Auteur/autrice : Nicolas Le Luherne

  • Mon carnet rouge ou l’extension du domaine au numérique

    Mon carnet rouge ou l’extension du domaine au numérique

    On est samedi matin, le jour de nos vacances. Après avoir écouté dans la voiture Apocalypse de Cigarettes after Sex, je prends un bol d’air marin sur la côte de granit rose. Sans voix devant tant de beauté, je prends ces rochers galets en photo. Je me prends parfois pour un artiste à la fleur d’instantanés numériques…

    Aujourd’hui, c’est un dièse sans filtre, demain surement un sépia 2.0. Je pense à ces paysages des films d’héroïque fantaisie aux longs-pieds que je regarderais surement le lendemain, peut-être dans trois semaines ou même jamais. C’est un peu comme ces livres que l’on accumule parfois. On se dit : on ne sait jamais. La vitesse de l’actualité littéraire et scientifique étant celle qu’elle est, finalement, on l’oublie sous quelques millimètres de poussière.

    Le temps s’écoule, le soir venu, en jouant à un jeu de société, on s’amuse à se poser des colles. Il arrive parfois qu’elles soient collectives. Heureusement, une encyclopédie à notre disposition nous permet de sortir de l’ornière. La réponse nous ouvre des possibles. Un seul regret, nous ne captons pas la radio, enfin nous ne la captions pas. Cela fait cinq minutes que l’espace musical est de nouveau occupé.

    Un coup de téléphone interrompt ma rêverie et m’oblige à un effort d’organisation. Je note sur mon agenda et règle une alerte. Je n’oublie pas un message d’absences. Une cloche sonne, c’est l’anniversaire d’un ami. Il m’arrive d’avoir des trous de mémoire et de calcul mental. Du coup, pour ne rien oublier c’est ceinture et bretelles. Encore une année sans fausse note, l’amitié ne garantit pas toujours la ponctualité.

    J’ouvre ma ligne d’informations. C’est un geste, presque un réflexe. Depuis quelques temps, j’ai la chance de rencontrer l’altérité. Je lis un article traduit par ce que certains appellent un Troll alors que je le considère comme un ami critique. Dans ce monde en mouvement dans des bulles, le contradicteur est indispensable. Je me dis qu’il faut que je rencontre ce type. On n’est peut-être pas d’accord sur tout mais ce sera forcément intéressant parce qu’on a plus en commun qu’en différence. A moi de choisir la forme épistolaire.

    Au hasard de mes pensées, je me rappelle cette lecture fondatrice du sociologue espagnol Joaquín Rodríguez Marco dans ce qui était encore le nouvel observateur. Il discutait de la peur du progrès technique et surement de l’éthique de responsabilité pour y faire face. Je vais rechercher dans mes archives. Avec un petit sourire, je lis cette inspiration de Phèdre de Platon. Je me dis surtout que la liste est un peu longue.

    Je zappe devant la télé. Je tombe sur Mac Giver et son couteau suisse. Tout ça, c’est pas nouveau, surtout quand je regarde mon médium unique et multifonction de 6”5. Rien ne change et tout à la fois change : l’émotion se dessine toujours sur mon visage.

    Si je veux, avec ce que je veux : mon carnet rouge

    Je n’ai pas mis par hasard mon carnet rouge en photo. Il symbolise la manière dont je travaille.

    C’est un mixte entre numérique et analogique. J’ai appris à travailler avec le papier et cela me va bien.

    J’ai même trouvé la bonne carburation car je tire la sève du numérique sans en prendre l’amertume. Je ne suis pas un Smartphone native. J’ai connu son début et il m’a accompagné tout au long de mes usages professionnels.

    Il est vrai qu’au départ, il n’était qu’un simple gadget, une extension de mon PC. Je me souviens encore prendre des notes pour la forme plus que pour le fond. Je suis revenu en arrière et j’ai repris mon vieux carnet rouge. J’aime écrire et avoir les doigts bleus. En vérité, je préfère y travailler, c’est mon geste professionnel. C’est comme ça.

    Trier, classer, organiser, partager et supprimer

    Je vois encore les yeux désespérés de mes professeurs face aux millefeuilles de papetiers qu’étaient mes classeurs. Un vrai problème d’organisation régnait ou en tout cas le classeur cet agrégateur de cours ne correspondait à ce que j’étais. Trop fragile, trop complexe, pas assez pratique, on ne s’est jamais vraiment rencontré. J’étais revenu au cahier. J’aimais retrouver le storytelling du cours et le classement dans le secrétaire de ma chambre.

    La seule peur : perdre un cahier ou le jeter.

    Chez mes parents, la masse physique s’accumulait dans les cartons du sous-sol au risque de l’obsolescence du savoir et de ne rien y retrouver. Indiana Jones n’y aurait pas retrouvé l’Arche. Pas de plan de classement, d’indexation et finalement une accumulation d’informations et de connaissances désorganisées et donc inutilisables. Les archives, c’est pourtant pratique quand on souhaite analyser et comprendre un document. Fastidieux, je préférais recommencer depuis le début… perte de temps.

    Un jour j’ai rencontré un ordinateur puis les nuages. Non seulement, classer une masse importante devenait facile mais elle était disponible partout. La fin de l’angoisse de la corne d’abondance sans pour autant celle de la mobilité. Parce que le web est une mine, plus d’hésitation à organiser pour supprimer, archiver. Un jour les plateformes de curation et les réseaux sociaux sont arrivés et là on travaillait à plusieurs. Gain de temps, on parle de flat design, j’aime à penser à l’organisation légère et frugale.

    J’ai eu un ordinateur portable, puis un second et enfin un troisième.

    Portable mais pas mobile, portable mais pas connecté. J’ai repris mon carnet rouge.

    Lui était mobile. Il n’était pas connecté mais pas plus que l’autre… Un jour est arrivé le smartphone, enfin… on y reviendra.

    La question du flow : économie de l’attention

    Je me souviens de mes recherches fastidieuses. Je commençais par visiter Tout l’Univers pour chercher l’Universalis. La télé toujours branchée de l’autre côté de la cloison, la voix d’un doc à la radio ou mon livre caché, bref… peu d’économie de l’attention, enfin, quand je m’ennuyais ou quand je ne voyais pas où tout cela me menait.

    Le sujet posait toujours la question du flow.

    Vous savez ce moment où vous êtes complètement plongé dans une activité. Dans une concentration où un orage, une alerte ou même une finale de ligue des champions vous laisse de marbre. Depuis, j’ai toujours des choses qui m’ennuient mais les nipcasters m’ont appris le pomodoro. On doit toujours passer par le fastidieux mais autant le rendre productif.

    Nous sommes déjà des cyborgs

    La question de la technologie pour moi se pose moins que l’espace qu’elle délivre pour le plus important : réfléchir, comprendre, apprendre, créer et rêver.

    Sans aller jusqu’à neuralink, je suis déjà un être augmenté.

    Non pas parce que j’ai des lunettes ou une barbe bien fournie. Ce n’est même pas mon ordinateur. Je viens de m’apercevoir qu’il n’est qu’une simple extension de mon smartphone et de mon carnet rouge.

    A tous les deux, ils sont imbattables. Je prends des notes sur l’un, fais des recherches sur l’autre. J’y dépose ma mémoire, mes habitudes et mes idées. J’y dresse mes scénarii. Je fixe et partage mon planning. Je pose des questions au robot conversationnel de mon téléphone Google et obtiens une réponse instantanée. J’écoute de la musique, travaille sur mes articles de blogs, note mes idées, maintiens le lien avec ma famille.

    La visio conférence, quelle belle manière de faire correspondance. Je m’essaye à la créativité avec instagram. Je suis allé sur un moteur de recherche pour trouver des tutoriaux en streaming et apprendre à faire une photo parfaite. Je partage ce que je vois en direct et surtout ce que j’apprends. Mon identité est faite d’enthousiasme, le reste je le garde pour moi. J’ai deux couches supplémentaires à mon cerveau l’une numérique et l’autre analogique.

