes se mettent en scène sur la Toile et se rencontrent par la logique de réseau qui caractérise les médias sociaux. Lors de précédentes recherches dans le cadre de notre mémoire de Master nous avons pu explorer les pistes de ce que Prouxl appelle les communautés imaginées, à travers l’étude de sites intégristes catholiques. Les traditionalistes bien que groupes minoritaires disposent d’une vitrine sur le Net et pratiquent ce que les chercheurs anglo-saxons (Helland, Dawson, Cowan…) caractérisent de religion online, activité d’information confessionnelle, qui se situe davantage sur le Web 1.0 et de online religion qui intègre le Web 2.0 et a une portée communicationnelle évidente.

    C’est au sein des pratiques permises par le Web social et qui structurent une online religion multiforme que nous nous intéressons aux groupes traditionalistes. Un support en particulier a attiré notre attention, celui de la vidéo, quelle soit sur les plateformes de partage ou les Web télé. L’intérêt du support est la mise en images d’une idée, d’une croyance, d’une métaphore, d’une utopie, de mythes. L’image animée est une forme représentationnelle qui a l’avantage d’être accessible voire ludique, ce qui peut permettre une plus grande diffusion. Internet est un lieu de représentation.

    Nous nous appuyons sur certains travaux décisifs sur les identités numériques, comme ceux de Cardon ou Georges qui ont une approche très visuelle, sémiotique et cartographique de l’identité. La représentation de soi est intrinsèquement liée au milieu culturel et social dans lesquels elle s’exprime (Goffman) et fait métaphoriquement de l’individu un acteur qui se met en scène dans le monde social (associé à un théâtre) et qui se représente (et donc interagit) dans ce monde social. Cette mise en scène se retrouve transformée sur Internet et en particulier sur le Web 2.0., qui, selon Georges, est investie d’un niveau symbolique, et modifie les paramètres traditionnels de la représentation de soi.

    Le complot judéo-maçonnique est un marqueur de l’identité communautaire de nombreux traditionalistes catholiques et fait parti de leur imaginaire social dont les significations produites déterminent la vie quotidienne des groupes et leurs implications dans les débats publics. Les principales accusations des catholiques anti-judéo-maçonniques vis-à-vis de la Franc-maçonnerie concernent la victoire de la République contre la Monarchie, la « décatholicisation » de la France et la prise de pouvoir dans toutes les strates du gouvernement. Ces éléments sont traités par le biais de vidéos, par détournement symbolique et réécriture de l’histoire.

    Un mythe du secret maçonnique est très présent dans certains milieux catholiques tout comme le fantasme selon lequel la Franc-maçonnerie serait dirigée par un « lobby » juif. Les juifs et les franc-maçons sont représentés comme les acteurs responsables de nombreux événements historiques à l’origine de la déperdition de la France catholique.

    Dans le cadre de notre thèse en cours sur l’ « Activisme religieux sur Internet : analyse comparée des fondamentalismes chrétiens et musulmans en France », nous proposons de fournir une analyse succincte de la production de sens chez les traditionalistes catholiques à travers la représentation qu’ils ont du « complot judéo-maçonnique ». En somme nous traiterons de l’imaginaire anti-judéo-maçonnique produit à travers les images animées des plateformes de partage . Nous avons délimité un échantillon de vidéos sur les plateformes de You Tube et Daily Motion entre autres. Nous nous proposons d’observer à travers une analyse sémio-pragmatique, la production d’un récit, imaginé et/ou fantasmé, du complot judéo-maçonnique. Récit par ailleurs bien antérieur à l’existence d’Internet mais dont l’énonciation se contextualise sur la Toile.

     

    Ainsi nous nous poserons certaines questions : Comment s’inscrivent les mythes judéo-maçonniques véhiculés par les supports vidéos ? En quoi constituent-ils des éléments d’appartenance identitaire et marquent-ils l’imaginaire catholique (traditionaliste) ? Nous nous intéresserons aux raccourcis historiques réemployés dans les vidéos, et à un discours sur l’histoire de la France. Nous nous pencherons sur la manipulation des symboles juifs et maçonniques et celle de l’image dans la production d’un imaginaire conspirationiste et de victimisation des traditionalistes catholiques.

    Les outils d’expression changent et les supports vidéos en ajoutant des images au discours figent les idées et les mythes dans l’imaginaire collectif. Les vidéos véhiculent les mythes. C’est ce que nous nous appliquerons à montrer à travers une analyse sémiotique d’une part mais également pragmatique par l’interrogation des commentaires  présents sur les pages des vidéos ; commentaires qui nous le pensons, nourrissent eux aussi l’imaginaire collectif d’une communauté. Ils constituent un discours sur le discours. L’imaginaire sur le Web social se construit par et pour les internautes ; produisant un contenu symbolique caractérisé.

