Catégorie : COLLECTIVITÉS LOCALES

  • Pourquoi le changement vers le numérique, c’est maintenant…?

    Pourquoi le changement vers le numérique, c’est maintenant…?

    26022013512cbaed9152cPourquoi ? 

    Vivons-nous donc une dichotomie entre les impulsions successives créées par les ministères, et certaines communes, qui reportent d’année en année l’intégration du numérique dans leurs écoles ?
    Tentons d’en comprendre les causes pour se risquer, dans un second volet, de souffler aux collectivités, qui n’en seraient pas convaincues, les raisons pour lesquelles elles ne pourront rater le coche du numérique dès 2013.

    Le numérique à l’école, ajourné dans les conseils municipaux ? 

    Certes l’annonce du projet de loi Peillon, qui institutionnalise le numérique comme un volet pédagogique essentiel, est encore très récent, mais nous avons malgré tout enquêté auprès de communes, afin d’en comprendre les répercussions sur les nouveaux projets municipaux. Tant pour les communes, pour lesquelles le numérique restait marginal, il y a encore un an et que pour celles, déjà lancées dans un projet TICE.
    Ces dernières, confortées dans leurs choix par le projet de loi, poursuivent leurs projets.

    Mais pour celles, qui n’avaient encore rien initié, la question : « intégrerez-vous en 2013 un projet d’équipement numérique dans vos écoles ? », les propos recueillis restent en grande majorité presque inchangés, à ceux enregistrés l’an dernier, à la même époque.

    « Ce n’est pas notre priorité pour le moment…. Nous équiperons nos écoles en numérique sûrement d’ici un ou deux ans », quand les projets ne sont pas remis à des dates ultérieures. Réponses que nous enregistrions de ces mêmes communes déjà l’an dernier.
    « Trop de communes sont encore installées dans une ère de procrastination, en remettant à plus tard des projets pourtant essentiels au développement et au dynamisme de leur territoire » confirme et regrette Pascale Luciani Boyer, en charge des questions éducation et numérique, à l’Association des Maires de France.

    À ce constat, des raisons diverses tant structurelles que circonstancielles

    La première raison évoquée par les élus et les services des villes lors de notre enquête est liée aux restrictions budgétaires et aux problèmes de financement, sur lesquelles nous reviendrons dans notre prochain article.
    Mais Anna Angeli, Maire adjointe du Pré Saint-Gervais (93) et consultante des projets éducation auprès de Villes internet, précise que « les problématiques financières ne sont pas la raison unique et réelle. Un manque de connaissances encore important des enjeux de l’éducation au numérique pour les élèves du 1er degré persiste au sein des communes. Les élus et les services concernés ont besoin d’expertise, et de formation pour construire leur politique numérique éducative ».

    C’est ce que nous confirme Thierry Coilhac, Directeur Stratégie Éducation chez Orange, auditeur du rapport du Conseil National du Numérique de mars 2012, relatif au choix du numérique à l’École. « Nous constatons régulièrement une méconnaissance des usages et des besoins des enseignants de leurs écoles, ce qui impacte sur les problématiques budgétaires, car méconnaître les usages, c’est faire l’impasse sur les équipements et infrastructures précis dont auront besoin les enseignants localement. Ce qui, par voie de conséquence, entraîne trop souvent des choix et des budgets inadaptés, exposés à des dépenses inutiles ».
    « Sans compter un manque d’accompagnement de la part de l’éducation nationale pour faire évoluer ces collectivités et les aider », ajoute Anna Angeli.

    Autre motif, là, plus « ancré dans les mentalités des élus est, poursuit-elle, de considérer que l’apprentissage du numérique, et les usages pédagogiques correspondants, peuvent attendre le collège et ne constituent pas une priorité en primaire ».

    « D’autant qu’ils ont ce qu’il faut à la maison ! » nous a-t-on, même avancé, lors de notre enquête.

    C’est ignorer les réelles inégalités entre les enfants, moins en matière d’accès à Internet, qu’en matière d’éducation et de recul face à ce média, où l’école joue dès le plus jeune âge un rôle primordial : l’un des leitmotivs de la mis en place du B2i et de l’inscription du principe d’éducation numérique dans le projet de loi Peillon.

    Et Anna Angeli de confirmer « le fossé numérique se creuse entre les villes qui équipent leurs écoles et celles qui ne le font pas, générateur d’inégalités inacceptables au sein de notre système éducatif républicain.
    Les nouvelles générations se retrouvent, comme si l’Internet était inné et génétique, sans repères culturels pour profiter des opportunités formidables d’accès aux droits, à la connaissance, à la citoyenneté et de fait à l’emploi induit par ces technologies de l’information et de la communication
     ».

    « Un système éducatif rénové doit garantir l’accès aux savoirs et à la culture numérique et ne pas laisser une grande partie de la jeunesse s’adjoindre la fracture numérique, aux fractures sociales et culturelles déjà existantes. Dans un contexte de budgets contraints, le besoin d’un État garant de l’équité des moyens et coordonnant les différents niveaux de collectivités est plus que criant » ajoute t-elle.

    À ces problématiques, vient s’ajouter la réorganisation des temps scolaires et périscolaires, qui d’après les entretiens que nous avons menés, absorbe actuellement les emplois du temps des élus et des services, et de ce fait gèle souvent les nouveaux projets d’écoles numériques.

    Le numérique, l’outil de choix pour des Plans éducatifs territoriaux efficaces et efficients

    « Toutes ces raisons sont bien compréhensibles car la gestion comptable, administrative et politique d’une commune est d’une grande complexité. Mais en cette période de crise nous devons, reconsidérer nos repères et nos valeurs, pour donner à nos enseignants, les moyens d’une plus grande efficacité, en matière de réussite éducative, grâce à des outils efficients. Or, le numérique est justement à terme source d’efficacité augmentée, et d’économie pour les frais de fonctionnement de nos écoles », avance Pascale Luciani Boyer.

    Source à termes d’efficience, mais aussi, prix en baisse des matériels et des infrastructures, technologies qui se hissent au plus haut niveau, pour entre autres, permettre une pédagogie différenciée, et soutenir pour le moins les enfants en difficulté, sont quelques-unes des réponses, qu’apporte le numérique aux problématiques que rencontrent les collectivités, tant sur les plans de gestions administratives, de gouvernances territoriales éducatives, de continuité pédagogique, ou d’économie budgétaire.

    Autant d’éléments que nous développerons dans un second volet sur ce sujet.

    Pourquoi le changement vers le numérique, c’est maintenant…… ? 2ème volet, prochainement sur ludovia.com

    MF. Bodiguian, 
    AMO-TICE

    Avis aux lecteurs de cette rubrique :
    Appel à Témoignages de collectivités engagées ou en projet sur le numérique et la refondation de l’école : vos réactions concernant le projet de loi, vos initiatives, vos idées et propositions, et les problématiques que vous rencontrées, contactez-nous !
    Merci d’envoyer vos mails à mfb@amotice.com, ou vous coordonnées sur twitter @amotice, pour nous faire partager votre expérience.
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  • Nouveaux rythmes scolaires : le numérique, une chance pour les communes ?