    Je crois que Socrate m’aurait pris pour son Phèdre. J’ai appris à apprendre comme cela, c’est comme ça, il fallait résoudre des problèmes d’organisation, d’ubiquité de l’information pour me consacrer au seul geste qui compte l’apprentissage. J’ai utilisé les technologies natives et ajouter celles qui viennent. Les technologies, nous les façonnons et elles nous façonnent en retour, c’est vrai, elles nous offrent des possibles surtout. Ne tapons pas sur l’outil sans penser à notre démarche.

    Je ne sais pas travailler sans écrire, je ne saurais plus sans mon téléphone.

    Demain, il ne s’agira pas de smartphone, cet objet déjà obsolète, mais de Neuralink. Cela interroge le monde et l’École en tant que projet de société. La quantification de la société, l’émergence de la société du calcul, la place des algorithmes, les voitures autonomes, la blockchain… vont changer l’emploi, le service ou même nos capacités cognitives. Faut-il pour autant céder à un déterminisme techniciste ?

    Non, à nous l’éthique, la manière de penser demain, à nous en emparer ou pas. Le non est l’honneur de notre humanité. Il ne s’agit pas d’anathème ou d’ancien contre moderne. Il s’agit de direction du monde. On nous parle de transhumanisme, d’hyperhunanisme…

    Notre rôle est d’aider l’élève à devenir, à acquérir les compétences professionnelles, sociales et humaines pour qu’il puisse s’emparer de demain. On peut refuser l’innovation technique à la manière de Socrate pour Phèdre. Faut-il refuser ou penser l’avenir ?

    Sources :

    Flow, article wikipédia

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Flow_(psychologie)

    Nous sommes déjà des cyborgs, Ludovic Louis, Siècle Digital, 9 mai 2017

    https://siecledigital.fr/2017/05/09/nous-sommes-deja-des-cyborgs/

    Neuralink, la start-up d’Elon Musk qui veut mettre des implants dans votre cerveau pour le rendre surpuissant, Gregory Rozière, Huffington-Post, 28 mars 2017

    http://www.huffingtonpost.fr/2017/03/28/neuralink-la-start-up-delon-musk-qui-veut-rendre-votre-cerveau_a_22014731/

  • Ludovia#14 : l’Educ-Maker Faire au pieds des montagnes

    Ludovia#14 : l’Educ-Maker Faire au pieds des montagnes

    Une réflexion de @profleluherne sur LUDOVIA, ce qui vous donnera peut-être envie d’y aller ou PAS…

    Certains pourraient se dire, il se mouche pas du coude @profleluherne (oui je sais, je suis victime du syndrome patronymo-gazouilleur, et en même temps, à Ludovia : il n’est pas rare d’entendre : “ah mais oui ! Je te reconnais mais euh comment ah oui ! @profleluherne”) quand il a écrit son titre. Ils seraient peut-être susceptibles de croire que, Blogueur officiel, il n’est pas tout à fait partial ou même raisonnable. Trois remarques :

    • vous avez raison, je ne suis pas objectif mais qui l’est ?
    • franchement en toute objectivité, Ludovia c’est vraiment un colloque à faire une fois,
    • Serais-je victime du biais d’intention pour interpréter celle d’un lecteur qui n’existera peut-être jamais #jetravailletropsurlecomplot (#personnalBranding).

    Je sais Aurélie et Eric, encore une fois, je parle trop de moi !

    Maker Faire Kezako ?

    Alors, je vais vous dire la vérité : “en vrai, je ne sais pas !”. Enfin si, j’imagine ce que c’est. Si je reprends la définition donnée par l’édition du Maker Faire Paris* qui aura lieu à Paris du 9 au 11 juin, c’est à la fois “une fête de la science, une foire populaire et un événement de référence pour l’innovation”. Bon, oui là, je sais, on n’est pas bien avancé… Est-ce que le mot Kermesse vous dit quelque chose ? Beaucoup d’entre vous (souvent les plus vieux) voient la pêche au canard, les jouets emballés dans du papier journal (lowtech ?), le barnum et le camion prêté par l’assurance ou l’agence bancaire du village. (Au-delà du fait, qu’encore une fois, j’affirme ma bretonnité )

    La kermesse c’est un lieu où l’on présente son travail de l’année au travers du spectacle des enfants, où les parents discutent voir collaborent entre eux (c’est ce que je fais en ce moment), on joue, on se détend et où les enseignants échafaudent déjà le thème de l’année à venir.

    La fête de l’École, ce n’est jamais la fin de quelque chose, c’est le devenir de l’année scolaire qui vient.

    Si je reprends le fil sérieusement : Michel Lallement, dans l’Âge du Faire, parle “d’évènement populaire” et ajoute “non un obscur rassemblement de quelques geek en mal de sociabilité”. Ludovia est tout cela à la fois pour l’éducation : une fête de la pédagogie, une foire aux idées, un lieu où l’on joue à jouer de la musique connectée et où l’on est au contact. C’est un événement centré sur l’innovation pédagogique puisqu’il s’agit d’abord d’un lieu de discussion et de créativité. A Ludovia, on y va par choix à la fin de l’Été pour y rigoler peut-être ; mais surtout pour travailler.

    Oui, mais Ludovia alors

    Bien sûr Ludovia ( @ludovia14 ) n’a pas l’histoire, ni l’affluence de l’évènement né à San Matéo en 2006. Vous allez pourtant y croiser des dandys numériques, des chercheurs chevronnés, des chanteurs connectés, des professionnels, des institutionnels. Les gens se mélangent et prennent une pause à la terrasse d’un café. Le plus important à ludovia : l’apprentissage de l’élève en gardant l’idée en tête que nous sommes tous des apprenants qui

    • investiguent,
    • réfléchissent,
    • échouent,
    • transforment,
    • et finalement réussissent.

    Les lieux de sociabilité informels ont l’avantage de casser les barrières et peut-être les sylos disciplinaires qui empêchent tant de travail en équipe. Il s’agit avant tout d’humanité à Ax-Les-Thermes. L’échange est facilité parce que facilitant.

    Les chemins buissonniers


    Pechakucha1 Ludovia#13 : Christophe BATIER

    Il y a deux Ludovia : celui où l’on suit le programme et celui où l’on va au devant de l’autre. Les gènes de cet évènement sont peut-être le mieux représentés par les Edmustech. Voilà, une équipe d’enseignants d’éducation musicale qui au détour de quelques improvisations, ont construit leur association. Ludovia est un évènement qui se hacke. Il y a un air d’”eductivistes” qui se rencontrent, échangent, créent, partagent et contribuent à l’essor de nouvelles communautés. Le colloque se partage et couve les initiatives pédagogiques : des twictonautes, de la team ceinture de compétences ou des amis de Inversons la classe. Ces nouveaux collectifs reviennent même pour en faire un moment cosmopolite. C’est un Ludovia du bricolage qui participe à cette kermesse de la créativité parce que travailler sérieusement à la fin de l’été c’est éviter de se prendre au sérieux.

    Qu’est-ce qu’il manque alors à Ludovia ?

    Un Burning man (non, non Aurélie, c’est une blague enfin pas vraiment), non il manque celui qui lit ses lignes sans y avoir été. L’intelligence collective se nourrit de chacun, de l’altérité, car à Ludovia on aime l’ami critique. Qui sait demain, vous serez les “educ-maker” ?

    Source :

    http://paris.makerfaire.com*

  • Autoportrait du blogueur en découverte de Médiation : guide du randonneur pédagogique à l’usage des rookies !

    Autoportrait du blogueur en découverte de Médiation : guide du randonneur pédagogique à l’usage des rookies !

    Cela faisait un moment que j’avais laissé mon carnet de voyage pédagogique prendre la poussière. Je ne sais plus comment doser et faire. Je me pose un tas de questions qui vont de la légitimité à la structure de la phrase. Je manque d’un médiateur d’écriture…

    En quête d’un chemin nouveau de lecture, j’ai relu l’Autoportrait de l’auteur en coureur de fond écrit par Haruki Murakami. Je suis un peu comme un rookie face à cet apologue en forme de carnet d’entraînement. En écrivant ces quelques lignes, je reprends après une période de diète kilométrique et, comme pour l’auteur, le plus excitant n’est pas la course mais le chemin pour y arriver.