     

    Références bibliographiques

    Prouxl, S. (2005) « Les communautés virtuelles construisent-elles du lien social ? » XVII° congrès international des sociologues de langue française, Tours, 5-9 juillet 2004. In Actes de travaux de groupe de travail Sociologie de la communication, Janvier 2005. 291-297.

    Georges, F. (2006). « Immersion et métaphore de l’intériorité ». Actes du colloque Ludovia 2006, 5-7 juillet, Saint Lizier

    Georges, F. Seilles, A., Artignan, G., Arnaud, B.,… (2009). « Sémiotique et visualisation de l’identité numérique : une étude comparée de Facebook et MySpace ». Actes de la conférence H2PTM 09. Paris : Hermès, p. 257-268.

    Georges, F. (2007). Sémiotique de la représentation de soi dans les dispositifs interactifs : l’hexis numérique. Thèse de doctorat, Université Paris 1.

    Jauréguiberry, F. (2000). Le Moi, le Soi et Internet. Sociologie et Société, vol. 32, n°2. Montréal, p. 135-151.

    Lakoff, G. et Johnson, M. (1985). Les métaphores dans la vie quotidienne. Les Editions de Minuit.

    Meunier, J.-P.  et Peraya, D. (2004). Introduction aux théories de la communication. Analyse sémio-pragmatique de la communication médiatique. Bruxelles : De Boeck.

    Merzeau, L. (2009). Présence numérique : les médiations de l’identité. Les Enjeux de l’information et de la Communication. En ligne : http://w3.u-grenoble3.fr/les_enjeux

    Pastinelli, M. (2002). Quand le vrai s’oppose au réel. Discours identitaires et mise en scène du soi dans les bavardages d’Internet. Buica, C. et Simard, N (dir.). L’identité : zones d’ombre. Québec et Montréal, CELAT, p. 235-253.

    Yee, N. et Bailenson, J. (2007). The Proteus Effect : The effect of Transformed Self-Representation on Behavior. Human Communication Research, 33. P. 271-290.

    Cardon, D. (2008). Le design de la visibilité : un essai de cartographie du web 2.0 ; Réseaux : Réseaux sociaux de l’Internet, vol.6, n° 152, p. 165-193.

    Castells, M. (1998) L’ère de l’information, Tome 1, La société en réseaux, Paris Fayard.

    (1999) L’ère de l’information, Tome 2, Le pouvoir de l’identité, Paris, Fayard.

    Rheingold, H. (1995), Les communautés virtuelles, Addison-Wesley, France.

    Helland, C. (2005), Online religion as lived religion, Methodological issues in the study of religious participation on the Internet ; Online-Heidelberg Journal of religions on the Internet, 1.1.

    Goffman, E. (1973, trad.), La mise en scène de la vie quotidienne, Minuit, « Le sens commun », 1996.

    Poulat, E.  (1969), Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman.

    Rémond, R , (1989) L’intégrisme catholique, Portrait intellectuel, Archives des Sciences sociales des religions, vol. 67.

     

  • Urbanisme collaboratif : Concevoir la ville de demain avec l’habitant 2.0. ?

    Urbanisme collaboratif : Concevoir la ville de demain avec l’habitant 2.0. ?

    Ludovia_NacyOttavianoOutil de dessin et de conception, l’usage de l’informatique est largement répandu chez les concepteurs et aménageurs de la ville. Cependant avec la combinaison de l’informatique et du numérique d’autres pratiques semblent émerger depuis peu en Île-de-France. Autour de pôles de compétitivités et impulsés par différentes institutions se développent des poches et réseaux de petites et moyennes entreprises qui, ensembles, sont  assimilées à un « écosystème de l’innovation » par les acteurs qui les composent et les fédèrent. Alors que ce terreau singulier dépasse largement la question de l’aménagement urbain, en son sein, différents dispositifs tentent de mobiliser le numérique afin de permettre aux habitants de territoires définis par les emprises de projets d’interagir avec leur milieu. (Berque, 2000)

    « L’urbanisme collaboratif » est une mouvance portée par Ufo, fondée sur les premières utopies du Web et un certain idéal de l’Internet (Cardon, 2005) qu’il s’agirait de mettre à l’œuvre dans les processus de conception de la ville. Cette jeune start-up issue du monde de l’architecture et labellisée par CapDigital est le lieu d’une observation de type ethnographique en cours depuis 2010. Elle commence a être reconnue pour sa conception d’interfaces qui agissent comme des véhicules vers un futur co-conçu en proposant des expériences qualitatives scénarisées adressées à des quantités relativement importantes d’usagers.