    Nouveaux rythmes scolaires : le numérique, une chance pour les communes ?

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    Ludovia a cherché à comprendre auprès des communes, déjà investies dans les TICE, la place et le rôle que pourra prendre le numérique dans les futurs activités périscolaires, et la politique éducative territoriale de la commune.

    Levier de continuité éducative et logistique

    Le ministère, dans son projet de loi sur la refondation de l’école, exprime une ambition de continuité éducative à travers différentes mesures : création d’un cycle Cm2-6éme, d’un service public numérique « pour prolonger l’offre des enseignements » et «rapprocher les familles de l’école », développement « des activités périscolaires, prolongeant le service public de l’éducation ».

    Dans le guide publié sur les nouveaux rythmes scolaires publié par le ministère le 5 février dernier, le numérique y est également encouragé comme l’une des activités possibles, qu’i s’agisse d’activités dites « d’épanouissement » ou « d’activités pédagogiques complémentaires »

    Si le projet de loi suggère la mise en place pour les enseignants d’ « une plateforme d’échange et de mutualisation » ou la mise en place d’une plateforme de ressource collaborative, soit un espace numérique d’échange, ne peut-on pas imaginer que ce type d’outil constitue un véritable trait d’union entre les projets d’école et programmes pédagogiques des enseignants et le projet éducatif de la ville ?

    D’autre part « penser le temps de l’enfant tout au long de la journée suppose inévitablement, pour Janine Bouvat, directrice de l’Education de la ville de La Ciotat,que nous partagions les lieux et les équipements entre les équipes scolaires et périscolaires, donc également les infrastructures et matériels numériques ».
    Anne Sophie Benoit, présidente de l’ANDEV, voit également dans « le numérique, un levier de continuité éducative entre le scolaire et le périscolaire, qui peut favoriser le flux des contenus et de la coordination administrative ».

    C’est ce que l’on observe en particulier dans les villes, qui dans le cadre de leurs politiques éducatives territoriales, définissant le cadre de la continuité éducative entre le scolaire et le périscolaire, ont privilégié la mutualisation des outils, la formation des animateurs, et la mise en œuvre d’un partenariat suivi entre l’Education Nationale et la ville.
    A Issy les Moulineaux par exemple, l’usage d’un espace numérique collaboratif partagé entre l’équipe enseignante et périscolaire a été expérimenté dans une école entre février et juin 2012, pour être étendu à plusieurs écoles depuis septembre 2012.
    Cet espace numérique d’échange intègre les partenaires associatifs naturels de la ville, qui œuvrent dans le cadre des animations périscolaires : développement d’un serious game, atelier d’écriture, animation numérique suite à la visite d’un musée avec la classe grâce à l’usage d’une mallette de ballado-diffusion, etc.

    A Angers, on mutualise également les équipements numériques entre le scolaire et le périscolaire. A l’école élémentaire Isoret en particulier, où a été maintenu le rythmes des 4 jours ½, l’un des projets d’école était de suivre un coureur du Vendée Globe. Ce projet permettait, entre autres dans le cadre des objectifs pédagogiques, de faire travailler en groupe les enfants sur l’expression écrite et parlée : concevoir en équipe un message et savoir l’exprimer. En parallèle, afin d’animer ce projet, les enfants ont participé sur le temps périscolaire à la fabrication d’un bateau, conçu au départ avec les outils numériques de l’école.

    Dans une autre école de la ville, certaines applications sur tablettes vont permettre, pendant les activités périscolaires, la création d’une pièce de théâtre.
    « Ces exemples illustrent bien, selon Luc Belot,  député de la 1ère circonscription du Maine-et-Loire, le trait d’union établit entre les activités scolaires et périscolaires et cristallise l’homogénéité et la cohérence du projet éducatif territorial ».
    Mais « chaque école devra monter son propre projet progressivement, et l’adapter, précise t-il, selon le contexte aux parcours pédagogiques, définis avec la ville dans le cadre de son projet éducatif territorial ».

    Des choix financiers nécessaires

    Mais créer des ponts organisationnels entre les équipes enseignantes et périscolaires engendrent auprès de nombreux directeurs éducation des villes des interrogations sur les conditions de mutualisation des outils et de sécurisation et de maintenance de ces matériels, sans oublier la formation des animateurs, et, donc par voie de conséquence des investissements et des coûts de fonctionnement supplémentaires.

    « Nos animateurs n’ont pas la compétence pour manier les usages numériques, et nous craignons que des incidents techniques survenus lors de séances périscolaires entravent les usages des matériels dédiés aux enseignants »,  avance la responsable des affaires scolaires d’une ville des Yvelines.

    « L’organisation à mettre en place pour faire face aux nouveaux rythmes scolaires sera très coûteuse et investir dans des équipements informatiques et dans la formation des animateurs n’est pas notre priorité », affirme le directeur éducation et jeunesse d’une autre ville des Bouches du Rhône.

    Pourtant peu argentées, certaines communes comme La Ciotat estiment néanmoins que les outils numériques sont justement une réponse réaliste aux questions que pose le réaménagement des temps de vie scolaire et périscolaire.
    « Bien pensé, une architecture et un équipement numérique dans une école peuvent être une réponse aux problématiques rencontrées avec l’aménagement des nouveaux rythmes scolaires tant au niveau des objectifs éducatifs de la ville, que dans la gestion administrative des personnels. D’autant que des solutions à moindre coût existent », souligne Janine Bouvat.
    « L’usage d’un espace numérique collaboratif de travail ou d’échange, poursuit-elle, permet une meilleure gestion et coordination des plannings et des contraintes logistiques. D’autre part les restrictions budgétaires entrainent des choix financiers et le numérique est à terme un outil permettant d’optimiser ses investissements ».

    Même discours du côté des grandes villes : « Aménager des activités périscolaires aura un coût indéniable, et le numérique en est un. Mais il présente de tels avantages, qu’il devient aujourd’hui incontournable de l’intégrer dans les plans éducatifs territoriaux », confirme Luc Belot.

    MF. Bodiguian, 
    AMO-TICE

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  • Refondation de l’Ecole : ce que le projet de loi ne précise pas…

    Refondation de l’Ecole : ce que le projet de loi ne précise pas…

    12022013511a150a1d566Malgré un cadre budgétaire, organisationnel et juridique qu’elles considèrent délicat (voir article du 5/02/2013, « Les collectivités encore dans l’expectative« ), les collectivités territoriales ont déployé, ces dernières années, un nombre croissant de projets TICE au sein des établissements scolaires. Mais la faiblesse des usages découragent peu à peu certaines bonnes volontés, ce qui nuit à la généralisation des équipements, qui devrait faire suite aux diverses expérimentations.

    La question est donc aujourd’hui de savoir si les outils, ressources et formations annoncées dans le projet de loi seront suffisants pour créer un réel élan sur les usages auprès de la communauté éducative et pédagogique et inciter les collectivités à poursuivre leurs efforts.