    Autoportrait pourquoi ?

    J’ai lu, il n’y a pas si longtemps sur un fil twitter que le partage avait quelque chose à voir avec l’ego pour ne pas dire l’auto-promotion. C’est en partie vraie, écrire un article ou un billet est d’abord une aventure personnelle. C’est un partage et souvent on en attend quelque chose de l’autre. C’est un moment de profonde réflexion et d’engagement. Ecrire, comme courir, est un plaisir personnel qui n’a souvent de sens que pour soi.

    Murakami l’exprime bien lorsqu’il écrit“Je crois que j’ai pu courir depuis plus de vingt ans pour une raison simple : cela me convient. Ou du moins, je ne trouve pas cela pénible. Les êtres humains continuent naturellement à faire ce qu’ils aiment et cessent ce qu’ils n’aiment pas.

    Il y a une part de jubilation à l’écriture, comme à celle de la conception d’un scénario pédagogique.

    Un plan qui se déroule sans accroc ?

    On court pour soi mais on écrit, quelque part, pour être lu. Il faut alors que le texte fasse sens, favorise l’apprentissage de l’élève et satisfasse les besoins de l’enseignant. La relation professeur – élève a quelque chose de plus qu’écrivain – héros : la personnalité.

    Enseigner, c’est d’abord le plaisir de concevoir et de rêver. C’est la joie de l’interactivité qui fait qu’un plan ne se déroule pas sans accroc et tant mieux ! Nous ne sommes pas le Colonel Hannibal Smith et la scénarisation n’est pas l’Agence Tous Risques. Nos élèves nous demandent en permanence à (s’) ajuster. C’est une opération bien plus complexe que l’écriture d’un blog ou d’un billet. C’est un monologue interprétatif que j’entretiens avec le livre de Murakami. Avec l’élève, il faut passer au dialogue.

    Du dialogue ou de la médiation

    Si l’on prend la définition de wikipédia : “La médiation est une pratique ou une discipline qui vise à définir l’intervention d’un tiers pour faciliter la circulation d’information, éclaircir ou rétablir des relations. Ce tiers neutre, indépendant et impartial, est appelé médiateur”. Un premier problème se pose alors ; toute mon introduction est-elle donc un hors sujet magistral ? Pas si sûr ! Lire est un dialogue avec soi-même ; une occasion de penser le monde autrement et de se poser des questions. C’est vrai tout cela, mais c’est un peu juste pour parler de médiation. On est tout au plus en dialogue avec soi-même, et alors ?

    Baudelaire, le premier des médiateurs ?

    Oui, mais alors concrètement…. c’est quoi un médiateur et qu’est-ce que la médiation ? Je me souviens de mon formateur de lettres à l’IUFM (oui, oui, il y a eu quelque chose entre l’Ecole Normale et les ESPE) qui nous avait révélé un secret de la poésie. C’était un moment qui tenait moins de l’enseignement que du parcours littéraire. J’ai lu, souvent entendu, mais jamais vraiment écouté, ces quelques vers de Baudelaire :

    La Nature est un temple où de vivants piliers

    Laissent parfois sortir de confuses paroles ;

    L’homme y passe à travers des forêts de symboles

    Qui l’observent avec des regards familiers”.

    Oui, nos élèves et nos stagiaires traversent parfois nos formations un peu comme dans un tunnel. Le paradoxe : Baudelaire dans le poème Correspondance plaçait le poète entre l’humanité et le monde sensible. C’est l’intermédiaire, celui qui accompagne à la recherche du savoir. Accompagner, ce n’est pas faire à la place, mais donner la main.

    L’enseignant est médiateur car il facilite le chemin de l’élève. Sa qualité d’expert lui donne parfois les clefs qu’il convient de dévoiler à l’élève.

    Le plus dur aujourd’hui n’est pas d’accéder à l’information mais de la transformer en connaissance. Il est nécessaire alors d’avoir un intermédiaire. Comme le poète, l’enseignant écoute, transmet et parfois révèle. Le plus important n’est pas la réponse mais la question et la manière d’y répondre. Je suis sur la piste mais ce n’est pas suffisant… comment accompagner les élèves sur les sentiers de la connaissance ?

    Et si c’était finalement Socrate !

    Il y a quelque chose de la maïeutique dans la médiation.

    Pour pasticher, Socrate « L’art de faire accoucher les projets ».

    Il s’agit d’être à l’écoute, poser des questions, accompagner. On l’imagine se promener le long des allées d’Athènes à qui voulait l’entendre. Sa méthode est celle du parcours. Apprendre se fait au travers de l’échange avec l’autre.

    D’ailleurs, son élève Platon se moque un peu de lui quand il ne supporte pas celui-qui écrit au lieu d’écouter. Il y a une mise en abîme de notre sujet dans cet exemple car il a fallu la médiation de ses disciples pour que sa pensée nous arrive. C’est une belle leçon de se dire que celui qui transmet n’est pas le centre de la pièce. Il n’est qu’un intermédiaire au service de l’élève. L’élève n’est pas un passager que l’on prend en charge, c’est un acteur que l’on aide à progresser. L’ego, s’il y en a, ne s’exprime qu’au travers de la réussite de l’autre.

    Et pour aller au biomimétisme

    La comparaison semble facile et drôlement à la mode ; pourtant, il y a quelque chose que la nature nous inspire. La classe ou plutôt l’établissement est une ruche qui s’ignore. Elle permet de connecter des individus pour dépasser le cadre de sa communauté. Elle conduit progressivement l’élève à voler de ses propres ailes. L’École est un projet de société que l’enseignant médiateur fait partager. Il y transmet les valeurs des frontons de la République : liberté, égalité et fraternité. Il pollinise ces principes pour la réussite de tous et l’avenir de chacun.

    La médiation, une posture

    Dans cet incubateur pédagogique qu’est la classe, quelques règles sont à mettre en place : bienveillance, ne pas juger, échanger, partager son savoir, savoir-faire pour engager au changement. Parce qu’adopter la posture de médiateur, c’est accepter une partition qui se joue au rythme de l’apprenant. Peut-être que la médiation n’existe pas en elle-même car le chemin ne se fait jamais tout seul. Peut-être qu’il ne peut y avoir que co-médiation ?

    Pour en revenir à mon problème du début, il y a quelque chose de l’ego dans le fait d’écrire ou d’enseigner pour les autres. Il y a celui de penser que l’on a les qualités pour transmettre aux élèves. Il y a aussi la force du temps qui passe qui nous rend toujours plus humble.

    A ce stade de ce qui ressemble à une conclusion, je n’ai toujours pas parler de numérique. C’est normal, dans ludomag, comme à ludovia,

    ce qui compte c’est le projet de l’élève, par l’élève et pour l’élève. L’outil numérique est le facilitateur au service de la réussite de nos jeunes.

    Vous l’aurez compris, je ne suis pas un spécialiste de la médiation mais j’ai un début de piste : car le plus important ce n’est pas d’écrire mais de réfléchir ensemble.

     

    Sources :
    Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, Haruki MURAKAMI, Belfond, 2009
    Médiation, wikipédia
    Les fleurs du mal, Baudelaire, 1857           

     

    Photos : pixabay.com

  • Eloge de la modération

    Eloge de la modération

    Nicolas Le Luherne n’aime pas entrer dans la polémique ; l’article de Philippe Bihouix dont nous avons déjà parlé dans ludomag avec « Numérique en classe : élève t-on nos enfants hors-sol ? » de Ninon Louise LePage, »Les élèves ne sont pas des tomates ! » avec Stéphanie De Vanssay et « Hors-sol ou l’école déconnectée » par Caroline Jouneau-Sion lui ont pourtant donné matière à réagir « positivement ».

    J’ai longtemps hésité à réagir à un article de libération qui stimule un peu plus les lignes de fracture qui apparaissent depuis quelques mois au sein du monde de l’éducation. Je me suis, toujours, imposé un minimum de commentaires et d’évoquer uniquement ce qui me paraît positif.