    Partant d’une vision initiale du partage des savoirs et de l’enthousiasme de la constitution d’une intelligence collective, lors de la manipulation les dispositifs permettent aux utilisateurs de faire varier des curseurs d’intensités de thématiques urbaines prédéfinies pour voir les supports graphiques se modifier en temps réel et configurer l’option préférée de chaque participant. Les combinaisons de chacun sont ensuite rassemblées dans une base de données statistiques, via une plateforme de type réseau social. Ce principe de fonctionnement par choix quali/quantitatif est présent entre autres dans les projets « Villes sans limite » et « Evolving Cities » portés par ufo et qui seront les études de cas privilégiés pour mettre en relief les valeurs sociétales du Web transposée à la ville.

    Entre gamification et serious game, la scénarisation du contenu est un enjeu fondamental dans la conception d’applications logicielles qui permettraient la mise en partage de la conception urbaine. En ce sens, observer la logique manipulatoire proposée à l’utilisateur de l’interface permettra de renseigner la façon dont celui-ci est perçu en tant que « co-concepteur » avec un jeu de compétences mobilisables en tant qu’habitant ou comme expert du territoire.

     

    Ainsi en ouvrant sur d’autres exemples, cette communication se propose d’observer comment se construisent les figures des différents types d’acteurs  qui façonnent la ville  dans l’imaginaire des concepteurs de dispositifs numériques : concepteur, décideur, usager individuel et les géométries variables de groupes qui se font et se défont selon les protocoles d’usages de différents exemples d’interfaces. Conglomérat d’individus ou polis, la constitution d’un public  (Dewey, 2003) bien que prétendument facilitée par ces outils semble en fait avoir gagné en complexité par le truchement des degrés d’implication possibles des usagers : informer, permettre d’informer, mettre la conception en partage…

    Autant de modes participatifs (Zask, 2011) qui combinent et recombinent les relations et les rôles. Selon quelles modalités est-ce que la réalité des pratiques du numérique permet la mise en dialogue des différents acteurs qui composent la ville ? De l’intention sociétale initiale à l’expérience individuelle puis à la construction d’un discours collectif, comment ces dispositifs recomposent-ils les paroles récoltées et ainsi le « faire communauté » qui était à l’origine même de leur émergence ? (Agamben, 1999) Alors que certains auteurs décrivent une crise multiple de la représentation comme légitimité des modalités de la constitution d’un public autour d’un objet d’attention ainsi que comme processus par lequel est rendu visible l’objet d’attention à l’assemblée concernée (Latour, 2005) par quels moyens ces dispositifs permettent-ils la mise en place de processus de démocraties participatives et/ou directes à travers les filtres de leurs protocoles d’usage et de la nécessaire mise en représentation des récits récoltés ?

     

     

     

    ### Biographie
     

    Bibliographie indicative

    – BRETON, Philippe. Le culte de l’internet. Une menace pour le lien social?. Paris : La Découverte, 2000

    – CARDON, Dominique. La démocratie Internet, promesses et limites. Paris : Seuil, 2010, pp.102

    – CASILLI, Antonio A. Les liaisons numériques : Vers une nouvelle sociabilité ? Paris : Le Seuil, 2010, 331 pp. Coll. La couleur des idées.

    – DEWEY, John, Le public et ses problèmes, traduction et introduction J. Zask, Pau : Farrago / Léo Scheer, 2003

    – HOUDART Sophie et MINATO Chihiro, Kuma Kengo, une monographie décalée, Paris, éditions Donner Lieu, 2009

    – HOUDART Sophie (2006), « Des multiples manières d’être réel. Les représentations en perspective dans le projet d’architecture », Terrain, n°46 pp.107-122

    – LATOUR Bruno, La science en action, Paris, La Découverte, 1989

    – LATOUR Bruno et WOOLGAR Steve, La vie de laboratoire – la production des faits scientifiques, Paris, La découverte, 1993

    – LATOUR, Bruno, et WIEBEL, Peter, Making things public :Atmospheres of Democraty, Cambridge : The MIT Press, 2005

    – WOLTON, Dominique. Internet, et après ? Une théorie critique des nouveaux médias. Paris : Flammarion Poche, Collection Champs, 2010.