    Entre motivation des enseignants et gouvernances territoriales auprès des collectivités, qu’en est-il du rôle attendu par le ministère des services déconcentrés de l’Education Nationale, maillon essentiel et clé de voûte de la réussite de ce projet de loi ?

    Un projet de loi inscrit dans la continuité 

    Quoiqu’il en soit, le projet de loi de Vincent Peillon est reconnu par les acteurs de l’éducation numérique qui œuvrent au sein de l’Education Nationale comme un texte pilier et fondateur, qui institutionnalise un volet essentiel de la pédagogie.

    Comme Pascal Cotentin,  directeur du CRDP et conseiller Tice de M. le Recteur de l’académie de Versailles le souligne, « le projet de loi sur la refondation de l’Ecole propose une dynamique et des mesures concrètes qui devraient encourager les usages du numérique à l’école ».

    Jean-Michel Fourgous, maire d’Elancourt, et auteur de deux rapports sur l’école numérique sous le gouvernement Fillon, considère le volet numérique du projet de la loi pour la refondation de l’école comme « une bonne nouvelle »,  et salue la démarche de Vincent Peillon d’avoir tenu compte des préconisations des derniers rapports FOURGOUS, sur l’apport des outils numériques dans les apprentissages scolaires mais aussi sur la transformation de la pédagogie par le numérique.

    Encourager les usages par la valorisation des enseignants

    Mais nombreuses collectivités, qui ont déjà engagées des investissements et développer un projet d’école numérique, restent relativement réservées, exprimant une inquiétude au niveau de la motivation des enseignants, en raison d’un manque de reconnaissance vis-à-vis de leur hiérarchie sur l’utilisation des outils numériques.

    C’est ce que nous confirme le chef de projet du déploiement numérique dans les écoles d’une des villes pionnière, en matière de TICE.

    « Beaucoup trop d’enseignants en France ne prennent pas en compte le numérique en raison d’un manque de reconnaissance de leurs inspections de circonscription, qui considèrent le numérique comme un outil gadget, un artifice ludique au détriment du véritable contenu pédagogique ».
    « C’est fortement pénalisant pour les usages », poursuit-il, « donc pour les services et les élus qui doivent justifier des investissements engagés par la ville. J’espère que la future loi créera peu à peu une réelle motivation au niveau des services déconcentrés de l’Education Nationale, et impactera sur les usages, sans quoi nous ne pourrons avancer ».

    La valorisation hiérarchique  des enseignants utilisateurs des TICE avait d’ailleurs fait l’objet, dans le rapport Fourgous  d’une  proposition, intitulée : « Réinventer le management des enseignants : incitation, reconnaissance, valorisation ».

    Etablir une collaboration entre l’Inspection académique et la collectivité permet en effet aux enseignants de travailler dans un environnement constructif et de confiance, où les matériels sont mis à la disposition des enseignants, qui ont le droit à l’erreur.

    C’est par exemple le principe du dispositif OPPIDUM* à Saint Maur-des-Fossés dans le Val de Marne, où l’inspection académique, partie prenante dans les objectifs d’usages, entreprend un suivi permanent des enseignants, utilisateurs des matériels, pour un réajustement continu des besoins en matériel, logiciel ou ressources numériques.

    Quid de la gouvernance territoriale avec l’Education Nationale…. ?

    Quoiqu’il en soit, tous les projets d’écoles numériques réussis nous enseignent aujourd’hui, que seuls de solides partenariats tripartites, entre collectivités territoriales, Education Nationale et établissements scolaires, permettent d’aboutir à des usages efficients grâce à une réflexion commune en amont sur le projet pédagogique, les équipements, et infrastructures à mettre en regard, sans oublier la formation, le suivi et l’analyse régulière des usages.

    Citons en exemple parmi les plus connues, les actions menées dans les villes de Limoges, Elancourt, Saint Maur des Fossés avec le programme OPPIDUM*, dans les départements du Val d’Oise, de l’Ariège ou de la Corrèze, ou en encore en région PACA avec le CRDP de l’académie Aix-Marseille.

    C’est la raison pour laquelle les associations d’élus territoriales ainsi que l’ANDEV avaient proposé à Ludovia 2012, que le projet de loi intègre des mesures de continuité éducative cohérentes (école, collège, lycée) par bassin d’éducation entre les collectivités et les instances locales de l’Education Nationale.

    « Il est aujourd’hui contreproductif de séparer la réflexion sur les acquisitions des matériels, la gestion de la maintenance, et les objectifs d’usages de ces équipements. C’est dans le cadre d’une convention interterritoriale structurée numérique pluriannuelle, où serait clairement définie une politique d’usage pédagogique numérique par bassin d’éducation, que pourront être définis les meilleures conditions de maintenance, de renouvellement de matériels, de connexion, d’usages et de formation.
    C’est cette nouvelle gouvernance qui pourrait déterminer les transferts de compétence les plus judicieux
     », souligne Jean-Pierre Quignaux de l’ADF.

    Les associations représentantes des collectivités militent donc pour une co-élaboration cohérente des politiques éducatives numériques territoriales avec l’Education Nationale, pour des usages et des investissements efficients.

    L’exemple de l’observatoire ObserTice 92 est en cela très instructif puisqu’au sein du département des Hauts de Seine, une large concertation se poursuit entre les représentants des communes et la DSDEN (direction académique). Tous s’efforcent de mener à bien une réflexion permanente entre les besoins et les contraintes des communes, l’identification d’indicateurs destinés à mesurer les effets d’une politique TIC concertée, les retours d’expérience des enseignants et les orientations pédagogiques de l’Education Nationale sur l’usage des équipements.

    « Nous avons trouvé un format de collaboration efficace, confirme Elisabeth Hordequin, Conseillère Technique TICE du DASEN des Hauts-de-Seine, qui nous permet de diffuser et de mutualiser les démarches, ainsi que les retours des politiques d’équipement, en vue d’optimiser les investissements de chaque commune et dynamiser les usages des enseignants ».

    Si ce travail de coordination est là rendu possible grâce à la faible étendue du 92, ne pourrait-on pas imaginer que ces actions soient également menées au sein des bassins d’éducation ?

    MF. Bodiguian, 
    AMO-TICE

    Dans le cadre des actions que les collectivités engageront sur le développement du numérique dans les établissements scolaires, Ludovia vous propose de poster à cette adresse mfb@amotice.com vos réflexions et questions, afin par la suite de vous donner la parole dans ces colonnes, et de vous apporter, si ce n’est des réponses, au moins un partage des réflexions et des expériences des autres collectivités.  

    OPPIDUM* : Observatoire des Pratiques Pédagogiques Innovantes et des Usages du Multimédia.
    Dispositif initié et mis en place à Saint Maur des Fossés (94), associant dans un partenariat tripartite entre l’Education Nationale, l’Université René Descartes et le territoire, une réflexion mutualisable sur les dispositifs les plus performants tant sur les plans des réponses pédagogiques que sur ceux liés à l’utilisation réelle des investissements, à une recherche d’indicateurs pertinents de suivi, et un accompagnement de mise en œuvre.