    Ce n’est pas de l’angélisme mais j’aime laisser aux autres la polémique. Puis à l’image des rêveries d’un promeneur solitaire, je suis allé fouiller dans ma bibliothèque mondiale accessible par cet outil formidable qu’est le World Wide Web.

    Je suis, alors, tombé sur un article d’une de mes revues préférées : les inrocks (oui, comme tous les hipstprofs de moins de 40 ans). Quand on a introduit les instruments et les outils numériques dans sa pratique professionnelle, il est difficile d’entendre que le numérique serait un désastre pour l’École.

    Les barricades…

    Le mot désastre évoque : le malheur, la ruine, la calamité quand je consulte mon OPNI (Objet Papier Non Identifié) : Le Robert illustré 2014. Je ne vais pas invoquer Umberto Eco et la sémiologie pour relever ce qu’a de clivant et de violence, ce terme, d’autant que j’ai été tenté d’y céder. Je suis comme tout le monde, je cède parfois à l’irrationnel comme si il existait des barricades.

    Forcément, comme elles n’ont que deux côtés, je suis du bon. Je vais chercher dans ma bibliothèque la référence qui “tue”, le titre punchline. J’aime les pastiches et ce coup-là je voulais détourner le titre du pamphlet du comité invisible : L’insurrection qui vient. Cela ressemblait au “Désastre qui ne viendra pas”. Je voulais, d’ailleurs, utiliser ce paragraphe : “Sous quelques angles que l’on prenne, le présent est sans issue…. à tous ceux qui prétendent détenir des solutions, ils sont démentis dans l’heure”.

    J’avais pour consolider tout cela, une liste d’articles prélevés sur le web (je les partage dans les sources) pour étayer la dispute.

    …mais ça, c’était avant.

    Oui, ça c’était avant. D’abord, je ne suis pas Nostradamus et je ne peux pas prédire de l’école. Je n’ai pas l’autorité d’un chercheur en sciences de l’éducation pour faire de la prospective. Cela ne veut pas dire que je n’ai pas mon avis mais tout simplement qu’il faut faire preuve d’humilité.

    A relire les deux articles (il faut dire que je n’ai pas encore lu le livre), je nous ai trouvé des points communs (eh oui !). D’abord, j’ai relayé un article du blog de Philippe Silberzhan. Il évoque quatre erreurs que l’on commet facilement quand on passe au digital.

    Pour résumer, un peu rapidement, le numérique n’est pas une baguette magique. En matière de pédagogie comme de management, c’est l’humain qui compte. Les outils ne sont qu’au service de la démarche pédagogique.

    Le soucis de l’élève :

    Nous avons tous une vision de l’école.

    L’École, c’est un peu l’équipe de France de football, il y a 60 millions de sélectionneurs.

    C’est une bonne nouvelle car nous sommes tous concernés par ceux qui seront la France de demain. Ces visions ne sont ni meilleures, ni moins bonnes que les autres. Elles sont les nôtres. Le plus important est le souci de l’élève et de la réussite de leurs apprentissages. Le titre est très bon et accrocheur, cependant, il interroge aussi sur l’état de la communication entre les différents acteurs de l’éducation. Si j’avais écrit cet article, j’aurais participé à cette fuite en avant eschatologique. Je ne voulais pas me trouver dans la situation de Bruce Willis dans Armageddon (oui, j’ai une série de film culte dont j’ai un peu honte), surtout que pour être honnête, je ne serais jamais le sauveur de l’Éducation et plus encore celui de l’humanité.

    Sortons de nos bulles :

    Alors, qu’est-ce qui m’a décidé à écrire finalement ? Le partage d’un ludovien bien connu : Lyonel Kaufman. Je suis tombé, grâce à lui, sur cet article du Monde intitulé La propagande des algorithmes ? Vraiment ?

    Il ne s’agit pas, bien sûr, d’une attaque bien maladroite et mal venue au livre qui vient de paraître. Deux passages, de cet excellent papier, m’ont marqué. Le premier nous explique que “les réseaux sociaux notamment ont renforcé l’absence de consensus, l’absence de vérité partagée”. Le second nous dit que : “Les algorithmes des médias sociaux nous enferment dans nos bulles de filtres nous proposent une vision du monde soigneusement sélectionnée pour aller dans le sens de nos croyances et de nos convictions, nous éloignant de toutes réfutations”.

    Ma réaction témoigne de ces deux symptômes : le manque de prise de hauteur et l’effet citadelle. Je ne suis pas une victime du numérique. J’ai tendance à ne suivre (comme beaucoup) que les gens avec qui je partage des affinités pédagogiques. C’est, toujours, plus facile d’échanger avec notre cercle que de débattre avec l’autre. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir été prévenu !

    Une démarche didactique et pédagogique :

    J’ai relu les deux articles et on y parlait beaucoup d’outils et d’instruments. Quelque chose nous unit pourtant : le soucis de faire progresser nos élèves.

    J’ai le sentiment qu’il y a maldonne parce que tous ceux que je connais et qui utilisent le numérique, ne le font qu’au service d’une démarche didactique et pédagogique.

    Par exemple, j’ai utilisé édugéo pour faire de la diachronie. Mon objectif était de montrer l’étalement urbain de la ville où j’habite. Quand j’étais étudiant, il fallait plusieurs cartes IGN, une grande table… avec cet instrument pédagogique : je pouvais le faire en un clin d’oeil.

    Ici, ce n’est pas par facilité mais simplement pour consacrer l’attention de mes élèves à mon réel objectif pédagogique et didactique.Cet instrument me permettait de penser l’apprentissage du croquis en granules.

    Je commençais par le système d’information géographique pour finir par le papier. Parfois, je n’ai pas honte de le dire : j’utilisais un OPTD (Objet Pédagogique Technologiquement Dépassé) : le rétroprojecteur. Oui, oui, ce machin est idéal pour s’entraîner aux croquis fait à la main. Il permet de recommencer, de comparer à l’aide du transparent et finalement de se mettre en confiance.

    Enseigner hors-sol ou plutôt enseigner hors-âge ?

    Je ne sais pas ce qu’est enseigné hors-sol. Philippe Zilbersahn répond d’une certaine manière quand il nous dit “qu’on ne peut pas penser un changement technologique hors-sol, que la technologie est toujours le produit d’une société, qu’elle modifie en retour”. Mon objectif est, surtout, de ne pas enseigner hors-âge. Enseigner c’est un chemin avec quelques embûches et parfois des erreurs d’orientation. Chaque classe est différente mais il faut tenter de trouver des outils qui permettent de différencier les parcours (cela ne se fait pas, je me site, mais cet article explicite mon parcours d’enseignant).

    Vous savez, je suis même plutôt “réac” d’une certaine manière, mes références pédagogiques sont du début du XX siècle quand le monde passait beaucoup plus de temps à se déchirer qu’à penser à construire une école au service des élèves. Freinet, Montessori, Janusz Korshak, j’en ai retenu la bienveillance. Loin du laxisme : cette philosophie est de créer des conditions favorables pour que les élèves progressent. Être bienveillant, c’est encourager tout le temps, et parfois sanctionner, pour progresser.

    Une autre manière de voir le monde :

    L’introduction du numérique dans la classe, cela a été l’occasion de me poser de nouvelles questions. Qu’est-ce que je vais faire de ce nouvel outil ? Qu’est-ce que cela change à la manière dont j’anime la classe, à la géographie. Je suis allé voir ce qu’il se faisait ailleurs.

    J’ai lu le livre de Chris Anderson : Makers. « Quand je construis un scénario pédagogique, comme le grand-père de l’auteur, j’ai toujours aimé réfléchir, construire des prototypes, tenter de résoudre des casses-têtes, trouver des solutions. C’est passionnant d’être enseignant !  »

    Les rencontres se sont multipliées au même rythme que les questions. Il n’y a pas longtemps, j’ai entendu parler d’école lassalienne (c’est pas tout jeune). J’ai retrouvé des mots qui rimaient avec ma passion de la musique underground des années 1980. Le Do-it yourself, devenir un enseignant bricoleur, autonome et en même temps dans une équipe plus large.