    – YANEVA Albena, The making of a building, a pragamatist approach to architecture, Peter Lang Editor, 2009

    – ZASK, Joëlle. Participez. Essai sur les formes démocratiques de la participation. Paris : Le Bord de l’eau, 2011

     

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  • A la recherche de l’échange :  Phantasmes communautaires et expériences sociables  sur les sites de rencontre

    A la recherche de l’échange : Phantasmes communautaires et expériences sociables sur les sites de rencontre

    imaginaireLorsqu’elles sont étudiées, les relations qu’entretiennent les utilisateurs des sites de rencontre entre eux et avec les dispositifs numériques de ces sites le sont régulièrement à l’aune de notions telles que celles de « communautés virtuelles »[1] ou de « cyberespace »[2]. On suppose en effet que la virtualité des échanges numériques, leurs temporalités, censées être de nature radicalement différentes de celles qui président à la vie quotidienne, affectent de façon sensible voire disruptive les relations susceptibles d’être nouées entre les hommes et les femmes fréquentant les sites de rencontre.

     

    Or, en considérant les relations des utilisateurs des sites de rencontre sous l’angle de leur virtualité, de telles analyses conduisent le plus souvent à l’idéalisation d’une communauté censée communiquer mieux, plus vite et plus librement au moyen d’Internet, comme si les réseaux permettaient d’amplifier et de faciliter les relations entre individus et groupes sociaux. Dans cette perspective, la notion même de « communauté » est utilisée sans être questionnée.
    Les éditeurs de sites de rencontre mettent d’ailleurs en scène ces formes de communauté idéale via leurs campagnes de promotion, que cela soit pour vanter le caractère convivial des rapports instaurés entre hommes et femmes, échangeant dans un entre-soi sociable privilégié (meetic affinity, attractiveworld, etc.) ou même l’inversion de la domination masculine conférant aux femmes le pouvoir de s’affranchir de règles sociales contraignantes dans leur vie de tous les jours (meetic, adopteunmec, etc.)

     

    A contrario, la condamnation d’office qu’implique le recours à une virtualité conçue par certains chercheurs ou commentateurs comme un manque, un déficit, une dégradation du réel, confère à cette notion de « communautés virtuelles » une orientation versant dans le misérabilisme. Dénaturées, distanciées, déshumanisées, les relations entre utilisateurs des sites de rencontres présenteraient tous les stigmates d’une vie en société devenue évanescente, sans consistance, inauthentique – à la fois dégradées empiriquement et attestant d’une grande misère symbolique. Une telle conception de la « communauté virtuelle » rejoint d’ailleurs, paradoxalement, la forme d’organisation en « société » que Ferdinand Tonnies[3] oppose à sa définition de la « communauté ». Entendue comme un collectif basé sur la proximité géographique et émotionnelle, ainsi que sur des interactions directes et authentiques entre membres de ce collectif, la communauté repose, à ses yeux, sur la nature individuelle de liens marqués par l’affection et le respect. Au sein de la vie en société, en revanche, toute morale serait amenée à se dissoudre au profit de liens rationnels, définis par contrat et fondés sur l’intérêt.

     

    En somme, avoir recours à la notion de « communauté virtuelle » reviendrait à porter crédit aux deux faces d’une même « idéologie technique », pour reprendre les termes de Bruno Latour[4], conférant vices (relations intéressées, mercantiles et sans sentiments) et vertus (relations intenses, libres et sentimentales) aux relations virtuelles autorisées par les réseaux. Or, comme le rappellent Serge Proulx et Guillaume Latzko-Toth,[5] les relations engagées par les individus au moyen des réseaux ne sont pas d’une nature différente des relations sociales ordinaires, mais au contraire révélatrices de la fluidité et de la complexification croissantes des affiliations modernes. Comment, dès lors, les utilisateurs de site de rencontre gèrent-t-ils la collision entre des imaginaires technicistes et des expériences sociables dont les déterminants, nous aurons l’occasion de le montrer, diffèrent peu des formes traditionnelles de la sociabilité amoureuse ? Et comment, de leur côté, les entrepreneurs de ces sites orientent-ils le marketing émotionnel afin de combler le hiatus entre les attentes importantes des usagers et leur possible déception ?

     

    Dans une approche croisant les apports de la philosophie, de la science politique, de la sociologie et des sciences de l’information et de la communication, nourrie d’une enquête conduite sur les utilisateurs de sites de rencontre, nous nous proposons ainsi de montrer, à partir de l’étude des sites de rencontre (dispositifs concepteurs et utilisateurs), comment les spécificités de la médiation numériques permettent de questionner les rapports entre imaginaires et formes de réflexivité en ligne. Et par-delà le phantasme de la « communauté », quelle valeur (symbolique et marchande) est conférée à l’échange tant espéré ?