  • Refondation de l’Ecole : les collectivités encore dans l’expectative

    Refondation de l’Ecole : les collectivités encore dans l’expectative

    numérique
    Globalement, l’ensemble de la communauté éducative et des collectivités territoriales saluent l’initiative de Vincent Peillon d’inscrire à présent dans la loi le principe d’une éducation numérique pour tous les élèves, et de vouloir intensifier les élans donnés par ses prédécesseurs en développant « une grande ambition pour le numérique à l’Ecole (…) pour enseigner par le numérique et enseigner le numérique ». Tous reconnaissent la volonté  d’institutionnaliser pour la première fois ce volet pédagogique.
    Dans ce contexte,  Ludovia magazine a souhaité comprendre comment sont aujourd’hui perçues ces nouvelles mesures du numérique par les collectivités territoriales, et quelles en seront les répercussions sur leurs organisations logistiques et financières.

    L’ADF et l’ARF pour un transfert des compétences

    Développer une grande ambition pour le numérique dans l’Education, donc des usages dans les écoles collèges ou lycées, suppose bien évidemment un développement des équipements en matériels, infrastructures et logiciels et la maintenance qui y est associée.

    Le  Chapitre II du projet de loi consacre de nouveaux articles à la coordination des actions entre les collectivités territoriales et l’Etat et donne à cet effet aux départements et aux régions, la charge de l’acquisition et de la maintenance des matériels informatiques et des logiciels prévus pour leur mise en service dans les collèges et les lycées.
    Equiper les établissements scolaires de matériel informatique engage d’énormes investissements, mais c’est la délicate question de la maintenance et des centaines d’emplois indispensables pour assurer la continuité de service de ces équipements qui reste dans l’état actuel du projet de loi, un point névralgique pour sa mise en œuvre.

    Suite aux remarques de la CCEN, le ministère reconnaissait d’ailleurs  l’existence d’un « flou au niveau législatif, sur la question de savoir qui, de l’Etat ou des collectivités territoriales, est compétent en la matière ».
    Mais si l’ARF et l’ADF sont favorables à une clarification des compétences, celles-ci contestent largement la présentation qui en est faite dans le projet de loi. Selon elles, celui-ci devrait « préciser clairement qu’il s’agit d’un transfert de compétences, ce qui de ce fait impliquerait une compensation financière de l’Etat ».

    Pourquoi cette précision des représentants régionaux et départementaux ?

    Suite au lancement du plan « Informatique pour tous ». en 1985, le code de l’Education précisait en 2004 que l’Etat prenait en charge le premier équipement informatique. Aussi, le législateur considère qu’il revient aux départements et régions d’équiper et de maintenir les équipements qui se sont succédés depuis.
    Raisonnement qualifié de « spécieux ».par l’ARF qui précise : « l’Etat s’appuie là sur cette disposition, pour affirmer qu’il n’a donc la responsabilité de la maintenance que de ce premier équipement, disparu depuis bien longtemps ».

    Selon les associations territoriales, on ne peut assimiler les équipements informatiques d’il y a 30 ans avec ceux liés aux technologies d’internet, qui depuis les années 2000, ont totalement transformées nos modes de communication, donc les besoins de maintenance en matériels.

    Et l’ARF, de poursuivre : « l’Etat a d’ailleurs consacré, suite au « plan informatique pour tous » d’importantes sommes à l’acquisition d’équipements informatiques divers. Un décret (D.211-14 et 211-15), ne peut restreindre son champ d’application aux premiers équipements, sauf de manière purement indicative (cf. jurisprudence du Conseil d’Etat) ».

    Les départements et les régions ont exprimé auprès du ministère leur opposition à prendre en charge l’acquisition et la maintenance informatique des infrastructures des collèges et des lycées, à moins que ne soit effectivement reconnu le transfert de compétence qui donne alors lieu à une compensation financière.

    Inquiétude du côté des communes

    Du côté des communes, on s’inquiète dans le projet de loi d’une absence de précision concernant la coordination de ces actions entre l’Etat et les communes.

    Pascale Luciani Boyer, en charge des questions Education et Numérique à l’AMF, qui reconnaît au texte de Vincent Peillon une véritable volonté politique de faciliter les usages du numérique dans le primaire, regrette qu’aucun article ne vienne préciser le rôle des communes dans l’équipement informatique et numérique ainsi que dans l’orchestration de la maintenance, ni soutenir les collectivités dans cette initiative à travers un quelconque engagement de l’Etat.
    Les communes ont en effet à ce jour, selon la loi en vigueur, obligation d’assurer dans les écoles les équipements nécessaires aux enseignements, sans pour autant avoir la charge de développer des projets informatiques.

    « Quelle mesure incite les communes à donner aux enseignants les moyens nécessaires de travailler avec le numérique et  à ne pas laisser leurs écoles avec un tableau noir et une craie »?  demande Pascale Luciani Boyer. «Les textes en l’état n’encadrent pas les communes en ce sens et rien ne leur permet non plus de se sentir épaulées si elles décident de s’engager dans cette dynamique ».

    Pour sa part, la SE-Unsa, qui milite pour la réduction de la fracture numérique rappelle que les petites communes ne pourront financer les parcs informatiques ou les outils numériques qui seront nécessaires aux usages du futur service public du numérique ni assurer la maintenance, qui « trop souvent fait appel aux bonnes volontés ».

    Les petites communes ont d’ailleurs fait savoir qu’elles ne pourraient pas assumer ce rôle et demanderaient à l’Etat de le faire.

    Dans le cadre des actions que les collectivités engageront sur le développement du numérique dans les établissements scolaires, Ludovia magazine vous propose de poster à cette adresse mfb@amotice.com  vos réflexions et questions afin, par la suite, de vous donner la parole dans ces colonnes  et de vous apporter, si ce n’est des réponses, au moins un partage des réflexions et des expériences des autres collectivités.

    MF. Bodiguian, 
    AMO-TICE

  • Les plus beaux équipements du monde favorisent-ils les meilleurs usages ?

    Les plus beaux équipements du monde favorisent-ils les meilleurs usages ?

    Au programme de ce dernier épisode, regardons l’opération landaise d’un point de vue usages. Pour cela, nous avons rencontré les chefs d’établissement, les enseignants et les élèves qui sont au cœur du dispositif.

    Toutes les salles de classe équipées en matériels de visualisation collective (vidéoprojecteur, TNI et visualiseur numérique), 1 ordinateur portable pour chaque élève de 4e et de 3e, 1250 enseignants dotés eux-aussi et 120 logiciels ou ressources en ligne à la disposition de toute cette communauté. Quoi de mieux pour apprendre avec le numérique ?

    Des ressources pour faciliter les usages

    Comme l’a souligné Henri Emmanuelli dans l’épisode 1, le Conseil général a du sortir de son champ de compétences en investissant dans les ressources, supposées favoriser les usages. En effet, sans contenus, le numérique ne représente pas grand chose dans une classe.