    Les murs sont tombés et pourtant je n’ai jamais senti être autant ancré dans la classe.

    Je me suis même intéressé au Jugaad ou l’art de faire plus avec moins. J’ai bien conscience qu’il n’y a pas de corne d’abondance ouverte. Si je traverse la rue, le fablab du coin organise des cours pour programmer avec un kit Arduino (il faut que j’y aille) et surtout un “Repair café”. Et pourquoi pas réparer, recycler et bricoler avec mes élèves. Aller voir ailleurs, réfléchir aux conséquences… Une belle leçon d’écologie appliquée non ?

    Des gardes-fous :

    Je regarde une nouvelle fois ma bibliothèque et j’y vois trois livres “de chevet pédagogique” : Serge Tisseron : 3-6-9-12, André Tricot et Franck Amadieu : Apprendre avec le numérique et un nouveau : le cerveau funambule de Jean Philippe Lachaux. Les deux premiers livres sont des gardes-fous, ils permettent de discerner les mythes des réalités. Le dernier permet de revenir au principal comment mettre l’élève dans des conditions optimales d’apprentissages.

    Le dernier samouraï :

    Le problème principal, quand on ne se parle et ne s’écoute plus, est de voir l’autre comme un pompier pyromane. Les échanges sont entre le sarcasme, l’argument d’autorité et l’affrontement de bibliothèque à bibliothèque. Qui connait, réellement, les ambitions de l’autre pour les élèves ? J’ai le sentiment que l’on tombe dans les travers du Dernier Samouraï.

    L’image est un peu étrange, mais elle est plus explicite quand on regarde l’émission Motion vs History de Nota Bene (Je conseille cette chaîne youtube à tout le monde). Les deniers Samouraï ont utilisé des fusils et pas des katanas ! Le danger des citadelles, c’est l’image d’épinal qu’elle soit pro ou anti-numérique.

    Et si on se parlait ?

    Empathie et respect de l’altérité, appliquons-nous les valeurs que l’on souhaite transmettre aux élèves. Il n’y a pas une bonne manière d’enseigner, il n’y a pas de formule magique.

    Le numérique n’est pas la pierre philosophale et les enseignants ne sont pas des alchimistes.

    Il y a simplement des stratégies qui relèvent de la classe, de l’enseignant, de la programmation mais aussi de l’instant. Nos élèves méritent mieux que des punchlines, ils méritent de la modération. Il est temps que nous sortions des “tranchées et de se dire” : “Et si on se parlait ?”

     

    Sources :

    Philippe Bihouix : «Avec l’école numérique, nous allons élever nos enfants « hors-sol », comme des tomates», entretien Par Noémie Rousseau, Dessin Sylvie Serprix, Libération, 2 septembre 2016.

    Le numérique est-il un désastre pour l’école ?, Fanny Ménéghin Les Inrocks, 1 septembre 2016.

    Former à la transformation digitale: Quatre erreurs fréquentes, Le blog de Philippe Silberzahn, 25 avril 2016.

    La propagande des algorithmes ? Vraiment ?, Hubert Guillaud, Le Monde, 17 septembre 2016.

    Le métissage pédagogique. Découvrez l’auto-socio-construction, Thot Cursus, Nicolas Le Luherne.

    La vérité sur le dernier samouraï, Motion VS History #7, Nota Bene, 7 septembre 2016

    Makers : la nouvelle révolution industrielle, Chris Anderson, 2002

    3 – 6 – 9 -12 : Apprivoiser les écrans et grandir, Serge Tisseron, Eres, 2013.

    Apprendre avec le numérique, Franck Amadieu, André Tricot, Retz, 2014.

    Ce qui aurait dû être les sources de mon article :

    Bernard Stiegler : « Avec le numérique, nous sommes dans l’obligation de repenser l’éducation », Christophe Castro, Inriality, 11 septembre 2013.

    Les Z, ces « digital intuitives », Roxane Baché, Snip, 27 juillet 2016.

    Dix expériences innovantes pour changer l’école, Le Monde, 5 septembre 2016.

     

     

     

     

  • Ma sélection des twittos francophones inspirants

    Ma sélection des twittos francophones inspirants

    La métaphore est un peu facile en cette veille de championnat d’Europe des Nations de football mais je tente quand même la figure de style. Un peu en avance sur notre sélectionneur, j’ai décidé moi-même de rendre hommage et de remercier cette équipe qui m’a permis de progresser.

    Sans l’équipe, on n’est personne. L’enseignement, ce n’est pas une culture de travail hors sol ou plutôt hors relation sociale.

    Enseigner c’est être avec les autres pour la seule victoire qui compte : la réussite de l’élève.

    Une liste est forcément incomplète, sinon, il aurait fallu citer l’ensemble de ma TL car chacun oeuvre dans l’essaim en harmonie et pour le bien de l’autre. Comme pour une écriture contrainte, je vais tenter de m’en tenir à 22 noms. Promis j’essaierais de ne pas tricher : pas de trucage, pas de simulation.

    Du point de vue tactique comme technique

    En football, on fait des mathématiques. C’est un véritable code restreint pour le profane : 3.5.2, 4.5.1… Comme, j’ai le droit à 22 noms et comme finalement pour les listes inspirantes il n’y a pas de règles (de toute manière, c’est ma chronique !). Je tente, donc, le 0.0.22 soit une liste pédagogique 100 % offensive engagée pour la réussite de l’élève.

    Quand on parle tactique, je ne peux m’empêcher d’évoquer le catenaccio. Cette approche, dite du verrou, est rassurante du point vue pédagogique car elle ferme toute possibilité à l’imprévu mais ne donne pas l’espace suffisant à la créativité du joueur et donc pour nous à l’élève comme à l’enseignant (Je file la métaphore mais j’oublie peut-être de constituer ma liste).

    Quand je me suis intéressé au numérique pédagogique, j’ai eu la chance de suivre deux comptes inspirants : @mdrechsler et @mlebrun2. Tous deux m’ont permis de voir tout de suite qu’au delà de l’outil numérique, c’est l’engagement pédagogique qui comptait le plus. il faut pour devenir un bon alchimiste avoir les bons grimoires : @thot , @lasphere, @FCpixel, @anaerevue, @cafepedagogique, @Classe_Inversee et bien sur : @ludomag (N’aie pas peur, je ne nous ai pas oubliés @aurelie_julien !). Alors si quelqu’un pense que je triche déjà sur mes 22 noms, il aurait raison.

    Une liste pas un classement

    Je crois qu’il est important d’en venir à l’équipe et d’en préciser la construction. Cette liste n’a aucune vocation de classement, elle n’est pas exhaustive. Je n’ai que des comptes que je trouve chouette de suivre pour le partage professionnel mais aussi pour l’humanité qu’il y transparaît. Il y a ce que l’on pourrait appeler des jeunes rookies et des pionniers du numériques.

    En tout cas, ils appartiennent tous à mon EAP : mon équipe d’apprentissage professionnel. Je suis en contact avec certains, parfois je les ai vus en réalité mais souvent je ne connais d’eux que le profil (et c’est dommage !). Chacun a une belle interprétation du “jeu” pédagogique et cela m’a permis d’avancer.

    Je me lance

    @outilstice et @Ticeman01 parce que même si on a des intentions pédagogiques, la technique cela aide aussi. Le numérique c’est un état d’esprit collaboratif, une forme d’altruisme et de générosité. Il ne faut, jamais, oublier que derrière cette masse d’information et de tutos, il y a des heures de travail. Je ne peux que saluer l’engagement et le travail accomplis au service des collègues. Pour être moins ampoulé : simplement merci !