     Note de positionnement scientifique et méthodologie

    Sections de rattachement :

    Sociologie, philosophie, science politique et sciences de l’information et de la communication.

    Terrain et méthodologie :

    Nous nous référerons, en premier lieu, à un protocole d’ethnographie quantifiée ayant conduit à l’observation d’utilisateurs de sites de rencontre et associant entretiens et analyse socio-démographique des inscrits de différents sites identifiés dans une ville moyenne (Avignon) durant la période 2009-2011[6]. Le choix y a été fait d’observer différents sites de rencontre, en concentrant l’analyse sur ceux qui, du fait de leurs interfaces, mobilisent le plus l’écrit : meetic.com, meetic affinity.com et pointscommuns.com plutôt que easyflirt.com ou amoureux.com. De la même façon, s’il est parfois question des sites de rencontres sexuelles ou échangistes, des sites communautaires[7] voire des forums permettant la rencontre, l’essentiel des observations ou des témoignages alimentant cette étude proviennent de sites de rencontre amoureuse hétérosexuelle, de loin les plus répandus et les plus utilisés. Il s’est en fait agi de rassembler le plus de matériaux possibles, en autorisant la comparaison entre dispositifs et situations. Pour chacun des sites auquel il est fait référence ici, un compte utilisateur homme et femme ont été créés. Les limites de cette observation participante, on le comprendra aisément, se sont imposées d’elles-mêmes : aucune sollicitation, sous aucune forme que ce soit, et pas d’autre réponse aux contacts que celles consistant à expliciter la démarche de recherche présentée ici afin d’obtenir des témoignages n’ont été faites. En observant les profils édités sur les sites de rencontre étudiés ou les échanges intervenant sur les salons de discussion, des contacts ont pu être pris avec plusieurs abonnés, hommes ou femmes. Des discussions via msn ainsi que des entretiens en face à face ont été conduits à l’issue de ces prises de contact, afin de mieux saisir à la fois les motivations de ces utilisateurs, la façon dont leur décision de s’abonner avait été prise, ainsi que le sens que prenaient ces échanges au quotidien ou dans une perspective plus longue. De ces échanges, des sociogrammes ont été rédigés[8]. Ils se veulent une synthèse, une série de portraits « idéaux-typiques »[9] des profils rencontrés, construits pour rendre compte des logiques d’usages de ces dispositifs numériques. Restait à donner un cadre à cette étude, à pouvoir observer les pratiques sur un « terrain » qui ne soit pas totalement évanescent. Situer les observations à partir d’un seul site s’est avéré impossible, le « public » potentiellement concerné étant composé de plusieurs centaines de milliers de membres. Même les sites de rencontre non généralistes regroupent plusieurs dizaines de milliers de membres actifs. L’option retenue a donc été de choisir une localisation géographique et de dresser un portrait aussi détaillé que possible de la population des utilisateurs des sites de rencontre étudiés. Celui-ci étant réalisé à partir des indicateurs fournis par les moteurs de recherche de ces sites. Le fait de demander aux éditeurs des sites de pouvoir disposer, à des fins d’études, d’un accès à leurs bases de données se heurte à des difficultés de deux ordres. Des difficultés juridiques, dans un premier temps, la Commission Nationale des Libertés Informatiques interdisant tout traitement secondaire des données numériques personnelles sans autorisation expresse des abonnés et sans déclaration préalable. Des problèmes de fiabilité, dans un second temps : le fait que les entreprises gestionnaires des plus importants sites de rencontre soient cotées en bourse aboutit à une certaine inflation dans les déclarations du nombre d’abonnés. Il devient délicat, dans ce contexte, d’espérer obtenir un accès aux bases de données, surtout lorsque déclarer un volume important d’abonnés actifs constitue un argument de vente à destination de futurs clients potentiels. Une réelle opacité règne ainsi sur les populations d’abonnés de la plupart des sites de rencontre, tant en ce qui concerne les effectifs totaux que la composition sociodémographique (pourcentages hommes / femmes, classes d’âges ou catégories socioprofessionnelles notamment)[10].