    Pierre-Louis Ghavam, chef du service informaTIC au Conseil général des Landes, ajoute qu’ils ont tenté de faire les meilleurs choix possibles pour les enseignants. Pour cela ils se sont entourés d’un comité stratégique comprenant un enseignant de chaque discipline et des IA-IPR qui se réunissent chaque année pour suggérer les ressources dont le Conseil général fera l’acquisition, en fonction de ses moyens financiers.

    Question pratique, les 120 logiciels sont habilement classés par icônes, soit par fonction (icône clé) si « je veux dessiner, je veux graver des CD, je veux regarder un film… », précise Pierre-Louis Ghavam, soit par discipline (icône à flèche).
    Et il ajoute, « les enseignants ont ces ressources à disposition mais ne sont en aucun cas obligés à s’en servir ».

    Malgré la bonne volonté de chacun, la pauvreté de contenus numériques disponibles pour certaines matières restreindrait les possibilités d’usages des matériels.

    Pour exemple en français, aucun manuel n’apparaît dans le menu des ordinateurs landais. Aux enseignants de lettres s’offre l’application « la grammaire du collège »,  mais cela reste limité.

    Karine Artola, enseignante en français au collège Jean Mermoz de Biscarosse ajoute qu’elle peut difficilement laisser ses élèves prendre en note le cours uniquement sur ordinateur car elle doit aussi respecter les consignes de l’inspection, qui demande à ce qu’il y ait une trace écrite.
    « Cela signifie qu’il y ait l’ordinateur d’un côté et le cahier de l’autre ; en clair, une organisation, notamment matérielle, un peu particulière ».

    Elle reconnaît que le numérique peut avoir des aspects intéressants : « en classe de 4e, lorsque nous étudions le portrait des Misérables, je dépose sur le réseau une adaptation filmée de l’ouvrage que mes élèves peuvent regarder chez eux car je n’ai pas le temps de la montrer en classe ».

    Sur un cas concret qui se pose et la question des ibooks, Karine Artola accepte que ses élèves lisent sur numérique. Par contre, elle reconnaît que pour retrouver des citations, entre les élèves qui ont la version papier et les autres en version numérique, cela est un peu compliqué car les références de pages sont différentes.

    Exemples d’adoptions réussies du numérique par les enseignants

    Que ce soient Stéphane Landeau que vous avez pu découvrir dans le 3ème épisode de la série avec son cours de « culture numérique » ou encore Lionel Grupeli, enseignant en Histoire-Géographie, Anita Morales, enseignante en espagnol et Eric Villeroy, professeur de technologie, tous trois du collège Jean Mermoz, leur avis est unanime : le numérique a changé leur manière d’enseigner.

    Au quotidien, Lionel Grupeli enregistre les compétences nouvelles que ses élèves acquièrent grâce au numérique ; un apprentissage qui se trouve facilité d’après lui :

    « Avec le numérique, on peut présenter le cours et ses objectifs, le sommaire apparaît ». Il insiste sur le fait que cela permet à l’élève de structurer sa pensée ; il comprend vers quel objectif l’enseignant veut l’amener et par quels chemins il va passer pour y aller.

    Il poursuit,  « le numérique est un véritable « ami » de l’élève qui ne rendait rien à l’écrit ou qui était en difficultés. Le correcteur et le traitement de texte leur permettent d’avoir une production disciplinée ».

    Malgré tout, il est conscient que les usages ne peuvent être exclusivement numériques, que le juste milieu est à trouver et qu’il dépend aussi de chaque élève.

    Anita Morales, en espagnol, prend beaucoup de temps à préparer ses cours sur support numérique pour que ses élèves puissent travailler sur leurs ordinateurs pendant l’heure de classe. Au menu du jour, un travail sur l’œuvre de Picasso au travers d’une vieille publicité.

    « J’avais ce document sur cassette vidéo et je l’ai repiqué avec mon combi-scope chez moi pour pouvoir le passer aux élèves en classe et le déposer sur le réseau pour qu’ils puissent ensuite travailler dessus à la maison », nous explique t-elle simplement.

    Une enseignante motivée par le numérique qui fait même de la « récup » pour ranger les casques audio qu’elle a commandé à l’établissement pour ses élèves (car non fournis avec l’ordinateur) : elle se sert d’une cagette à « naranja », traduisez « oranges » !

    Eric Villeroy, en tant que professeur de technologie, utilise beaucoup les ordinateurs, notamment pour faire travailler ses élèves en autonomie. Il utilise donc régulièrement les outils mis à sa disposition ; d’après lui, les usages ne peuvent pas se faire au même niveau pour chaque enseignant car cela dépend beaucoup de la discipline.
    Même pour communiquer, il avoue que les échanges se font surtout entre enseignants d’une même discipline, « il y a de la mutualisation sur le site du rectorat de Bordeaux où les professeurs peuvent mettre en ligne ce qu’ils ont fait ».

    Les ressources et la motivation des enseignants ne sont pas les seules données à prendre en compte pour favoriser les meilleurs usages. D’après quelques témoignages que nous avons recueillis, il semblerait que d’autres adaptations soient à envisager pour y parvenir.

    Accompagner l’école dans une réadaptation matérielle et temporelle

    Françoise Laurençon, principal du collège départemental de Biscarosse, pense que le numérique devrait aider l’école à s’adapter au monde moderne dans lequel nous vivons. La classe, dans son espace matériel et temporel cloisonnés ne répond plus aux exigences des rythmes d’aujourd’hui.

    C’est en ce sens que le numérique peut aider « à faire éclater la classe » et sortir du schéma classique « d’une succession de boîtes : 1 heure de cours, 1 enseignant, 1 salle, 1 classe », argumente t-elle.
    Et elle ajoute : « et je ne suis pas certaines que l’ordinateur portable soit investi à hauteur de qu’il pourrait l’être (…). Cet outil était l’outil de l’enfant, associé au jeu, à quelque chose de ludique et l’école s’en est emparé mais l’école n’a pas réussi à l’investir en outil scolaire pour que l’élève lui-même l’investisse en tant que tel (…) ». Elle reste donc sceptique quant à l’utilisation de l’ordinateur à la maison à des fins scolaires.

    D’après elle, cela est dû au manque de « commandes scolaires » qui devraient être plus régulières et plus appuyées, ce qui permettrait à l’élève d’intégrer que l’ordinateur est comme son cahier : le soir à la maison, il le sort pour travailler.

    En termes d’adaptation temporelle, Catherine Acquier qui s’occupe des élèves en classe ULIS, apporte son témoignage et rejoint en un sens, les propos de notre chef d’établissement.
    Elle n’a pas cette contrainte temporelle et elle avoue qu’elle trouve bénéfique de pouvoir rester plus d’une heure sur la même matière.

    « Les élèves allument l’ordinateur le matin en arrivant et on peut rester deux heures sur la même matière si ils sont lancés et si tout fonctionne bien ; nous ne sommes pas tributaires de la sonnerie et c’est vrai que c’est un confort pour eux ».