    @nbenyounes, @batier, @frompennylane, @Nipedu, @Karabasse77, @profdesecoles, @nicoguitare, @jourde , @marie34, @lvighier et @yannhoury a force de les lire, de consulter les blogs et les partages, j’ai l’impression d’être tout petit face à un monde d’innovation immense. Des pionniers au sens noble du terme. Que ce soit pour l’usage des réseaux sociaux, de la twittclasse, du transmedia, de l’audioguide ou bien du podcast… on a en face de nous des aventuriers. Eux aussi Ils me font penser à ces explorateurs qui tracent des voies pour que l’on puisse prendre le sentier de l’école buissonnière. Avec eux et pour paraphraser les Nipédus : on parle Pédagogie, École, Numérique et surtout Élève. On se nourrit les uns les autres et j’aime beaucoup cela.

    @VPatigniez, @karen_prevost, @infoprofdoc et @Tricardstef Mon équipe EMI quand tu nous tiens, au delà de la compétence, c’est le partage qui compte et les conseils. Il facilite la plus simple et la plus dure des questions “et toi comment tu ferais ?” J’y ai découvert trois professeurs documentalistes survitaminés à la pédagogie et au numérique. Il y en avait plein d’autres et je m’excuse de ne pas les avoir cités comme @roselyneberthon (je triche là non ?) Avec eux, j’ai parlé de différenciation, d’auto-socio-construction et de politique documentaire.

    Ils m’ont montré à quel point, il était important de ne pas rester enfermer dans son silo disciplinogeographique.

    @Fabmarrou, @ProfChrismath (qui doit rire quand il calcule ma sélection de 22 comptes), @YannPoirson @MurielMeillier et @AnneCeGabarrou c’est ma team #fabnum. On vient d’horizons différents, on n’est pas toujours d’accord mais c’est comme cela que l’on progresse ensemble. Comme des passionnés de Vespa, on se penche autour du moteur pour le plaisir de poser des questions, de travailler ensemble et de résoudre des énigmes.

    @PMarques_HG @igruet. Je ne peux m’empêcher de faire un détour par ma Bretagne natale (d’abord parce que c’est le coin le plus beau du monde !). Au delà de l’instinct grégaire, j’ai envie de dire quelle curation ! Une de mes principales sources d’information et de formation personnelle.

    Il serait étrange d’annoncer une équipe francophone uniquement composée de personnes habitant la France. Ce serait injuste car la pédagogie n’a pas de frontière et l’inspiration non plus. J’ai plein de noms en tête… mais comme je triche déjà un peu sur le nombre. Je vous partage deux profils : @BrigitteProf et @anneandrist car franchement je ne peux que leur dire merci pour tout ce qu’elles nous montrent et apportent. C’est important de regarder sur l’autre berge !

    J’entends déjà mon collègue et ami @lenyrobin18 avec son sourire malicieux me dire tu ne peux pas te contenter d’être d’accord avec les autres. Il faut plus d’ambition et se confronter à la parole de l’autre. Pas d’empathie sans altérité ! C’est là que mon non moins ami et collègue @cpoupet me dirait il te faut des profils “rantanplans”. Je n’aime pas trop l’expression un tantinet dévalorisante. Il est certain que si l’on rêve encore d’un internet espace ouvert, il est indispensable de s’ouvrir aux autres si l’on veut faire progresser le savoir échanger et finalement le vivre ensemble.

    En tout cas, j’espère que comme moi, vous arriverez à trouver votre équipe !

     

  • Face au “complotisme” : éduquer à l’esprit critique, pour mettre des mots entre les diapos

    Face au “complotisme” : éduquer à l’esprit critique, pour mettre des mots entre les diapos

    Il reste qu’une présentation ne se suffit pas à elle-même, surtout quand on parle de complot.

    Je me suis dit qu’il serait intéressant de vous laisser cette porte ouverte afin de vous ouvrir la trappe et le chemin qui m’ont conduit à produire ce qui reste un simple support de présentation. Je vais essayer au travers de ces quelques lignes de vous retracer l’élaboration de ma scénarisation pédagogique pour éduquer à l’esprit critique face au complot, entre autres.

    Un essai de définition

    Mon premier geste était de me constituer un portrait robot du “complotiste”. Je suis un enfant des années 1980 / 1990 et j’ai, comme beaucoup de ma génération, un goût prononcé pour les séries.

    La mère de toutes les séries modernes est pour moi X-Files, le seul rendez-vous qui m’empêchait de sortir le samedi soir. A l’époque, je ne pouvais penser à aucun moment qu’elle serait d’une aide incroyable pour appréhender le complotisme. Il reste qu’elle rassemble une grande partie des “mantras” de la théorie conspirationniste.

    Le Pitch comme grille de lecture

    Je sais que tout le monde connaît mais un petit retour sur l’histoire pour nous rafraîchir la mémoire (Non, pas de spoiler ici !). Fox Mulder est un agent du FBI chargé des dossiers non résolus. Il enquête pour cela à l’aide de sa collègue : l’agent Dana Scully. Tous les deux forment les deux faces d’une même pièce entre rationalité et empirisme. Le problème est que ces deux agents vont devoir, très vite, affronter un monde trouble empli de zones d’ombres.

    Mulder est un frère traumatisé par l’enlèvement de sa soeur qu’il attribue aux extra-terrestres. Comme l’affiche de son bureau le dit “I want to beleive”,  il fait sien ce slogan. Cet homme est guidé par une conviction : le gouvernement ment sur ce qui s’est passé à Roswell en 1947 à travers une version officielle farfelue. S’il ment sur ce sujet, le mensonge est général. Il doute alors de tout, guider par la conviction que lui seul détient et accouche de la vérité. Sa conviction se renforce au moment de l’enlèvement de la cartésienne Scully.

    Ils se rendent compte qu’elle a été contaminée à l’Huile Noire. Cet agent chimique aurait pour objectif de mettre en esclavage l’humanité au profit des extra-terrestres. Ce complot est soutenu par une officine clandestine dirigée par l’Homme à la cigarette. Heureusement pour Dana et Fox que les Lone Gunmen, citoyens sentinelles, diffusent rumeurs, intox ou informations secrètes pour les aider dans leur combat. (Le spoiler a été évité de justesse !).

    Si la vérité est ailleurs, les “mantras” du complot sont là.

    Un retour sur l’histoire :

    Rumeurs, intox (hoax), informations secrètes, officines clandestines (false flag), agent toxique (chemical trail),  version officielle… N’avons-nous pas tous les ingrédients du complotisme ?

    Dans nos sociétés, il faut toujours un diable qui permet d’expliquer l’inexplicable. Le souffre-douleur permet souvent de calmer les angoisses. La foule, en s’en prenant à ces populations, vit une expérience cathartique. En 1821 à Odessa, à la suite d’une rumeur concernant la participation de Juifs au meurtre du patriarche gréco-orthodoxe Grégoire V de Constantinople, un pogrom est organisé dans la ville. C’est un peu la parabole des “caquins ou caquous” de Bretagne ou les “cagots” dans le Sud Ouest de la France. Frappés de la marque indélébile de la lèpre, les “caquins” vivaient comme des proscrits. Ces populations victimes d’une forme de ségrégation étaient toujours regardées comme “des personnes louches”.

    Il s’agit souvent de petits groupes, de minorités stigmatiseés qui centralisent la vindicte (C’est vrai, des gens qui fabriquent des cordes pour les pendus, faut s’en méfier. C’est sur, ils complotent. Et puis, c’est pas comme si personne ne voulait le faire). Le parallèle est facile à faire avec le complot juif des Protocoles des Sages de Sion monté de toutes pièces par l’Okhrana. C’est la peur millénariste de l’extinction ou de la contamination finale.

    Paranoïa et sentiment de détenir la vérité

    Le principal problème quand on envisage de travailler sur l’esprit critique face au complotisme est que les complotistes ne se voient pas comme tels mais comme des “truthers” : “diseurs de vérités”. C’est le sentiment d’appartenir à une avant-garde éclairée que le système cherche à museler absolument. Il n’y a qu’à voir la réaction de certains tenants de ces théories quand on commence à les contredire :  “Vous êtes profs, vous appartenez au système” ou “j’arrête d’argumenter, à la fin vous allez me traiter de nazi”.