    Pour obtenir une idée aussi précise que possible des caractéristiques sociales des utilisateurs des sites de rencontre étudiés, le choix a donc été fait d’avoir recours aux mêmes requêtes que celles pouvant être faites par un abonné standard. Il est en effet possible, sous réserve de certaines limitations, d’obtenir la liste de tous les abonnés inscrits triés selon un ou plusieurs critères. Certes, l’utilisation des moteurs de recherche des sites pour extraire les informations utiles à l’analyse des profils sociodémographiques de leurs utilisateurs présente des limitations importantes, dont celle d’hériter des catégories produites par les gestionnaires des sites. Emanant des sites de rencontres eux-mêmes, elles présentent cependant le double intérêt de traduire la vision des publics que se font les éditeurs de ces sites et de donner un cadre de départ aux processus par lesquels les utilisateurs s’engagent dans la co-construction de la scène sociale formée par ces sites. Nous aurons l’occasion de développer ces points dans le cadre de notre communication.

    En second lieu, notre démarche exprime une intention conceptuelle, car elle vise à examiner et éventuellement à qualifier ou à caractériser certaines notions employées spontanément, telles que « échange » et « communauté ». Ces deux notions engagent des réflexions intéressantes pour la philosophie morale et politique d’aujourd’hui, telles que : qu’est-ce qu’un échange sur sites de rencontres ? Qu’est-ce qui s’échange ? Comment autrui est-il appréhendé et et en fonction de quelle sorte d’intentionnalité ? La communauté des usagers, sur quel commun se fonde-t-elle ou engendre-t-elle ? Quelles actions concrètes en conditionnent le ressenti ? Ce dernier traduit-il vraiment une socialité originale ?

    En troisième lieu, notre recherche s’appuie sur une réflexion qui, au-delà de son terrain et des concepts qu’elle engage, tentera de déterminer la part et la nature des projections imaginaires des acteurs. Le hiatus entre les attentes des usagers et la réalité triviale ou décevante est peut-être comblé par le travail incessant des images. Or, elles-mêmes sont animées par un travail de marketing émotionnel dont il nous semble important de mener l’analyse critique. Par suite, c’est le rôle de l’imaginaire que nous voulons prendre en compte, caractériser et éventuellement mesurer.


    [1] RHEINGOLD, Howard, Les communautés virtuelles, Addison-Wesley, Paris, 1995.

    [2] Voir par exemple LÉVY, Pierre, L’intelligence collective. Pour une anthropologie du cyberespace, Paris, La Découverte, 1997.

    [3] TONNIES, Ferdinand, Communauté et société. Catégories fondamentales de la sociologie pure, Paris: Presses universitaires de France, 1977.

    [4] LATOUR, Bruno, La science en action, Paris : La Découverte, 2005.

    [5] Latzko-Toth, Guillaume, Proulx, Serge, « La virtualité comme catégorie pour penser le social : l’usage de la notion de communauté virtuelle » in Sociologie et sociétés, 2000, vol. 32, n° 2.

    [6] ZERBIB, Olivier, « Des utilisateurs de sites de rencontre en pilotage automatique ? Normes et ressources réflexives » in  Je(ux) en ligne. Pour une approche socio-communicationnelle des technologies numériques, thèse de doctorat sous la direction d’Emmanuel ETHIS, Avignon : Université d’Avignon, 2011.

    [7] On fait référence ici à des sites tels que gayfrance.fr, gay.proximeety.com, lesbienneproximeety.com, jdream.fr, jdate.fr, rencontres-musulmanes.com, rencontre-ado.com, etc. Ces sites reprennent des interfaces, des modes de présentation et d’indexation largement inspirés des sites généralistes étudiés ici. Ils ouvrent des pistes d’approfondissement spécifiques à cette étude engagée. On pense notamment, dans la lignée de travaux menés respectivement par Dominique Pasquier ou Philippe Leguern, à l’analyse des spécificités des pratiques d’écriture liées aux sociabilités juvéniles pour les sites du type rencontre-ado.com, ou aux rapports entre écritures, genres et définitions identitaires, de la marge à la norme, sur les sites gays et lesbiens.

    [8] Voir ZERBIB Olivier, « annexe 2.3. Neuf sociogrammes d’utilisateurs de sites de rencontre » in op. cit, 2011.

    [9] WEBER, Max, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris : Plon, 1985.

    [10] Pouvoir se prévaloir d’un grand nombre d’abonnés actifs, d’un ratio hommes/femmes harmonieux, voire d’une mixité en termes d’âges et de catégories socioprofessionnelles constitue un argument marketing décisif pour les éditeurs de sites de rencontre. Ces indicateurs sont, en effet, régulièrement convoqués pour expliquer en quoi leur « communauté de célibataires » est différente de celle des autres sites de rencontre : plus active, plus mixte ou au contraire plus « select », plus jeune ou au contraire plus mûre, etc.

     

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  • Le numérique comme véhicule de transcendance dans les films de Mamoru Oshii, auteur de Ghost in The Shell.