    Le fait de commencer un travail dans une discipline qui peut durer toute la journée est d’usage fréquent chez cette enseignante ; un concept qui pourrait être appliqué aux établissements, comme Jean Mermoz ou le collège départemental de Biscarosse, qui sont tout numérique, mais cela nécessiterait une métamorphose totale de l’organisation scolaire.

    Pourtant, ces contraintes temporelles et matérielles, comme changer de salle ou allumer et éteindre l’ordinateur plusieurs fois dans la journée, ne semblent pas stresser les élèves. Lorsque nous les interrogeons, ils avouent y être « habitués ».

    Nous avons recueilli leur point de vue et la vision qu’ils ont sur l’utilisation de leur ordinateur.

    Un outil « normal » pour une école « normale »

    Nous venons de pointer du doigt les aspects matériels du processus, qui, à priori, ralentiraient les usages.
    Mais au fait, les enfants seraient-ils prêts à travailler toute la journée sur ordinateur ?

    Alexis, Chloé, Jennad, Lison et Mc Kenzie (une petite Australienne fraîchement débarquée à Biscarosse) nous avouent qu’ils n’aimeraient pas taper des heures durant sur leur clavier. D’une part, ils trouvent que ça fatigue les yeux ! Puis, « si l’ordi tombe en panne, on a toujours le cahier », ajoutent-ils spontanément.

    Avec l’ordinateur, on apprend « mieux » ?

    Apparemment non, mais c’est une façon plus amusante d’apprendre, « on préfère apprendre sur un ordi plutôt que sur un cahier ». Ils trouvent aussi plus enrichissant d’avoir l’ordinateur car ils peuvent chercher des données sur internet et retrouver des documents déposés sur le réseau par leur professeur.

    Après la 3e, ces élèves vont se retrouver au lycée sans leur compagnon numérique qu’ils ont apprivoisé pendant 2 années au collège. Nous leur avons posé la question de savoir si il allait leur manquer et pour la plupart, la réponse est OUI, même si ils semblent résignés et acceptent ce changement sans aucune marque de regret, comme si c’était « normal ».

    Certains avouent avoir un ordinateur personnel à la maison ; cependant, ils ne sont pas sûrs de pouvoir le prendre dans leur cartable à leur rentrée en seconde.

    Le problème de la continuité numérique dans le cursus scolaire se pose et pas seulement entre le collège et le lycée. Des élèves qui prennent des habitudes « numériques » et qui vont être obligés de se déshabituer ensuite, c’est un peu dommage… Encore une adaptation à penser, pourquoi pas dans les évolutions à donner à la « Refondation » de l’Ecole de la République.

    Landes_janv13

  • Apprendre le numérique, développer une «culture» pour élèves et enseignants


    « On considère que le numérique est quelque chose d’intuitif chez l’enfant (…). Au contraire, je crois que c’est un maniement qui doit être accompagné et initié », Françoise Laurençon, principal du collège départemental de Biscarosse.

    L’achat de matériel informatique et l’équipement des établissements en numérique doivent s’accompagner des usages pédagogiques. Avant d’aborder cette question  qui le sera dans le dernier épisode de cette série qui occupe, à juste titre, toutes les réflexions de la communauté éducative, Françoise Laurençon pointe du doigt une donnée importante à prendre en compte : celle d’apprendre, pour ne pas dire « d’apprivoiser » le numérique. Elle introduit la notion de « culture numérique », aussi bien pour les élèves que pour les enseignants.

    Un nouveau cours : la « culture numérique »

    Pour exemple, dans son collège, elle a créé un enseignement disponible à partir de la classe de 4e, dès que les élèves reçoivent leur ordinateur portable, qui s’intitule « culture numérique ».
    Cet enseignement doit permettre aux élèves de s’approprier l’outil de manière intelligente ; même si nombre de gens tendent à penser que le numérique est quelque chose d’inné pour les enfants, notre chef d’établissement reste persuadée que cette étape de découverte « accompagnée » est indispensable.

    Cette nouvelle discipline est dispensée pendant deux heures tous les 15 jours et par groupe de demi-classe, pour faciliter le travail collaboratif entre élèves et entre professeur-élèves. Les 75 élèves de 4e ont un créneau horaire dédié à la culture numérique dans leur emploi du temps ; la mise en place de ce cours est réellement un choix de l’établissement, « qui a pour objectif de mettre du sens avec le projet de dotation en ordinateurs portables du Conseil général », souligne Françoise Laurençon.

    Une culture adoptée aussi par les enseignants

    Côté enseignants, la principale du collège tient à instaurer une sorte « d’incentive » en informatique en proposant des stages d’équipe. En 2011, deux stages ont eu lieu, avec comme thèmes « comment écrire sur un site de l’établissement » et « comment créer et utiliser un blog sur le plan pédagogique ».

    Les résultats de ces formations se sont tout de suite fait sentir. Motivés, les enseignants de langue ont créé un blog, en partenariat avec les écoles primaires, ce qui permet d’échanger entre classes, de mutualiser des supports de cours, etc.

    Françoise Laurençon se réjouit de constater que cette initiative va dans le sens de ce qu’elle entend par  « culture numérique » ; il ne s’agit plus seulement de numérique dans un contexte cloisonné de classe mais bel et bien d’ouverture sur le monde. « Cela fait éclater la frontière de la classe », ajoute t-elle.

    Deux prochains stages sont prévus en 2013 sur « l’utilisation des réseaux sur le plan pédagogique » et « comment construire un cours avec l’outil numérique ».

    Donner du sens au numérique à l’école

    Côté élèves, l’enthousiasme pour le cours de « culture numérique » de Stéphane Landeau est à son comble. Alors même que la cloche vient de sonner, les élèves ne décrochent pas de leur ordinateur où ils sont entrain de fabriquer leur propre blog.
    Au programme de la leçon du jour : les « widgets » et le travail sur la « sidebar », la barre latérale d’un blog WordPress.

    « Les élèves sont passionnés, ils viennent me voir après les cours pour me poser des questions sur le sujet (…) ou me donner le nombre de visites de leur blog : ils en sont extrêmement fiers (… ) », confie Stéphane Landeau, enseignant en physique-chimie, qui occupe également la place de référent numérique du collège.

    Même si dans cet exercice, les élèves ont toute liberté sur le choix du thème de leur blog, ils produisent quelque chose et ils acquièrent des compétences, sans même s’en rendre compte.
    L’enseignant a tenu à ce que chaque élève de son cours crée une boîte Gmail ; cette adresse leur sert à échanger avec leur professeur, même pendant le week-end !
    « Ils sont accrocs ! », ajoute t-il.

    Certains élèves ont déjà créé des blogs de leur côté avant même le cours de Stéphane Landeau, mais le fait de pouvoir avoir cette activité en classe leur montre qu’avec l’ordinateur qui leur a été fourni dans le cadre scolaire, on peut aussi travailler autrement tout en prenant du plaisir.