    Ce sentiment d’assiégé n’est pas sans rappeler, en effet, le nazisme par sa culture de l’angoisse, du sentiment d’être isolé et seul face au monde.

    Être complotiste c’est un univers mental complet. On y trouve des mythes, des croyances, un au delà, une explication du monde, une langue, un univers musical, des signes de reconnaissance.

    Il y a des stigmates du complot que seul l’initié peut déceler. La question se pose : peut-on parler du complotisme comme d’une Culture qu’il faut appréhender comme telle pour mieux la comprendre ?

    Attention au point Godwin

    Invoquer le nazisme, c’est risquer l’argument béton : “ah, je l’attendais le point godwin”. Cette “Loi” du web développée par Mike Godwin dit que :  “Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de 1”.

    Autrement dit, c’est le meilleur moyen pour être discrédité, car pour devancer ce que je vais dire au prochain paragraphe, parmi les complotistes, il y a des collègues aussi. L’idée n’est pas de dire que l’autre est un nazi mais  de comparer pour mieux singulariser. Tous les complotistes ne sont pas nazis mais d’une manière peut-être anachronique tous les nazis le sont (le complot judéo-maçonnique pour détruire l’Allemagne). La série V emprunte et réinterprète “le bestiaire” vestimentaire des organisations de combat du NSDAP (Comme les Forces de l’Empire dans Star Wars).

    On ne peut pas traiter de nazi, un homme qui pense que les dirigeants du monde sont des lézards. Le processus et le système de pensée qui mènent à cette conclusion par contre eux sont très comparables. Le risque avec un argument d’autorité en classe est l’effet “guerre de tranchées”, cliver la classe. Toute discussion devient impossible et ne ressemble plus qu’à une guerre de position.

    Qui ?

    Toutes les couches de la société peuvent être touchées par le complotisme et c’est bien pour cela qu’il ne suffit pas d’annoncer que le complot n’existe pas pour désarmer le complot.  Au cours des dix dernières années et notamment pour le 11 septembre, combien de “peoples” sont venus sur les plateaux de télévision présenter leur version de ce qui n’a pour eux jamais existé.

    Deux articles m’ont aidé à mieux appréhender les cibles du complotisme : l’article des Inrocks “Le complotisme touche tous les milieux, Bac +10 comme Bac -5” du premier septembre 2012  et celui du Monde Diplomatique : “Personne n’est à l’abri” de juin 2015.

    Les adeptes des théories du complot ne sont pas des individus irrationnels. Les raisonnements sont “relativement ordinaires” et font même preuve d’un certain esprit critique. Le problème est que le doute devient systématique pour toute chose, tout évènement et pour tout le monde. Le rapport de confiance à l’autre est cassé et le complot devient la règle. Quelle est la valeur de la parole de l’enseignant dans ce contexte de défiance ?

    Ma stratégie : la métaphore de l’eau

    L’eau a deux qualités, elle peut contourner un obstacle sans perdre de vue son objectif et elle peut éroder la roche jusqu’à la faire disparaître. Elle répond à la stratégie que je souhaite mettre en place en classe. Je ne désire pas braquer les élèves directement par un rapport “front contre front”. Ce rapport d’opposition, s’il ne renforce pas la position de chacun, ne fait pas évoluer les choses.

    J’ai toujours préféré travailler à côté des lycéens.

    Apprendre et enseigner, c’est un parcours qui ne peut être réussi sans l’autre. J’ai préféré poser “des casiers” (un autre moins breton dirait des jalons) un à un qui remonteront au moment où la question du complot se posera. Il s’agit donc pour moi de travailler sur un temps long.

    Cette éducation à l’esprit critique prend le temps du cycle baccalauréat. Les programmes de lettres histoire géographie sont autant d’occasions de construire celui-ci et de prendre des chemins officiels de traverse pour déconstruire le complotisme.

    Le docufiction comme indices “Canada Dry”

    Il serait trop long de retracer l’ensemble de la scénarisation mais le docufiction Bye-Bye Belgium est très symbolique de cette “philosophie”. L’étudier, c’est jouer un peu l’effet Canada Dry,  “Ça ressemble à la réalité c’est doré comme la réalité… mais ce n’est pas de la réalité ».

    Dans un premier temps, je laisse les élèves étudier le film avec un questionnaire. Tout semble réel pour lui. Souvent, ils se font avoir et ne remarquent pas tous les indices de la supercherie. Ils n’ont pas l’habitude de questionner l’image pour peu qu’elle possède les attributs de la réalité.  Je dévoile la vérité et nous décryptons ensemble le docufiction. Comme pour la vidéo, il n’y a pas de parole sacrée mais des indices qui permettent d’élaborer une échelle de confiance.

    L’idée : inviter l’élève à réfléchir au schéma de communication et à  confronter les sources. Il se construit, à travers l’étude, une grille de lecture et des clefs de compréhension du monde.

    Ensemble, il est important de poser les questions des enjeux et de la stratégie de la communication. Mon objectif est de recréer du lien.

    Faire appel à la créativité des élèves

    Quand la mise en scène est fascinante, les idées passent au second plan, la foule réagit comme un seul homme, synchronisée par l’émotion”, Boris Cyrulnik.

    La musique est vecteur d’émotion qui installe le récepteur dans un univers qui fait sens. La bande originale de Requiem for a Dream, en toile de fond, installe dans un univers angoissant. Les élèves le comprennent rapidement. C’est un gimmick du complotisme.

    Encore une fois, nous pouvons passer par d’autres oeuvres. En classe, on travaille sur la Vie est Belle de Roberto Benigni. On s’intéresse à la bande son et comment elle construit le sens du film. C’est peut être évident pour nous, mais le réalisateur nous installe dans une ambiance. Il prévoit à l’avance quand il va nous mettre en colère, nous faire rire ou nous émouvoir. Il a des outils pour cela : le jeu d’acteur, la couleur mais aussi le son. Pour créer une empathie envers l’histoire et le personnage, il joue sur ces “manettes”. On y note toute l’importance du storytelling.

    Avant l’assassinat de Guido, la musique installe le drame. Elle se fait toujours plus basse jusqu’au son de l’exécution et remonte ensuite.  Supprimer le son au moment où le garde SS explique les règles du camp. Demander aux élèves d’imaginer celles-ci en s’appuyant sur les images. Ils sont loin d’imaginer les règles qu’invente le père pour protéger son fils. Il est facile de s’inspirer du jeu des sept erreurs pour faire ressortir les incohérences de ce centre de destruction (les habits civils dans le baraquement, la présence d’un enfant après la sélection…).  C’est une manière d’expliciter aux élèves les ressorts pour créer un univers d’émotions.

    Savoir agir sur les bons leviers, c’est percevoir la “manipulation”. Comprendre est toujours plus efficace qu’imposer. La tactique à mettre en place est l’art de ne pas se faire avoir.

    Et finalement : faire face au complotisme

    Est-ce que finalement, je ne renonce pas à faire face au complotisme pendant au moins deux ans puisque dans les programmes d’histoire géographie, le 11 septembre n’est abordé qu’en Terminale professionnelle ?

    Je ne crois pas car je compte sur l’effet d’aubaine.  Je ne renonce jamais mais j’agis plutôt au coup par coup. J’essaye de créer un univers intelligible et rassurant. J’ai des outils dans les mains qui m’aident dans cette tache : l’Éducation aux médias et à l’information, le cours d’histoire, le programme d’EMC. Ils sont autant d’occasions pour expliquer, décrypter et déminer. Il y a un cadre de la parole. Un échange a un début et une fin. Il y a des règles de communication à poser et une “éthique du débat” : écouter l’autre, pas de jugement, respect de l’autre et un ton à ne pas dépasser.

    J’essaierais de ne jamais juger mais d’échanger pour éviter le sentiment de persécution et la paranoïa. Je compte sur le mimétisme face à l’attitude de l’enseignant. Il faut savoir dire :”je ne sais pas mais je vais faire des recherches”, “je me suis trompé” et même “vous avez raison”. Accepter la parole légitime de l’autre permet de construire la confiance. L’apprentissage est un processus. Il faut laisser à chacun le temps du parcours pour se construire sa propre grille de lecture critique du monde. La contradiction appartient à l’adolescence et il est important de laisser chacun grandir.