    Le numérique comme véhicule de transcendance dans les films de Mamoru Oshii, auteur de Ghost in The Shell.

    imaginaireD’après les formes archétypiques proposées par Jung et ses continuateurs, la recherche de la transcendance, de la re-union avec le divin, semble être une constante dans la psychologie humaine; cette recherche s’est inscrite traditionnellement dans les formes de la religion. A l’époque actuelle, dans l’univers des imaginaires générés autour du numérique, dominés à priori par la science et la logique, y a-t-il de la place pour cette quête de la transcendance?, le bouleversement de notre vie, provoqué par le numérique, ne peut-il pas être considéré comme le point de départ de la transcendance de la condition actuelle de l’être humain? Il est surprenant qu’une société comme la société japonaise, productrice majeure de technologie, et probablement celle qui a su intégrer le mieux le numérique dans la vie quotidienne, connaisse un essor de réalisations qui montrent des imaginaires dans lesquels les possibilités et la promesse du numérique deviennent le véhicule de cette éternelle quête de la transcendance.

    Il est possible, en faisant l’analyse des réalisations de Mamoru Oshii, de découvrir les transmutations que la notion de transcendance a subies en fonction de l’imaginaire numérique, ainsi que la manière dont les caractéristiques et les perspectives digitales semblent catalyser les aspirations existentielles et religieuses qui, jusqu’à une époque récente, paraissaient ne pas s’intégrer aux sphères numérique et technologique. Le cinéma d’Oshii est peut-être l’un des exemples les plus représentatifs de cette nouvelle vue. Ancien chrétien et militant social, Oshii ne réussit pas à assouvir ses aspirations, individuelle et collective, de transcendance dans la religion. Par la suite, à travers l’évolution du questionnement qu’il faisait de la transcendance, il commença à considérer les nouvelles technologies comme des moyens plus réels et efficaces pour atteindre la transcendance tant désirée.

    La trace de l’évolution de cette quête est présente dans ses films. L’une de ses premières réalisations Tenshi no Tamago (L’oeuf de l’ange) de 1985 (en co-réalisation avec Yoshitaka Amano) se structure comme une allégorie aux fortes nuances chrétiennes qui débouche sur un discours philosophico-religieux portant sur l’évolution des organismes et sa culmination en un état divin; cependant, dans ce film, l’aspiration de la transcendance-évolution a lieu dans un niveau symbolique et contemplatif sans jamais appeler directement ni la technologie ni le numérique. Avec ses deux films Kidô keisatsu patorebâ (Patlabor 1 et 2) de 1988 et 1993, Oshii introduit dans ses préoccupations le concept de mecha, et plus tard, en 1995, celui de cyborg, avec son chef d’œuvre Kôkaku kidôtai (Ghost in The Shell); viennent ensuite l’existence et l’apothéose de l’être humain dans un monde virtuel proche des jeux vidéo d’immersion totale avec le film Avalon de 2001, pour en venir, ultérieurement, à l’hybride génétique comme moyen de transcendance dans Mezame no Hakabune (Open Your Mind) de 2005.

    Tous ces concepts impliquent la transformation de l’être humain en une nouvelle entité grâce à la fusion avec la technologie et le numérique: l’hybride génétique est le résultat de modifications génétiques, c’est l’union d’au moins deux organismes en un seul; dans Avalon où l’existence est possible grâce au monde virtuel, c’est précisément ce monde de jeux vidéo qui réside la promesse de transcendance comme le faisait le légendaire Avalon; en ce qui concerne le cyborg, la fusion directe de la chair avec la machine et le numérique (et la capacité qui en découle de se connecter à La Toile[1] grâce à des implants dans le lobe occipital) crée une nouvelle entité plus proche de la divinité; pour ce qui est de mecha, il s’agit d’une symbiose moins drastique mais tout aussi importante entre l’humain et le robot qui le loge. Chez Oshii, cyborg, mecha… ne sont pas que des éléments caractéristiques du genre; ils deviennent les instruments d’une transcendance de la condition biologico-spirituelle de l’être humain, ainsi que la possibilité majeure pour l’homme de se transformer en une entité ayant la possibilité de connaître un nouvel état évolutif. Oshii, lui même, l’explique ainsi: “Depuis toujours, que cela soit visible ou non, l’être humain vivait dans le désir de l’hybride.