    « La finalité  de cet enseignement, il faut bien l’avouer,  est également de valider les items du B2i pour que tous les élèves à la fin de leur 4e est le B2i en poche, ce qui leur évite de le passer en 3e », rappelle Stéphane Landeau.

    Impliquer tout le monde dans l’ère du numérique à l’école

    De son côté, Françoise Laurençon tient à impliquer l’ensemble de la communauté éducative dans sa démarche d’intégration de la culture numérique. Pour ce faire, elle a tenté, en partenariat avec le Conseil général, d’impliquer les parents d’élèves dans l’opération « un collégien, un ordinateur portable », afin de leur expliquer la démarche, qui va bien au-delà du nouveau matériel que leur enfant va ramener à la maison.

    Hélas, peu de parents ont répondu à l’invitation qui avait pourtant lieu en fin de journée.

    Un constat encore très fréquent : non pas que les parents soient la 5ème roue du carrosse mais force est de constater que, malgré des fédérations de parents d’élèves motivées pour s’impliquer dans les projets de numérique à l’école, nous n’avons pas encore atteint l’heure du changement dans les habitudes des foyers.

    Sans doute ne mesurent-ils pas encore les bouleversements que ces nouvelles pratiques à l’école vont engendrer, y compris à la maison. Pourtant ils font partie de ceux qui doivent accompagner la « révolution » numérique.

    A suivre dans le prochain épisode : les plus beaux équipements du monde favorisent-ils les meilleurs usages ?

  • «un collégien, un ordinateur portable» : 12 ans après, vu par Henri Emmanuelli

    Visions croisées de personnels de la collectivité, de l’éducation nationale et de ses représentants et points de vues des élèves sur cette opération d’envergure. Durant quatre épisodes, Ludovia Magazine vous fait entrer dans le monde du collège landais et de ses connexions diverses et variées…

    Quoi de mieux pour débuter cette série que d’interroger l’homme qui est à l’origine de ce vaste chantier : Henri Emmanuelli, Président du Conseil Général des Landes et Député des Landes.

    Les chiffres parlent…

    Le Président du Conseil Général rappelle que le département a investi 52 millions d’euros dans l’opération. Depuis septembre 51 000 collégiens landais ont pu bénéficier d’un ordinateur portable en prêt pendant une ou deux années de leur scolarité. Cela représente par an, l’équipement d’environ 9 500 portables remis aux collégiens de classe de 4ème et de 3ème et leurs enseignants. Mais aussi 3000 équipements fixes qui ne sont pas à négliger.
    « L’investissement en vidéoprojecteurs, TNI, le câblage dans les collèges, est aussi très important », ajoute t-il.

    Des résultats dépendant de l’implication des équipes éducatives

    Une enquête SOFRES avait été commandée fin 2008 (rendue publique à l’Université d’été de Ludovia édition 2009), par le Conseil Général afin de mesurer les usages induits par l’opération. 12 ans après ses débuts, Henri Emmanuelli avoue avoir toujours quelques difficultés à annoncer des résultats dans leur globalité.
    « Nous pouvions dire, en regardant l’enquête SOFRES, que le verre était à moitié plein, à moitié vide (…) Cela dépend beaucoup de l’implication de l’éducation nationale, des inspecteurs d’académie, des principaux de collèges, (…). Dans certains collèges, il y a un noyau très actif, dans d’autres un peu moins (…) ».

    Henri Emmanuelli regrette qu’il n’y ait pas eu de véritable politique nationale instituée par l’éducation nationale en matière d’introduction du numérique dans les écoles. Il avoue même s’être heurté, au départ, à l’éducation nationale dont certains refusaient l’arrivée et l’utilisation de ces outils en classe.

    En 2001, répondant à une double volonté, réduire la fracture numérique d’une part et introduire cet outil dans la classe d’autre part, Henri Emmanuelli souligne que l’opération aurait nécessité une politique globale d’accompagnement des enseignants, en plus des formations initiales prodiguées par l’EN en 2002. Cela ne s’est pas produit et le Président en fait mention, notamment au travers du manque de ressources numériques pédagogiques.

    De l’investissement «hors champ», dans les ressources numériques pédagogiques

    Pour combler ce manque, les Landes sont largement sorties de leur champ de compétences en investissant sur la décennie environ 4 millions d’euros en «logiciels» ; mais là encore, le département a été confronté à certaines difficultés, comme celle de trouver des ressources pour l’enseignement, peu nombreuses à l’époque, et qui commencent tout juste à se déployer aujourd’hui.

    Il donne l’exemple d’un enseignant de mathématiques de 4ème qui souhaite faire son cours avec l’ordinateur et qui dit « moi je dois faire mon cours, j’ai l’outil mais je n’ai pas le logiciel qui reprend le cours de 4ème » (…) « Il n’y a pas l’équivalent logiciel de ce qu’on a connu dans le livre », ajoute Henri Emmanuelli.

    Toujours «hors champ», la maintenance en question

    Sortant encore du champ de ses compétences, le département des Landes a également largement contribué à maintenir ses matériels «à flot» et à procéder à leur renouvellement lorsqu’ils sortaient de garantie. Trop souvent oubliée dans les discours, la maintenance des équipements numériques relève d’une véritable mission.

    Pour chance, les Landes permettent à chaque collège d’avoir son assistant d’éducation, chargé de ces différentes tâches. Personnel de l’éducation nationale, il est pourtant rémunéré indirectement par le Conseil Général des Landes, dans environ les ¾ des collèges.

    Cet état de faits est important à souligner car la présence de cette personne ressource au sein de l’établissement rassure les enseignants, comme le souligne Françoise Laurençon, Principal du collège départemental de Biscarosse.
    « La présence d’Anthony, l’assistant d’éducation, rassure beaucoup les enseignants. De plus, il s’implique vraiment dans tous les projets, y compris pédagogiques car pour aider et dépanner, il faut aussi comprendre la philosophie de l’objet que l’on construit (…) ».

    Poursuite de l’opération landaise

    Henri Emmanuelli est conscient que le secteur du numérique est en perpétuelle évolution et que cela demande toujours à se renouveler et à investir. Lorsqu’on l’interroge sur les tablettes, il reconnaît que l’outil est intéressant et a l’avantage d’être moins cher qu’un ordinateur portable.
    Cependant, il rappelle la contrainte «ressources», à laquelle il s’est déjà heurté ; faire basculer tous ces logiciels sur tablette sans changer les pratiques des enseignants est pour l’instant mission impossible !

    Non pas que le Conseil Général des Landes n’assume pas la modernité, si tant est que la tablette devait être son emblème, mais ayant déjà prouvé par cette opération avant-gardiste qu’il pouvait se montrer innovant, il souhaite poursuivre sa mission d’équipement dans l’intérêt des collégiens.

    A suivre dans le prochain épisode : l’ordinateur du collégien landais, découverte de la vie d’une «star».

  • Le numérique à l’école, un virage vu par trois niveaux de collectivités

    Que va t-il se passer demain dans nos écoles, sommes-nous à un virage ?