    Une journée d’étude pour échanger nos stratégies

    Écouter les autres, c’est souvent prendre du recul par rapport à soi-même.

    Un enseignant dans son geste professionnel est souvent celui qui donne plus qu’il ne reçoit. On oublie souvent la règle la plus évidente de tout maître d’apprentissage : la simplicité. Thomas Huchon et Laurent Renaudet me l’ont rappelée. Il y a une première évidence que j’ai perdue de vue. Les complots ont toujours existé et la littérature regorge de références. “Toi aussi mon fils” (Tu quoque, fili) est une des expressions favorites de César dans Astérix. Cette formule interroge le jeune lecteur. La citation est liée à un complot qui a réellement existé. L’autre évidence, c’est le retournement. Faire de l’élève, le maître et lui demander d’étayer son propos.

    Qu’est ce qui te prouve que c’est vrai ?” ; cette question renverse les rôles puisqu’elle pose la question de la preuve. Il est toujours plus facile d’écouter, de répondre que de poser les questions.

    Pour compléter cet article, découvrez aussi le Prezi de Nicolas.

    Photo : Pixabay CC0 Public Domain

  • Enseigner l’Histoire, à la manière du Petit Poucet…

    Enseigner l’Histoire, à la manière du Petit Poucet…

    Découvrir les mondes engloutis

    Lors de l’édition 2015 de Ludovia, l’une des sensations avaient été le parcours « Les traces de Maupassant » produit par la classe de Marie Soulié. C’était une porte temporelle un peu comme dans la série sliders où l’élève pouvait vivre.

    Elle avait poussé les murs physiques de la classe, elle poussait ici les portes du temps.

    Histoire des mondes engloutis

    L’histoire c’est un peu comme ce dessin animé mélancolique des années 80 les mondes engloutis, c’est tenter de comprendre le passé. C’est la recherche d’Arkadia : comment vivaient les hommes, où vivaient-ils ?
    Qu’est ce qui explique que tel ou tel événement soit arrivé. On est d’une certaine manière amnésique car nous cherchons toujours à comprendre avant avec nos lunettes d’aujourd’hui.

    L’audio-guide ouvre les portes d’un monde que l’on pense connu mais que l’on pas vécu.

    Incarner pour faciliter

    Enseigner l’Histoire, c’est aussi l’incarner dans le quotidien des élèves. A côté de mon lycée, un calvaire a été érigé. Il rend hommage aux victimes des bombardements de la Seconde Guerre Mondiale à Lucé.
    La seconde guerre mondiale, ce n’est pas ce qui est loin de soi. Cela a été ici et avant.
    Point besoin d’une capsule orale pour lancer la séance mais simplement d’un bol d’air. Le chemin de l’histoire parfois prend celui de la ville d’aujourd’hui et d’hier.

    Un audioguide pour comprendre le passé

    L’histoire avec l’audioguide iziTravel, c’est faire l’école buissonnière dans la classe. L’élève repousse les murs pour imaginer hier, avant et parfois demain.
    La ruse pédagogique est de s’appuyer sur un produit destiné à aider les élèves à investiguer.

    C’est un travail de recherches, de construction et de production orale. Un travail d’historien ! L’élève doit rendre intelligible le passé.

    Une fois les recherches finies et la synthèse construite, il faut la transformer en production orale. L’élève doit s’engager dans un processus forcément long alors qu’il pensait se promener sur les rives de l’Histoire.

    Ecrire pour les autres

    Ecrire pour soi, c’est d’abord écrire pour les autres et c’est ça que l’on attend de l’élève. Il doit comprendre que la personne la plus importante est en face. Il doit faire preuve d’empathie, anticiper les besoins de l’autre, produire une capsule de qualité.

    La solution : l’équipe

    Je remercie Marie car son travail ne m’a pas permis seulement de faire de l’histoire mais du français, de la production orale, du repérage, du réseautage, de la communication… et anticiper la webradio. Nous avons utilisé un conducteur pour distribuer les rôles et la parole. Chaque projet entre dans l’histoire des autres.

    Finalement, la solution c’est l’équipe car l’autre est inspirant.

    Voir aussi le Parcours de mémoire de la Seconde Guerre Mondiale à Chartres de la classe de Nicolas.

  • Randonner : oui, mais est ce l’équipement le plus important ?

    Randonner : oui, mais est ce l’équipement le plus important ?

    Je continue à filer la métaphore de la randonnée. Pour le jeune innovateur comme pour le néo randonneur, il y a trois facilitateurs ou obstacles à l’engagement : les chaussures, le poids du sac et le parcours. Mal choisis, mal adaptés même si la motivation est belle pour découvrir des horizons pédagogiques nouveaux : l’abandon n’est pas loin.

    Un bon sac et de bonnes chaussures

    C’est pour cela que le poids du sac est fondamental en randonnée. Au départ, il faut investir dans des outils mais de manière juste. Quand on enseigne, c’est comme quand on marche, il ne suffit pas de compiler les outils. Un simple couteau suisse résout plus de problème parfois qu’une mallette riche en outils mais obscure en perspectives d’usages. Le plus complexe, c’est souvent la simplicité.

    La simplicité du parcours

    La simplicité, ce n’est pas être simpliste ; c’est se connaître pour se donner la chance de réussir. En tant qu’enseignant, il faut apprendre à apprendre et à comprendre les sensations que l’on ressent. Nous nous surprenons toujours au fur et à mesure que nous découvrons de nouveaux chemins. Le GR20 est l’Everest du marcheur d’exception.
    Pour le randonneur amateur que je suis, le chemin à côté de chez moi, c’est le plaisir de progresser afin de se sentir en capacité de voir plus grand ; la politique des petits pas pour déplacer des montagnes.

    Raisonnable et innovant

    Innover doit s’envisager sous la forme d’un programme d’entrainement. C’est un parcours progressif pour celui qui choisit de faire faire différemment. Il ne faut pas hésiter à se faire accompagner et à apprendre avec les autres. Pour pasticher le cyclisme : l’enseignement est « un sport individuel qui se pratique en équipe ».

    Un dispositif pédagogique ambitieusement raisonnable et progressif est souvent le plus court chemin vers la réussite, la confiance et l’engagement. N’oublions jamais que l’enseignant n’a jamais été aussi important depuis l’ère du numérique.

    Pour engager les élèves, il faut que nous soyons nous même convaincus et engagés.

  • Guider, randonner pour favoriser l’engagement : réflexion autour du thème de Ludovia#13

    Guider, randonner pour favoriser l’engagement : réflexion autour du thème de Ludovia#13

    A la lecture de l’appel à communication scientifique de ludovia 12 : « Formes d’attention, formes de présence, engagement », j’ai pensé à une métaphore de la randonnée.

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    Chaque randonneur connaît la complexité que peut représenter un voyage hors des sentiers battus. Si l’aventure et l’inconnu sont toujours des facteurs de motivation importante, elles ne favorisent pas toujours un engagement sur le long terme.

    Chaque randonneur connaît les balises qui permettent de vivre un voyage au suspens contrôlé. C’est un peu comme le film Wild avec Rees Witherspoon où l’héroïne vit une véritable aventure intérieure le long d’un chemin borné. Il en est de même pour les apprentissages, c’est un parcours à étape intérieur individuel vécu et pratiqué en collectivité.

    Il est toujours plus facile de prendre le risque de s’engager quand on connaît l’objectif à atteindre.

    NicolasLeLuherne2_themeludovia_210116Les instruments et les outils d’apprentissages sont autant de route qu’il convient d’indiquer. Si on laisse la part au hasard alors souvent les possibles conduisent à se perdre et à arrêter.

    Tout comme un topo guide, l’enseignant construit dans sa scénarisation une architecture des choix en fonction du degré de difficulté et de complexité. Il indique la piste noire, mais conseille la piste verte au novice.

    Un engagement à long terme est souvent favorisé par un apprentissage guidé, autonome, progressif et différencié.

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