    Auparavant il pouvait y avoir cette idée de fusion avec le religieux, être habité par la présence de Dieu, en être le vaisseau. Mais aujourd’hui le thème qui remplace tout cela est le corps occupé par la technologie (le cyborg, bien sûr, mais aussi les suppléments pharmaceutiques). Si l’on souhaite avancer dans cette quête du beau, du pur, d’une alternative à la bassesse, ce thème de l’hybride technologique s’impose comme voie à suivre.”[2]

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    Note de positionnement scientifique

     

    Je suis rattaché au Laboratoire de Recherche en Audiovisuel (LARA) de l’Université de Toulouse, ou je réalise un doctorat en études audiovisuelles. Cette communication est conçue comme une analyse cinématographique et des idées qu’on trouve à intérieur des réalisations en question. Les références à utiliser sont les réalisations elles-mêmes, des entretiens avec Mamoru Oshii et des textes, comme les œuvres de Joseph Campbell ou de Carl Jung, qui permettront d’avoir un cadre de décryptage des films. Une analyse comparatif entre différents productions japonaises (Neon Genesis Evangelion, Serial Experiments Lain, Blame!,Akira…) peut aider à mieux comprendre la façon (japonaise et d’Oshii) de concevoir le numérique comme véhicule de transcendance, et de contraster les idées qu’on trouve dans les réalisations de Mamoru Oshii.



    [1] Chez Oshii, La Toile possède des caractéristiques propres à la divinité: elle est ubiquiste, elle connecte les consciences entre elles, elle a en plus une existence immatérielle comme si elle était un plan spirituel. Dans Ghost in The Shell, c’est grâce à La Toile que le Puppet Master (une sorte d’entité divine générée par La Toile,elle-même) communique avec Motoko; et dans Avalon, cette même Toile est la demeure de l’Avalon numérique.

    [2] Sarrazin, Stephen. Leçons de cinéma de Mamoru Oshii IX. Cahiers du cinéma (Internet). 18 décembre 2006 au 5 juin 2007.

  • Comment appréhender la complexité des imaginaires à l’œuvre des technologies numériques aux usages ?

    Comment appréhender la complexité des imaginaires à l’œuvre des technologies numériques aux usages ?

    imaginaireUne analyse de la complexité du sens à l’œuvre dans la conception des technologies numériques, des objets logiciels et matériels, des sites web, des réseaux sociaux, des applications, des usages nous a amenée à aborder l’imaginaire sous l’angle des esthésies ou sensibilités à la fois perceptives, énonciatives, éthiques.

    Pour questionner les tensions entre esthésies ou gestes énonciatifs, éthiques qui se jouent de la conception des technologies numériques aux usages, nous proposons, à partir de cas concrets, un modèle sémiotique construit sur une interrelation permanente de strates.

    Ainsi, dans une première strate, les technologies numériques préfigurent, avec une certaine esthésie, les pratiques informationnelles et communicationnelles mais, dans une deuxième strate, les concepteurs-programmeurs-designers, à leur tour énonciateurs, configurent de façon plus ou moins spécifique les pratiques de l’information et de la communication en jouant avec l’esthésie propre aux technologies numériques.

    Dans une troisième strate, les usagers qui mettent en place des méta-mediums (sites web, applications, …) dialoguent avec la sensibilité à l’œuvre dans les supports matériels et logiciels sélectionnés en apportant leur propre forme et force de vie fondatrice de l’esthésie.

    Dans une quatrième strate, il revient aux formes et aux forces de vie relevant des usages des méta-mediums de performer ou de contre-performer plus ou moins les esthésies qui fondent la préfiguration et la configuration des expériences énonciatives via les supports numériques.

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  • L’imaginaire technologique contemporain. Le cas du numérique

    L’imaginaire technologique contemporain. Le cas du numérique

    imaginaireL’objectif de cette communication est de montrer que l’imaginaire technologique est un concept utile pour l’analyse de l’innovation technologique. En effet la technique ne consiste pas seulement à  agencer des  composants dans un dispositif pérenne, elle nécessite aussi de donner du sens à un dispositif.

    Après avoir étudié la façon dont le concept d’imaginaire social est défini dans la tradition philosophique et sociologique d’A. Appadurai et de C.Taylor, on s’appuiera sur  les concepts d’utopie et d’idéologie définis par P. Ricoeur  pour  mieux définir l’imaginaire technologique.

    On illustrera ensuite cette réflexion par trois cas, celui du virtuel, de l’internet et du nucléaire.  Il s’agira à la fois d’examiner la culture médiatique des ingénieurs et du public dans laquelle ces technologies ont pris place et de montrer qu’il existe plusieurs configurations imaginaires.

    On terminera en positionnant la notion d’imaginaire technologique par rapport à celle de promesse technologique.

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