    Les collectivités aimeraient avoir une vision plus claire sur ce qu’ils investissent et d’un autre côté, les acteurs de l’éducation nationale aimeraient être formés. Ces représentants des collectivités nous donnent leur état des lieux en matière d’e-éducation et surtout leur ressenti de ce qui devrait être fait pour que le numérique dans les écoles, collèges et lycées fonctionne mieux.

    Anne-Marie Cocula annonce que la région Aquitaine s’est lancée dans l’ENT avec le souci de faire participer tous les établissements et les amener progressivement à prendre ce virage.  D’après elle, la réussite dépend fortement du consentement des enseignants pour faire accepter et faire fonctionner l’ENT.
    L’idée des expérimentations est à retenir, « il ne faut pas non plus vouloir tout faire d’un coup ». Sur 154 EPLE que compte la région Aquitaine, pour l’instant 13 d’entre eux (dont 2 lycées agricoles), sont en phase d’expérimentation de « Léa », nom de l’ENT aquitain.

    Du côté de la Gironde, les services chargés du numérique ont constaté que dans les collèges, les connexions sont encore aléatoires, les débits insuffisants et les identifications imprécises. « Nous menons donc, avec le rectorat, un audit sur les 103 collèges pour les problématiques des réseaux internes », souligne Sylvie Loiseau.
    Elle ajoute que la clarté de la gouvernance doit être de mise. « Nous ne pouvons plus être sur des politiques de silos, qui ne sont pas articulées. Du fait des contraintes budgétaires, chaque euro dépensé doit l’être de manière la plus judicieuse ».

    Elle prend l’exemple du plan DUNE pour lequel un accord devait être signé avec l’ADF et l’ARF ; cela n’a jamais été fait ; « nous n’étions pas dans l’articulation ».

    Anne-Marie Cocula ajoute que les collectivités n’ont jamais cessé de vouloir collaborer avec l’Etat. Quand l’Etat décide de fermer une formation alors que la Région a investi pour équiper des salles destinées à cette formation, la collectivité ne peut rien contester et l’argent a été dépensé pour rien. C’est de cette concertation en amont dont il est question.

    Bernard Cuartero, Maire de Cambes, nous raconte comment il a découvert le numérique à l’école. Dans son village, il a équipé son école en classes mobiles puis en TNI, en accord avec l’éducation nationale et surtout avec les enseignants. Il avoue avoir eu la chance d’être confronté à un directeur d’école et une équipe motivés par cette idée. « Ma démarche était en faveur de l’Ecole de la République ». « Je n’arrive pas en « César » pour imposer mes choix, je discute avec les enseignants car c’est eux qui vivent dans l’école ».

    Les problématiques sont très différentes pour un département, une région, ou une petite commune de 1400 habitants comme celle de Cambes. Néanmoins, tous sont unanimes : ils ne souhaitent plus investir sans avoir la certitude que les outils soient utilisés.

    Une gouvernance est aussi à trouver au niveau d’un territoire : pourquoi ne pas prévoir des choix partagés de l’école maternelle au lycée ? La cohérence ne serait-elle pas dans la continuité ?

  • Qui se cache derrière le bon fonctionnement du numérique dans les établissements ?

    On ne parle pas souvent d’eux, qui sont-ils ? Ce sont ces personnes qui font que, sans leur présence, le numérique ne fonctionnerait pas. Souvent, ces « petites mains » du numérique ont connu des parcours professionnels très variés avant d’en arriver à s’occuper de la maintenance. Au collège Joliot-Curie, nous avons rencontré Joël et Frédéric, qui nous parlent de leur métier.

    Jöel Mogade est au départ ouvrier d’entretien et d’accueil ; il passera ensuite ouvrier professionnel et suivra une formation de 4 mois en tant que technicien de réseaux de maintenance pour devenir « correspondant technique de proximité ».
    Aujourd’hui,  titulaire au Conseil Général du Val d’Oise sous l’autorité du rectorat de Versailles, il a en charge 9 établissements, soit un parc de 150 machines. Son quotidien est rythmé par les appels à l’aide des établissements qui arrivent sur un portail d’assistance ; ceux-ci sont ensuite gérés par un superviseur qui à la charge de distribuer les missions en fonction des bassins concernés.

    Il aime son métier et ce qu’il lui plaît surtout, c’est de pouvoir travailler en équipe.
    « En tant qu’ouvrier professionnel, j’étais plutôt en solitaire et en tant que correspondant technique de proximité, je me retrouve dans une équipe où il y a un partage, un échange de compétences ». Il avoue que ce n’est pas si simple de basculer d’un métier où il ne connaissait rien en informatique à ce qu’il est devenu maintenant. Et il se perfectionne chaque jour avec l’aide de ses collègues « et je trouve cela formidable », conclut-il.

    Frédéric Quinot travaille à la Direction des Services d’Information du rectorat de Versailles. De son côté, il a en charge la supervision des équipes techniques de proximité du Conseil Général, dont fait partie Joël, pour leur intervention sur le terrain.

    La gestion des missions se fait de manière rigoureuse, car il faut savoir donner des priorités ! Frédéric nous donne l’exemple d’une panne internet dans un établissement : « cela nécessite une intervention codée  « accord de niveaux de services de 4 heures »», qui sous-entend que la mission doit être effectuée dans ce laps de temps.

    Un travail de terrain en cas de panne, mais pas seulement ; les équipes techniques de proximité interviennent également en amont lors de visites préventives qui servent, par exemple, à effectuer la mise à niveau des logiciels, des vérifications sur l’efficacité des solutions de sauvegarde ou à donner des conseils aux utilisateurs dans les politiques de sécurité…
    « C’est une politique voulue par le Conseil Général et qui constitue une des raisons de l’embauche des conseillers techniques de proximité », souligne Frédéric.

    Enfin, il ajoute que l’arrivée de ces nouveaux personnels a favorisé la mise en place des réseaux unifiés dans les collèges. Pour schématiser, le réseau pédagogique et le réseau administratif travaillaient chacun de leur côté de manière indépendante. Les MIP (équipes Mobiles d’informatique de Proximité) interviennent aujourd’hui à la fois sur le pédagogique que sur l’administratif, ce qui fluidifie les échanges entre les différentes institutions.

    Un ordinateur, un TNI ou un VPI dans une salle ne fonctionnent pas tout seuls. Ces témoignages viennent souligner l’absolue nécessité des ces équipes qui effectuent au quotidien un travail de plus en plus dense, au fur et à mesure que les matériels se multiplient dans les classes.

    Le Conseil Général du Val d’Oise a su réagir à ces nouveaux besoins, grâce à l’embauche et à la formation de personnels spécifiques et en bonne entente avec les instances académiques. Cette bonne entente profite au collège Joliot-Curie d’Argenteuil.

    Certes, le sujet est beaucoup moins « sexy » que la nouvelle tablette ; cependant, il soulève un problème de fond dans les établissements : le numérique à l’Ecole et les investissements qui en découlent sont à penser de manière «globale »,  sans oublier des « wagons » en route, si nous voulons que le train puisse avancer à grande vitesse…